Cet article a pour sujet les familles dysfonctionnelles non conformes aux normes de la Bible, où les parents et les enfants vivent des échecs.

4 pages. Traduit par Paulin Bédard

Des familles dysfonctionnelles

  1. Définition du dysfonctionnement
  2. Où sont les familles heureuses?
  3. Les devoirs et les échecs des enfants
  4. Les devoirs et les échecs des parents
  5. Les conséquences

Nous connaissons bien le cinquième commandement : « Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent sur la terre que l’Éternel, ton Dieu, te donne » (Ex 20.12).

Mais comment appliquer ce commandement dans les familles dysfonctionnelles? Comment les enfants peuvent-ils honorer des parents négligents dans leur responsabilité parentale? Et comment les parents doivent-ils exercer leur autorité dans les situations de rébellion à la maison?

1. Définition du dysfonctionnement🔗

Le terme « famille dysfonctionnelle » est familier, même dans une société qui tient en piètre estime les notions traditionnelles de la famille. Les familles dysfonctionnelles et leurs mésaventures ont alimenté à l’infini les émissions de télévision qui se veulent humoristiques et divertissantes.

Bien que familier, le terme est mal défini. Par « famille dysfonctionnelle », j’entends : une famille dont les structures et les rôles relationnels ne sont pas conformes aux normes de l’Écriture de manière sérieuse et durable.

Pour comprendre le « dysfonctionnement », nous devons être au clair sur ce qu’est le bon fonctionnement d’une famille chrétienne. Quels sont les structures et les rôles au foyer qui plaisent à Dieu? Les traits dysfonctionnels sont contraires à ce que l’on peut considérer comme des comportements appropriés.

Il est peut-être vrai que chaque famille présente un certain niveau de dysfonctionnement. Tout enfant de l’alliance aura du mal à obéir à ses parents avec amour et humilité. Tout parent connaîtra des échecs dans l’exercice des responsabilités particulières qui lui ont été données par Dieu et qu’il a promis d’assumer lors du baptême. Ce qui devrait être l’un des éléments qui procure le plus de sécurité pour l’identité d’un chrétien — sa famille — peut être un lieu de fracture profonde et d’échec. Une famille peut être confrontée à des tensions dans ses conversations et interactions quotidiennes, tandis que certaines familles sont également confrontées aux traumatismes de la maltraitance ou du divorce. Les difficultés familiales sont très répandues.

2. Où sont les familles heureuses?🔗

J’ai lu quelque part l’affirmation suivante : « Il n’y a pas de familles heureuses dans la Bible. » Il s’agit bien sûr d’un argument du silence. En effet, si la Bible décrit certainement de nombreuses familles dysfonctionnelles, elle n’a pas nécessairement l’occasion de dire explicitement des choses comme : « Azaria et sa femme eurent dix fils et quatre filles, et ils vécurent en paix pendant de longues années. »

Il est toutefois vrai que l’Écriture contient de nombreux exemples de ce que nous pourrions appeler des familles dysfonctionnelles. Pensez à la manière dont Isaac et Rebecca ont péché par favoritisme avec leurs fils Jacob et Ésaü, à la manière dont la fille de Jephté a souffert à cause du comportement irréfléchi de son père, à la manière dont le prêtre Éli a permis à ses fils de persister dans l’impiété, à la manière dont les fils de Samuel étaient des hommes méchants, ou à la manière dont même la maison du roi David a été tourmentée par les frasques d’enfants rebelles. Cette dure réalité est évoquée dans Proverbes 17.25 : « Un fils insensé donne du mécontentement à son père et de l’amertume à celle qui l’a enfanté. »

L’Écriture ne passe pas sous silence les difficultés qui surviennent dans la vie d’une famille fidèle. Néanmoins, l’étiquette « dysfonctionnelle » ne doit pas être appliquée à toutes les familles confrontées aux difficultés de la vie familiale. « Dysfonctionnel » est un terme chargé qui met l’accent sur les devoirs et les échecs des enfants et des parents, lorsqu’ils ne vivent pas, de manière sérieuse et durable, selon les normes de l’Écriture.

3. Les devoirs et les échecs des enfants🔗

Dans le cinquième commandement, Dieu demande aux enfants d’honorer leur père et leur mère. Dans les cultures anciennes, honorer quelqu’un, c’était reconnaître son importance et sa valeur. Honorer quelqu’un, c’est démontrer, par des interactions quotidiennes, que cette personne est significative ou qu’elle joue un rôle important dans l’orientation de notre vie.

L’exigence d’obéissance des enfants à leurs parents est présente tout au long de l’Ancien Testament. Outre le cinquième commandement, nous pensons à Lévitique 19.3 : « Chacun de vous respectera sa mère et son père et observera mes sabbats. Je suis l’Éternel, votre Dieu » (voir aussi Pr 1.8; 23.22).

Nous trouvons la même chose dans le Nouveau Testament. Le commandement d’Éphésiens 6.1 « Enfants, obéissez à vos parents » était conforme aux attentes du monde romain, où le père exerçait un contrôle quasi total sur la vie de sa famille.

Ce qui distingue l’instruction du Nouveau Testament, c’est l’ajout de la phrase « Enfants, obéissez à vos parents selon le Seigneur » (Ép 6.1). La vie quotidienne au sein du mariage, de la famille et de la société est façonnée par notre vie en Christ. L’Évangile du Christ change le but et la motivation de l’obéissance des enfants, car ils s’efforcent d’obéir parce que cela plaît au Seigneur.

