Comparaison entre le bouddhisme et la foi chrétienne
Comparaison entre le bouddhisme et la foi chrétienne
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Traits communs entre le bouddhisme et le christianisme
a. Leur morale
b. Leur caractère universel
c. Le péché, le bien et le mal
d. La voie du salut -
Bouddha ou Jésus-Christ?
a. Des divergences profondes
b. Jésus-Christ est Sauveur
c. Jésus-Christ est Dieu
d. Le Christ est ressuscité - Annexe
1. Traits communs entre le bouddhisme et le christianisme⤒🔗
a. Leur morale←↰⤒🔗
Le bouddhisme atteint certains sommets particuliers. Assurément, nous trouvons dans les textes bouddhistes des préceptes admirables. On y recommande la miséricorde, la douceur, la pureté, la véracité, l’humilité. On y pousse très loin le souci de ne faire du tort à aucune existence, jusqu’à prendre certaines précautions qui nous paraissent ridicules, par exemple l’usage d’un filtre à travers lequel les religieux passent leur eau, non par motif d’hygiène, mais par crainte d’absorber les animaux microscopiques qui s’y trouvent. L’examen de soi et la confession des fautes sont enjoints.
« Grand roi, aurait dit Bouddha, je n’enseigne pas ma loi à mes auditeurs en leur disant : Allez, ô religieux et opérez […] des miracles supérieurs à ce que l’homme peut faire; mais voici comment j’enseigne ma loi à mes auditeurs : vivez, religieux, en cachant vos bonnes œuvres et en montrant vos péchés. »
Ces vertus qui nous rappelleront en partie les dix commandements, les bouddhistes n’entendent pas les pratiquer d’une manière formaliste, mais dans leur esprit :
« Ce qui rend impur, lisons-nous, ce n’est pas de manger de la viande, mais d’être brutal, dur, calomniateur, sans pitié, arrogant, avare. Ce n’est pas d’avoir les cheveux rasés qui fait l’ascète. Si l’on est tout entier possédé par la convoitise et le désir, comment serait-on ascète? »
L’égoïsme est combattu de manière radicale : De toutes les calamités, de toutes les souffrances, de toutes les terreurs de ce monde, l’unique cause est le sentiment ou l’amour de soi. Il faut y renoncer. On ne peut éviter la souffrance qu’en sortant du « moi ».
« On ne peut éviter la brûlure qu’en sortant du feu. Plus tu fais pour épargner au corps la souffrance, plus tu le rends sensible et plus bas tu le fais tomber. Si je m’aime véritablement, il ne faut pas m’aimer! Si je veux me sauvegarder, il ne faut pas me sauvegarder! »
Nous trouvons des déclarations d’une élévation à laquelle nous ne pouvons pas rester indifférents. Nous lisons qu’il convient d’observer des consignes telles que celles-ci : Ne pas convoiter jalousement les avantages dont jouissent ceux qui nous entourent. Se réjouir du bonheur qui leur advient. Rejeter la méchanceté, la colère, le dédain, le mauvais vouloir. Ne pas nourrir de haine, même contre ceux qui nous font du mal. Avoir pour tous les êtres vivants des sentiments de bonté, de bienveillance et d’amour.
Cependant, prenons garde. Tandis que la morale chrétienne se présente comme une valeur absolue, parce qu’elle est la volonté du Dieu saint, la morale bouddhiste n’a pas de valeur préparatoire. Elle vise à discipliner l’homme en vue de le détacher de l’existence et de le rapprocher du nirvana, où il n’y a plus de distinction entre le bien et le mal. Une fois de plus, le négativisme, le nihilisme bouddhiste, compromet les élans les plus généreux.
Par exemple, dans la contemplation et la compassion : La vie contemplative est la substance principale de la voie moyenne du Bouddha (au sens d’indulgence envers soi et d’austérité mortifiante). Quiconque désire la libération doit pratiquer le contrôle de soi, analyser sa personne (sati) et pratiquer la concentration (samadha). Le terme désignant la contemplation est dhyana. Le fil d’or de la méditation traverse tout le bouddhisme asiatique. Les techniques de la contemplation sont nombreuses et ensemble ils forment le yoga bouddhiste.
