Cet article a pour sujet les limites de la science qui n'est pas compétente pour découvrir le processus de création ni le temps pris par Dieu pour créer le monde. C'est la Bible qui nous révèle ces choses. Il nous faut revenir à la sola Scriptura.

8 pages.

La science peut-elle analyser les actes créateurs de Dieu?

  1. Sola Scriptura ou Scriptura sub scientia?
  2. Les limites de la science
  3. La révélation générale révèle Dieu et non ses actes créateurs
  4. Quelques conséquences de l’abandon de la sola Scriptura
  5. Ce que nous confessons à ce sujet demeure valide

1. Sola Scriptura ou Scriptura sub scientia?🔗

Depuis près de deux siècles, les débats au sujet de la création du monde et de la signification de la première page de la Bible font rage dans l’Église. De nombreux chrétiens ont succombé à la pression ambiante d’accepter l’idée que Dieu aurait créé le monde sur une très longue période et que l’univers serait vieux de plusieurs milliards d’années. La Bible nous dit pourtant clairement et simplement que Dieu a créé le monde en six jours (Gn 1; Ex 20.8-11). De plus, lorsque nous compilons les chronologies bibliques (Gn 5; Gn 11.10-32, etc.), nous pouvons estimer l’âge du monde, d’après la Parole de Dieu, à environ 6000 ans seulement. Comment se fait-il alors que tant de chrétiens ont adopté le modèle des milliards d’années?

La réponse est que ces chrétiens ont été influencés, d’une manière ou d’une autre, par les théories scientifiques modernes sur les origines de l’univers, de la terre de la vie. Ces théories stipulent une évolution stellaire (formation des étoiles et des galaxies), une évolution géologique (formation des roches et des fossiles dans le sol) et une évolution biologique (origine des plantes, des animaux et ses hommes) étalées sur des millions et des milliards d’années. Pour le dire très simplement, c’est à cause des théories scientifiques modernes sur les origines que l’on s’est mis à croire aux milliards d’années, et non parce que la Bible nous révélerait une si longue durée.

Cela soulève inévitablement la question de la place des Écritures saintes. Au fond, la question est la suivante : sola Scriptura ou bien Scriptura sub scientia? Devons-nous nous baser uniquement sur ce que nous révèle l’Écriture pour savoir comment et en combien de temps Dieu a créé le monde, ou bien devons-nous soumettre l’Écriture sainte à la science? Cette question est au cœur du débat actuel.

2. Les limites de la science🔗

Pouvons-nous être aussi certains qu’on le prétend que la science est en mesure de nous éclairer sur les actes créateurs de Dieu? La science est-elle en mesure de nous dire la manière dont Dieu a créé le monde et le temps qu’il a pris pour le faire? Je propose dans cet article qu’il nous est impossible par la science de déterminer comment Dieu a créé le monde ni en combien de temps il a l’a fait. Voici les quatre principales raisons ou obstacles qui expliquent cette impossibilité :

a. D’abord, les actes créateurs de Dieu sont décrits dans la Bible comme étant surnaturels, alors que la science, par définition, ne peut étudier que des phénomènes naturels. En parlant de ces actes créateurs — couvrant ce que Dieu a fait du premier au sixième jour —, l’auteur de l’épître aux Hébreux nous dit que « ce qu’on voit ne provient pas de ce qui est visible » (Hé 11.3), mais vient de la puissance créatrice de la Parole de Dieu, ce qui rend impossible toute analyse scientifique du processus créateur1. La science peut étudier et analyser le résultat de l’acte créateur (la lumière, les roches, les plantes, les animaux, le corps humain, etc.), mais ne peut jamais étudier son processus de création. Pour aider à comprendre, j’ai l’habitude de donner l’analogie de la coupe de vin provenant des noces de Cana : un laboratoire scientifique pourrait en analyser sa composition chimique une fois l’eau changée en vin, mais les scientifiques de ce laboratoire ne pourraient aucunement déterminer, par leurs observations, leurs mesures et leur analyse chimique, comment le vin a été produit ni en combien de temps il a été fait. La raison est à la fois simple et profonde : ce vin provient d’un miracle et non d’un processus naturel! Tout ce que la science peut étudier, en dépit de ses équipements sophistiqués, ce sont les processus naturels. C’est là que s’arrête son champ de compétence.

