Conversion et repentance
Conversion et repentance
- Jésus-Christ Prophète – L’annonce du jugement s’il n’y a pas de repentance
- Jésus-Christ Sacrificateur – La véritable conversion
- Jésus-Christ Roi – Comment il doit régner sur nos vies
Dans cet article, nous méditerons sur le thème suivant : conversion et repentance. Nous allons le faire en suivant le Catéchisme de Heidelberg, cette instruction chrétienne de base rédigée il y a plus de 400 ans, mais qui reste toujours d’une étonnante actualité. Le 33e dimanche du Catéchisme, c’est-à-dire les questions et réponses 88 à 91, traite précisément de cette question. Les voici :
Question 88 : « Quels sont les deux éléments de la véritable conversion de l’homme?
La mortification du “vieil homme” et la résurrection de “l’homme nouveau”. »
Question 89 : « Qu’est-ce que la mortification du vieil homme?
C’est une repentance sincère de ce que nous avons suscité la colère de Dieu et c’est être affligé du fond du cœur à cause de ses péchés, les haïr et les fuir de plus en plus. »
Question 90 : « Qu’est-ce que la résurrection de l’homme nouveau?
C’est se réjouir de tout cœur en Dieu par Jésus-Christ et mettre sa joie et son amour à vivre selon la volonté de Dieu, dans l’accomplissement de toutes œuvres bonnes. »
Question 91 : « Mais quelles sont ces œuvres bonnes?
Ce sont seulement celles qui procèdent d’une vraie foi et sont accomplies selon la Loi et pour la gloire de Dieu; et non pas celles qui sont fondées sur nos propres opinions ou sur des préceptes humains. »
Je citerai maintenant deux textes tirés du Nouveau Testament et qui chacun à leur manière nous parlent très directement de la nécessaire conversion qui doit prendre place en nous si nous devons hériter la vie éternelle promise par Dieu. Tout d’abord, un récit de l’Évangile selon Luc, où Jésus parle à ses auditeurs de la repentance et leur raconte une parabole qui a justement trait à ce thème, la parabole du figuier stérile.
« En ce temps-là, quelques personnes vinrent lui raconter ce qui était arrivé à des Galiléens dont Pilate avait mêlé le sang avec celui de leurs sacrifices. Il leur répondit : Pensez-vous que ces Galiléens aient été de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens parce qu’ils ont souffert de la sorte? Non, vous dis-je. Mais si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous de même. Ou bien, ces dix-huit sur qui est tombée la tour de Siloé et qu’elle a tués, pensez-vous qu’ils aient été plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem? Non, vous dis-je. Mais si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous pareillement.
Il dit aussi cette parabole : Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint y chercher du fruit, et n’en trouva pas. Alors il dit au vigneron : voilà trois ans que je viens chercher du fruit à ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le : pourquoi occupe-t-il la terre inutilement? Le vigneron lui répondit : Maître, laisse-le encore cette année; d’ici là, je creuserai tout autour et j’y mettrai du fumier. Peut-être à l’avenir produira-t-il du fruit; sinon, tu le couperas » (Lc 13.1-9).
Puis voici un court extrait de la première lettre de Paul aux chrétiens de Corinthe, dans lequel il appelle aussi ses lecteurs à une conversion et une repentance sincère, sans laquelle, leur dit-il, ils n’hériteront pas du Royaume de Dieu.
« Ne vous y trompez pas : ni les débauchés, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les dépravés, ni ceux qui pratiquent l’homosexualité, ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, ni les insulteurs, ni les accapareurs n’hériteront le royaume de Dieu. Et c’est là ce que vous étiez, quelques-uns d’entre vous. Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ et par l’Esprit de notre Dieu » (1 Co 6.9-11).
1. Jésus-Christ Prophète – L’annonce du jugement s’il n’y a pas de repentance⤒🔗
Dans notre vie ici-bas, nous nous trouvons placés devant une seule alternative : la mort éternelle ou bien la mortification du vieil homme et la résurrection de l’homme nouveau. D’après la Bible, il n’existe pour nous aucun autre chemin que ces deux-là. Nous ne trouvons dans la Bible aucune trace de réincarnation, qui donnerait la possibilité à tout être humain de réapparaître dans une autre vie, peut-être meilleure ou plus élevée. Il n’est aussi nullement question que les créatures de Dieu cessent absolument d’exister après la mort, qu’elles soient totalement désintégrées. Dieu vous a créé une fois pour que vous existiez éternellement.