Elle ne nécessite pas le célibat, mais selon une opinion, la vie spirituelle supérieure se trouve dans la Sangha. La contemplation elle-même est nulle si elle ne s’accompagne pas de la vertu; on y trouve ainsi la solidarité de la théorie et de la pratique. Il ne suffit pas de croire que les choses ne sont pas permanentes et de rechercher de manière philosophique la nature des choses.
On a dit que la pratique du sati rappelle la psychanalyse occidentale, car il chercherait à analyser et à comprendre des motifs profonds.
Sans aucun doute, l’un des points qui attirent les Occidentaux vers le bouddhisme theravada, comme vers le bouddhisme zen, se trouve dans la méthode cherchant à atteindre la paix intérieure, spécialement dans une société technocrate comme la nôtre. Mais l’athéisme profond du theravada s’explique par le fait que non seulement il existe diverses formes d’expériences religieuses, mais aussi leurs interprétations sont variées. En principe, on peut dire que le bouddhisme, et surtout le bouddhisme du grand véhicule, met en œuvre beaucoup de notions voisines aux notions chrétiennes, telles que la chasteté, la confession, la condamnation de l’égoïsme, la charité. Mais d’autre part, ces mêmes notions sont en flagrante contradiction avec la foi chrétienne. Les notions mêmes qui paraissent les plus voisines diffèrent de toute la distance qui existe entre l’esprit hindou et l’esprit chrétien.
Pour ne parler que de la charité, on remarquera qu’elle est envisagée comme une méthode de perfectionnement moral, méthode purgative indispensable, mais inférieure à la méditation. La méditation du vide ou du néant conduit le fidèle jusqu’au nirvana. La vertu du don ou de la pitié, dès qu’on a compris le néant universel, n’a pas de raison d’être ni d’utilité. Le bouddhisme est pénétré d’un idéalisme déconcertant. Le signe vaut la chose signifiée, principe dangereux dans les œuvres de miséricorde.
Si raisonnable qu’il soit par certains côtés, si curieuse et touchante que soit sa légende dorée, si remarquable qu’ait pu être sa propagande, si sympathiques que soient ses écrivains de dévotion, on doit se souvenir que le bouddhisme est né parmi les visionnaires et les pénitents mal équilibrés du point de vue mental, et qu’il a grandi dans des cloîtres et pour les cloîtres, au sein de l’hindouisme. De là, dans l’ensemble, quelque chose d’artificiel, une littérature trop scolastique, le développement exorbitant de quelques lieux communs, tels que la misogynie, la pitié, l’universel vide, tant de cheveux coupés en quatre, dialectique vide en effet. Leur charité aboutit à la conception du saint qui multiplie dans tous les cimetières son énorme cadavre, pour que les animaux s’en repaissent et obtiennent ainsi la renaissance céleste et la bouddhification.
Cherchons encore d’autres points qui, même si d’inspiration ou de source indépendante, pourraient à première vue rappeler des traits communs entre les deux religions.
b. Leur caractère universel←↰⤒🔗
Un premier point réside dans l’universalité des deux religions. À peu d’expression près, les religions antiques étaient toutes nationales, au moins à leurs débuts. Pour adorer Osiris, il fallait être Égyptien; pour invoquer Jupiter, il fallait être citoyen de Rome; et pour être initié aux mystères du brahmanisme, il fallait être hindou, et encore hindou des castes, appartenir à une caste supérieure.
La foi israélite était universelle dans son principe, en ne s’adressant pas à un Dieu local, mais au seul vrai Dieu, Maître de l’univers. Elle aurait pu être largement missionnaire comme le montre le livre de Jonas. Cependant, même pour le judaïsme, un certain particularisme nationaliste était prévu, bien plus, voulu même du Dieu de l’alliance. Il ne fallait pas que le peuple pût se corrompre et, à cet effet, il devait rester à l’écart des nations.
