Romains 1 et 2 - Coupables et sans excuse
Romains 1 et 2 - Coupables et sans excuse
Romains 1.18-32 et 2.1-11
Je poursuis la lecture commentée de la lettre de Paul aux Romains, que l’on trouve dans le Nouveau Testament de la Bible, et qui forme l’un des textes les plus lus, expliqués et médités de toute la Bible en raison de l’exposition des vérités de la foi chrétienne qu’il contient.
Après la salutation initiale de Paul à ses lecteurs, il a résumé le contenu de la foi en Jésus-Christ en terminant cette section par une citation du prophète Habacuc, qui vivait six siècles avant Jésus-Christ : « En effet, cet Évangile nous révèle en quoi consiste la justice que Dieu accorde : elle est reçue par la foi et rien que par la foi, comme il est dit dans l’Écriture : Le juste vivra par la foi » (Rm 1.17). Paul énonce maintenant le contenu de la sentence divine qui pèse sur tous les hommes, et qui forme l’acte d’accusation universel ne laissant aucune échappatoire à quiconque. Je cite les versets 18 à 32 du premier chapitre de la lettre aux Romains :
« Du haut du ciel, Dieu manifeste sa colère contre les hommes qui ne l’honorent pas et ne respectent pas sa volonté. Ils étouffent ainsi malhonnêtement la vérité. En effet, ce qu’on peut connaître de Dieu est clair pour eux, Dieu lui-même le leur ayant fait connaître. Car, depuis la création du monde, les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité se voient dans ses œuvres quand on y réfléchit. Ils n’ont donc aucune excuse, car alors qu’ils connaissent Dieu, ils ont refusé de lui rendre l’honneur que l’on doit à Dieu, et de lui exprimer leur reconnaissance. Ils se sont égarés dans des raisonnements absurdes et leur pensée dépourvue d’intelligence s’est trouvée obscurcie. Ils se prétendent intelligents, mais ils sont devenus fous. Ainsi, au lieu d’adorer le Dieu immortel et glorieux, ils adorent des idoles, images d’hommes mortels, d’oiseaux, de quadrupèdes et de reptiles. C’est pourquoi Dieu les a abandonnés aux passions de leur cœur qui les portent à des pratiques dégradantes, de sorte qu’ils ont avili leur propre corps. Oui, ils ont délibérément échangé la vérité concernant Dieu contre le mensonge, ils ont adoré et servi la créature au lieu du Créateur, lui qui est loué éternellement. Amen! Voilà pourquoi Dieu les a abandonnés à des passions avilissantes : leurs femmes ont renoncé aux relations sexuelles naturelles pour se livrer à des pratiques contre nature. Les hommes, de même, délaissant les rapports naturels avec le sexe féminin, se sont enflammés de désir les uns pour les autres; ils ont commis entre hommes des actes honteux et ont reçu en leur personne le salaire que méritait leur égarement. Ils n’ont pas jugé bon de connaître Dieu, c’est pourquoi Dieu les a abandonnés à leur pensée faussée, si bien qu’ils font ce qu’on ne doit pas. Ils accumulent toutes sortes d’injustices et de méchanceté, d’envies et de vices; ils sont pleins de jalousie, de meurtres, de querelles, de trahisons, de perversités. Ce sont des médisants, des calomniateurs, des ennemis de Dieu, arrogants, orgueilleux, fanfarons, ingénieux à faire le mal; ils manquent à leurs devoirs envers leurs parents; ils sont dépourvus d’intelligence et de loyauté, insensibles, impitoyables. Ils connaissent très bien la sentence de Dieu qui déclare passibles de mort ceux qui agissent ainsi. Malgré cela, non seulement ils commettent de telles actions, mais encore ils approuvent ceux qui les font » (Rm 1.18-32).
L’acte d’accusation universel énoncé par Paul se fonde tout d’abord sur le fait suivant : tous les hommes, quels qu’ils soient, sont censés connaître Dieu, le Créateur et le Législateur, du fait même de leur existence. Dieu se fait connaître de manière indiscutable dans la nature, sa création. Elle reflète de manière visible ses perfections invisibles. Ce n’est pas, comme beaucoup le diraient, l’ignorance qui est cause de ce que les hommes ne connaissent pas le vrai Dieu, c’est le fait qu’ils suppriment intentionnellement la connaissance de Dieu. Ils sont d’abord coupables de rébellion contre lui, et cette rébellion se manifeste par l’étouffement volontaire de la vérité. Ils retiennent injustement la vérité captive. Le reste des vices humains découle de ce fait primordial. Étouffer intentionnellement la vérité concernant Dieu ne peut conduire qu’à adorer la créature au lieu du Créateur.
