Jacques 1 - L'épreuve et la joie
Jacques 1 - L'épreuve et la joie
« Jacques, serviteur de Dieu et du Seigneur Jésus-Christ, aux douze tribus dans la dispersion, salut! Mes frères, considérez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves que vous pouvez rencontrer, sachant que la mise à l’épreuve de votre foi produit la patience. Mais il faut que la patience accomplisse une œuvre parfaite, afin que vous soyez parfaits et accomplis, et qu’il ne vous manque rien. »
Jacques 1.1-4
Jacques écrit aux douze tribus qui sont dans la dispersion, disséminées, éparpillées, séparées les unes des autres, semblables à un troupeau dans lequel un loup a pénétré. C’est l’Église, peuple de Dieu, qui est dépeinte ainsi. Elle est dispersée et disséminée parmi tous les peuples de la terre, là où, apparemment, elle vit encore rassemblée en tant que communauté spirituelle.
Combien grande est la division de l’Église, combien grande sa dispersion! Cette situation est identique dans l’Église d’aujourd’hui, ici comme ailleurs. Malgré tout, cette Église existe, puisque Jacques écrit « aux douze tribus ». L’Église est présente; malgré tout, cette adresse le prouve. Il faut se le répéter les uns aux autres, crier les uns aux autres : « Nous sommes là, nous sommes près de vous! » pour se donner du courage, quand on marche dans le brouillard ou dans la nuit et qu’on ne voit plus. Si nous pouvons proclamer partout, par-dessus toutes les frontières, que l’Église vit, qu’elle tient bon malgré la dispersion des chrétiens, ce sera pour ceux qui luttent un message d’espérance et de réconfort.
Nous existons parce que le Christ est présent. Ce que Jacques écrit, il ne l’écrit pas de lui-même. Il l’écrit en tant que « serviteur de Dieu et du Seigneur Jésus-Christ ». C’est de Jésus-Christ qu’il est question ici, dont la présence et la puissance se manifestent au milieu des siens, c’est-à-dire dans l’Église, qui ne vit que de cette puissance et de cette présence. C’est ce qui l’empêche de s’effondrer. Nous devons avoir l’absolue certitude que cette miséricordieuse et efficace présence de Jésus-Christ ne nous a pas fait défaut un seul instant. C’est du reste pourquoi Jacques peut commencer par dire : « Je vous salue dans la joie ». « Soyez dans la joie ». Il le dit comme un mot d’ordre, comme s’il disait : « Vous pouvez être dans la joie, réjouissez-vous ».
Dans cet écrit, par-dessus tout et avant tout figure le mot « joie ». En entendant les ordres, les instructions et les commandements que Jacques nous donne, il ne nous viendrait pas un seul instant à l’esprit l’idée que son intention soit de nous écraser. Bien au contraire, son intention est de nous convoquer, de nous rassembler comme peuple de Dieu pour nous soumettre tous au Christ, le Seigneur. Les ordres que donnera l’auteur sont l’aide et le secours dont nous avons si grand besoin dans notre dispersion. La Bible nous donne de nombreux exemples d’hommes qui ont soupiré après un ordre qui viendrait de Dieu et qui ont lutté pour obtenir des directives de sa part.
Les paroles que Jacques nous adresse ici contiennent des ordres et des instructions claires et nettes. C’est la preuve que le Christ ne nous abandonne pas. Il nous envoie son serviteur pour nous transmettre des ordres, pour que nous sachions que lui, le Roi, est là, qu’il étend sur nous le règne de sa seigneurie. C’est pourquoi Jacques peut dire : « Mes frères, considérez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves que vous pouvez rencontrer ». Les commandements que Dieu nous donne quand nous passons par l’épreuve sont un signe de sa présence efficace au milieu de nous. Celui qui reçoit des ordres de Dieu fait partie de son peuple, même lorsqu’il traverse l’épreuve. C’est pourquoi vous pouvez être dans la joie si vous vous soumettez aux instructions de Dieu.
Les ordres que le serviteur de Jésus-Christ nous donne sont, il est vrai, bien différents de ceux qu’un soldat reçoit de son officier. Pour ce qui est des ordres que nous recevons de Jésus-Christ, il nous est dit de tenir bon dans l’épreuve, d’éprouver notre foi, de patienter et de persévérer jusqu’à la fin. Jacques veut que notre vie et la vie du monde soient transformées de fond en comble. Notre vie doit être bouleversée, tirée d’une situation difficile et orientée dans une direction nouvelle. Mais Jacques sait bien que ce bouleversement total de notre vie ne peut pas être notre affaire. Par nous-mêmes, nous ne sommes pas même capables de faire un tout petit pas en avant. Nous ne parviendrons jamais à changer, si peu que ce soit, la direction de notre vie. Ce sera l’œuvre de celui qui parle ici, l’œuvre de Jésus-Christ, qui a étendu sa main sur la vie de Jacques et qui a racheté sa vie, comme on paie le prix d’un esclave à celui auquel il appartient. C’est pourquoi Jacques se dit « serviteur de Dieu et du Seigneur Jésus-Christ ».
Tel est le mystère de la Bible. Toute vie sera changée et renouvelée; à vous le salut, la lumière, la vérité qui sont révélés là où Jésus-Christ parle, souffre, meurt et ressuscite. Et c’est comme serviteur de ce Jésus-Christ que Jacques s’adresse ici. Cela signifie qu’en dehors de lui — c’est-à-dire en ne comptant que sur soi-même — personne ne peut faire autre chose que de pousser un soupir d’impuissance, si quelqu’un vient à lui parler du renouvellement de sa vie, de son devoir de patienter et de persévérer dans l’épreuve. Hors de Jésus-Christ, il nous est impossible de suivre ses exhortations. Comment pourrais-je renouveler ma vie, moi qui suis mort dans le péché, qui ne suis qu’un cadavre spirituel?
