Né d'eau et d'esprit
Né d'eau et d'esprit
C’est un fait bien connu de tout chrétien qui dispose d’un Nouveau Testament et le lit régulièrement que ce sont les Évangiles de Matthieu et de Luc qui retracent la naissance de Jésus-Christ, le Messie promis des siècles auparavant dans l’Ancien Testament. L’Évangile selon Jean, lui, fait état dès le début de la Parole qui a été faite chair, ou, selon une autre traduction, du fait que « Celui qui est la Parole est devenu homme et il a habité parmi nous » (Jn 1.14). Cette naissance de Jésus-Christ est confessée depuis le début par l’Église chrétienne comme une naissance virginale, c’est-à-dire que c’est par un acte divin spécial que Jésus a été conçu : non par un homme (en l’occurrence Joseph, fiancé à Marie), mais directement par le Saint-Esprit de Dieu.
On pense souvent à tort que ceci est une condamnation implicite de l’acte sexuel entre un homme et une femme. Comme si en soi cet acte représentait le péché, et qu’il serait donc impensable que le Fils de Dieu en soit le produit biologique. Rien n’est plus faux. La naissance virginale du Christ, conçu du Saint-Esprit, mais porté et enfanté par sa mère humaine, Marie, signifie tout autre chose : c’est la filiation divine directe de Jésus-Christ qui est ici en question, filiation qui ne repose pas sur la volonté ou le désir d’un homme et qui implique que Christ ne participe pas à la nature corrompue de l’humanité depuis le premier homme, Adam. Raison pour laquelle il a pu accomplir le salut promis par Dieu à tous ceux qui croiraient en son Fils bien-aimé. Cette nature divine s’est cependant unie dans une même personne, celle de Jésus-Christ, à la nature humaine héritée de sa mère, sans cependant que ces deux natures distinctes soient mélangées ou opposées l’une à l’autre.
Que ceci soit un fait absolument unique, hors du commun, n’échappera à personne. Il n’est même pas question de vouloir l’expliquer à l’aide de schémas intellectuels ou scientifiques applicables au reste de l’humanité. Nous n’en prenons connaissance qu’à travers la révélation divine, dans la Bible. Cela dit, même si une telle naissance miraculeuse échappe à nos schémas traditionnels de compréhension, il n’en demeure pas moins qu’une série d’enseignements s’en dégage, avec une logique spirituelle incontournable, et qu’on ne peut y rester indifférent. Certes, seuls les croyants voudront approfondir ce mystère, tandis que le reste de l’humanité s’en moquera allègrement et fera les gorges chaudes de ces croyants qu’ils considèrent comme bien trop crédules. Mais peu importe. Poursuivons plutôt notre examen des données bibliques concernant la naissance virginale du Christ.
Comme je le disais plus haut, il semble au premier abord que l’Évangile selon Jean ne mentionne pas cette naissance. Là aussi, rien n’est moins vrai, pour peu qu’on s’attache à bien étudier le texte. Reprenons l’extrait du premier chapitre déjà cité : « Celui qui est la Parole est devenu homme et il a vécu parmi nous. Nous avons contemplé sa gloire, la gloire du Fils unique envoyé par son Père : plénitude de grâce et de vérité » (Jn 1.14). Il est bien question ici du Fils unique de Dieu envoyé dans le monde par son Père, une assertion qui n’est faite à propos d’aucun autre homme et qui pointe en direction de cette naissance hors du commun. Aucun autre humain n’est qualifié dans la Bible de « plein de grâce et de vérité » ou encore de Fils unique. Le fameux passage du chapitre trois le réitère : « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle » (Jn 3.16).
Mais quel profit retire donc le croyant de la naissance du Christ? S’agit-il d’un article de foi étranger à son salut, un fait divin qui concerne Christ, mais ne nous concerne pas vraiment? Bien sûr que non. Et ici, l’Évangile de Jean nous donne toutes les clés pour comprendre la valeur de ce mystère pour notre vie. Toujours au premier chapitre, nous lisons :
« La Parole est venue chez les siens, et les siens ne l’ont pas reçue; mais à tous ceux qui l’ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, et qui sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu » (Jn 1.12-13).
