L'histoire d'Israël dans l'Ancien Testament
L'histoire d'Israël dans l'Ancien Testament
- L’importance de l’histoire d’Israël
-
Les grandes étapes de l’histoire d’Israël
a. L’origine des Hébreux
b. Israël en Égypte
c. L’Exode
d. Moïse
e. La conquête de Canaan
f. La période des juges
g. Le règne de David
h. Salomon
i. La religion durant la première monarchie
j. Le schisme
k. L’Éternel ou Baal
l. Les guerres syriennes
m. Le déclin d’Israël
n. L’enseignement des prophètes
o. Le royaume de Juda durant la période assyrienne
p. Michée et Ésaïe
q. La réaction sous Manassé
r. Le règne de Josias
s. La chute de Jérusalem
t. L’Exil et la restauration
u. Le judaïsme après la restauration - Les nations voisines
- Les religions païennes mentionnées dans l’Ancien Testament
- Tableau synoptique de la chronologie de l’Ancien Testament
1. L’importance de l’histoire d’Israël⤒🔗
Dans l’histoire de l’évolution humaine, l’histoire du peuple hébreu occupe certainement une place exceptionnelle. D’autres peuples ont dominé de vastes empires et ont laissé derrière eux des monuments grandioses, tant littéraires que d’art et d’architecture. Néanmoins, c’est aux Hébreux que nous devons le rôle médiateur de la révélation divine; notre foi chrétienne dérive son origine et ses concepts théologiques du livre saint d’Israël. Si du côté séculier l’histoire intellectuelle occidentale plonge ses racines dans la culture gréco-romaine, du point de vue religieux, il reste dépendant du peuple de l’Ancienne Alliance. Sa profession de foi a gagné le monde civilisé et l’a profondément transformé.
Nombreuses sont les raisons pour lesquelles nous devons étudier l’histoire de ce peuple. Les récits bibliques sont essentiellement différents des pages qui ont été rédigées par des historiens profanes; ces récits portent leur intérêt sur un fait fondamental, celui des rapports de Dieu avec les hommes, et ils subordonnent le reste à ce rapport. Ceci explique que nombre d’événements sur le plan politique ou international, économique ou socioculturel sont passés sous silence, alors qu’est surtout soulignée l’expérience religieuse d’Israël. En outre, on constatera que des livres rédigés à des dates souvent fort éloignées les unes des autres furent réunis dans un même recueil, même si nous n’avons pas toujours de claire indication quant à la date précise de leur rédaction et des circonstances durant lesquelles ils furent composés.
De récentes découvertes archéologiques accordent une importance considérable à la place que ce peuple a occupée dans le concert des nations voisines.
Le présent chapitre traitera de cette histoire-là dans son rapport avec des mouvements internationaux, pour aborder ensuite le cadre d’où elle a émergé.
2. Les grandes étapes de l’histoire d’Israël←⤒🔗
a. L’origine des Hébreux←↰⤒🔗
Les Hébreux appartiennent à la branche sémite de la race humaine, branche dont on suppose que l’Arabie fut le berceau. Se dirigeant vers le nord et vers l’ouest, les peuples sémites s’établirent en Asie occidentale, notamment en Mésopotamie, entre le Tigre et l’Euphrate. D’après les premières inscriptions datant des 4e et 3e millénaires avant notre ère, ce furent des nations hautement évoluées tant du point de vue des idées et croyances religieuses que de celui de la civilisation matérielle.
Aux alentours de l’an 2400, les princes de l’antique cité de Babylone parviennent à instaurer leur hégémonie sur la plus grande partie de cette région et y fondent la dynastie dont Hammourabi est le plus célèbre représentant. On a identifié Hammourabi avec Amraphel (voir Gn 14.1). De ce fait, on pourrait fixer la date de l’épisode d’Abraham avec une quasi-certitude, soit vers la fin du 3e millénaire soit au début du second. Nous n’examinerons pas ces détails chronologiques qui sont passablement controversés par des savants; nous nous contenterons plus simplement d’indiquer les dates qui paraissent les plus probables. Nous basant sur celle-ci, il est possible qu’Abraham ait vécu au début même du second millénaire (1990).
Nous avons aussi la certitude qu’il fut l’ancêtre et le fondateur de la religion d’Israël; nous n’aborderons pas la question d’une éventuelle influence subie sur ce plan par les peuples parmi lesquels il a successivement séjourné.
La religion à cette époque lointaine de l’histoire de l’humanité, celle du Proche-Orient, était la source de toutes les activités intellectuelles; les sacrificateurs sont des guides dans tous les départements de la pensée. Mais la religion, même si elle était monothéiste, était pourtant source d’une très grande confusion. On connaît les dieux des cieux, ceux de la terre, les divinités des profondeurs (chthoniennes), d’autres qu’on considère comme patrons de la famille, pères, mères, fils et filles, les dieux locaux des villes et des hauteurs, ceux qui s’engagent dans les puissances naturelles, qui s’affrontent et s’entredéchirent, et créent ainsi une indescriptible confusion dans les mœurs et les faits contemporains. L’ensemble offre alors une vue affligeante d’un polythéisme grossier, foyer et fabrique de dégradantes superstitions.
Un regard attentif ne manquera pas d’observer aussi des éléments plus nobles. Ainsi, lorsque le penseur babylonien lève les yeux vers le ciel, d’une façon qui nous est familière, il observe le mouvement des corps célestes et y situe le siège des grands dieux. À ses yeux, la totalité de l’univers se divise en trois régions : d’abord les cieux septentrionaux dans lesquels l’étoile Polaire se consume sans cesse; ensuite la large ceinture du zodiaque s’étendant dans les cieux tout au long des cieux et à l’intérieur de laquelle on voit tous les mouvements du soleil, de la lune et des planètes où ils se meuvent; enfin, les profondeurs du midi. Au-dessus de ces régions, on trouve la triade des principaux dieux, Anu, Bel et Ea, lequel préside l’ensemble.
Pareillement, il existe une triple division dans le système zodiaque, présidé par la lune, le soleil et Vénus, l’étoile du soir. Il semble pourtant que la pensée d’un Dieu unique, dont toutes les autres divinités ne seraient que des manifestations, était sur le point de surgir. Ainsi Sin, la déesse-lune est saluée en des termes d’une assez grande élévation :
Seigneur, ordonnateur des lois du ciel et de la terre,
Dont l’ordre ne peut se briser,
Au ciel qui est suprême? Toi seul, tu es suprême!
Sur terre, qui est suprême? Toi, tu es suprême!
Les divinités locales elles aussi sont absorbées par Marduk, le conquérant de Babylone. On dirait presque s’approcher du degré de la révélation du vrai Dieu, sans toutefois l’atteindre. Le pas ne sera jamais franchi par la religion de Babylone. Dans la pensée mésopotamienne, le dieu même suprême n’est qu’une pâle abstraction et non une personnalité vivante, au caractère clairement défini.
Sur ce point précis, le récit relatif à Abraham prend tout son relief. Vivant au milieu de ces mouvances religieuses et intellectuelles, Abraham entend la voix de Dieu qui s’adresse à lui et découvre la communion avec le Très-Haut, un Dieu personnel et unique. Par amour pour lui, il quittera sa famille et son pays pour se diriger vers Canaan. La figure énigmatique de Melchisédek laisse entendre que des contemporains du patriarche hébreu aient pu faire à peu près la même expérience de la révélation. Pourtant, Abraham aura, parmi tous, la possibilité de la transmettre à ses descendants. Il aura fait de façon toute spéciale l’expérience de la communion personnelle et intime avec le Dieu des cieux et de la terre. Le Nouveau Testament (NT) lui rend ce témoignage : ses descendants suivront ses pas, plutôt que de choisir d’autres voies. Le Père céleste qui cherche ceux qui l’adorent en Esprit et en vérité l’a choisi pour faire de lui le père de tous les croyants.
b. Israël en Égypte←↰⤒🔗
Au bout d’une certaine période, pas facile à en préciser la durée et pendant laquelle les descendants du patriarche vécurent comme des nomades dans les pâturages s’étendant entre Hébron et Béerschéba, le midi du Juda (Gn 22.19 et 28.10), ceux-ci se rendirent au Goschen, dans la plaine alluviale des bords de l’Égypte. À l’époque, les Hyksos sont les maîtres du pays. Ce sont des rois-pâtres, vraisemblablement d’origine sémite; leur dynastie durera jusqu’au 16e siècle. La faveur dont les Hébreux furent les objets de la part de ceux-ci et la manière amicale dont ils furent reçus dans le pays s’explique par la parenté raciale entre les deux peuples. Mais lorsque les Hyksos furent expulsés, sans doute vers le milieu du 16e siècle, le nouveau monarque « ne connaissait pas Joseph » (Ex 1.8). Ainsi commence la période d’oppression dont les Hébreux seront les victimes malheureuses. On pense que ce fut Ramsès II, constructeur de la ville de Pithom (Ex 1.11), qui est le Pharaon oppresseur de l’Exode.
c. L’Exode←↰⤒🔗
La date de l’Exode a fait l’objet de nombreux débats. Des indications historiques extrabibliques laissent entendre comme date possible de l’Exode le début du 13e siècle. Avant cette date, la Palestine fut une province égyptienne, ainsi que le démontrent les tablettes d’El-Amarna; le contrôle égyptien dut être beaucoup trop ferme pour pouvoir tolérer une conquête hébraïque. Vint ensuite un temps de faiblesse royale et d’anarchie généralisée lorsque la surveillance des parties extérieures fut relâchée. Par contre, en s’appuyant sur 1 Rois 6.1 qui dit qu’il s’est écoulé 480 ans entre la sortie d’Égypte et le règne de Salomon, d’autres proposent une date plus ancienne, vers 1440 avant J.-C.