Jacques connaît tout cela. Il connaît la misère de notre situation, l’impossibilité de remporter la victoire. Mais il pense à Jésus-Christ, mort et ressuscité pour nous. Même si nous étions dispersés, éparpillés, disséminés et déracinés, nous ne pouvons ignorer le nom de Jésus-Christ. C’est en son nom que nous avons été baptisés ou que nous devons l’être. Il se peut que nous l’ayons oublié, que tout cela soit recouvert d’une épaisse couche de poussière. C’est pourquoi Jacques dit : Réjouissez-vous! Réveillez-vous! Redressez-vous. Soyez forts! Considérez ce qu’a fait Jésus-Christ pour vous.
Cette assurance et cette lumière nous permettent de dominer nos plaintes. Si on ne juge notre condition que du seul point de vue humain, on ne peut que désespérer. On peut nous prêcher une morale élevée, nous donner un bon coup de fouet, on n’en restera pas moins impuissant. Le moralisme et le découragement vont de pair. Mais si l’on juge notre vie à partir de Dieu, dans la lumière du Christ, on peut alors dire et penser toute autre chose. On impose une limite et même une fin à notre découragement. Au lieu de gémir, on prend conscience de la présence du Père. Jésus est à côté de ceux qui souffrent, qui sont affligés, opprimés, chagrinés, accablés, et leur dit : « Vous appartenez à Dieu. »
À cause de cette joie, nous écoutons l’ordre de Dieu et nous le mettons en pratique. Il ne s’agit ni d’une morale ni d’une plainte. Nous avons la possibilité de vivre, d’obéir, d’aller de l’avant, à cause de Jésus-Christ à nos côtés. Il est la source de toute vie. Sa présence a introduit dans notre vie un peu de cette volonté de Dieu, de cette obéissance que nous lui devons, de ce changement si nécessaire! L’interrogation est si sérieuse qu’elle peut nous plonger dans la honte.
Mais à quoi reconnaît-on la présence de Dieu dans notre vie? Le serviteur de Jésus-Christ nous oblige à une décision. Il nous appelle à la repentance. Il nous dit : Vous parlez de Jésus-Christ, vous allez au culte, vous lisez la Bible, vous avez la foi et vous priez. Mais tout cela reste de vains mots si la volonté de Dieu n’est pas accomplie, si on ne constate pas un changement effectif dans votre vie. Dieu a fait pour vous une grande chose, il a étendu sa main sur vous. Mais vous, qu’en avez-vous fait de cette miséricorde? Pourquoi ne saisissez-vous pas cette main? Voilà la repentance à laquelle il nous appelle. Cette repentance est la conséquence de cette grande joie que Dieu a préparée pour nous en Jésus-Christ et dans laquelle il veut que nous vivions. C’est en proclamant cette joie que Jacques nous appelle à la repentance, mais à une repentance joyeuse. Il n’a que faire de ces hommes et de ces femmes qui ne savent que gémir et se lamenter… Il veut des chrétiens vaillants, appelés à la joie et capables d’obéissance.
Aussi : « Soyez joyeux dans l’épreuve, soyez patients et persévérants jusqu’à la fin ». Nous sommes invités à marcher dans les traces de celui qui, parvenu au terme de la course, nous appelle, de celui qui est lui-même le chemin qui conduit au but. Il nous appelle et nous montre le chemin; nous pouvons nous mettre en route avec la force qu’il nous donne. Nous pouvons admettre, dès lors, qu’obéir à sa volonté est une grande joie. Car « son commandement est la vie éternelle », écrit saint Jean dans son Évangile (Jn 12.50). On peut être dans la joie quand on reçoit un commandement de Dieu. Dieu nous prend par la main, nous sommes à lui, il fait de nous ses serviteurs. Nous pouvons être à ses ordres.
Mais il y a une épreuve par laquelle nous devons passer. Chaque jour, nous nous remettons en route. Nous nous levons, la journée commence, nous allons vaquer à nos affaires. Et voilà que tout d’un coup, comme venant de l’enfer, un obstacle surgit. C’est peut-être une contrariété ou quelque chose qui va s’acharner sur nous, troubler les heures qui viennent, gâter notre journée… Ou quelque chose qui nous accable ou qui nous accuse; peut-être une angoisse ou une souffrance qui nous tombe soudainement dessus. Et aussitôt, l’éclat du jour que Dieu nous avait donné disparaît. Et nous voilà abattus, déprimés, en panne, misérables… Voilà ce qui nous arrive, dit Jacques. C’est alors qu’il dit aussi : « Considérez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves que vous pouvez rencontrer ». Faut-il se réjouir du mal et de l’inquiétude qui fondent sur nous? Certainement, car l’épreuve qui survient ainsi sur nous est un événement extrêmement important. C’est en effet ainsi que, dans la réalité concrète de notre vie de tous les jours, Jésus-Christ prépare pour nous la joie.
C’est dans de telles circonstances que la foi est mise à l’épreuve. Et si c’est important, nous n’avons pas le droit de nous lamenter, mais il nous faut considérer la seule chose qui compte : Nous appartenons à Dieu malgré tout, malgré l’épreuve et le malheur. L’épreuve aussi comme la joie nous met en communion avec notre Père. Comprenons-le donc bien. Il s’agit du renouvellement total de notre vie. Dans l’obéissance du commandement, nous acquerrons une position qui nous permet de recevoir le salut, la lumière, la conversion, toutes grâces qui nous sont données par Jésus-Christ de la part de Dieu le Père, qui est aux cieux.