Nos deux textes, chacun à sa manière, soulignent le changement nécessaire et radical qui doit prendre place dans notre vie, afin que la mort éternelle soit remplacée par une autre mort. Cette fois, il s’agit de la mortification progressive de notre nature de péché, une sorte de mise à mort graduelle de tout ce qui, en nous, s’oppose à la volonté de Dieu. Une telle mortification mène à la vie éternelle. Notre vie ici-bas n’est jamais immobile. Tout comme nous vieillissons chaque jour et ne demeurons jamais dans le même état, nous sommes en chemin vers une destination donnée : ou bien la mort éternelle dans l’angoisse d’être séparé de Dieu pour toujours, ou bien la vie éternelle dans la communion avec Dieu.
Mais qui peut donc opérer un changement si radical dans la vie humaine? Qui a le pouvoir de faire toutes choses nouvelles? Puis-je moi-même renverser la vapeur? Ou bien suis-je automatiquement en route vers le ciel, quelle que soit ma conduite? Voilà aussi des questions qui surgissent de nos deux textes. Mais dans ces deux passages, nous pouvons clairement percevoir la présence de quelqu’un qui agit en tant que médiateur d’une telle conversion radicale : Jésus-Christ! Nous allons voir comment Jésus-Christ nous conduit au travers du processus de conversion en remplissant un triple office : celui de Prophète, celui de Prêtre et celui de Roi.
Au chapitre 13 de l’Évangile selon Luc, Jésus avertit ses auditeurs, et nous avec, d’une crise imminente qui va frapper tout un chacun. Il agit ici comme Prophète. Des gens l’ont approché pour lui demander son opinion au sujet d’un événement qui vient de se produire : un groupe d’habitants de Galilée, la province du nord de la Palestine, sont morts pendant qu’ils étaient en train d’offrir leurs sacrifices à Dieu dans le temple de Jérusalem, probablement durant la fête juive de la Pâque. Le gouverneur romain Ponce Pilate a ordonné de les faire tuer. Quelles étaient ses raisons d’agir de manière si cruelle? Nous ne disposons d’aucune donnée à ce sujet, mais à travers cet élément d’information et d’autres incidents similaires qui nous sont rapportés par d’autres sources historiques, nous sommes en mesure d’apprendre quelque chose sur le caractère de Ponce Pilate et de ses méthodes de gouvernement en Palestine.
Pour les interlocuteurs de Jésus, la question est vraisemblablement d’un autre ordre : Est-ce que ces Galiléens n’avaient pas gravement péché pour avoir été frappés par un tel destin? N’ont-ils pas reçu là un châtiment proportionnel à une quelconque faute commise à un moment ou à un autre? Cette conception était assez répandue du temps de Jésus : vous recevez une rétribution immédiate pour ce que vous, voire vos parents, avez fait.
Un autre épisode, tiré cette fois de l’Évangile selon Jean, au chapitre 9, illustre cette idée. Je vous cite le début de cet incident : « Jésus vit, en passant, un homme aveugle de naissance. Ses disciples lui demandèrent : Maître, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle? » (Jn 9.1-2). L’un des dangers d’une telle idée c’est que l’on commence à examiner la vie de son prochain, ses misères et ses épreuves, et qu’au lieu de l’aider au mieux de ses possibilités, l’on essaie d’analyser le passé d’une telle personne pour condamner ses actions. Ce faisant, on s’exclut soi-même du champ de la rétribution divine pour ses propres actions, puisqu’on ne souffre pas soi-même des maux qui frappent l’autre.
Mais la réponse de Jésus à la nouvelle du massacre des Galiléens par Pilate replace tout dans la perspective divine. Remarquez bien qu’il emploie quatre fois le mot « tous » : « Pensez-vous que ces Galiléens aient été de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens parce qu’ils ont souffert de la sorte? Non, vous dis-je. Mais si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous de même » (Lc 13.2-3). Et à nouveau, il pose la même question en fournissant une réponse identique au sujet d’un fait divers qui cette fois n’a pas été directement provoqué par une main d’homme : il s’agit de l’écroulement d’une tour ayant provoqué la mort de dix-huit personnes. Dans sa réponse, Jésus se fait l’écho du Psaume 14 :
« L’Éternel du haut des cieux se penche sur les êtres humains, pour voir s’il y a quelqu’un qui ait du bon sens, qui cherche Dieu. Tous sont égarés, ensemble ils sont pervertis; il n’en est aucun qui fasse le bien, pas même un seul. Tous ceux qui commettent l’injustice n’ont-ils pas de connaissance? Eux qui dévorent mon peuple comme on dévore du pain, ils n’invoquent pas l’Éternel. C’est là qu’ils trembleront de peur, quand Dieu paraîtra au milieu de la race juste » (Ps 14.2-5).