La présente introduction n’étant pas un commentaire du texte biblique, nous passerons outre la description des plaies ayant frappé le pays. Qu’il suffise de rappeler que le passage de la mer Rouge laissa une trace indélébile sur la mémoire collective israélite. Certains considèrent cette monumentale expérience comme le fait fondateur ayant donné naissance au peuple d’Israël. Ils ne l’oublieront jamais. Désormais, ils reconnaîtront également que le Dieu de leurs pères, d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, les a sauvés et arrachés de la maison de servitude, avec une main puissante et par son bras étendu.
d. Moïse←↰⤒🔗
Durant une période que l’on peut considérer comme assez longue, Ies Israélites séjournèrent dans le désert, dans le voisinage immédiat du Sinaï. C’est ici que la grande œuvre de Moïse, en tant que législateur, s’est accomplie. Durant le séjour dans le désert, la religion d’Israël sera organisée et prendra sa forme définitive. À partir de maintenant, il est le peuple élu de l’alliance. Le récit de la signature de celle-ci se trouve dans Exode 34. Cette alliance entre Dieu et Israël est un pacte religieux véritable, et non un simple lien national qui relierait entre elles les douze tribus. Elle témoigne de l’élection gracieuse de Dieu, lequel, ému de compassion, les avait délivrés et qui, à présent, leur promet de rester leur divin Protecteur et Guide. Moïse a reçu de Dieu même le Décalogue. On peut en résumer la théologie en quelques points :
1. Foi au Dieu personnel, révélé aux pères dans le passé et qui s’est à nouveau manifesté aux enfants. Son nom sacré est YHWH; il n’est pas lié à Israël par des liens ethniques, ce qui est le cas des divinités païennes, ni par une nécessité extérieure; au contraire, sa relation entre lui et son peuple élu se fonde sur son initiative gratuite et sur son propre choix libre. Aucune autre nation n’a jamais pu atteindre une telle conception de Dieu, à la fois personnel et universel.
2. Foi au Dieu dont les attributs fondamentaux sont la justice et la compassion. La force de Dieu dépasse de loin la puissance impériale d’Égypte, qui à vue humaine passe pour une superpuissance. Pourtant, la force de Dieu n’est pas une violence brutale; elle est mise au service d’une fin morale.
3. Ayant conclu une alliance, Dieu demande en contrepartie, de la part du peuple partenaire, une conduite juste, la justice, la bonté fraternelle entre l’homme et son prochain, etc. Ceci explique la particulière insistance sur le lien absolument indissoluble entre la religion et la morale. Bien qu’à ce stade-là et même durant les siècles après Israël pratiquera une religion au caractère plutôt national par sa nature constitutive, toutefois cette religion recèle les germes d’une théologie véritablement universelle qui seront éclos ultérieurement dans l’Évangile chrétien. Certes, ses grandes idées fondamentales seront très souvent oubliées, ensevelies sous d’épaisses couches païennes moralement perverties. Mais, en dépit de cette dégradation morale et spirituelle, ces mêmes vérités initiales rendront le peuple capable de résister à maintes reprises aux influences canaanites et lui assureront sa survie. Le triomphe de cet enseignement offre une ample preuve de sa mission d’être messager de Dieu.
e. La conquête de Canaan←↰⤒🔗
Une grande partie de la période de séjour dans le désert se déroulera dans Kadesh-Barnéa, au sud de Canaan, hors de portée égyptienne (Nb 13.26; Dt 1.46). Divers facteurs rendront l’invasion de Canaan possible. Plusieurs peuples étrangers, parmi lesquels des pirates de l’ouest, connus sous le nom de Philistins, balaient d’un bout à l’autre la terre palestinienne en cette époque. Ramsès III, lors d’une grande expédition, réaffirmera la suprématie égyptienne, mais ce sera la dernière intervention de l’Égypte durant plusieurs siècles. L’Égypte perdra la Syrie qui désormais deviendra le foyer de nombreux états-cités indépendants; la voie est ouverte pour une attaque décisive et pour la conquête de la terre promise.
Les premières campagnes seront menées à l’est du Jourdain où se trouve établi un royaume amorite avec Hébron comme capitale. Sihon, son souverain, est vaincu et tué, et son territoire occupé (Nb 21.21-25). Moïse mort, Josué assure la relève; le passage du Jourdain face à Jéricho et l’invasion à proprement parler commencent (voir Jos 1 à 3). En combinant les récits du livre de Josué avec ceux de Juges 1, nous apprenons que, grâce à la victoire du successeur du grand chef, le peuple mis pied en terre palestinienne.
Mais après la disparition de Josué, il restera encore beaucoup à faire. Des expéditions seront entreprises par des tribus séparées de Juda et de Siméon, de Joseph, de Zabulon, d’Asher, de Nephtali et de Dan (Jg 1). À la fin, les villes maritimes de Phénicie et de Philistie sont les seules à avoir préservé leur indépendance. Des forteresses puissantes telles que Taanach, Meguiddo, Bethshan (Jg 1.27) assureront à leurs habitants les plus riches contrées de la vallée de Kishon, tandis que des citadelles telles qu’Ajalon, Jébus, Gézer, sont coupées de Juda et de Siméon et presque totalement du reste d’Israël. De récentes découvertes paléontologiques ont prouvé que ces cités conservèrent en effet leur indépendance durant plus de deux siècles après l’invasion.
f. La période des juges←↰⤒🔗
La date récente assignée à l’Exode ramène cette période à moins de deux cents ans, sans doute ayant pris fin vers 1050. Les campagnes militaires en vue de l’émancipation sous Déborah et Barak (Jug. 4-5), Gédéon (Jug. 6 à 8) montrent que le peuple est toujours rallié à l’Éternel. Néanmoins, la religion du pays conquis exercera aussi une influence néfaste sur celle des conquérants. Plusieurs autels demeurent sur des hauts lieux jadis consacrés au culte des divinités locales; désormais, ils seront adoptés pour le culte de l’Éternel. Mais cette adoption en soi innocente devint source de multiples maux ultérieurs, ainsi qu’en témoignent les écrits prophétiques.
Dans l’ensemble, Israël aura appris, au prix d’une lutte incessante, à défendre la patrie et l’exercice libre de la religion afin que des générations futures puissent également conserver l’acquis et la place sacrée qui revient à la religion du Dieu révélé. Le cantique de Déborah est unanimement reconnu pour dater de cette époque des juges et prouve de manière éclatante aussi bien la forte conscience d’unité nationale que la vigueur de la foi au vrai Dieu, celui de l’alliance.