b. Deuxièmement, la création originelle a subi un changement drastique après la chute de l’homme. Les conséquences dramatiques du péché et du jugement de Dieu sur la nature ont rapidement et irrémédiablement bouleversé l’ordre originel du monde créé : le sol a été maudit, les ronces et les épines se sont mises à pousser, la vanité et la corruption ont envahi la création entière, la réduisant à un pénible esclavage, incluant les maladies, les catastrophes naturelles, la souffrance et la mort (Gn 3.17-19; Rm 5.12-21; Rm 8.18-22). Les lois de la nature (ou plus exactement de la providence divine régissant le maintien de la création) ne sont plus exactement les mêmes que celles qui prévalaient avant la chute. Cela signifie que ce qui est accessible à la science aujourd’hui, ce n’est pas la création excellente telle qu’elle est sortie des mains du Créateur à l’origine, mais une création déchue et soumise à la vanité causée par les conséquences du péché de l’homme et par le jugement de Dieu.

Il existe ainsi une barrière historique qui nous empêche non seulement d’observer et d’analyser le processus créateur qui s’est déroulé durant les six jours de la création, mais qui nous empêche également d’observer et d’analyser l’état de la création au moment où elle était achevée à la fin du sixième jour. Nos instruments scientifiques ne sont pas en mesure d’aller en amont de l’événement historique de la chute, du moins sans distorsion profonde, à cause de la nature et de l’étendue du jugement divin qui a frappé la création tout entière. Tout ce que la science peut faire aujourd’hui, c’est d’étudier le sol maudit et la création soumise à la vanité et à l’esclavage de la corruption.

c. Troisièmement, depuis la chute, nous sommes par nature morts dans nos péchés, notre cœur est endurci et notre intelligence est profondément enténébrée (Rm 1.18,21; Ép 4.18). Les hommes (incluant les scientifiques) sont ainsi devenus étrangers à la vie de Dieu, ils étouffent la vérité sur Dieu qu’il révèle à tous dans sa création, et s’égarent dans de vains raisonnements. L’entreprise scientifique n’est pas neutre, elle se fait par des hommes pécheurs aliénés de Dieu qui refusent de glorifier leur Créateur par leurs pensées et par leurs travaux scientifiques, à moins qu’ils soient régénérés par l’Esprit de Dieu et qu’ils soient éclairés par les vérités de sa Parole.

Il existe donc non seulement une barrière externe, découlant de la nature des actes de création et de jugement de Dieu, mais aussi une barrière interne, dans le cœur, les pensées et les raisonnements tordus de l’homme, empêchant la science des hommes de bien parler non seulement de l’œuvre créatrice de Dieu telle qu’elle s’est produite au commencement, mais les rendant même incapables de bien parler de la création actuelle, telle qu’elle existe aujourd’hui, dans son état de souffrance et de corruption. N’oublions jamais la profondeur de la dépravation du cœur humain et de l’obscurcissement opaque de la raison humaine!

d. Quatrièmement, le déluge qui a englouti la terre entière (Gn 7 et 8; 2 Pi 3.6) a sans aucun doute modifié en profondeur le paysage et les conditions de vie sur terre2. Pour cette raison, il n’est pas possible d’observer et d’étudier directement les conditions qui prévalaient sur la terre avant le déluge, ce qui a une incidence directe sur plusieurs domaines scientifiques3. Par ailleurs, étant donné la réduction drastique de la longévité humaine après le déluge4, de même que les nouvelles dispositions de l’alliance avec Noé5, il semble que d’autres changements importants soient survenus après le déluge, modifiant les conditions sur terre et pouvant avoir une incidence importante sur encore d’autres domaines scientifiques6. Bref, quelle que soit la précision de nos instruments scientifiques, nous ne pourrons plus jamais observer devant nous une terre prédiluvienne; c’est seulement une terre post-diluvienne que nous pouvons explorer, mesurer, analyser, tester et revérifier. Il manquera donc nécessairement une clé d’interprétation importante aux scientifiques (athées ou chrétiens) qui rejettent le déluge universel ou qui refusent de tenir compte de ce fait historique majeur dans leurs investigations scientifiques7.