En revanche, quel que soit son pays ou sa race, n’importe qui peut embrasser le bouddhisme. Aussi avons-nous affaire d’emblée à un mouvement missionnaire, le premier digne de ce nom, cinq siècles avant saint Paul. Le fondateur a donné l’exemple en prêchant sa doctrine pendant plus de quarante ans :
« Je n’entrerai pas, aurait-il dit, dans l’anéantissement total, tant que mes auditeurs ne seront pas instruits. Semblable à un nuage qui verse une eau homogène, je suis aussi bien disposé pour les aryas que pour les hommes inférieurs, pour les vertueux comme pour les iniques, pour les adeptes des hétérodoxies et tenant des opinions erronées, comme pour ceux dont les opinions et les doctrines sont saines et parfaites. »
Les disciples ont poursuivi le même effort, tant et si bien que, deux siècles plus tard, l’immense population de l’Inde était en majorité convertie à leur doctrine. C’est un succès qui, considéré dans son aspect extérieur, supporte fort bien la comparaison avec les résultats des missions chrétiennes dans l’Empire romain durant les trois premiers siècles de son existence.
c. Le péché, le bien et le mal←↰⤒🔗
Du bien et du mal bouddhiques au bien et au mal chrétiens, nous l’avons démontré plus haut, la distance est immense, malgré d’apparentes similitudes pratiques. Il n’y a, dans la morale bouddhiste d’ascèse thérapeutique, rien qui contredise les perspectives chrétiennes. On y trouve au contraire des exercices et pratiques pleins d’utilité pour la fuite hors du monde mauvais. Dans les cinq préceptes communs aux moines et aux laïcs, on y rencontre des principes sains de morale naturelle. La notion de mertâ, de sympathie amicale envers les autres, sans être la charité, revêt une note de partage interpersonnel très positive.
Certains diront qu’il est donc facile de s’entendre avec la « morale » bouddhique. Une telle conclusion serait hâtive. La morale chrétienne suppose que l’on admette l’existence réelle et solide de ces deux collaborateurs, Dieu et l’homme, affirmés comme des êtres intelligents, libres, distincts l’un de l’autre. Le bouddhisme est un système d’autoguérison, construit sciemment hors de l’hypothèse de dieux, ou d’un Dieu, secourables. Ce même bouddhisme vise l’autoguérison par l’auto-extinction, préférant cette disparition analgésique à l’affirmation de la personne. L’homme bouddhique, pour fuir radicalement la douleur, proclame que le « soi » peut et doit disparaître, qu’il est non permanent et non substantiel.
Si les présupposés profonds diffèrent tellement, on voit quel changement d’esprit signifierait le passage d’une morale bouddhique à une morale chrétienne, ou vice versa. Des deux côtés, on veut fuir le mal et faire le bien, mais les mots recouvrent des réalités largement différentes.
d. La voie du salut←↰⤒🔗
Un autre point de contact entre les deux religions est qu’elles ont toutes les deux la prétention de montrer à l’humanité la voie du salut et que c’est là même le centre de leur message. À cet égard, d’ailleurs, elles ne sont pas les seules. Le bouddhisme et le christianisme sont les deux mouvements qui, sur cette base d’une rédemption de l’homme, ont recueilli le plus d’adeptes. Cependant, là aussi, si on regarde les faits de près, on est frappé des formidables différences, pour ne pas dire oppositions entre les deux.
Le bouddhisme vise à délivrer l’homme de l’erreur et de l’illusion en le détachant du monde. C’est à cela et à cela seulement que tendent les quatre vérités nobles. De culpabilité, il n’est pas question! Il ne saurait en être question, puisqu’il n’y a pas de Dieu suprême devant qui l’on soit responsable. Chacun doit réaliser son affranchissement par ses propres efforts. Lorsque nous disions que bouddhisme et christianisme étaient tous les deux des religions de salut, nous ne pouvions le dire qu’en donnant à ce terme deux sens tout à fait différents. Ce n’est pas du même salut qu’il s’agit. L’Évangile est avant tout moral; le bouddhisme est une métaphysique orpheline de Dieu.
En examinant la morale bouddhiste, nous remarquerons que ni le bouddhisme ni le christianisme ne sont essentiellement des morales; ils ne sont en tout cas pas des moralismes, même s’ils ont l’un comme l’autre des préceptes. Les différences sont grandes :
Le bouddhisme est fondamentalement une thérapeutique soucieuse d’exactitude et d’efficacité; elle n’accorde guère d’attention au reste, ainsi qu’on l’a expliqué. Le christianisme, fondamentalement, est un acte d’amour divin à notre égard, amour de Dieu, par Jésus-Christ et dans l’Esprit Saint.
Suivant la doctrine « du grand véhicule », non seulement les moines, mais pratiquement tous les hommes peuvent obtenir le salut. Il est vrai que le bouddhisme prend cette direction en exigeant un culte pompeux. S’il y a dans le bouddhisme une préoccupation pour le salut de tous les hommes, le bout de l’oreille se montre encore ici. En aidant l’autre, je m’aide moi-même à obtenir mon salut. Et on peut aider non seulement un homme, mais aussi bien une puce qu’un dieu! Oui! dans le bouddhisme et dans l’hindouisme, il faut aussi prêter assistance aux dieux!