Et voilà où mène la folie humaine : les peuples de l’Antiquité les plus développés sur le plan de la connaissance scientifique, des arts, de l’architecture, des mathématiques et de la géométrie, se sont mis à adorer des figures d’animaux ou d’humains… Les Égyptiens, remarquables bâtisseurs des pyramides, vénéraient des divinités sous forme animale : Héquet, la déesse grenouille, Khepri, le dieu-scarabée, Nekhbet, la déesse vautour, Sebek, le dieu crocodile… La conséquence de cet état de fait est que Dieu abandonne alors les hommes à leurs désirs les plus fous. Il ne les protège plus contre leur propre folie destructrice, il les laisse aller à leurs penchants mauvais. Ceux-ci, nous dit Paul, se manifestent d’abord par l’abandon des relations sexuelles naturelles entre hommes et femme, pour adopter des relations homosexuelles. Il est significatif que Paul commence par là, car il se réfère à l’abandon d’un ordre originel créé par Dieu. Il établit ainsi un parallèle entre abandonner Dieu le Créateur pour adorer une créature semblable à soi-même — c’est l’idolâtrie — et chercher une relation sexuelle avec quelqu’un de semblable à soi-même. S’adonner à une telle relation c’est nier la complémentarité dans la différence qui caractérise l’ordre sexuel établi par Dieu dans sa création.
Certes, dans le monde grec de l’Antiquité, tout comme aujourd’hui dans bien des sociétés, ces relations étaient considérées comme normales. Mais Paul, lui, ne mesure pas une pratique à l’aune de sa popularité, ou du fait qu’elle est couramment pratiquée; il l’évalue et la juge au regard du plan de Dieu dans sa création, plan confirmé dans la loi de l’Ancien Testament. C’est le Créateur qui établit les normes concernant les relations entre les humains, et qui jugera les hommes en fonction de leur obéissance ou désobéissance à ces normes de conduite.
Mais la liste des vices humains ne s’arrête pas là et Paul nous en donne un aperçu assez complet. En résumé : les hommes ont une connaissance de Dieu naturelle qui est à la fois suffisante pour les condamner à ses yeux, et tout à fait insuffisante pour les sauver de son juste jugement.
Mais reprenons maintenant la lecture du texte à partir du chapitre 2, tout en gardant à l’esprit que la division en chapitres et en versets de la Bible a été ajoutée bien des siècles après la rédaction des livres bibliques. Cette division offre un repère pratique pour tous les lecteurs de la Bible, quelle que soit la traduction qu’ils ont sous les yeux, mais elle ne représente pas nécessairement la division du texte telle que les écrivains bibliques l’ont envisagée :
« Toi donc, qui que tu sois, qui condamnes ces comportements, tu n’as donc aucune excuse, car en jugeant les autres, tu te condamnes toi-même, puisque toi qui les juges, tu te conduis comme eux. Or, nous savons que le jugement de Dieu contre ceux qui agissent ainsi est conforme à la vérité. T’imaginerais-tu, toi qui juges ceux qui commettent de tels actes, que tu vas échapper à la condamnation divine? Ou alors, méprises-tu les trésors de bonté, de patience et de générosité déployés par Dieu, sans te rendre compte que sa bonté veut t’amener à changer? Par ton entêtement et ton refus de changer, tu te prépares un châtiment d’autant plus grand pour le jour où se manifesteront la colère et le juste jugement de Dieu. Ce jour-là, il donnera à chacun ce que lui auront valu ses actes. Ceux qui, en pratiquant le bien avec persévérance, cherchent l’approbation de Dieu, l’honneur et l’immortalité, recevront de lui la vie éternelle. Mais, à ceux qui, par ambition personnelle, repoussent la vérité et cèdent à l’injustice, Dieu réserve sa colère et sa fureur. Oui, la souffrance et l’angoisse attendent tout homme qui pratique le mal, d’abord le Juif et aussi le non-Juif. Mais l’approbation de Dieu, l’honneur et la paix seront accordés à celui qui pratique le bien, quel qu’il soit, d’abord le Juif et aussi le non-Juif, car Dieu ne fait pas de favoritisme » (Rm 2.1-11).
Paul veut-il dire qu’il est possible d’accomplir par soi-même le bien et donc d’hériter la vie éternelle? Nous verrons par la suite du texte qu’il n’en est pas ainsi, car, soulignera-t-il sans ambages au chapitre 3, personne n’est en état d’accomplir parfaitement le bien tel que Dieu l’exige. Par ailleurs, Paul montre dans le passage que nous venons de citer que celui qui pense pouvoir condamner les autres en les jugeant tombe lui-même sous la coupe de la même condamnation. Il se trompe lui-même en pensant que l’apparence de religion qu’il affiche le place en deçà d’une condamnation, comme s’il suffisait de ne pas s’adonner aux vices les plus grossiers pour échapper au juste jugement de Dieu. Mais il n’en demeure pas moins que, si quelqu’un pouvait atteindre le degré de perfection requis par Dieu, alors, selon le juste jugement divin, il en serait récompensé, qu’il soit Juif, c’est-à-dire ayant connaissance de la loi révélée de Dieu, ou non-Juif. Dans la section suivante, Paul indiquera les normes par lesquelles le juste jugement de Dieu s’appliquera aux uns et aux autres. Dans un autre article, nous continuerons notre parcours de l’épître aux Romains.