1 Jean 3 - L'amour entre chrétiens
1 Jean 3 - L'amour entre chrétiens
« Voici le message que vous avez entendu dès le commencement : Aimons-nous les uns les autres; ne faisons pas comme Caïn, qui était du Malin et qui égorgea son frère. Et pourquoi l’égorgea-t-il? Parce que ses œuvres étaient mauvaises, et que celles de son frère étaient justes. Ne vous étonnez pas, frères, si le monde a de la haine pour vous. Nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous aimons les frères. Celui qui n’aime pas demeure dans la mort. Quiconque a de la haine pour son frère est un meurtrier, et vous savez qu’aucun meurtrier n’a la vie éternelle demeurant en lui. À ceci, nous avons connu l’amour : c’est qu’il a donné sa vie pour nous. Nous aussi, nous devons donner notre vie pour les frères. Si quelqu’un possède les biens du monde, qu’il voit son frère dans le besoin et qu’il lui ferme son cœur, comment l’amour de Dieu demeurera-t-il en lui? Petits enfants, n’aimons pas en parole ni avec la langue, mais en action et en vérité. »
1 Jean 3.11-18
Le thème de cet article est l’amour des chrétiens entre eux, tel que la Bible nous l’enseigne. Jésus-Christ a enseigné que le premier grand commandement que Dieu a donné aux hommes est qu’il nous faut aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, de toute notre pensée et de toute notre force. Et le second commandement, qui est semblable au premier, est qu’il nous faut aimer notre prochain comme nous-mêmes (Mc 12.30-31). Certes, il n’est pas difficile de parler d’amour, mais le mettre en pratique, voilà ce qui constitue bien souvent pour nous un obstacle.
Que nous dit l’Écriture sainte à ce sujet? L’amour dont nous parle Jean dans sa première lettre citée ci-haut concerne spécialement les frères et sœurs qui partagent la même foi en Jésus-Christ. L’amour des frères est un thème central de la doctrine de Jésus-Christ, il devrait donc être un thème central de la doctrine des chrétiens. Pour Jean, l’auteur de la lettre du Nouveau Testament dont nous avons cité quelques extraits, cet amour est la véritable manifestation de Christ vivant en nous. Nous allons donc réfléchir ensemble sur trois points : le premier point est cette relation intime entre la doctrine chrétienne et l’amour du prochain. Le second point est l’importance vitale de cette relation. Le troisième point consistera à nous demander à quoi devrait ressembler cet amour fraternel.
Mais tout d’abord, pourquoi Jean confronte-t-il ses lecteurs avec ce thème de l’amour chrétien, pourquoi en fait-il une question vitale? Il le fait, car de son temps, il y avait un groupe de gens, connu sous le nom de gnostiques, qui prétendaient détenir la vérité en utilisant le nom de Jésus-Christ, alors qu’en fait ils ne le connaissaient pas. Ils prétendaient avoir accès à une connaissance secrète, initiatique, de mystères élevés, alors qu’ils ne faisaient pas du tout preuve de l’amour manifesté par Jésus-Christ. Donc la question de connaître la vérité d’une part et d’exprimer un amour véritable d’autre part, ainsi que leur relation mutuelle, était une question vitale, cruciale. C’est pourquoi nous ne devons pas être surpris de lire, dans ce passage de la lettre de Jean, l’expression « nous savons », ou « nous connaissons », répétée plusieurs fois : car il s’agit bien ici de la vraie connaissance.
Aujourd’hui, les gnostiques de l’époque de Jean ne vivent plus avec nous, mais la lettre de Jean nous force à confesser que notre doctrine n’est pas une simple accumulation d’idées, encore moins une théorie. Notre doctrine est une foi en une personne, Jésus-Christ, dont Jean nous dit qu’il a donné sa vie pour nous. Il a donc manifesté la vérité dans sa personne, par un acte d’amour. Une théorie, un ensemble d’idées ne donnera pas sa vie pour vous et moi. Devant la tombe vide, au matin de Pâques, Marie n’a pas rencontré une théorie ou un ensemble d’idées lorsqu’elle s’est écriée : « Maître! » en reconnaissant le Seigneur Jésus ressuscité. Elle a rencontré une personne.