Ainsi, en prenant en compte les données bibliques, nous pouvons conclure que ces quatre obstacles rendent impossible pour la science de nous dire comment et en combien de temps Dieu a créé le monde. Ces questions sont tout simplement en dehors du champ de compétence de la science. La meilleure façon de faire de la science un bon serviteur, et non une idole ou un maître tyrannique, est d’en reconnaître les limites!

Il faut donc nous tourner vers la Bible et réaffirmer le principe de la sola Scriptura! Ce n’est pas qu’un simple slogan, mais un principe qui devrait être mis en pratique dans tous les domaines de la vie. Lorsque nous parlons de la doctrine de la création, ce n’est donc pas l’Écriture qui devrait se soumettre à la science, mais la science qui devrait se soumettre à l’Écriture!

Cependant, comme un certain nombre de chrétiens l’admettent candidement, pour en arriver à conclure que Dieu aurait créé le monde sur des milliards d’années, il faut se tourner vers la science. Il faut soumettre la Parole de Dieu à la science des hommes. Scriptura sub scientia! Par le fait même, nous ne sommes plus réformés. Par le fait même, nous abandonnons ce que nous confessons, ce que nos pères dans la foi ont tant chéri et ce que nous avons la responsabilité de transmettre à la génération suivante. Oh! nous aimons bien encore confesser ce slogan de nos lèvres, sans doute, mais en pratique la substance n’y est plus. Nous réglons le débat religieux en invoquant la science, au lieu de nous appuyer exclusivement sur la Parole de Dieu.

3. La révélation générale révèle Dieu et non ses actes créateurs🔗

Il m’apparaît utile d’ajouter ici un commentaire sur la doctrine de la révélation générale qui affirme que Dieu donne à tout homme une révélation dans l’ensemble de sa création. Plusieurs chrétiens favorables aux milliards d’années évoquent cette doctrine biblique pour tenter de lever les obstacles cités plus haut. La nature et les Écritures seraient deux livres distincts, mais complémentaires qu’il nous faut tous les deux lire et interpréter correctement. Toute vérité venant de Dieu est vraie, nous dit-on, qu’elle provienne du livre de la nature ou du livre des Écritures. Par conséquent, une interprétation correcte de la nature (qui nous serait donnée par la science) pourrait nous aider à corriger une interprétation incorrecte des Écritures (par exemple notre interprétation de Gn 1 et d’Ex 20.11).

Cette façon d’employer la doctrine biblique de la révélation générale comporte toutefois un certain nombre de problèmes et d’inexactitudes. Tout d’abord, lorsque la révélation générale est comparée à « un livre magnifique » (par exemple dans l’article 2 de la Confession de foi des Pays-Bas), il faut comprendre qu’il s’agit là d’une figure de style. Dans la nature, Dieu ne se sert pas de phrases intelligibles soumises aux règles de grammaire du langage humain, comme il le fait dans les Écritures saintes. « Ce n’est pas un langage, ce ne sont pas des paroles », nous dit le roi David (Ps 19.4). La nature ne peut donc pas être soumise à des règles d’interprétation aussi précises que les Écritures. De plus, le même article de la Confession ajoute que Dieu « se fait connaître à nous plus clairement et plus pleinement par sa sainte et divine Parole ». La nature et les Écritures ne peuvent pas être mises sur le même pied, puisque les Écritures nous présentent une révélation de Dieu plus riche, plus claire et plus complète qui nous permet de mieux comprendre la nature et de l’interpréter correctement. Par ailleurs, cette approche des « deux livres » en vue de justifier la croyance en des milliards d’années a la fâcheuse tendance de pratiquement confondre la révélation générale de Dieu et les théories scientifiques humaines, alors que, d’après la Bible, la révélation générale vient directement des œuvres créées par Dieu, sans passer par l’intermédiaire de la main des hommes, et qu’elle est donnée indifféremment et clairement à tous les hommes, sans distinction. « Ce qu’on peut connaître de Dieu est manifeste pour eux » (Rm 1.19), nous dit Paul en parlant des païens de son temps qui pouvaient tous directement contempler la révélation de Dieu dans la nature autour d’eux.