Si le devoir des enfants est d’honorer leurs parents et de leur obéir, les attitudes et les comportements rebelles constituent un grave échec. Manquer de respect, c’est traiter une personne « importante » comme si elle était sans importance. En raison du lien étroit entre l’honneur de Dieu et l’honneur des parents, maudire ses parents revient à maudire Dieu. C’est pourquoi le fait de dire du mal de ses parents était puni de mort dans l’Ancien Testament (Ex 21.17; Pr 20.20). Par sa loi, Dieu cherchait à préserver l’intégrité d’un foyer faisant partie de l’alliance.

Les foyers chrétiens sont parfois marqués par le dysfonctionnement de la rébellion : règles de la maison transgressées sans crainte, discours irrespectueux envers les parents, tensions élevées, départs brusques du foyer, et bien d’autres choses encore. Nous déplorons le manque consternant de respect pour l’autorité dans notre culture, et la façon dont cela affecte également les foyers chrétiens. Bien qu’un tel irrespect soit grave, l’Écriture indique qu’il faut s’y attendre.

Dans Romains 1, parmi de nombreux autres péchés odieux qui sont mentionnés, la « désobéissance aux parents » est un exemple de péché débridé (voir 2 Tm 3.2). Dans les dysfonctionnements familiaux, nous nous heurtons à l’omniprésence du péché.

4. Les devoirs et les échecs des parents🔗

Dans le cinquième commandement, Dieu impose une exigence explicite à ceux qui sont sous une autorité légitime, avec une obligation implicite pour ceux qui sont en autorité. Dieu appelle le père et la mère à enseigner à leurs enfants les voies du Seigneur. Pensez au mandat de Deutéronome 6.4-9 qui ordonne aux parents d’innonder le foyer de la Parole de Dieu (Ps 78.1-4). Dans Proverbes 22.6, les parents reçoivent l’exhortation suivante : « Oriente le jeune garçon sur la voie qu’il doit suivre; même quand il sera vieux, il ne s’en écartera pas. »

L’esprit de cette instruction ressort clairement de Proverbes 3.12 : « L’Éternel reprend celui qu’il aime, comme un père l’enfant qu’il chérit. » Ce verset souligne le lien indéfectible entre l’amour de l’Éternel et le traitement qu’il réserve à ses enfants : parce qu’il aime, Dieu corrige, instruit et discipline. Telle est la norme céleste pour les parents terrestres : un parent consacré à Dieu doit aimer ses enfants, en prendre soin tendrement et les discipliner fidèlement.

Dans le Commentaire sur le Catéchisme de Zacharias Ursinus, en relation avec le 39e dimanche, il offre un résumé utile des devoirs des parents1. Il est demandé aux parents de :

  1. nourrir et chérir leurs enfants (Mt 7.9);
  2. défendre leurs enfants contre toute atteinte (1 Tm 5.8);
  3. les instruire (Ép 6.4);
  4. les gouverner par une bonne discipline (Pr 13.1).

Inversement, les fautes des parents correspondent généralement à ces devoirs :

  1. ne pas rechercher ou fournir le soutien et la nourriture nécessaires à leurs enfants, ou les élever dans le luxe et l’extravagance;
  2. ne pas les protéger contre les blessures, ou ne pas les habituer à la patience et à la douceur;
  3. ne pas éduquer leurs enfants, ou ne pas se soucier de les éduquer selon leurs propres capacités ou celles de leurs enfants, ou les corrompre par leur mauvais exemple ou leurs mauvaises instructions;
  4. élever leurs enfants dans l’oisiveté… ou ne pas les corriger lorsque la nécessité l’exige, ou les châtier avec plus de sévérité que le devoir ou la nature de l’infraction ne l’exige, et s’aliéner ainsi leur affection par une sévérité et une cruauté trop grandes2.

Ces catégories permettent de mieux comprendre ce que peut être le dysfonctionnement parental. Tout comme Éphésiens 6 souligne le devoir essentiel des enfants, ce passage fait de même pour les parents. Notamment, Paul commence par une mise en garde contre une mauvaise utilisation de l’autorité parentale : « Et vous, pères, n’irritez pas vos enfants » (Ép 6.4).

Au premier siècle, alors que le père exerçait un pouvoir absolu sur sa famille, le verset 4 était étonnamment contre-culturel : « Pères, n’irritez pas vos enfants. » La tyrannie parentale ne devrait pas exister dans un foyer chrétien. Les parents peuvent exiger l’obéissance de leurs enfants, bien sûr, mais des règles bien intentionnées peuvent se transformer en un grand nombre de règlements inutiles. Les parents peuvent aussi prendre l’habitude de faire des remarques désobligeantes à leurs enfants, de trouver toujours quelque chose à critiquer et de rarement les féliciter. Si nous sommes durs avec eux, si nos règles sont arbitraires, si nous sommes insensibles aux besoins particuliers et au caractère de notre enfant, nous provoquerons de la frustration.

5. Les conséquences🔗

Les Écritures montrent qu’une autorité mal employée peut avoir des conséquences fâcheuses. Colossiens 3 est une variante proche du commandement d’Éphésiens : « Pères, n’irritez pas vos enfants, de peur qu’ils ne se découragent » (Col 3.21). Le dysfonctionnement parental aura certainement pour résultat le découragement des enfants. L’Écriture enseigne que, si les parents provoquent souvent l’exaspération ou la frustration de leurs enfants, ceux-ci auront du mal à accepter l’instruction parentale. Un enfant frustré n’est pas un enfant prêt à apprendre les voies du Seigneur.

Notes

Dans un prochaine article, intitulé La grâce pour les familles dysfonctionnelles, nous examinerons comment Dieu aide les familles dysfonctionnelles.

1. Zacharias Ursinus, Commentary on the Heidelberg Catechism [Commentaire sur le Catéchisme de Heidelberg], tr. G.W. Williard, Phillipsburg, N, P&R, 1985, p. 577-78.

2. Ursinus, Commentary, p. 578.