La période s’achève par l’oppression exercée par les Philistins. Ce peuple audacieux et guerrier, au point de vue militaire, est de loin supérieur aux Hébreux. Il cherche à se soumettre Israël. Shamgar (Jg 3.31) et Samson (Jg 13 à 16) sont les héros populaires de cette époque qui, par des actes vaillants, entament la puissance des bandes de maraudeurs philistins. Mais à la longue, les Hébreux seront incapables de résister à des attaques successives. Après la capture de l’arche de l’alliance à Aphek, près de Mitspa (1 S 4), le déclin national semble imminent. L’oppression philistine s’étendra sur le centre et le sud du pays conquis et le recours aux armes leur sera strictement interdit (1 S 13.3,19-23).
g. Le règne de David←↰⤒🔗
Après un intervalle de sept ans, durant lesquels David aura régné sur Juda seulement, à Hébron, alors que les partisans de Saül, le roi déchu et disparu, auront choisi comme quartier général Manahaïm, au-delà du Jourdain (2 S 2.4-11), et après l’assassinat de Ischbosheth, le successeur de Saül (2 S 4.5-7), David accédera au trône et deviendra le souverain du peuple unifié (2 S 5.1-3). Son règne sera marqué par la conquête de tout le territoire palestinien; désormais, les Philistins ne joueront plus qu’un rôle effacé; des conquêtes sur des peuples avoisinants marqueront l’établissement d’un mini-empire israélite (2 S 8.2-14), la prise de Jérusalem et le transfert de l’arche de l’alliance (2 S 5.6-10 et 6.12-19). À cette époque, l’Assyrie est pour l’heure une puissance négligeable et l’Empire hittite au nord est disparu, alors que l’Égypte est divisée et sans force menaçante. Ces facteurs expliquent le développement presque prodigieux de la monarchie sous David.
h. Salomon←↰⤒🔗
Le règne de Salomon, son fils et successeur, est notamment marqué par la construction du Temple dans la capitale à Jérusalem, mais aussi par une remarquable prospérité économique. Cependant, ses efforts en vue de limiter les libertés et de réduire les sujets au statut de sujets d’un potentat oriental causeront une profonde et inquiétante insatisfaction générale et causera, après sa mort, la division de la monarchie (1 R 5.27-32; 11.26-40).
i. La religion durant la première monarchie←↰⤒🔗
Les conditions religieuses de cette période nous sont assez bien connues grâce à des fragments d’histoire conservés intacts. La loi stricte du sanctuaire central nous est familière. Samuel offrait des sacrifices à Mitspa, avait bâti un autel à Rama, sacrifié sur des hauts lieux, à Guilgal et à Bethléem. Du passage de 1 Samuel 14.35, nous apprenons que Saül, lui aussi, avait bâti plus d’un autel en l’honneur de l’Éternel, offrant la preuve de sa loyauté à son culte. Le passage de 1 Samuel 20.6 est une référence toute naturelle aux premiers sacrifices de la famille de Jessé à Bethléem. La manière simple dont nous parviennent ces informations montre qu’elles ne traitent pas des faits inhabituels, mais qu’au contraire elles rapportent une pratique bien courante (voir aussi Ex 20.24). Simultanément, les prophètes tels que Nathan ont maintenu le caractère moral des prérogatives de l’Éternel et seront traités avec le plus grand respect (2 S 12.1-15). Avec l’établissement du royaume de David, l’espoir se lèvera d’un royaume perpétuel de l’Éternel, espoir qui tiendra une grande part dans les écrits des prophètes ultérieurs (2 S 7.1-17).
j. Le schisme←↰⤒🔗
La rupture eut lieu en 937 avec la division en deux de la monarchie davidique. C’est sous le règne de Roboam, fils et successeur de Salomon, que les dix tribus se révoltèrent contre l’état central pour former désormais le royaume dit d’Israël ou du Nord, laissant Juda et une partie de Benjamin former le royaume de Juda ou du Sud. Ce dernier fut relativement insignifiant, sans jouer un rôle international majeur, grandement affaibli aussi par l’invasion de Chichaq l’Égyptien (1 R 14.25-26). Des listes égyptiennes du temple d’Amon à Karnak mentionnent aussi cette attaque. Du fait que des cités éphraïmites lui ont payé un tribut, on peut supposer que, durant une certaine période, aussi bien Juda qu’Israël furent assujettis au régime de tributaires de l’Égypte. Cependant, nous n’avons aucune trace de récit d’une attaque contre Israël. Durant une certaine période, les deux royaumes se sont trouvés engagés dans un conflit armé, Israël au Nord étant le plus fort des deux.
Un pas décisif sera pris par Asa de Juda qui, aux environs de l’an 900, appellera à son aide Benhadad, de Syrie, contre Baasha (1 R 15.18-21). La condamnation de cette démarche (2 Ch 16.7-9) est amplement justifiée, car elle offrit pour la première fois l’occasion à une invasion étrangère en territoire israélite, celle de l’armée syrienne. À la suite de plusieurs révolutions de palais, ou des menées par l’armée, une dynastie suffisamment forte sera établie par Omri (1 R 16.23-28). Omri fait construire la Samarie et y transfère la capitale du Nord. Sous son règne, la paix entre Juda et Israël est conclue et les deux maisons royales s’allient par des mariages. (La pierre moabite, un monument archéologique datant de cette époque, porte une inscription due à Mesha, montrant qu’il s’était soumis à Moab). D’autres références sont faites aussi dans des inscriptions assyriennes qui le tiennent pour le fondateur du royaume d’Israël. Mais le silence des récits bibliques est une illustration de l’indifférence des auteurs sacrés pour des intérêts purement politiques et temporels.
k. L’Éternel ou Baal←↰⤒🔗
Sous Achab, fils d’Omri, surgira l’un des conflits les plus dramatiques et les plus décisifs entre le prophète Élie et les prêtres païens de Baal. Pour des raisons toutes politiques, Jéroboam, le fondateur réel du royaume d’Israël, avait introduit à Dan et à Béthel des images en or du veau en l’honneur de l’Éternel. Mais sous l’influence de cette pratique syncrétiste, la religion officielle s’est vite détériorée. La conscience du peuple s’y est régulièrement opposée. Même au nord, le culte vrai est maintenu et sont aussi maintenus les autels. Les passages de 1 Rois 19.10 et l’action du prophète Élie d’après 1 Rois 18.30 en sont les preuves.
Cependant, lorsque l’épouse phénicienne d’Achab, Jézabel la mal famée, princesse de Sidon, cherche à instaurer le culte du Baal tyrien et se met à persécuter les fidèles de l’Éternel (1 R 16.31-33; 18.4), Élie s’avance comme défenseur du culte véritable. La question n’est plus au sujet d’un culte plus ou moins impur, mais celle de vie et de mort. Ou bien c’est l’Éternel qui est le Seigneur, ou bien c’est Baal. Ceci explique la sévérité avec laquelle Élie cherchera à imposer le culte de l’Éternel (1 R 18.40), de même que le rôle tenu par Élisée, son successeur, dans l’instigation de la révolution aboutissant au renversement de la maison d’Omri et à l’accession de Jéhu au trône (2 R 9).
l. Les guerres syriennes←↰⤒🔗
Cette période de conflit religieux sera marquée par d’incessantes guerres avec la Syrie, qui avaient déjà été inaugurées par l’invasion sous Baasha. Les souverains d’Israël sont réduits à la position de vassal (2 R 20.3); selon les inscriptions contemporaines, en 854, Benhadad de Syrie, en compagnie d’Achab, fournira un contingent de 2000 chars militaires et 10 000 hommes; mais l’armée alliée sera écrasée près d’Hamath par les forces de Salmanasar II d’Assyrie. Plus tard, Achab parviendra à assurer l’indépendance de la monarchie contre l’hégémonie syrienne et remportera même quelques victoires (1 R 20). À cette époque, la Syrie est passablement affaiblie du fait des campagnes assyriennes contre Damas (en 850, 849, 846). En 842, le monarque assyrien reçoit un tribut de la part de Jéhu et, en 839, il remporte une nouvelle victoire contre Hazaël de Syrie.
À cette même époque, une insurrection fomentée par le fils du monarque assyrien forcera ce dernier à chercher refuge au nord de Babylone, offrant à la Syrie un bref répit et l’occasion de reprendre le souffle. Mais des invasions répétées ont réduit Israël à une position d’extrême dépendance (2 R 10.32; 13.3-7; 14.26).
Sous Ramman-Nirari (812-783), l’Assyrien, Damas est de nouveau soumis, et sous le règne de Joas et de Jéroboam II, le prestige perdu d’Israël est rétabli et des territoires perdus sont regagnés (2 R 13.14-25; 14.25-28). Lors de ces victoires militaires, Élisée apparaît comme un vaillant et vigilant patriote exceptionnel (2 R 13.14-20). Sous Jéroboam II (782-741), Israël jouira d’une période de prospérité qui n’avait pas eu son égale depuis l’époque de Salomon.