Oui, en ligne directe avec le Psaume 14, Jésus avertit ses auditeurs de la crise imminente qui arrive et au cours de laquelle Dieu prononcera son jugement final sur une humanité corrompue. On pourrait l’appeler une crise eschatologique, une crise qui a trait à la fin des temps et qui frappera chacun, sans aucune distinction. Et de fait, dans la deuxième partie du précédent chapitre de l’Évangile selon Luc, Jésus s’est précisément attaché à cela : avertir ceux qui l’écoutent de rester éveillés eu égard à cette crise qui s’annonce inéluctable. Jésus agit en tant que Prophète qui appelle les hommes à la conversion.
2. Jésus-Christ Sacrificateur – La véritable conversion←⤒🔗
Mais il existe encore une chance d’éviter la crise : Convertissez-vous! Portez de bons fruits! La véritable conversion est la seule façon d’éviter d’être frappé par la crise inéluctable qui s’approche.
La parabole du figuier stérile est un récit assez dramatique, car elle nous parle bien de la patience de Dieu, qui est prêt à attendre; mais remarquez bien que le propriétaire de la vigne a d’abord donné à son jardinier l’ordre d’arracher le figuier. Ce n’est qu’à cause de la demande du jardinier que le propriétaire remet l’exécution de son projet à l’année suivante. Si la situation n’a pas changé, si, malgré tous les soins du jardinier, l’arbre ne porte pas de bons fruits l’année d’après, le figuier sera arraché. Voilà comment Jésus conclut la parabole : la crise est encore en perspective. Il est du reste significatif qu’en grec, langue dans laquelle le Nouveau Testament a été écrit, le mot « krisis » signifie « jugement ».
Mais qu’est-ce que la conversion? Que veut dire Jésus? Le Catéchisme de Heidelberg nous enseigne qu’une vraie conversion comporte deux parties : la mortification du « vieil homme en nous », et la résurrection de « l’homme nouveau ». On pourrait illustrer ceci en utilisant de nouveau l’image du figuier. Cette fois-ci, le figuier n’est plus arraché. Pourtant, il y a encore plusieurs branches mortes qui doivent être coupées, car elles empêchent la bonne croissance de l’arbre; ces branches ne peuvent plus porter de bons fruits. Mais ce n’est pas tout : grâce aux soins du jardinier, qui l’arrose régulièrement, arrache les mauvaises herbes autour de lui et aussi l’entoure de fumier, le figuier reçoit une nouvelle vie, une sève nouvelle. Il est transformé de l’intérieur et commence finalement à porter de bons fruits. Reconnaissez-vous ici les questions et réponses 89 et 90 du Catéchisme de Heidelberg déjà citées?
Question 89 : « Qu’est-ce que la mortification du vieil homme?
C’est une repentance sincère de ce que nous avons suscité la colère de Dieu et c’est être affligé du fond du cœur à cause de ses péchés, les haïr et les fuir de plus en plus. »
Question 90 : « Qu’est-ce que la résurrection de l’homme nouveau?
C’est se réjouir de tout cœur en Dieu par Jésus-Christ et mettre sa joie et son amour à vivre selon la volonté de Dieu, dans l’accomplissement de toutes œuvres bonnes. »
Si nous continuons toujours à employer l’image du figuier et du jardinier, nous pouvons aussi comprendre que sans le jardinier qui travaille dur, la condition du figuier ne s’améliorera pas d’elle-même. C’est là que beaucoup de gens font une grosse erreur au sujet du mot « conversion »; celle-ci est envisagée comme un acte humain qui trouve son origine en l’homme. C’est moi le premier qui fait un pas en direction de Dieu, et je deviens alors totalement tourné vers ma propre expérience, qui m’enchante. Une vraie conversion est toute autre. Même s’il s’agit d’une conversion subite, après qu’on a passé de longues années en vivant comme un païen, la conversion ne peut avoir lieu si Dieu n’a pas d’abord planté en vous une nouvelle vie, cette sève qui commence à donner de la vitalité à l’arbre.