Il est toutefois encore plus important de considérer le contenu et le but de la révélation générale. Quel est le contenu de la révélation qui est donnée à tous les hommes dans la nature? Ce contenu, c’est Dieu lui-même, et non la manière dont il a créé le monde ou le temps qu’il a pris pour le faire.

« Ce qu’on peut connaître de Dieu est manifeste pour eux, car Dieu le leur a manifesté. En effet, les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient fort bien depuis la création du monde quand on les considère dans ses ouvrages » (Rm 1.19-20).

C’est Dieu, ses perfections, sa divinité et sa puissance qui se voient dans la nature et que les hommes peuvent connaître à partir des œuvres créées par Dieu. Le chef-d’œuvre de la création nous dit qui en est le Créateur, et non pas comment le Créateur s’y est pris pour produire son chef-d’œuvre. Ainsi, le but de cette révélation générale dans la nature n’est pas de nous informer, à l’aide de théories scientifiques, sur les processus employés par Dieu pour créer le monde; son but est de rendre tout homme inexcusable, et par conséquent de rendre la rédemption en Jésus-Christ ainsi que la révélation spéciale de ses œuvres rédemptrices absolument nécessaires.

Pour savoir comment Dieu s’y est pris pour créer le monde et en combien de temps il l’a fait, nous devons nous mettre à l’écoute de ce que Dieu nous a révélé à ce sujet dans sa Parole sainte. Chercher à placer le « livre » de la nature (plus exactement la science des hommes) au-dessus du livre des Écritures c’est, en fin de compte, abandonner le principe de la sola Scriptura.

4. Quelques conséquences de l’abandon de la sola Scriptura 🔗

Quelles peuvent être les conséquences de cet abandon de la sola Scriptura? Elles sont malheureusement nombreuses et profondes. J’en retiendrai ici brièvement quelques-unes.

a. Premièrement, pour vraiment comprendre les Écritures, en particulier le début de la Genèse et d’autres textes bibliques nous parlant de l’œuvre créatrice, il nous faudrait au préalable avoir une connaissance suffisante des théories scientifiques modernes. On se tourne alors vers les scientifiques qui deviennent à nos yeux « les experts », le « haut clergé », le « magistère » autorisé à nous dire ce que nous devons croire sur la doctrine de la création et comment il nous faut accommoder la Bible à ces théories. Nous lançons ainsi aux croyants non scientifiques dans nos Églises le message selon lequel ils ne pourraient pas comprendre ces pages de la Parole de Dieu, à moins d’avoir été illuminés par la « gnose » scientifique moderne.

Cela aura, tôt ou tard, forcément pour effet chez les fidèles de fermer la Bible (qu’ils estimeront ne plus pouvoir comprendre par eux-mêmes). Quant aux pasteurs et aux enseignants qui ne sont pas tellement versés en science, ils éviteront de parler de la doctrine de la création dans leurs enseignements (sauf de dire que Dieu est Créateur). Ainsi, au lieu d’encourager les fidèles à faire comme les Béréens qui examinaient chaque jour les Écritures pour voir si ce qu’on leur disait était exact (Ac 17.11), cela laissera encore plus le peuple de Dieu dans l’ignorance au sujet de la doctrine de la création, et les rendra encore plus vulnérables au lavage de cerveau évolutionniste systématique imposé dans les écoles, depuis le primaire jusqu’à l’université.