La succession légitime du royaume du Sud, ayant agi comme un allié fidèle d’Israël aussi bien contre la Syrie que contre Moab (1 R 22; 2 R 3), sera interrompue par l’usurpation du trône par Athalie (2 R 11), mais sera restaurée avec Jehojada. Amasia, rompant l’alliance avec Israël, est désastreusement écrasé par Joas (2 R 14.8-14). Sous Osias (790-749), Juda a retrouvé sa position et a vaincu les Philistins (2 Ch 27.6), tandis que l’armée, elle, est réorganisée (2 Ch 27.13-14) et des tours sont bâties au long des frontières pour servir de fortifications ou de barrières aux incursions des nomades du désert (2 Ch 27.10).
m. Le déclin d’Israël←↰⤒🔗
La mort de Jéroboam II met fin à la période de prospérité dont jouissait le royaume du Nord. Des révolutions répétées ont affaibli sa force (2 R 15.10-14). Pendant ce temps, sous Tiglath-Piléser III (connu aussi sous le nom de Pul dans 2 R 15.19), l’Assyrie poursuit sa politique expansionniste et agressive; Menahem d’Israël lui doit un lourd tribut (2 R 15.19-20). En 734, Pékah s’allie à Rézin le Syrien; ensemble ils envahissent le territoire de Juda, apparemment ou sous prétexte de le forcer à se joindre à eux dans leur expédition coalisée contre l’Empire assyrien. Cependant, Israël sera dévasté (2 R 15.29). L’assassin de Pékah, Osée, est le vassal de Tiglath-Piléser, mais ses intrigues avec le roi égyptien (2 R 17.4) entraînent un châtiment sans délai. Salmanasar IV marche de nouveau contre Israël, mais il meurt durant le siège de la Samarie. Son œuvre sera achevée par son successeur Sargon, lequel en 722 pénétrera en Samarie et mettra définitivement fin au royaume du Nord.
n. L’enseignement des prophètes←↰⤒🔗
Une lumière éclatante brille sur toute cette époque mouvementée, par moments tragiques, grâce aux oracles d’Amos et d’Osée. Le premier apparaît sur scène sous Jéroboam II. Il affirme avec force le droit moral de l’Éternel, lequel s’impose non seulement à Israël, mais encore aux peuples environnants. Il répudie sans concession le culte rituel célébré à Béthel et prédit la ruine imminente de la nation. Le seul espoir qu’il entrevoit pour le futur est celui de la restauration du royaume sous un roi davidique (Am 9.11), après qu’un lourd châtiment lui sera infligé.
Osée, dont le ministère s’exerça durant les jours sombres après la mort de Jéroboam II, et dont l’histoire personnelle tragique est la clé même de son message, fait résonner une autre note, mais lui aussi répète la prévision du châtiment, voire celle de la ruine finale. Il traite d’idolâtrie le culte du taureau (Os 8.4). Le fait que c’est l’amour plutôt que la justice de Dieu qu’il souligne dans son message rend les menaces proférées plus redoutables encore. Pourtant, par delà l’orage, il aperçoit aussi la permanence du Royaume de Dieu (Os 3.5).
L’importance du témoignage de ces deux prophètes est considérable. Ils ont apparu non comme des innovateurs, mais en tant que les restaurateurs et les réformateurs de la foi en l’Éternel. Leur enseignement fait essentiellement un avec celui de Moïse. Mais la hardiesse avec laquelle ils présentent l’Éternel comme le Dieu de l’univers, et leur inébranlable conviction qu’aucun privilège passé ne servira d’abri et de sauvegarde pour le peuple des conséquences de ses multiples transgressions, élargissent et approfondissent les fondements de la vraie religion. Il convient d’ajouter qu’il est extrêmement difficile de croire, ainsi que l’on a suggéré, qu’Osée aurait principalement dénoncé le culte idolâtre voué à l’Éternel, et non l’idolâtrie elle-même!
o. Le royaume de Juda durant la période assyrienne←↰⤒🔗
Avec la chute d’Israël, au nord, Juda dépend pour son existence des bonnes grâces de l’Empire assyrien. Malgré les véhémentes protestations du prophète Ésaïe, Ahaz a librement imité aussi bien les coutumes sociales que les pratiques religieuses du conquérant (2 R 16.10-16). Son fils Ézéchias a succédé dans un temps bien troublé. Au sud, les Éthiopiens d’Égypte accroissent leur pouvoir, ils cherchent à s’allier avec lui. Cette politique de rapprochement avec ces nations fut énergiquement dénoncée par Ésaïe (És 30.1-7; 31.1-40). Le prophète conseille de se tenir à l’écart de la politique expansionniste de l’Assyrie en se confiant uniquement à l’Éternel.
Cependant, Ézéchias poursuit sa politique d’alliance avec l’Égypte, la puissante voisine. Il mène des négociations avec Mérodach-Baladan (2 R 20.12-19) lequel, dès 721-710, avait réussi à s’établir à Babylone et cherché à former avec Tyr, Sidon, Askalon et Ekron une coalition contre l’Assyrie. Mais l’avance fulgurante de Sennachérib, successeur de Sargon, a brisé cette coalition. L’Égypte fut vaincue à El-Tekeh, près d’Ekron, et Ézéchias, après la perte de 46 cités et de plusieurs sujets, parvint à sauver et à conserver Jérusalem au prix d’une énorme rançon (2 R 18.14-16).
Les récits bibliques qui suivent ne sont pas toujours très clairs dans tous les détails qu’ils rapportent en relatant ces événements. Les monuments de l’époque ne disent pas davantage sur le désastre subi par l’armée assyrienne et certains ont émis l’hypothèse selon laquelle celui-ci se serait produit plus tard, lors d’une campagne dont on ne posséderait aucune mémoire. Le fait que Jérusalem ne fut pas prise demeure sans explication humainement possible. La plus probable étant qu’après avoir perçu la rançon d’Ézéchias, une division de l’armée de Sennachérib se tourna traîtreusement et exigea la reddition de la ville. Le corps principal de l’armée se trouvait cependant aux frontières de l’Égypte, où elle fut frappée par la plaie que l’on sait, et Sennachérib dut rentrer précipitamment au pays. Cette délivrance en 701 avait été prédite par le prophète Ésaïe (És 31.5; 37.33-5) qui considérait que Jérusalem, la ville de Dieu, ne saurait tomber entre les mains des païens.
p. Michée et Ésaïe←↰⤒🔗
Deux autres prophètes jetteront de nouveau une vive lumière sur la période troublée. Michée est originaire de la campagne, il dénonce vigoureusement les maux sociaux de la paysannerie et prédit à son tour la chute de Jérusalem (Mi 3.12). Cependant, il a cru aussi en la permanence du règne divin et attendit un autre Roi comme David, issu du peuple, capable de restaurer l’état ruiné (Mi 5.2).
Ésaïe, lui, considère les châtiments répétés comme infligés par Dieu; une petite minorité y échappera (És 6.11-13). Mais son espoir d’un royaume parfait sera un témoignage porté à Emmanuel (És 7.13-16) ainsi que la promesse du Prince qui portera quatre noms d’excellence (És 9.6-7), lequel régnera sur un âge millénaire marqué par la paix et la bénédiction. Il est appelé le rameau de Jessé, du nom du père de David (És 11.1-10).
Durant le règne d’Ézéchias, des tentatives partielles avaient été faites pour détruire les hauts lieux et pour ramener le centre du culte à Jérusalem; malheureusement, cette œuvre de réforme n’a pu être menée à bien (2 R 18.14-22).
q. La réaction sous Manassé←↰⤒🔗
Le long règne de Manassé (692-641), son fils, bien extérieurement prospère, aura été marqué par la recrudescence du paganisme dans lequel l’œuvre accomplie par Ésaïe sera défaite (2 R 21.1-17). Vers la fin de son règne, il s’engage pourtant dans une opposition contre le vice-roi de Babylone et, du fait, il sera amené captif pour expier son crime d’insoumission (2 Ch 33.11-13). La survie de la foi véritable est possible grâce au livre de la loi, en particulier le Deutéronome.
r. Le règne de Josias←↰⤒🔗
Josias (639-608) succède à Amôn, son père, après la mort violente de celui-ci. Il débute sous des auspices favorables. L’invasion de l’Asie occidentale par des hordes scythes a probablement suscité les anticipations plutôt sombres de Sophonie qui s’attend à l’avènement du jour de jugement universel. Cependant, ces invasions ébranleront sérieusement la puissance assyrienne et laisseront Juda assez libre pour suivre son propre destin sans l’interférence de cette dernière. Les premières prophéties de Jérémie datent de cette époque. Une tentative sérieuse de réforme religieuse est entreprise et la découverte du livre de la Loi contribue magistralement à celle-ci (2 R 22.8). Se fondant sur les instructions qui y sont contenues, les hauts lieux où on célèbre encore le culte de l’Éternel de façon semi-païenne sont détruits; le Temple devient le sanctuaire central (2 R 23.4-15).