Nous avons vu plus haut qu’en dépit de ses aspects séduisants, le bouddhisme n’est qu’un faux système de délivrance. Car il s’occupe d’un faux problème, celui de la souffrance, au lieu de se pencher sur la réalité du mal en tant que péché, comme rébellion éthique et cause de souffrance. La foi au Christ proclame le salut comme délivrance du péché; le bouddhisme promet le soulagement de la peine.
Le Bouddha a établi des préceptes qui enferment la vie du moine dans un réseau serré de mortifications aisées, de lectures ou de méditations assoupissantes, éminemment favorables au renoncement.
Cependant, le bouddhisme ne se contente pas de dire que la vie ne vaut pas d’être vécue; que les choses sont comme si elles n’étaient pas; que notre moi, voué à la passion et à la souffrance, est haïssable, en un mot, que tout est vanité et qu’il faut se renoncer soi-même. Il transporte ces négations du domaine moral, où peut-être elles sont nées, dans le domaine métaphysique et psychologique. Le nihilisme est une partie essentielle du plus ancien bouddhisme. Les bouddhistes, ou le plus grand nombre, disent que les sensations, les pensées, les actes existent en soi, sans qu’il y ait en dessous un être qui sente, pense, agisse ou croie sentir, penser, agir. Ils n’arrêtent pas de dénoncer la folie de ceux qui, croyant à un moi, espèrent parvenir à la délivrance.
Lorsqu’il s’agit de « voies et moyens » de salut, le chrétien est amené à se poser le problème de la grâce. Le bouddhiste en marche sur la voie de la délivrance peut-il et doit-il attendre un secours, à déterminer, accordé par quelque puissance en dehors de lui-même? Que peuvent pour son salut les « êtres surhumains », devas ou démons? Que peut pour son salut le Bouddha lui-même, cet être devenu surhumain depuis son pari nirvana?
2. Bouddha ou Jésus-Christ?←⤒🔗
a. Des divergences profondes←↰⤒🔗
Il nous est permis de constater que le Christ se situe à un tout autre niveau que le bouddhisme, même dans les meilleures expressions de celles-ci. La rédemption se situe sur le plan de l’éthique, au sens que l’homme est coupable devant Dieu, ses fautes doivent être expiées et elles le sont grâce au sacrifice du Calvaire.
Selon quelques spécialistes de l’histoire des religions, l’Évangile chrétien serait lourdement redevable au bouddhisme. Mais d’autres orientalistes sont parvenus à la conclusion contraire selon laquelle la doctrine bouddhiste n’exerça aucune influence sur la foi chrétienne, voire sur le Christ lui-même. Ils sont parvenus à cette conclusion en comparant des éléments de la légende du Bouddha, composés bien après la mort du fondateur, avec les Évangiles canoniques. En outre, on fait remarquer que les prétendus parallèles entre le bouddhisme et le christianisme sont tirés des textes de l’école du Nord qui sont tardifs et tout à fait mythiques, à tel point qu’ils obscurcissent même la figure historique du Gautama, tandis que les prétendus parallèles chrétiens sont surtout tirés des écrits chrétiens apocryphes. Si l’on veut tenir compte des textes des Évangiles canoniques et ceux du bouddhisme du Sud, les parallèles entre les vies du Bouddha et du Christ ne sont guère différents de ceux qui normalement sont propres à tout fondateur de religion.
Des cinq parallèles mentionnés, trois sont parmi les plus importants et sont relatifs : la présentation de l’Enfant Jésus au temple est comparée à celle de l’enfant Bouddha; le jeûne observé par Jésus à celui observé par Bouddha; la préexistence de Jésus et celle du Bouddha au ciel. Mais de ces trois, la présentation du Bouddha ne se trouve nulle part dans les textes du Sud et même pas dans les anciens textes provenant de l’école du Nord. Tandis qu’à l’époque de Jésus il était habituel pour une mère pieuse de se présenter au Temple, en vue du rachat du premier-né et pour sa propre purification rituelle.