Mais l’apôtre Jean, lui-même témoin de la crucifixion et de la résurrection, nous emmène bien plus loin encore. Il nous dit que notre vie doit manifester la même vérité, la même doctrine de la personne du Christ : notre vie doit devenir une doctrine vivante! Rappelons-nous l’exemple donné par Jésus à ses disciples, tel que Jean le rapporte dans son Évangile, au chapitre 13 :
« Jésus, qui savait que le Père avait tout remis entre ses mains, qu’il était venu de Dieu et qu’il s’en allait à Dieu, se leva de table, ôta ses vêtements et prit un linge dont il s’entoura. Ensuite, il versa de l’eau dans un bassin et se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture. […] Après leur avoir lavé les pieds et avoir repris ses vêtements, il se remit à table et leur dit : Comprenez-vous ce que je vous ai fait? Vous m’appelez : le Maître et le Seigneur, et vous dites bien, car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres; car je vous ai donné un exemple, afin que vous aussi, vous fassiez comme moi je vous ai fait. En vérité, en vérité, je vous le dis, le serviteur n’est pas plus grand que son seigneur, ni l’apôtre plus grand que celui qui l’a envoyé. Si vous savez cela, vous êtes heureux, pourvu que vous le mettiez en pratique » (Jn 13.3-5,12-17).
Un peu plus loin, au verset 34, Jésus ajoute :
« Je vous donne un nouveau commandement : Aimez-vous les uns les autres; comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13.34).
Voilà donc le commandement que nous avons entendu depuis le commencement, comme nous avons lu précédemment dans la première lettre de Jean. Tous sauront que nous sommes ses disciples non pas parce que nous élaborons en paroles sur la doctrine du Christ, mais si nous nous aimons les uns les autres. Dans le récit de Jésus lavant les pieds de ses disciples, nous sommes frappés par le fait que Jésus n’expose pas d’abord une doctrine qu’il met ensuite en pratique, mais qu’il lave d’abord les pieds de ses disciples et leur demande ensuite s’ils ont compris ce qu’il leur a fait. Il leur montre l’exemple, afin qu’ils ne tombent pas dans la tentation d’aimer en paroles seulement, mais en actions et en vérité. Déjà dans l’Ancien Testament, le prophète Ézéchiel reprochait aux Juifs exilés à Babylone d’aimer en paroles, mais pas en actes. Voici les paroles du prophète :
« Toi, fils d’homme, les gens de ton peuple s’entretiennent de toi le long des murs et aux portes des maisons et se disent l’un à l’autre, chacun à son frère : Venez donc écouter quelle est la parole qui provient de l’Éternel! Ils se rendent en foule auprès de toi, et mon peuple s’assied devant toi. Ils écoutent tes paroles, mais ils ne les mettent pas en pratique, car ils agissent avec des paroles aimables à la bouche, alors que la cupidité mène leur cœur. Te voilà pour eux comme une aimable chanson : musique agréable et belle mélodie. Ils écoutent tes paroles, mais ils ne les mettent point en pratique » (Éz 33.30-32).
Mais la Parole de Dieu nous apporte une autre doctrine, une doctrine qui manifeste la vérité. Nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie lorsque nous aimons nos frères, nous dit le verset 14 du troisième chapitre de la première lettre de Jean. Voilà justement pourquoi il s’agit d’une question de vie ou de mort! Passer de la mort à la vie nous rappelle notre baptême en Christ, et aimer nos frères représente en quelque sorte une actualisation de notre baptême. Sans véritables actes d’amour, nous demeurons sur le rivage de la mort. Jean décrit ce rivage à l’aide de mots frappants : c’est le rivage du diable, celui sur lequel s’est tenu Caïn. Dès le commencement, il avait entendu le commandement d’aimer son frère, mais il le tua sans aucune pitié. Et ceux qui haïssent tout en se parant du nom de « frères » séjournent sur le même rivage.