b. Deuxièmement, nous lançons le même message à tous ceux dans le monde qui sont rejoints par l’Évangile à travers les efforts missionnaires, et je pense en particulier à ceux qui viennent de pays moins développés ou de milieux peu éduqués. Dans ces pays, beaucoup de chrétiens (récents convertis ou non) ignorent les théories scientifiques modernes sur les origines du monde qui ont été développées et enseignées surtout dans le monde occidental ou dans des milieux plus « éduqués » (à moins d’avoir un lien historique avec des Églises libérales occidentales). Ils n’auraient donc pas, eux non plus, la « clé » pour bien interpréter les premiers chapitres de la Genèse. Ils doivent dépendre pour cela des missionnaires et enseignants « éduqués » (surtout occidentaux) et de la documentation étrangère (surtout anglaise) pour être éclairés quant à la véritable signification des premières pages de la Genèse et pour découvrir par le « magistère des experts » que Dieu n’a pas pris six jours pour créer le monde, mais des milliards d’années.

c. Troisièmement, le même problème existe pour les chrétiens des 18 premiers siècles de notre ère. Ils croyaient généralement en une création en six jours véritables8 et ne pouvaient pas savoir d’avance que la science naturaliste des 19e et 20siècles allait proposer une évolution cosmologique, géologique et biologique s’étalant sur des milliards d’années. Si la science est au-dessus de la Bible et si elle est nécessaire pour « savoir » que Dieu a pris des milliards d’années pour créer le monde, nous devons forcément conclure que les chrétiens du passé n’avaient pas l’éclairage suffisant pour véritablement comprendre la première page de la Bible. Cela soulève de grandes questions sur la nature, la clarté et la suffisance de la révélation biblique et sur la sagesse même de Dieu d’avoir donné à son Église une révélation cryptique et pratiquement incompréhensible de son œuvre créatrice. Bien sûr, certaines doctrines bibliques ont mis plus de temps que d’autres à être bien comprises et articulées par l’Église, mais la raison ne se trouvait pas dans la nécessité de recevoir un apport d’informations extérieur à la Bible, mais plutôt dans le besoin de réfuter les erreurs et de mieux comprendre ce que la Bible dit sur ces sujets (par exemple : les doctrines de la Trinité, de la christologie, de la justification, des sacrements, etc.) Ces doctrines bibliques étaient accessibles dans les Écritures à toutes les générations passées, ce qui n’est pas le cas des nouvelles doctrines de la création en circulation depuis le 19siècle.

d. Quatrièmement, je crois qu’un problème semblable est suspendu au-dessus de la tête des chrétiens qui soumettent leur compréhension des Écritures à « l’éclairage » nouveau de la science. Car si les chrétiens du passé ne pouvaient pas s’imaginer à quoi ressembleraient les théories scientifiques d’aujourd’hui, les chrétiens d’aujourd’hui ne savent pas plus à quoi ressembleront les théories scientifiques de demain. Il est fort à parier que les chrétiens de demain qui recevront favorablement « l’éclairage » de la science de leur temps pour comprendre Genèse 1 estimeront que les chrétiens d’aujourd’hui étaient trop dépendants de la science arriérée du 21siècle, et qu’ils n’avaient pas les informations nécessaires pour avoir une doctrine correcte de la création… N’oublions pas que ce que Jacob a fait subir à son père et à son frère, il l’a lui-même subi des années plus tard aux mains de son oncle… Cela aussi fait partie de la sage providence divine.