Le récit du jeûne et de la tentation n’est pas davantage conséquent dans les deux histoires. On se rappelle que Bouddha doit d’abord surmonter Mara, l’équivalent du diable des Évangiles, et ensuite seulement jeûner durant quarante-neuf jours, tandis que Jésus, lui, s’adonne au jeûne pendant quarante jours et ensuite seulement il est tenté par le diable. Le récit évangélique est psychologiquement correct et il peut être comparé à celui des expériences de Moïse et d’Élie. Tandis que le récit de la tentation se trouve non seulement dans le christianisme et le bouddhisme, mais encore dans la religion du Zoroastre.
Le troisième parallèle relatif à la préexistence des deux est également contradictoire. Jésus existe au ciel depuis toute l’éternité et il est unique en son existence, tandis que Bouddha partage simplement l’histoire et l’expérience d’autres Bouddhas et il se réincarne d’innombrables fois.
Il faut également tenir compte de la différence profonde, radicale, irréductible des esprits des deux fondateurs de religion.
Le drame, si l’on peut ainsi qualifier la vie de Jésus, comme sa majesté sont différents aussi de la sérénité d’esprit dont jouit Bouddha. Jésus cherche le salut du monde; Bouddha commence par chercher son salut personnel et ce n’est qu’ensuite qu’il se met à enseigner le monde. L’objectif que poursuit Jésus chez les hommes c’est la foi en lui et leur vie éternelle en présence de Dieu; pour le Bouddha, le summum bonum, le bien suprême, est le savoir et ensuite l’annihilation de soi dans le nirvana.
En présence de tant de divergences, les prétendus parallèles entre le Bouddha et le Christ ne sont que des cas fortuits, des coïncidences accidentelles. Il est tout à fait certain qu’en dépit des voyages entre la Palestine et les Indes, qui, dans une certaine mesure, durent exercer une influence sur les rédacteurs des évangiles apocryphes et l’école bouddhiste du Nord, la foi chrétienne et le bouddhisme se sont développés de façon absolument indépendante.
b. Jésus-Christ est Sauveur←↰⤒🔗
C’est la conception du péché qui différencie le bouddhisme du christianisme. Le Dieu de ce dernier est un Dieu d’amour et de justice, tandis que le Bouddha est la miséricorde en soi, et rien de plus. Jamais le Bouddha ne juge. Or, le péché, la culpabilité, la dette sont une affreuse réalité dans notre vie. Quand la conscience est éveillée, chacun en sait quelque chose. Mais que l’homme reconnaisse ou non sa culpabilité et la dette qu’elle entraîne, tôt ou tard la facture lui en sera présentée. Et après? Bouddha reconnaît l’existence de la dette, aussi il répète avec insistance : « Tu dois faire quelque chose! » Nous avons en lui une religion de l’autorédemption. Sur cette voie, l’homme est constamment poussé par une furie qui, fouet à la main, proclame : « Tu dois faire quelque chose! Tu dois faire quelque chose! »
Mais Jésus a dit : « J’ai fait quelque chose pour toi. » Tel est le vrai et sûr chemin de la rédemption. « Le fils de l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup » (Mc 10.45). Voilà tout l’Évangile, la Bonne Nouvelle. Nous attendons en vain qu’un tel message sorte de la bouche de tous les fondateurs de religion. Bouddha n’est pas capable de le prononcer. Seul Dieu est capable de devenir notre Rédempteur. L’autorédemption n’existe pas. En mettant les choses au mieux, l’homme ne peut rien offrir de plus qu’une vie sans faute apparente et sans dette. Alors, bien sûr, il vit comme il faut, mais sans pardon.
Si je vis en février sans contracter de dette, celle de janvier n’est pas pour autant payée, et de loin. La dette reste la dette. Personne ne peut se remettre la sienne propre. Un adultère consommé reste pour l’éternité un adultère. On ne peut se racheter soi-même. Mais la mystique bouddhiste, dans sa phase finale, est la tâche entreprise pour se transformer soi-même en divinité. Sachant cela, nous comprenons pourquoi des bouddhistes se font emmurer vivants ou choisissent encore le chemin de l’immolation par le feu. C’est afin, en tant que parfaits qui ont abandonné toutes les exigences du corps, de pouvoir pénétrer plus vite dans le nirvana, le lieu des libérés.