Voyez-vous, il y a ici une identification entre Jésus-Christ qui a été conçu du Saint-Esprit et chaque homme ou femme qui est régénéré par l’Esprit de Dieu. Par notre nature humaine, nous sommes tous nés dans le péché, ayant hérité depuis le premier homme, Adam, de cette nature de péché, étant tous corrompus devant Dieu. Mais aussitôt que nous sommes greffés en Jésus-Christ, le second Adam, celui qui est venu restaurer l’humanité déchue, nous avons part à sa nature, nous aussi nous sommes alors nés de Dieu et plus seulement de la volonté de la chair ou de l’homme. Voilà où réside la valeur de la naissance virginale de Christ; elle a le pouvoir de nous conférer une nouvelle naissance, celle dont Jésus parle au chapitre 3 de l’Évangile selon Jean, lorsqu’il s’adresse à un interlocuteur du nom de Nicodème. Voici ce passage :
« Il y avait un homme qui s’appelait Nicodème; membre du parti des pharisiens, c’était un chef des Juifs. Il vint trouver Jésus de nuit et le salua en ces termes : Maître, nous savons que c’est Dieu qui t’a envoyé pour nous enseigner, car personne ne saurait accomplir les signes miraculeux que tu fais si Dieu n’était pas avec lui. Jésus lui répondit : Vraiment, je te l’assure : à moins de renaître d’en haut, personne ne peut voir le royaume de Dieu. — Comment un homme peut-il naître une fois vieux? s’exclama Nicodème. Il ne peut tout de même pas retourner dans le ventre de sa mère pour renaître? — Vraiment, je te l’assure, reprit Jésus, à moins de naître d’eau, c’est-à-dire d’Esprit, personne ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui naît d’une naissance naturelle, c’est la vie humaine naturelle. Ce qui naît de l’Esprit est animé par l’Esprit. Ne sois donc pas surpris si je t’ai dit : Il vous faut renaître d’en haut. Le vent souffle où il veut, tu en entends le bruit, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi pour quiconque est né de l’Esprit » (Jn 3.1-8).
Même en temps que Juif, et membre du parti très religieux des pharisiens, Nicodème était toujours un descendant d’Adam, né et conçu dans le péché comme tout homme. Il avait besoin d’être né de nouveau, de l’Esprit, pour avoir accès à la vie éternelle. Pourquoi alors Jésus parle-t-il « d’eau et d’Esprit »? S’agirait-il de deux choses différentes? Non pas. Dans la Bible, le Saint-Esprit et parfois associé au feu ou à l’eau, comme à des éléments qui purifient. Une prophétie bien connue de l’Ancien Testament en faisait déjà état, au livre d’Ézéchiel, chapitre 36, où Dieu parle à son peuple exilé à cause de ses fautes. Voici ce que Dieu promet à son peuple :
« Je répandrai sur vous une eau pure, afin que vous deveniez purs, je vous purifierai de toutes vos souillures et de toutes vos idoles. Je vous donnerai un cœur nouveau et je mettrai en vous un esprit nouveau, j’enlèverai de votre être votre cœur dur comme la pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon Esprit et je ferai de vous des gens qui vivent selon mes lois et qui obéissent à mes commandements pour les appliquer » (Éz 36.25-27).
Tout ceci, bien sûr, pointe en direction du baptême, ce signe d’une nouvelle naissance en Jésus-Christ. Le baptême est le signe de l’ensevelissement de la vieille nature de péché dans et par la mort de Jésus-Christ sur la croix. Cette vieille nature est noyée, engloutie dans la mort du Christ. En même temps, le baptême est aussi le signe de la nouvelle naissance en Jésus-Christ ressuscité, le signe de la purification accomplie. Dans le signe du baptême se trouvent donc signifiées aussi bien la mort que la résurrection : mort nécessaire de la vieille nature corrompue, suivie de la naissance de l’homme nouveau, né de nouveau avec Jésus-Christ, né d’eau et d’Esprit.
Par là nous comprenons la signification de la naissance virginale du Christ, pleinement Dieu et pleinement homme, seul capable d’accomplir le salut d’une humanité déchue. Certains, même au sein de l’Église, rejettent la véracité historique de la naissance virginale de Jésus, telle qu’elle est rapportée par les Évangiles du Nouveau Testament, et inventent toutes sortes de théories pour expliquer que Jésus était soit un enfant illégitime, soit un enfant ayant perdu son père en bas âge ou que sais-je encore. Ceux-là rejettent en fait le salut offert par Dieu et déclarent tout bonnement qu’ils n’ont pas besoin d’une nouvelle naissance, ou bien qu’ils peuvent l’obtenir par eux-mêmes et non par le don gratuit de Dieu en Jésus-Christ. Quelle folie! Le salut de Dieu nous est offert en Christ et nous est présenté dans sa Parole vivante. Acceptons-le donc avec joie et reconnaissance!