Cette nouvelle vie ne provient pas du tout de vous : la mort et la résurrection de Jésus-Christ qui ont eu lieu une fois, deviennent objectivement vie nouvelle pour vous. Il vit en vous, et vous vivez de sa vie. Sans le don total de sa personne sur la croix, il n’aurait jamais été question d’une vie nouvelle pour vous ou pour moi! C’est lui seul qui rend ceci possible par l’office de Prêtre qui est le sien, grâce à son offrande volontaire sur la croix. Ensuite, Dieu applique cette œuvre en vous par son Esprit, et cela se produit d’une manière très mystérieuse, parfois tout à fait silencieuse, que Dieu seul connaît. Ce processus, c’est la nouvelle naissance, dont Jésus parle à Nicodème, un théologien docteur de la loi, au troisième chapitre de l’Évangile selon Jean. Jésus lui dit :
« En vérité en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d’eau et d’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit. Ne t’étonne pas de ce que je t’aie dit : il faut que vous naissiez de nouveau » (Jn 3.7).
La conversion n’est que la conscience que nous avons de cette vie nouvelle que seul le Saint-Esprit nous accorde. Bien sûr, cette conscience nous remplit de joie, même s’il s’agit d’une conversion quotidienne par laquelle nous revenons de tout notre cœur vers Dieu; car nous sommes rendus chaque fois conscients du travail puissant de Dieu en nous. C’est pourquoi le Catéchisme parle de la résurrection de « l’homme nouveau » en termes de « réjouissance en Dieu par Jésus-Christ », de « joie ». Bien sûr aussi, la conversion ne demeure pas simplement un sentiment, mais elle nous conduit à accomplir des œuvres bonnes. C’est d’ailleurs exactement ce que dit le Catéchisme lorsqu’il parle de mettre sa joie et son amour à vivre, selon la volonté de Dieu, dans l’accomplissement de toutes œuvres bonnes. Les œuvres bonnes vont de pair avec la joie et l’amour, elles ne nous sont pas imposées, elles sont en fait devenues l’expression de notre reconnaissance.
La conversion comprend aussi la repentance. La repentance est, à dire vrai, le premier fruit de la conversion. C’est aussi une forme de conscience : conscience de ce que nous avons provoqué la colère de Dieu par nos péchés. Nous réalisons combien grande est la crise imminente à laquelle nous avons échappé, combien grande aurait dû être la rétribution de nos fautes. Plus encore, nous devenons conscients de ce que nos péchés ont gravement attenté à la sainteté de Dieu. Si nous n’étions pas tout d’abord nés de l’Esprit de Dieu, nous n’aurions jamais pu en devenir conscients. Car ce qui est né de la chair est chair et ne comprend rien de ce qui a trait à la sainteté de Dieu. Ceci nous montre clairement que même le tout premier fruit de la conversion, à savoir la repentance, ne procède jamais de l’homme naturel, mais est réveillé en nous par l’Esprit de Dieu. Et si vous n’éprouvez jamais de repentance telle que je viens de la décrire, alors il vous faut vous demander sur quelle route vous cheminez : celle de la vie éternelle ou celle de la mort éternelle… Mais la repentance non plus n’est pas qu’un sentiment. Elle nous fait haïr nos propres péchés (pas seulement les péchés des autres), puis elle nous fait nous écarter de nos péchés, elle nous fait fuir loin d’eux.
Jusqu’à présent, nous avons vu comment Jésus-Christ agit en tant que Prophète en nous avertissant de la crise imminente qui nous attend, le jugement final de Dieu, si nous ne portons pas de bons fruits, si nous ne nous repentons pas. Puis nous avons vu que Jésus-Christ, toujours lui, est le seul fondement de notre conversion, par l’œuvre de Prêtre qu’il a accompli une fois pour toutes sur la croix à Golgotha. C’est son sacrifice unique qui forme la base sur laquelle Dieu nous accorde une vie nouvelle, en appliquant l’œuvre de son Fils à nos vies par son Esprit Saint. Nous verrons maintenant comment Jésus-Christ doit régner sur nos vies, lui qui n’est pas seulement Prophète et Prêtre, mais également Roi.