Mais combien tout est différent chez le Christ! Par lui, nous savons que Dieu est justice, mais aussi amour. Parce qu’il est justice, il y a eu la croix du Calvaire, où Jésus-Christ le juste est mort. Il mourut afin de prendre sur lui la punition réservée au péché et de donner ainsi satisfaction à la justice divine.
Mais la justice est seulement l’une des faces du Seigneur. L’amour est l’autre. Par amour, il nous accorde son pardon. Par amour, le Christ nous a rachetés à la croix afin que nous soyons libérés. Le rachat en vue de la libération a un rapport avec l’esclavage. Ce qui nous est impossible d’accomplir, Jésus l’a fait à notre place. Ce n’est pas la rédemption par soi-même qui est la voie du salut, et donc pas plus les œuvres pieuses qui peuvent être accomplies chez nous que celles qui peuvent l’être en Inde, en Chine ou ailleurs. Le chemin du salut du monde et de l’homme provient du grand acte de rédemption accompli par Jésus. Le pardon du péché et la remise de notre dette, la paix du cœur, un état de sûreté dans un monde chaotique, la vie dès à présent et jusque dans l’éternité seront nos sûres et certaines acquisitions.
C’est avec un grand réalisme que la foi chrétienne s’occupe du péché. L’homme doit être libéré de la punition du péché. Le bouddhiste, lui, cherche à faire son salut en observant des commandements, mentionnés plus haut.
c. Jésus-Christ est Dieu←↰⤒🔗
Fondateur de religion, le Bouddha est un homme, c’est pourquoi sur sa vie pèse l’ombre du péché. Le péché fut une réalité tout au long de sa vie. Il en est autrement de Jésus. Chez lui, il n’y a, somme toute, aucune lutte en vue de la purification comme chez Bouddha. Jésus-Christ est resté pur de toute souillure du péché. Il lance un défi même à ses ennemis, les scribes et les pharisiens, en leur demandant : « Qui de vous me convaincra de péché? » (Jn 8.46). Aucun ne le pouvait. Et bien que tous épluchaient, observaient constamment et soupçonnaient sa vie, ils étaient obligés de se taire.
Il n’a jamais proféré un seul mensonge ni une parole méchante. Jamais l’égoïsme, l’injustice, la jalousie, l’impureté n’ont entaché sa vie. Pourtant, il côtoyait tout cela à chaque pas dans ses rencontres avec les hommes, mais il les a aimés malgré leur péché. Ce n’est pas par hasard si, en raison de la singularité de Jésus, il y a aussi, entre lui et le Bouddha, la différence de nature.
À coup sûr, la grandeur du Christ est d’un tout autre ordre que celle du sage de l’Inde. Et partant, l’Évangile a sur le bouddhisme toute la supériorité que la révélation divine a sur une spiritualité qui reste profondément humaine et donc insuffisante. Mais hélas!, les hommes chrétiens n’ont pas tous, ni toujours, la même supériorité sur les hommes bouddhistes. De même qu’autrefois le Seigneur pouvait citer en exemple certains païens pour faire honte au peuple juif, nous n’avons pas toujours lieu d’être fiers de ce que nous sommes, quand nous nous comparons à d’autres.
Sur le plan des principes, la foi au Christ est infiniment supérieure au bouddhisme. Malheureusement, dans l’application, nous sommes trop souvent infidèles. Pourtant, Dieu nous a donné tout ce qui est nécessaire à la vie et à la piété. Si nous ne nous rendons pas un meilleur témoignage, la faute n’est pas au Christ, qui peut sauver parfaitement ceux qui s’approchent de Dieu par lui. Qu’il nous fasse la grâce de nous emparer du secours que le Saint-Esprit est prêt à nous accorder; qu’ainsi nous puissions le glorifier, aux yeux de tous ceux qui sont encore dans les ténèbres des systèmes humains, et prouver par notre vie qu’il y a bien un seul nom donné aux humains par lequel ils puissent être sauvés, le nom de Jésus.