e. Cinquièmement, à partir du moment où on laisse le principe de la Scriptura sub scientia déterminer notre compréhension de certaines œuvres divines, on ne sait plus ni où, ni quand, ni comment ce principe devrait cesser d’opérer dans l’Église. Qu’est-ce qui nous permet de déterminer quand il faudra revenir à la sola Scriptura? D’ailleurs, je ne comprends pas pourquoi certains frères s’arrêtent au créationnisme progressif et qu’ils ne vont pas jusqu’à adopter l’évolutionnisme théiste, puisque la majorité des scientifiques modernes nous disent que l’évolution biologique est un fait certain. Pourquoi accepter l’évolution stellaire et l’évolution géologique, et rejeter l’évolution biologique? De plus, l’histoire de l’interprétation biblique nous enseigne que la logique de la Scriptura sub scientia, une fois adoptée, ne s’arrête pas arbitrairement aux deux premiers chapitres de la Genèse. Elle s’étend irrémédiablement au récit de la chute, à l’histoire de Noé et des premiers patriarches, puis aux miracles de l’Ancien et du Nouveau Testament, à la résurrection et à l’ascension de notre Sauveur, ainsi qu’à la divinité de Jésus et au caractère divinement inspiré des Écritures. Toutes ces vérités bibliques et d’autres encore ont déjà été maintes fois attaquées et rejetées par diverses formes de libéralisme, sous prétexte que ce sont là des conceptions mythiques « préscientifiques » qu’il faudrait aujourd’hui démythologiser pour parvenir au cœur du message de l’Évangile. N’avons-nous pas tiré des leçons de l’histoire? Au fond, s’il faut soumettre la doctrine de la création au jugement de la science, pourquoi ne faudrait-il pas soumettre également la doctrine de la résurrection du Christ au jugement de la science?

5. Ce que nous confessons à ce sujet demeure valide🔗

En conclusion, je citerai des extraits de trois confessions de foi réformées classiques qui affirment le principe de la sola Scriptura confessé par nos pères spirituels auquel nous ferons bien de prêter encore attention dans notre étude de la doctrine de la création révélée dans la Parole de Dieu.

Tout d’abord, l’article 5 de la Confession de foi de La Rochelle sur l’autorité des Écritures :

« Nous croyons que la Parole qui est contenue dans ces livres a Dieu pour origine, et qu’elle détient son autorité de Dieu seul et non des hommes. Cette Parole est la règle de toute vérité et contient tout ce qui est nécessaire au service de Dieu et à notre salut; il n’est donc pas permis aux hommes, ni même aux anges, d’y rien ajouter, retrancher ou changer. Il en découle que ni l’ancienneté, ni les coutumes, ni le grand nombre, ni la sagesse humaine, ni les jugements, ni les arrêts, ni les lois, ni les décrets, ni les conciles, ni les visions, ni les miracles ne peuvent être opposés à cette Écriture sainte, mais qu’au contraire toutes choses doivent être examinées, réglées et réformées d’après elle. »

Ensuite, l’article 7 de la Confession de foi des Pays-Bas sur la perfection des saintes Écritures :

« Nous croyons que cette Écriture sainte contient parfaitement la volonté de Dieu et que tout ce que l’homme doit croire pour être sauvé y est suffisamment enseigné. Tout ce qui a trait à la manière dont Dieu nous demande de le servir y est décrit en long et en large, de sorte que personne, pas même un apôtre ni même un ange du ciel, ne doit enseigner autre chose que ce que les saintes Écritures nous enseignent, comme le dit l’apôtre Paul (Ga 1.8-9). Le fait qu’il soit défendu d’ajouter ou de retrancher à la Parole de Dieu démontre bien que la doctrine est parfaite et complète à tous égards.
Par conséquent, il ne faut pas considérer les écrits des hommes, même des hommes les plus saints, comme étant de même valeur que les écrits divins. Il ne faut pas non plus considérer la coutume, le grand nombre, l’ancienneté, le passage du temps, la succession des personnes, les conciles, les décrets, les décisions officielles comme étant de même valeur que la vérité de Dieu, car la vérité de Dieu est au-dessus de tout. Tous les hommes sont en effet menteurs et plus vains que la vanité même. C’est pourquoi nous rejetons de tout notre cœur tout ce qui ne s’accorde pas à cette règle infaillible, comme les apôtres nous l’enseignent en disant : “Éprouvez les esprits pour savoir s’ils sont de Dieu” (1 Jn 4.1) et “Si quelqu’un vient à vous et n’apporte pas cette doctrine, ne le recevez pas dans votre maison” (2 Jn 1.10). »