Pendant ce temps, l’Assyrie se précipite vers sa chute tandis que Ninive est assiégée par Babylone et les Mèdes, et le Pharaon Néko d’Égypte marche vers le nord pour conquérir l’empire du monde. Dans sa résistance à celui-ci, Josias est vaincu et tué à Meguiddo en 608 (2 R 23.29-30). Ninive tombe à son tour et sa défaite cause également l’écrasement de l’Égypte, lors de la célèbre bataille de Carkémish sur les bords de l’Euphrate. En 605, Nébucadnetsar de Babylone devient le maître incontesté du monde de la région. Durant une très brève période de la supériorité égyptienne sur la Palestine, Jehoahaz sera déposé et Jehoiachin, son successeur, après quatre mois de règne seulement, sera amené captif à Babylone (2 R 24.1; 2 Ch 36.6). Trois mois plus tard, son successeur Jehojakim est également pris et amené avec la fleur de la nation, y compris le prophète Ézéchiel (597) (2 R 24.8-16).
L’essentiel du message prophétique se trouve dans le livre de Nahum qui, avec une certaine exaltation, attend la chute de Ninive; de même dans celui du prophète Habacuc qui regarde le monde ruiné et déclare tout conquérant coupable, tout en proclamant avec une merveilleuse assurance que le juste vivra par la foi (Ha 2.4). La partie centrale du livre de Jérémie relate un ministère héroïque exercé pendant cette période de la fin du règne de Juda.
s. La chute de Jérusalem←↰⤒🔗
En rejetant les avertissements de Jérémie, Sédécias, le dernier souverain du petit royaume du Sud, s’était engagé dans des complots contre Babylone (Jr 27.1-11; Éz 17.15). L’inévitable conséquence sera la prise définitive de Jérusalem et la fin du royaume. Jérémie avait depuis longtemps prédit la destruction de la capitale et payé par l’oppression qu’il subira pour son audace. Après un siège de 19 mois, la ville est prise et détruite, y compris le Temple. La personnalité noble de Jérémie constitue un trait lumineux exceptionnel durant cette fin lamentable de l’indépendance de Juda.
Malgré ses déclarations de ruine, le prophète regarde vers l’avenir, vers un temps où une nouvelle fois Jérusalem deviendra la capitale et le trône de l’Éternel (Jr 3.17), bien qu’il ait annoncé à Jéhojakin que personne de sa lignée ne survivra pour accéder au trône. Mais il espère que l’Éternel lèvera une branche fidèle issue de David; son espoir est plus fort que son désespoir. La plus grande parole prononcée par Jérémie est sortie de son emprisonnement. Tandis que les armées ennemies assiègent Jérusalem, il parle d’une alliance nouvelle entre Dieu et le peuple, alliance inscrite sur les cœurs (Jr 31.31-34).
Cette grande et dramatique histoire s’achève donc par une parole d’espérance et de rétablissement. L’idée de la religion va au-delà du pur formalisme. Bien que les prévisions d’un royaume ne furent pas matériellement réalisées, néanmoins elles reçurent leur accomplissement plus solidement et glorieusement lors de l’apparition du Fils de Dieu. La foi de son nouveau peuple place en lui son espérance du Royaume éternel de Dieu. Nous attendons donc le rétablissement définitif de ce Royaume de paix et d’ordre lors de l’avènement futur de notre Seigneur et Sauveur.
t. L’Exil et la restauration←↰⤒🔗
L’exil en Babylonie (586-538) a été pour le peuple d’Israël un temps d’épreuves douloureuses. Sans doute l’élite du peuple emmenée de force loin de Jérusalem ne fut-elle pas longtemps réduite en esclavage. Assez vite, ces déportés parvinrent à s’organiser et à travailler pour leur propre compte; plusieurs acquirent l’aisance et même la richesse. Mais ils se sentaient captifs, retenus loin de leur patrie, loin du Temple, et par cela même (selon la conception de beaucoup en ce temps-là) loin de Dieu. Cette épreuve fut précisément le creuset où se forgea la communauté juive, dont la pensée religieuse, la piété et la foi allaient s’approfondir au cours des siècles suivants.
Les textes bibliques qui nous font connaître cette période ainsi que des événements du retour en Judée sont :
1. Des documents historiques, rares d’ailleurs : Quelques chapitres narratifs de Jérémie (Jr 39 à 44 et 52), quelques indications dans les Lamentations et le livre d’Ézéchiel, et surtout les livres d’Esdras et de Néhémie qui nous fournissent des renseignements sur l’Exil, le retour d’une partie de la population lors de l’édit de Cyrus et la restauration (reconstruction du Temple et des murailles de Jérusalem; réorganisation de la vie sociale et religieuse des Juifs).
2. Des documents prophétiques, plus riches : Les prophéties d’Ézéchiel qui a vécu à l’époque de l’Exil, qui a dû partir en Babylonie avec un des premiers convois d’exilés et qui, par ses discours et ses perspectives d’avenir, a exercé un ministère d’avertissement, de consolation et d’espérance parmi les captifs découragés; les prophéties qui se trouvent dans la deuxième partie du livre d’Ésaïe et qui annonce le retour et la restauration du peuple de Dieu, ainsi que la mission qu’il aura à remplir comme témoin de Dieu parmi les nations. Ces pages sont parmi les plus belles de l’Ancien Testament (AT). D’autres livres prophétiques de moindre envergure sont contemporains du retour et de la restauration, en particulier Aggée, Zacharie et Malachie.
u. Le judaïsme après la restauration←↰⤒🔗
Les 500 ans qui séparent la restauration de Jérusalem de la naissance de Jésus ne sont pas racontés dans les livres historiques de la Bible. Ces 500 ans ont pourtant été extrêmement riches en événements; autour de la Palestine, les empires se sont faits et défaits.
À l’Empire perse assez tolérant à l’égard des Juifs a succédé l’Empire d’Alexandre le Grand. À sa mort (323), lorsque ses généraux se sont partagé ses conquêtes, la Palestine est revenue d’abord aux Ptolémées, suzerains de l’Égypte. Puis, les Séleucides, chefs de la Syrie, en sont devenus les maîtres, et Antiochus Épiphane, roi de Syrie de 175 à 164, a voulu imposer aux Juifs la culture et même les idoles helléniques. La résistance des Juifs fidèles prit corps lorsque la famille des Hasmonéens (dits les Maccabées, c’est-à-dire le « Marteau ») prit les armes et obtint pour le peuple une semi-autonomie religieuse et politique.
Pendant 100 ans, Jérusalem fut dirigée par leurs descendants que soutinrent fortement les partis attachés à la tradition (pharisiens). Mais au milieu du 1er siècle avant J.-C., de terribles querelles entre le sacerdoce et les princes Hasmonéens permirent l’intervention des Romains (Pompée) dans les affaires juives et la désignation d’Hérode, l’Iduméen (ou Édomite), comme roi de Jérusalem, sous le protectorat romain.
Ces circonstances tragiques, ces alternances d’espérance nationale et d’oppression, l’intense étude de la Bible dans les synagogues, sous l’influence des scribes et des pharisiens, ont fait des derniers siècles avant notre ère un temps d’ardente vie spirituelle où l’attente du Messie, la méditation des grâces reçues dans le passé et du mystère de l’actuel abaissement du peuple de Dieu primaient dans les masses croyantes sur le souci de la vie matérielle et favorisaient le développement d’une très vive piété.
L’histoire proprement dite de cette période ne nous est connue que par des écrits extérieurs à la Bible (Histoire juive, de Flavius Josèphe) ou par les livres apocryphes des Maccabées.
Mais une abondante littérature se développait aussi et, utilisant les prophéties anciennes et le langage symbolique alors en usage (chiffres, emblèmes, etc.), traçait de grandes fresques de l’histoire du monde, récapitulant les civilisations passées et les événements à venir jusqu’au jugement dernier. Ce sont les apocalypses, attribuées généralement à des hommes de Dieu du passé : Ésaïe, Hénoc, Baruch. Elles apportaient aux Juifs opprimés ou persécutés un message de confiance et de foi en annonçant les fins prochaines de ce monde mauvais, l’établissement du Royaume de Dieu et la résurrection des morts lors de l’avènement du Messie. Sous cette même forme apocalyptique, Jean apportera, à la fin du NT, le couronnement mystérieux et puissant de toute la révélation.
D’autres livres ont nourri la piété des derniers siècles du judaïsme, tels les recueils des Psaumes ou des Proverbes, le livre de Job ou l’Ecclésiaste. Ces livres alimentèrent la ferveur des croyants tant dans les cérémonies religieuses publiques que dans la méditation individuelle. L’on y trouve constamment sous-jacente la pensée de la justice de Dieu qui prend soin de ceux qui l’aiment et leur donnera finalement récompense et pleine clarté sur le mystère de ses dispositions.