Bouddha promet le nirvana à celui qui souffre à présent. Jésus-Christ a déclaré : « Je suis venu afin que les brebis aient la vie et qu’elles l’aient en abondance » (Jn 10.10). Il a annoncé non pas l’anéantissement de la personne, mais son accomplissement. Pour le chrétien, les conséquences les plus familières de cette vérité sont triples :
Les différences sont notoires. L’Évangile nous met en présence d’un Dieu souverain, Créateur du ciel et de la terre, qui donne un sens à l’existence humaine. Le bouddhisme n’admet pas la réalité ultime. L’objectif ultime du bouddhisme reste le nirvana. Mais Jésus-Christ se présente comme le Fils unique de Dieu, Dieu en personne, venu dans la chair, semblable à la nôtre, auteur de notre salut. Il est l’unique Rédempteur avant de devenir notre Modèle. Le Bouddha est par nature un homme, comme tout homme. Sa seule originalité est d’avoir apporté une révélation. Il a prétendu montrer la voie de la délivrance après l’avoir suivie lui-même, mais ne peut personnellement aider les fidèles à le suivre.
Jésus-Christ a déclaré : « Celui qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14.9). Bouddha n’a jamais osé affirmer cela. Jésus a déclaré : « Avant qu’Abraham fût, moi, je suis » (Jn 8.58). Par ces mots, il se réfère à sa préexistence attestée dans l’Ancien Testament. Une phrase d’une telle audace, Bouddha n’oserait prononcer. Il a dit encore : « Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort » (Jn 11.25). En pleine singularité, Jésus ose prononcer cette autre phrase : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre. […] Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28.18-20). « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point » (Mt 24.35). C’est en vain que nous chercherions des déclarations d’une telle majesté chez tous les fondateurs de religions. La prétention de Jésus à être l’unique révélation éternellement valable est sans pareille.
Ces déclarations royales et ces témoignages majestueux sont des revendications soit maladives, voire blasphématoires, soit entièrement justifiées. Il n’existe pas de troisième possibilité. Mais le Christ est digne de notre foi. Il mérite notre pleine et entière confiance. Ainsi, partout, en Europe, en Inde, en Chine, dans les recoins les plus reculés de la planète, la Parole de Dieu témoigne au sujet de Jésus : « Le salut ne se trouve en aucun autre; car il n’y a sous le ciel aucun autre nom donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés » (Ac 4.12).
On a établi des parallèles entre les récits de la naissance miraculeuse du Bouddha et l’Évangile de Noël. Mais le rapport est nul. Nous avons déjà rapporté la légende de la naissance du Bouddha. À côté de ces détails grotesques, songez à la sobriété et à la délicatesse des textes évangéliques.
De la même manière, la tentation de Bouddha est tellement différente de celle de Jésus. L’adversaire Mara, le diable hindou, s’y présente avec ses trois filles : la passion, la volupté et l’inquiétude, ce qui donne au récit un tour nettement allégorique que nous ne trouvons pas dans l’histoire biblique.
Ce qui différencie encore le Bouddha du Christ touche non seulement leur personne, mais encore leur vie et mission. La différence essentielle consiste en l’absence du péché chez notre Sauveur.
d. Le Christ est ressuscité←↰⤒🔗
Enfin, un dernier point de comparaison : Bouddha est mort, Jésus-Christ est ressuscité des morts, il vit éternellement. La résurrection de Jésus est le couronnement de son œuvre de rédemption accomplie à la croix. Sa résurrection rend cette œuvre pleinement efficace.
Quel énorme abîme sur lequel il n’est pas possible de jeter un pont entre lui et Bouddha! Celui-ci est mort, comme n’importe quel autre mortel. Jésus, lui, est ressuscité d’entre les morts et il vit éternellement. Il est au milieu de nous par son Saint-Esprit. Il nous fait entendre sa voix de bon Berger sur les pages de la Bible.
S’il n’y avait pas sa résurrection, l’Évangile n’en serait pas un, mais seulement une religion parmi tant d’autres. Sans la résurrection, Jésus ne serait qu’un guide, un maître noble et bon comme Bouddha, mais rien de plus. En fin de compte, il ne serait qu’un poteau indicateur. Il nous faudrait aller seuls, sans son assistance, sans la force que nous donne son Saint-Esprit, qui travaille dans nos cœurs et notre conscience. À la différence de Bouddha, Jésus a pu dire : « Je suis le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14.6). « Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort » (Jn 11.25).
Par sa résurrection et son existence présente parmi nous, il a prouvé la solidité de ces affirmations. Le témoignage de la présence du Seigneur ressuscité qu’apporte son Saint-Esprit nous en donne la certitude.