Enfin, l’article 1.10 de la Confession de foi de Westminster sur les Écritures qui sont notre Juge suprême :

« Le Juge suprême par qui tous débats religieux doivent être réglés, par qui toutes décisions des conciles, toutes opinions des Pères, toutes doctrines humaines et toutes manières de voir particulières doivent être examinées, et à la décision duquel nous devons nous remettre, c’est le Saint-Esprit parlant par l’Écriture; et nul autre. »

Notes

1. Pour plus de détails, voir ma prédication sur Hébreux 11.3 intitulée La foi comprend les actes créateurs de Dieu.

2. À cet égard, il est utile de comparer la géographie et l’hydrographie qui existaient au commencement autour du jardin d’Éden (Gn 2.10-14) avec la géographie et l’hydrographie du Moyen-Orient post-diluvien. Certains noms de lieux et de fleuves qui existaient à l’origine sont inconnus; d’autres noms ont été réutilisés après le déluge pour désigner des régions et des fleuves du « nouveau monde » post-diluvien (ce qui ne veut pas nécessairement dire que ces régions et ces fleuves sont situés exactement aux mêmes endroits qu’avant le déluge; pensons à la réutilisation des noms de nombreuses localités européennes pour désigner des lieux du nouveau monde américain…). Mais la description d’ensemble (un fleuve sortant d’Éden et se divisant en quatre, etc.) présente un visage passablement différent de la carte du Moyen-Orient que nous connaissons aujourd’hui. De plus, Éden, avec son entrée gardée par des chérubins protecteurs (Gn 3.23-24), est littéralement disparu de la carte. Le jugement universel de Dieu par le déluge a sans aucun doute modifié en profondeur le visage de la terre.

3. Je pense en particulier à la géologie et à ses disciplines associées : stratigraphie, paléontologie, océanographie, orologie, volcanologie, hydrologie, géodynamique, tectonique, etc., et bien entendu l’histoire de la géologie et les temps géologiques.

4. Comparer les âges des patriarches en Genèse 5 avec ceux en Genèse 11 et suivants.

5. En particulier la crainte nouvelle des animaux à l’égard de l’homme et la permission de manger de la chair animale (Gn 9:2-3).

6. On peut penser à des changements comportementaux, alimentaires et même génétiques chez l’homme et les animaux, mais aussi à des changements climatiques causés par le bouleversement du cycle de l’eau pendant et après le cataclysme diluvien.

7. Il est frappant de voir que la croyance en des milliards d’années adoptée par plusieurs chrétiens a pris son envol au 19siècle, sous l’influence de théories géologiques fondées sur le présupposé uniformiste qui rejette le déluge universel survenu à l’époque de Noé (je pense par exemple à l’influence de Charles Llyell et à d’autres géologues de cette même école de pensée uniformiste). En d’autres mots, pour pouvoir interpréter les roches et les fossiles dans le sol comme étant une preuve qu’il s’est écoulé des millions d’années sur la terre, il a d’abord fallu rejeter le présupposé catastrophiste de la Bible qui nous révèle la réalité historique d’un gigantesque déluge ayant rapidement englouti la terre entière. Le retour au modèle biblique catastrophiste diluvien ne pourra que nous amener à interpréter autrement les roches et les fossiles que nous observons dans le sol : la plupart de ces formations doivent provenir du déluge, et non d’une très lente évolution géologique étalée sur des millions d’années. Malheureusement, plusieurs chrétiens qui adoptent le modèle des milliards d’années ne semblent pas conscients que ce modèle repose sur un présupposé contraire à la Bible.

8. Il y a bien sûr des exceptions, dont la plus notable est Augustin qui, tout en prônant une interprétation littérale, a plutôt penché pour une création instantanée de toutes choses (basée entre autres sur une mauvaise traduction latine de Gn 2.4). Augustin ne croyait toutefois pas dans des milliards d’années ou dans la mort avant la chute.