(Pour l’histoire de la période intertestamentaire, consulter notre Introduction au Nouveau Testament).
3. Les nations voisines←⤒🔗
L’aperçu historique consacré aux origines et au développement des Hébreux nous a déjà familiarisés avec certains peuples et nations voisins d’Israël.
Pour commencer, notons encore que l’ensemble du Proche et du Moyen-Orient, connu aussi comme le Croissant fertile, a été le théâtre de migrations de divers peuples d’origines et de cultures différentes.
Parmi les voisins les plus immédiats se trouvent ceux qui ont la même origine raciale. Les Édomites au sud-est occupent le Séir, la région d’Araba et de Petra. Moab occupe le nord (à l’est de la mer Morte). Ammon, sans doute l’actuel Aman, se trouve en l’actuelle Jordanie.
Plus au nord, on rencontre de minuscules royaumes araméens de Damas et de Hammath. Ces peuples voisins et parents rendront l’existence d’Israël bien pénible, en créant constamment des conflits et en se livrant à de fréquentes incursions et des pillages.
Au nord-ouest se trouvent les Phéniciens; c’est un peuple de marins et de commerçants qui, dans tout le pourtour de la Méditerranée, a établi des comptoirs et des colonies; leurs villes les plus célèbres sont Byblos, Tyr et Sidon.
Ces peuples et nations peuplant la terre de Canaan se caractérisent par une certaine unité culturelle et religieuse. La langue cananéenne constitue le lien principal qui établit ou forme cette unité.
Au sud-ouest, les Philistins se sont fixés sur les régions côtières, presque simultanément à l’arrivée des Hébreux. Leur religion et leurs coutumes diffèrent des peuples précédemment mentionnés et se rapprochent de celles de la Grèce et de la Crète. Les Philistins sont aux yeux des Israélites de véritables étrangers.
Parmi les grandes puissances, il convient de mentionner les pays suivants :
L’Égypte. Vers l’an 3000, elle est la puissance mondiale avec sa civilisation parmi les plus brillantes qu’a connue l’antiquité. Depuis toujours, ses souverains, les Pharaons, ont cherché à pénétrer et à s’emparer de la Palestine, qui durant plusieurs siècles fut placée sous leur protectorat. Les rois de Juda seront soit leurs alliés, soit leurs vassaux.
La Mésopotamie (Mésopotamie en grec signifie entre des fleuves) est un pays plus complexe; des races et des ethnies diverses s’y côtoient; des empires s’y succèdent et se combattent. Le premier sera l’Empire assyrien, souvent en rapport avec la Palestine et les Israélites. Sa véritable expansion commencera au 9e siècle. Il envahira la Samarie et mettra définitivement fin au royaume des dix tribus d’Israël. La population y sera déportée et il imposera au minuscule royaume de Juda sa suzeraineté. En 608, l’Assyrie est écrasée et fait place à une nouvelle puissance, celle de Babylone, que dominent les Chaldéens. Nébucadnetsar mettra fin aussi bien au puissant empire assyrien qu’au royaume de Juda. Babylone ne fera pas long feu puisqu’en 538 Cyrus le Mède se la soumettra. La nouvelle puissance médo-perse sera plus tolérante que les précédentes pour les cultures et les religions ethniques. Toutefois, avant même la conquête mésopotamienne au 6e siècle, la Palestine se trouvait en rapport avec les principautés de la Basse-Mésopotamie, exerçant une vaste influence sur toute la région. Elle a de la sorte connu la domination des Sumériens, des Akkadiens, des Amorites, des Hourrites, des Assyriens, des Chaldéens, des Perses. On peut donc conclure que la Mésopotamie n’a jamais connu de rayonnement homogène et constant.
Le monde grec est la dernière puissance avant l’apparition sur la scène mondiale de Rome, qui se sera fait connaître en Palestine après la disparition d’Alexandre le Grand et le partage de son empire par les deux dynasties établies sur cette partie-là, les Ptolémées en Égypte, les Séleucides en Syrie. Rappelons-nous que, dès la fin du 2e millénaire, la Palestine avait connu l’influence de la civilisation égéenne, grecque, influence qui ira en croissant sous l’hégémonie perse. Notre Introduction au Nouveau Testament a déjà donné un aperçu du monde hellénistique, celui des successeurs d’Alexandre.
Les deux dynasties déjà mentionnées façonneront le Croissant fertile, y laissant au cours des 3e et 2e siècles une forte marque culturelle.
La langue grecque, « la koinè », sera la principale langue utilisée durant cette période, non seulement autour du bassin de la Méditerranée, mais encore en Palestine proprement dite. Mais l’influence de la culture et de la civilisation hellénistique s’exercera notamment sur la diaspora, c’est-à-dire la dispersion juive.
4. Les religions païennes mentionnées dans l’Ancien Testament←⤒🔗
Tout lecteur attentif de l’AT remarquera le nombre et la variété des formes de l’idolâtrie avec lesquels Israël dut se trouver en contact, parfois complice. Ce contact ne fut donc pas extérieur et superficiel, car il a exercé sur le peuple de l’alliance un effet des plus néfastes que n’ont pas manqué de dénoncer les prophètes. C’est seulement à la suite du désastre national survenu en 586 qu’Israël se résoudra à se maintenir pur.
Quelles sont les origines du grossier paganisme palestinien? Une certaine opinion prétend qu’il faut la chercher dans le culte des ancêtres. Une autre admet l’association de ce culte avec celui des animaux. Une autre la cherche dans l’adoration d’un monde grouillant d’esprits, dans des rêves, des expériences où se manifestent les esprits, leur pouvoir sur la nature, quand ils séjournent dans des arbres, en des animaux, quand ils animent des sources, des rivières, poussant les vents, déclenchant l’orage. Il serait prudent toutefois d’étudier le culte et les croyances de chacune de ces ethnies de manière séparée.
Dans Josué 24.2, il est rappelé que les ancêtres d’Israël avaient servi d’autres dieux, ce qui nous fait songer à la religion dont Abraham est issu. En Mésopotamie, ou Babylone, se trouvent deux types de croyances et de pratiques religieuses. L’une d’entre elles reconnaît un nombre infini de divinités dont chacune a ses pouvoirs et son nom propre. Des fouilles archéologiques ont permis la découverte d’une tablette de terre cuite portant des inscriptions des deux côtés et comportant 150 lignes, dont chaque colonne contient plus de 150 noms de divinités! Celles-ci sont présentées sous des formes et avec des attributs humains. Les plus grandes sont dotées d’un pouvoir exceptionnel, quoique elles-mêmes restant soumises aux mêmes passions que des humains mortels. Cependant, leurs passions s’expriment sur une échelle bien plus large que celle où se jouent celles des mortels. Chaque Babylonien aurait rêvé pouvoir les imiter! Ces dieux sont tout simplement des êtres humains magnifiés.
D’autre part, ces divinités apparaissent aussi comme la personnification des forces naturelles. Ainsi, à l’une est attribuée le mouvement du soleil, à une autre les changements des phases lunaires, à une autre encore celui de déclencher des orages et des tempêtes. Chaque ville possède son dieu-patron et lorsqu’une ville prouve et exerce sa supériorité sur une ville rivale, les divinités de cette dernière sont considérées d’un pouvoir et d’un rang moindres.
Les trois principales divinités sont Anu, dieu du ciel; En-lil ou Bel, dieu de la terre et de l’humanité; Ea qui préside les abîmes et les eaux. Vient ensuite la déesse lune Sin et le dieu soleil Shamash; Rammân est le dieu de l’atmosphère. La puissance babylonienne comme pouvoir suprême donne à sa divinité locale, Marduk, la supériorité sur toutes les autres divinités connues. Marduk est identifié avec Bel l’Ancien, ou Nébo, le dieu de Borsippa qui sera considéré comme le ministre, car Borsippa descendra au rang de banlieue de la capitale (voir És 46.1).
À l’exception d’Ishtar, la déesse babylonienne ne jouit pas d’une grande considération. Elle préside à l’amour, la magie, les batailles. À Erech où se trouve son sanctuaire principal, elle est servie par une communauté de prêtresses célibataires qui sacrifient leur virginité à sa gloire. À l’origine, Ishtar était la déesse du matin et du soir. On notera également le culte voué aux corps célestes. Celui-ci s’est répandu de Babylone vers l’ouest; le passage de 2 Rois 23.11 rappelle le chariot du soleil à qui sont offerts de nombreux sacrifices (voir également 2 R 23.4 et Éz 8.16).