3. Jésus-Christ Roi – Comment il doit régner sur nos vies←⤒🔗
Dans les deux parties précédentes, nous avons vu comment Jésus-Christ est celui qui avertit ses auditeurs, et nous avec eux, de la crise imminente qui s’annonce : le jugement final de Dieu sur ceux qui ne se seront pas repentis de leurs fautes, sur ceux qui n’auront pas connu une transformation radicale. Jésus exerce une fonction prophétique. Puis nous avons vu le rôle central accompli par Jésus dans le processus de notre conversion. Par sa mort et sa résurrection, il rend possible le fait de recevoir une nouvelle vie. Il s’agit de sa fonction sacerdotale, ou, si vous préférez, de Prêtre. Il envoie son Esprit pour appliquer en nous son œuvre qui provoque cette nouvelle vie. Notre conversion devient la conscience que nous avons de la manière dont Dieu travaille en nous. Elle nous amène à nous repentir de nos fautes, à les fuir, et à chercher à accomplir des œuvres bonnes. Désormais, Christ régit nos vies comme notre Roi. Il exerce donc son office royal.
Une question surgit pourtant : Un chrétien peut-il être à la fois juste devant Dieu, puisque pardonné par lui, et néanmoins encore pécheur? Le réformateur allemand du 16e siècle Martin Luther a justement exprimé cette double condition qui est la nôtre : toujours juste, toujours pécheur. Mais si cela est vrai, nous pourrions nous demander où est le gouvernement de Jésus-Christ sur nos vies. Ne manque-t-il pas quelque chose? Nous allons étudier cette question à la lumière d’un court passage du Nouveau Testament, tiré de la première lettre de l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe : après les avoir sévèrement repris pour leur manière de vivre qui ressemblait souvent davantage à celle des païens qu’à celle d’enfants de lumière, Paul leur écrit :
« Ne vous y trompez pas : ni les débauchés, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les dépravés, ni ceux qui pratiquent l’homosexualité, ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, ni les insulteurs, ni les accapareurs n’hériteront le royaume de Dieu. Et c’est là ce que vous étiez, quelques-uns d’entre vous. Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ et par l’Esprit de notre Dieu » (1 Co 6.9-11).
L’Église de Corinthe est un bon exemple de cette formule de Luther : toujours pécheurs, toujours justifiés. Ses membres sont encore empêtrés dans de graves égarements. Ils ont bien reçu la vie nouvelle de Christ, mais trébuchent sur le plan de la conversion quotidienne requise d’eux, sur le plan de la mortification du « vieil homme » et de la résurrection de « l’homme nouveau ». Paul doit aussi agir comme prophète vis-à-vis d’eux. Il les avertit de manière très claire, et nous avec : on ne reçoit pas automatiquement la vie éternelle. On n’a pas part au Royaume de Dieu, quelle que soit la manière dont on se conduit. « Ne vous y trompez pas », dit Paul. On pourrait paraphraser en disant : « ne vous bercez pas d’illusions ». Si vous continuez à vivre d’une manière totalement en contradiction avec la volonté expresse de Dieu, vous n’aurez pas part à son Royaume. Votre présence formelle chaque dimanche dans un lieu de culte, votre participation formelle aux activités d’une Église ne compteront pas davantage que votre style de vie. Le règne de Christ sur votre vie, les fruits d’une véritable conversion doivent aussi devenir visibles.
Remarquez bien que cela n’implique pas une perfection immédiatement visible. Le Catéchisme de Heidelberg, en décrivant ce qu’est la mortification du « vieil homme », nous dit que nous haïssons et fuyons nos péchés de plus en plus. Il s’agit d’un processus graduel. La vie nouvelle est bien là, mais les fruits d’une véritable conversion croissent petit à petit. Couper toutes les branches mortes de l’arbre de notre vie prend du temps. Pourtant, il existe une différence fondamentale entre ce processus graduel, qui caractérise les vrais croyants, et le fait de persévérer dans un style de vie criant de péché et de désobéissance, par exemple ce que Paul nomme dans le passage que nous avons lu.
« Ne vous y trompez pas, ne vous bercez pas d’illusions! » Dieu ne tolère aucun de nos péchés, il ne ferme pas les yeux par faiblesse sur notre désobéissance à sa volonté. Quel que soit le degré de tolérance de la société ou de la culture vis-à-vis des péchés humains, Dieu, lui, ne les tolère pas. La crise surviendra, le jugement est en route. Que le monde tolère le péché et même l’approuve, quoi d’étonnant à cela? Qui est donc le prince de ce monde? Satan, l’adversaire déclaré de Dieu. Quant à nous, nous avons reçu une nouvelle vie en Christ pour laisser Christ régner sur notre vie, et non pas Satan.