C’est par une confiance absolue en Jésus-Christ le Ressuscité qu’est comblée l’aspiration du cœur humain à un état de sûreté et à la paix. Le bouddhisme se présente comme une religion rigoureuse de loi. Sous son joug, l’homme ne peut finalement que gémir. Mais l’Évangile de la révélation de Dieu s’offre à nous en Jésus. Si, par la foi et avec confiance, nous saisissons les mains du Ressuscité présent aujourd’hui, nous saisirons aussi la paix. La Parole de Dieu dit de Jésus : « C’est lui notre paix » (Ép 2.14). Lorsque le cœur humain obtient cette paix, ses aspirations sont comblées.
3. Annexe←⤒🔗
La lettre ci-dessous, écrite par un auteur favorable au bouddhisme, a été adressée au quotidien parisien Le Monde (samedi 10 septembre 1983).
« Monde, cher monde, ne crains-tu pas qu’en braquant tant de clartés… sur le christianisme et l’islam…, ces deux sœurs ambitieuses qui ont sucé le lait du théocentrisme, tu ne favorises l’idée qu’elles seules représentent la religion, rejetant ainsi dans l’ombre d’autres mouvements de pensée moins démonstratifs de leur essence même, mais qui, dans cette ombre et cette modestie, travaillent sans doute avec plus de profondeur quelques esprits contemporains. […] Dans le bouddhisme l’autorité de la révélation n’existe pas. […] “Ce que nous offre le bouddhisme, c’est justement la possibilité de nier l’existence même de Bouddha, sans pour cela nier la doctrine”, a dit Borgès (auteur sud-américain, N. du T.).
Qu’en est-il donc de cette doctrine? Je laisserai la parole à un esprit de ce temps, Cioran […] dans le madhyamika de la vérité vraie, qui assume tous les risques, y compris celui de la négation de toute vérité et de l’idée même de vérité (dans Écartèlement). Dans cette saisie de l’insusbstantialité, que ce soit du monde, celle du monde physique ou celle du monde intérieur (le non-ego), l’homme reste seul face à la vacuité. Bouddha n’a jamais voulu se prononcer sur l’existence ou la non-existence d’un dieu, pas plus d’ailleurs que sur des spéculations métaphysiques. […] Il voulut sans doute préserver la liberté humaine. Pour lui n’est pertinent dans la recherche spirituelle que ce qui peut être expérimenté. Allez y voir si cela vous tente, on vous donnera même un guide et des techniques (c’est la voie de diamant). Bouddha : même de moi-même, ne croyez que ce que vous avez réalisé par vous-mêmes.
Le bonheur profond — liberté bouddhiste — est modernité. Le thème est exactement celui de Dostoïevski. L’homme occidental, qui a conquis tant de libertés, a peur de la vraie liberté qui est autocréation. Il reste cet individu substantialisé, accroché à son individualité et par là l’inconnu de lui-même. D’où cette dissociation de la liberté et du bonheur, dont les conséquences sont que cet homme est malheureux dans et par sa liberté et l’utilise à de fausses fins, se retranchant dans de nouvelles sécurisations. […] Le paradoxe apparent c’est que le bouddhisme a inventé la personne et l’a libérée, autrement dit l’homme universel, qu’il a libéré socialement aussi bien que spirituellement. L’Occident a reçu cet héritage à travers l’antiquité, le stoïcisme notamment… De là aussi vient une secte juive, que le stoïcisme, en lui apportant l’idée d’universalité de l’homme, transforme en religion universelle. C’est le christianisme (peut-être d’ailleurs né sous influence bouddhiste). L’Occident a reçu cet héritage, mais il a perdu en route quelques plumes essentielles. […]
Je citerai ce que Lévi-Strauss écrit sur les trois religions. “Les hommes ont reçu successivement le bouddhisme, le christianisme et l’islam; et il est frappant que chaque étape, loin de marquer un progrès sur la précédente, témoigne plutôt d’un recul. […] Que l’Occident remonte aux sources de son déchirement; en s’interposant entre le bouddhisme et le christianisme, l’islam nous a islamisés, quand l’Occident s’est laissé entraîner par les croisades à s’opposer à lui et donc à lui ressembler, plutôt que de se prêter à cette lente osmose avec le bouddhisme qui nous eût christianisés davantage et dans un sens d’autant plus chrétien que nous serions remontés en deçà du christianisme même. C’est alors que l’Occident a perdu sa chance de rester ferme” (in Tristes tropiques). »
On croit rêver en lisant ce texte!