L’autre courant beaucoup plus sombre de la religion babylonienne prend probablement son origine dans une couche plus primitive de la population. Elle surgit de la croyance en un vaste monde des esprits anonymes impossibles à identifier, mais surtout hostiles à l’homme et facilement provoqués par des offenses. Les formes et les traits de ces démons sont hideux. Un mot maladroit peut déclencher leur ire redoutable. Des charmes et des incantations sont indispensables pour éviter qu’on ne tombe victime de leur déplaisir. Aussi, la majorité des tablettes enfouies dans des bibliothèques babyloniennes qu’on a pu identifier sont remplies de formules incantatoires. La populace était profondément impressionnée par ce côté obscur de la religion et dut être extrêmement pessimiste et malheureuse.
Plusieurs éléments de ces superstitions et du paganisme ont infiltré la pratique israélite de la religion, donnant lieu à l’appel vigoureux des prophètes à se repentir et à réformer ses voies. Les téraphim sont des images qui représentent des ancêtres décédés dont on cherche à obtenir l’avis. La nécromancie est une autre pratique abominable cherchant à réveiller les morts pour en obtenir soit des renseignements soit l’avis et les conseils.
Dans son ensemble, la religion assyrienne ressemble étroitement à celle de la Babylonie. Mais il s’y trouve une forte tendance à concentrer la foi et la piété sur un seul dieu, appelé Asshur, représentant l’État, glorifié par les rois en des termes que l’Hébreu réserve exclusivement à l’Éternel. Ses qualités principales sont martiales; il est notamment loué pour des victoires qu’il accorde au roi, son fils et son serviteur.
Quiconque étudie la religion égyptienne y trouve composés des traits étroitement, mais confusément imbriqués au point où il est impossible de les démêler. L’élément le plus noble est lié au nom d’Osiris, tel un roi glorifié. Il est le dieu du monde de l’au-delà et de la résurrection. Bien que l’intention dans cette expression soit noble, malheureusement l’adjonction d’amulettes et de formules incantatoires en ôte toute valeur positive. L’habitude invétérée à déifier les Pharaons impliquait une servilité dégradante de tout sujet. Les lettres adressées par des gouverneurs des villes et des provinces commencent invariablement ainsi : « Au roi, mon seigneur, mon dieu, mon soleil, le soleil qui vient d’en haut des cieux; je tombe aux pieds de mon roi, mon maître, sept fois et deux fois sept… » Ensuite, l’adoration du dieu soleil Ra qui, en ce qui concerne le culte officiel, avalait tout le reste.
Les autres divinités sont regardées comme ses formes et ses manifestations, ce qui a poussé certains savants à penser que les Égyptiens seraient les adorateurs d’un seul dieu. Mais ce prétendu monothéisme est tellement vague qu’il n’est pas probable qu’il y ait d’unité dans la religion égyptienne, car sans cesse on y trouve des mutations. Dans l’ensemble, cela n’est rien d’autre qu’adoration des forces naturelles. Une attention particulière est accordée aux traits inférieurs et non supérieurs de la divinité. Le pouvoir manifesté dans l’univers, même s’il est tout-puissant, n’est pas aussi élevé que la justice et l’amour.
Ensuite, notons qu’en dérivant son origine sans doute dans la couche la plus inculte de la population, mais adoptée par les prêtres, on assiste à la déification des animaux, chats, lions, taureaux, chacals, crocodiles, etc. Les gens des couches plus cultivées n’ont pu y voir que des symboles de la divinité. Les ignorants, eux, les tiennent pour de véritables dieux. Il semble possible que le veau d’or fabriqué par Aaron et ceux établis par Jéroboam s’inspirent du culte du taureau Apis de Memphis à Héliopolis. Pour des peuples primitifs, le taureau est l’emblème de la puissance créatrice. Aaron et Jéroboam ont pensé que l’Éternel pouvait être adoré à l’aide de cette représentation matérielle. La contribution de l’Égypte fut de fournir des éléments de tout ce qui rampe et qui est abominable, ce qu’Ézéchiel a dépeint sur les murs du Temple dans sa vision décrite dans Ézéchiel 8.10.
Chaque ville phénicienne possède également son seigneur divin appelé généralement Baal, maître ou propriétaire. Des inscriptions portent les noms de Baal de Tyr, de Sidon, de Tarse, du Liban, du ciel. Il existe également des désignations telles qu’Eschmun, Tanity, la déesse de Carthage, Melkrath de Tyr. Le soleil, certaines sources, des rivières, des sommets, des arbres sont considérés comme sacrés. Des sacrifices sont offerts sur des hauts lieux, tenus pour plus proche du ciel. Des monstruosités ne sont pas rares telles que l’offrande des enfants. L’image d’El à Carthage est en métal chauffé à l’intérieur, l’enfant sacrifié est placé dans les bras et enveloppé de flammes. En des périodes pénibles de leur histoire, les Hébreux sont disposés à offrir les mêmes sacrifices (Dt 12.31; 2 R 16.3; Jr 19.5; Mi 6.7).
Également abjects sont les sacrifices de la chasteté et de la virginité des filles. Chez les Phéniciens, c’est Astarté qui reçoit l’hommage immoral. Elle est considérée comme la principale divinité de Sidon, la patronne de la passion sexuelle. Le cérémonial d’Adonis constitue l’une des plus extraordinaires marques du culte phénicien et correspond au précédent. À Babylone, Tammouz, le dieu des sources de la végétation, est tué par le soleil violent de l’été, il est pleuré par Ishtar. En Phénicie, Adonis, époux d’Astarté, est tué lors d’une folle procession à Aphaka, au Liban, où les rites d’une nature honteuse sont célébrés au point où Constantin le Grand l’a aboli par la force. De telles coutumes impures ont été introduites en Israël. Les femmes pleuraient pour Tammouz. Nombre de passages montrent combien ces pratiques étaient abhorrées par les représentants et porte-parole fidèles de la foi en l’Éternel.
En Canaan même, les conditions sont passablement les mêmes qu’en Phénicie. Les divinités locales sont des Baalim, le pluriel de Baal. Il y a des Baals des villes et des districts, chacun est responsable de la fertilité de son domaine. Il existe également de nombreuses Astartés. Les hauts lieux sont abondants et les envahisseurs hébreux ont succombé à la fascination désastreuse et fatale. À ce haut lieu se trouve un « ashera », un poteau sacré fixé au sol pour représenter un arbre que l’on croyait, dans des périodes antérieures, être animé par la vie de la divinité. Il y avait également un « mazzebah », ou pilier, que certaines versions traduisent par erreur par image (dans Dt 16.21; Os 3.4 et 10.1-2). Au départ, le pilier n’est qu’une pierre ordinaire dans laquelle l’être divin est censé séjourner. Plus tard, elle prend la forme d’un obélisque. À une étape ultérieure de son développement, la « mazzemah », originaire de la Phénicie et relative au culte du soleil, est le pilier du soleil (És 17.7; 27.9; 2 Ch 14.2). L’immoralité la plus grossière était associée à ses hauts lieux du culte païen.
On connaît moins bien les religions de la Syrie et celles d’autres peuplades de moindre envergure; les Syriens de Damas reconnaissent en Hadad leur divinité principale. Il était tenu pour être le dieu soleil, mais souvent aussi on l’identifie avec Rammaân, la divinité de l’atmosphère à qui les Assyriens vouaient également un culte important. À côté de lui se trouvent Shams, El, Resheph, le dieu du feu, Rekeb-el, etc. L’objet principal du culte des Moabites est Chémosh (2 R 3.27); il semble qu’il soit friand de sacrifices humains. Sur la pierre moabite qui contient une inscription de Mesha, un contemporain d’Achab, Ishtar-Chémosh est aussi mentionné. Ceci indique une identification voyant qu’en Babylone elle-même Ishtar est parfois considéré comme bisexuel, quoiqu’en Arabie il est simplement masculin.
Les Ammonites ont servi Milkom, qui est une autre forme du mot roi ou du nom de Molok que l’on trouve souvent dans l’AT et à qui l’on offrait des enfants par le feu (2 R 23.10,13). L’expression forte « Millom est l’abomination des enfants d’Ammon » indique certains détails dont on peut déduire que l’on objectait à un tel culte.
Les divinités d’Édom mentionnées portent des noms étrangers. Hadad provient de Syrie. Dagon est suprême en Philistie. Il est le dieu de l’agriculture et il accorde à son peuple la victoire. À Ekron, le Baal-Zebuth, seigneur des mouches, est révéré et consulté. L’origine de ce titre n’est pas absolument connue. Astarté possède également son temple dans l’une des villes philistines (1 S 31.10).