« Mais quelles sont ces œuvres bonnes? » demande le Catéchisme de Heidelberg à la question 91. « Ce sont seulement celles qui procèdent d’une vraie foi et sont accomplies selon la Loi et pour la gloire de Dieu; et non pas celles qui sont fondées sur nos propres opinions ou sur des préceptes humains. » Voilà une réponse actuelle à une question extrêmement importante. Les œuvres bonnes ne sont déterminées ni par nous-mêmes, ni par l’idéologie dominante, ni par la culture d’aujourd’hui, ni encore par un groupe de pression quelconque, même s’il se réclame de la bonté humaine ou de l’humanisme. Ce ne sont pas non plus les théologiens qui déterminent ce que les œuvres bonnes aux yeux de Dieu devraient être. Elles ne sont pas davantage déterminées par toutes sortes de traditions bien établies, mais seulement par la loi de Dieu, et pour la gloire de Dieu. Peu importe si nos œuvres bonnes nous rendent impopulaires aux yeux de la société et de la mentalité dominante, ce qui compte c’est ce qui plaît à Dieu.
Ceci est si clair pour le Catéchisme que la section qui suit commence avec les dix commandements (il s’agit des dimanches 34 à 44 du Catéchisme de Heidelberg). En d’autres termes, le gouvernement de Jésus-Christ sur notre vie et le maintien de la loi de Dieu ne vont pas à l’encontre l’un de l’autre. Bien au contraire, ils marchent ensemble dans la vie des hommes et des femmes qui se convertissent journellement à Dieu en se repentant et en recherchant sa volonté.
Qui a le pouvoir de faire toutes choses nouvelles? C’est la question que nous posions au début de cet article intitulé « conversion et repentance ». La réponse est simple : Jésus-Christ, par son Esprit, a ce pouvoir unique. C’est naturellement un signe de son office royal. Paul exprime de la plus belle manière ce pouvoir, lorsqu’après avoir nommé toutes les catégories de transgressions que nous avons lues (débauche, idolâtrie, adultère, etc.) il ajoute : « Et c’est là ce que vous étiez, quelques-uns d’entre vous. Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ et par l’Esprit de notre Dieu » (1 Co 6.11).
Pour le Dieu trinitaire, rien n’est impossible. Quelle que soit la gravité des péchés que nous avons pu commettre, tout cela peut désormais faire partie de notre passé. Au nom du Seigneur Jésus-Christ, nos péchés peuvent être lavés, nous pouvons être sanctifiés et recevoir l’absolution de la part de Dieu notre Père. Quel message unique de réconfort et d’espoir!
Je vous propose de conclure en lisant quelques extraits du Nouveau Testament qui traitent de ce sujet.
« Nous avons donc été ensevelis avec lui dans la mort par le baptême, afin que, comme Christ est ressuscité d’entre les morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie. En effet si nous sommes devenus une même plante avec lui, par la conformité à sa mort, nous le serons aussi par la conformité à sa résurrection; nous savons que notre vieille nature a été crucifiée avec lui, afin que ce corps de péché soit réduit à l’impuissance et que nous ne soyons plus esclaves du péché » (Rm 6.4-6).
« Faites donc mourir votre nature terrestre : l’inconduite, l’impureté, les passions, les mauvais désirs et la cupidité qui est une idolâtrie. C’est pour cela que vient la colère de Dieu sur les rebelles. Vous marchiez ainsi autrefois, lorsque vous viviez dans ces péchés. Mais maintenant, vous aussi rejetez tout cela : colère, animosité, méchanceté, calomnie, paroles grossières qui sortiraient de votre bouche. Ne mentez pas les uns aux autres, vous qui avez dépouillé la vieille nature avec ses pratiques et revêtu la nature nouvelle qui se renouvelle en vue d’une pleine connaissance selon l’image de celui qui l’a créée » (Col 3.5-10).
Terminons enfin avec ces paroles de Jean vers la fin du dernier livre de la Bible, l’Apocalypse, où Jean confirme les promesses de Dieu à ses enfants, mais où il confirme aussi le jugement divin sur ceux qui ne se repentent et ne se convertissent pas :
« Celui qui était assis sur le trône dit : Voici, je fais toutes choses nouvelles. Et il dit : Écris, car ces paroles sont certaines et vraies. Il me dit : C’est fait! Je suis l’Alpha et l’Oméga, le commencement et la fin. À celui qui a soif, je donnerai de la source d’eau de la vie, gratuitement. Tel sera l’héritage du vainqueur; je serai son Dieu et il sera mon fils. Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les débauchés, les magiciens, les idolâtres et tous les menteurs, leur part sera dans l’étang brûlant de feu et de soufre : cela, c’est la seconde mort » (Ap 21.5-8).