Mais voilà que nous vient la plus extraordinaire assurance concernant le rivage de la vie : « Nous savons, nous avons la certitude que nous sommes passés du rivage de la mort vers celui de la vie parce que nous aimons les frères. » Cet amour est un signe indubitable de ce voyage du salut depuis le rivage de la mort, par-dessus l’abîme de l’injustice, du meurtre, de la haine, vers le rivage de la vie éternelle. Jésus-Christ, qui donna d’abord sa vie pour nous, manifestant ainsi la vérité dans l’amour, est venu nous chercher sur le rivage de la mort où nous nous trouvions. Il nous a pris avec lui, sur ses ailes, pour nous amener sur le rivage de la vie éternelle.
Et maintenant, à quoi ressemble l’amour véritable? Le verset 16 nous le dit : « À ceci nous avons connu l’amour : c’est qu’il a donné sa vie pour nous. Nous aussi nous devons donner notre vie pour les frères. » Notez bien : « pour les frères ». Cela implique une attitude commune, et une forme de réciprocité. Le genre d’amour manifesté entre frères est dans un sens différent de l’amour que les chrétiens devraient manifester vis-à-vis de leur prochain en général. On ne peut attendre la réciprocité de la part d’un incroyant. On ne peut s’attendre à ce qu’il donne sa vie pour nous. Tandis que nous tous, qui nous appelons « frères » et « sœurs », devrions manifester cette forme d’amour.
Ensuite, l’amour véritable sait faire des sacrifices. C’est le genre d’amour manifesté par Christ. En théorie, cela semble tout à fait déraisonnable. En pratique, c’est tout sauf pratique. Mais c’est l’Évangile de notre Seigneur. Être crucifié sur une croix était tout sauf pratique pour notre Seigneur! Il est toujours plus pratique de se protéger des besoins des autres, de garder son confort privé, de travailler dur pour prospérer sans laisser les autres s’approcher de vous de trop près. Car autrement, nous serions forcés de voir les besoins des autres et d’y prêter attention. Selon le verset 17, l’amour véritable consiste à voir le besoin des frères. Cela consiste à prendre le temps de regarder et de ne pas détourner son regard.
L’amour véritable consiste aussi à ne pas être envahi d’un simple sentiment de commisération, mais à avoir compassion, comme Jésus-Christ eut compassion. Car s’il n’avait ressenti qu’un sentiment de commisération, il n’aurait pas pris forme humaine et ne serait pas venu sur terre donner sa vie pour nous. Il n’y a en effet pas d’amour sans vraie compassion. L’amour n’est pas un concept rigide, légaliste. Dans sa lettre, Jean écrit qu’aimer Dieu signifie obéir à ses commandements. Mais il écrit aussi que le commandement que nous avons reçu depuis le début est que nous devons aimer les frères. Et les aimer avec compassion. La compassion est un terme central dans toute la Bible. Dans le livre du prophète Ésaïe, peu après la prophétie concernant la souffrance du Serviteur de Dieu qui a donné sa vie et porté le péché de beaucoup, nous lisons, au chapitre 54 :
« Quand les montagnes s’ébranleraient, quand les collines chancelleraient, ma bienveillance pour toi ne sera pas ébranlée, et mon alliance de paix ne chancellera pas, dit l’Éternel, qui a compassion de toi » (És 54.10).
Or la vraie compassion aboutit toujours à des actes concrets.
Redonnons la parole à Jean, en guise de conclusion, et laissons l’Esprit Saint de Dieu nous enseigner ce que signifie l’amour véritable pour les frères :
« Mes enfants, que notre amour ne se limite pas à des discours et de belles paroles, mais qu’il se traduise par des actes, accomplis dans la vérité » (1 Jn 3.18).