Nous ne pouvons consacrer une étude à l’histoire de la religion des gréco-romains, ce qui nous éloignerait beaucoup trop loin de notre sujet. Mais lorsqu’Israël a subi leur influence, la religion des Grecs était déjà un produit d’un amalgame de religions comportant des éléments de divers cultes orientaux. Antiochus IV, de la dynastie séleucide, a cherché à forcer les Juifs à adopter les pratiques païennes grecques et orientales. Il n’est pas étonnant que ceux-ci se soient révoltés. Le Temple fut le lieu d’agitations violentes à cause des nombreuses profanations pratiquées par les païens, lesquels ont souillé le sanctuaire par la présence des prostituées dans l’enceinte extérieure de celui-ci (2 Macc 6.4).
De même, à une époque postérieure, lorsque nous rencontrons le nom d’une déesse grecque, Artémis, la Diane française, principale divinité d’Éphèse selon Actes 19.28, elle est plus orientale que grecque. Son image comporte plusieurs seins et symbolise toutes les forces reproductrices de la nature fertile; son culte est l’occasion d’abominables orgies. À Daphné, près d’Antioche en Syrie, on honore Apollon; il émane de lui des oracles très beaux dans la nature et dans l’art. Un sanctuaire lui est dédié pour la célébration d’un festival perpétuel du vice. Il est intéressant de noter que ce n’est pas un chrétien, mais l’une des plus nobles figures du paganisme antique qui écrivait, au 4e siècle de notre ère, que le festival annuel d’Antioche consistait tout simplement à pratiquer ce qui est impur et honteux en renonçant à toute décence!
Sous la domination romaine, la religion de l’empire consiste dans le culte de l’État. La ville est déifiée de même que l’empereur. Ainsi, la folle générosité d’Hérode le Grand envers le peuple ne pouvait remédier ou expier sa grave faute d’avoir bâti à Césaré un temple pour Rome, la déesse Roma et un autre en l’honneur d’Auguste. Des milliers de Juifs étaient prêts à mourir plutôt que de tolérer la prescription de Pilate aux légions de porter en ville l’image de l’empereur. Ils savaient que les soldats les adoraient. Le trait particulier de la religion des occupants était le culte et la vénération de la puissance, consacrant l’orgueil et l’arrogance humains.
L’impopularité du Juif contemporain de l’ère chrétienne est largement due à son intolérance indéfectible à l’égard de toute religion et de tout rituel religieux de ses voisins. Cette intolérance était née de sa lecture des écrits de l’AT. Un moderne serait tenté d’estimer que les législateurs et les écrivains de l’AT ont été trop intolérants et fanatiques envers d’autres religions. On doit cependant se rappeler que tous les prophètes et prêtres étaient engagés dans un combat à mort dans leur opposition et leur résistance à l’idolâtrie païenne. Si la foi au Dieu révélé, un et unique, ne résistait pas farouchement, elle serait submergée et emportée par les torrents de ces fausses religions. Dans ce cas, nous ne pourrions nous-mêmes bénéficier de la révélation et de la rédemption.
Le paganisme n’est pas seulement une confusion intellectuelle et morale dégradante. Une intelligence de l’ordre de l’univers ne peut coexister avec la croyance païenne selon laquelle l’univers serait régi par une pluralité contradictoire et conflictuelle de divinités et de puissances secondaires. L’uniformité de la nature dépend de l’uniformité même de Dieu. L’adoration des forces naturelles sous-jacentes dans l’antique idolâtrie détourne l’attention des éléments élevés de la nature de Dieu. Or, Dieu n’est pas une force impersonnelle, mais un être personnel, vivant et actif, saint, juste et bon. Les cultes païens, eux, sont éminemment licencieux.
Si des représentations peintes se trouvent sur des murs des temples, si des êtres supérieurs sont corrompus, si l’impureté fait partie de leur service, quelle chance la morale peut-elle espérer pour sa sauvegarde? Aucune. De même, si un homme, qu’il soit souverain, empereur ou prince irresponsable, est tenu pour être divin et que l’on élève des sanctuaires en son honneur, que ce soit après sa mort ou de son vivant, de nouveau une telle pratique constituera une infranchissable barrière à la liberté et au progrès.
La religion de l’AT a donc donné à l’humanité un don inestimable en discourant sur la majesté inapprochable du Dieu unique, révélé, devant qui tous les hommes sont égaux, refusant en son nom tout ce qui était impur et cruel. La religion du NT a satisfait à toutes les aspirations de l’Ancien, en révélant celui qui est infiniment au-dessus de l’homme, mais simultanément en étroit rapport avec lui, par la révélation du Dieu devenu homme, le Médiateur, la voie, la vérité et la vie, Jésus-Christ le Sauveur et le Seigneur.
5. Tableau synoptique de la chronologie de l’Ancien Testament←⤒🔗
Date Texte Événement
Gn 1 et 2 Adam et Ève, Caïn
Gn 5 Seth, Enoch, Noé
Gn 7 Le déluge
Gn 11 La tour de Babel
2000-1800 Gn 12 Abraham
1900-1750 Gn 21 Isaac
1800-1700 Gn 25 Jacob
1750-1650 Gn 37 Joseph
Ex 2 Moïse
1290-1260 Ex 12-14 L’Exode
(ou 1440) Ex 19-31 La Loi
Ex 15; Jos 3 Le séjour dans le désert
env. 1240 Jos 3 La traversée du Jourdain
Jos 24 La mort de Josué
Les Juges
Il existe deux interprétations de datation de cette période : une primitive (de 1380-1050); une seconde tardive (1220-1050). Nombre de juges sont des contemporains. Aussi les années de leur ministère ne peuvent être calculées avec précision.
8 ans Jg 3 Othniel, oppression mésopotamienne
18 ans Jg 3 Ehud, Shamgar, oppression moabite
20 ans Jg 4 Déborah, oppressions philistine et cananéenne
7 ans Jg 6 à 8 Gédéon, oppression madianite
Jg 9 Abimélek
Jg 10 Tola-Jaïr
Jg 1 à 12 Jephté, Ibzan, Elon, Abdon
18 ans Jg 13 à 16 Samson, oppression philistine
1 S 1 à 4 Éli, arche capturée
40 ans 1 S 7 Oppression philistine
1 S 7 à 31 Samuel et Saül
Le royaume uni
1050, 40 ans 1 S 9 Saül
40 ans 2 S 2 à 1 R 2 David
40 ans 1 R 1.37 à 11.43 Salomon
Le royaume divisé
Israël Juda
1re dynastie
Jéroboam 22 ans Roboam 17 ans
Nadab 2 ans Abijam 3 ans
2e dynastie
Baasha 24 ans
Éla 2 ans Asa 41 ans
Zimri 7 jours
3e dynastie
Omri 8 ans
Ahab 22 ans Josaphat 25 ans
Ahaziah 2 ans Joram 8 ans
Joram 12 ans Ahaziah 1 an
Jéhu assassine les rois d’Israël et de Juda
4e dynastie Athalie, reine
Jéhu 28 ans Joas 40 ans
Jehoahaz 17 ans
Joash 16 ans Amatsia
Jéroboam II 41 ans
Zacharie 6 mois Ozias 52 ans
Shallum 1 mois
5e dynastie
Menahem 10 ans
Peka 2 ans Jotham 16 ans
6e dynastie
Pékah 20 ans Ahaz 16 ans
7e dynastie
Osée 9 ans Ézéchias
722 Prise et chute de Samarie par l’Assyrie
Fin du royaume d’Israël
Ézéchias 26 ans
Manassé 55 ans
Amôn 2 ans
Josias 31 ans
Jehoaz 3 mois
Jehojakim 11 ans
Jehojakin 3 mois
Sédécias 11 ans
586 Captivité babylonienne
Disparition du royaume de Juda
605 Jr 39 à 46 1re captivité, Daniel
597 Jr 39.1-10 2e captivité
586 Jr 43.44 3e captivité, Temple détruit
571 Éz 17 à 21 Dernières prophéties
562 2 R 25 à 28 Jehojakin libéré
539 Dn 5 Festin de Balthasar
538 Dn 6 Daniel dans la fosse aux lions
2 Ch 36.22-23 Esdras, décret de retour
Esd 1.5 à 2.70 Premier retour sous Zorobabel
537-6 Esd 3 à 6. Fondation du second Temple
520 Esd 4 Temple rebâti
516 Esd 6 Temple consacré
483 Est 1 Festin d’Assuérus (Xerxes I)
479 Est 2 Esther reine
474 Est 3 à 7 Complot d’Haman
458 Esd 7 Second retour
445 Né 2 Retour sous Néhémie
444 Né 6 Murailles reconstruites
Né 10 Réformes
400 Mort de Néhémie