Témoigner à une époque d’apathie
Témoigner à une époque d’apathie
- Introduction à l’apathéisme
- Les sources de l’apathie
- Comment témoigner?
- Un élément à prendre en considération
Comment pouvons-nous témoigner auprès d’une personne qui ne s’intéresse pas à Dieu?
C’est l’un des défis de notre appel prophétique dans ce monde : nous n’avons pas toujours un public intéressé par ce que nous avons à dire. Nos interlocuteurs peuvent être apathiques. Pourquoi s’intéresseraient-ils à la vérité chrétienne? Certains sont ouvertement hostiles, bien sûr, et d’autres souhaitent en savoir plus.
Mais si je peux généraliser, je dirais que notre époque et la culture occidentale sont marquées par l’apathie religieuse.
Au cœur de l’apathie religieuse se trouve un désintérêt pour les questions liées à l’existence de Dieu. Il s’agit de questions telles que : Dieu existe-t-il? Si oui, comment se révèle-t-il et à quoi ressemble-t-il? Et s’il n’existe pas, qu’est-ce que cela signifie pour nous? Pour de nombreuses personnes vivant dans des pays occidentaux comme le nôtre, ces questions sur Dieu ne signifient pas grand-chose.
1. Introduction à l’apathéisme⤒🔗
D’où vient donc cette apathie? Pour cet article, je dois beaucoup au livre intitulé Apatheism [Apathéisme], de Kyle Beshears (B&H Academic, 2021). Il décrit un courant de pensée qui fait qu’il est difficile d’être un témoin fidèle du Christ.
Beshears explique que traditionnellement, il y avait quelques perspectives différentes sur la question de l’existence de Dieu.
- l’athéisme : la croyance que Dieu (ou les dieux) n’existe(nt) pas;
- l’agnosticisme : la croyance qu’il n’y a pas assez de preuves pour prouver ou infirmer l’existence de Dieu, « nous ne savons tout simplement pas ».
- le théisme : la croyance en l’existence d’un Dieu (ou de dieux) avec lequel ou lesquels nous pouvons entrer en relation.
Comme quatrième perspective, Beshears explique qu’il existe un autre point de vue courant sur l’existence de Dieu, et que c’est probablement l’attitude dominante aujourd’hui. On l’appelle l’apathéisme. Il s’agit de l’opinion selon laquelle l’existence ou non de Dieu (ou des dieux) n’est pas très importante.
Un « apathéiste » ne prend pas position sur la question de Dieu, il s’en fiche.
Nous avons probablement tous fait l’expérience d’essayer de dialoguer avec quelqu’un qui s’en fiche, d’avoir une conversation sur un sujet qui ne l’intéresse pas : c’est très difficile. Paradoxalement, il est beaucoup plus facile de discuter avec quelqu’un qui n’est pas du tout d’accord avec nous sur un sujet : cette personne s’intéresse toujours à la question débattue.
Pensez, par exemple, à une interaction avec un musulman pratiquant qui étudie à l’université. Étrangement, nous avons des choses à discuter avec lui! Il a envie de poursuivre la conversation parce qu’il reconnaît l’existence d’un Être divin.
Il y a de nombreuses années, j’avais un collègue qui aimait beaucoup parler de religion. C’était un étudiant de niveau postsecondaire, cultivé et poli, mais il ne croyait pas en Dieu. En termes de croyances, il avait des bases très différentes des miennes. Et pourtant, nous avions d’excellentes conversations. Nous pouvions parler facilement et naturellement, car il avait manifestement réfléchi à certaines de ses idées; il avait lu, écouté et réfléchi. Même s’il était athée, l’idée de Dieu lui tenait à cœur.
C’est probablement typique d’un athée. Les athées ne croient pas en Dieu pour une raison précise : à cause du problème du mal, ou parce que les religieux ont fait tant de mal dans ce monde, ou à cause d’un autre point critique contre la foi. Le fait est qu’ils y ont réfléchi. Nous pouvons donc essayer de leur répondre, de trier les objections, voire d’utiliser l’apologétique pour défendre la vérité et orienter la conversation vers le Christ.
En revanche, nous aurons peut-être du mal à parler avec quelqu’un d’apathique. Il ne ressent tout simplement rien à propos des « questions sur Dieu ». J’en ai fait l’expérience à plusieurs reprises lors de mes déplacements en avion. Je m’assois à côté de quelqu’un dans l’avion, je lui dis bonjour et j’entame timidement la conversation. La conversation s’oriente rapidement vers ce que je fais dans la vie : « Oh, je suis pasteur. » C’est une entrée en matière naturelle pour une discussion sur Dieu. Je peux demander : « Êtes-vous chrétien? Allez-vous à l’église? » Toutefois, je me heurte rapidement à un mur.
Peut-être qu’un voyage en avion n’est pas le meilleur cadre pour cela. Lorsqu’ils apprennent que je suis pasteur, je pense que les gens ont peur d’être assis à côté d’un fou de religion, quelqu’un qui va essayer de les convertir pendant les dix prochaines heures. Ils coupent donc la conversation et s’intéressent de très près aux films qui passent. Sont-ils intimidés? Plus probablement, je pense qu’ils sont tout simplement apathiques face aux questions sur Dieu.
Nous avons du mal à établir une relation avec un athée, mais c’est peut-être encore plus difficile avec un apathéiste. Nous sommes déconcertés : Comment pouvez-vous ne pas vous intéresser à Dieu? La foi en Dieu est la partie la plus importante de notre vie, et le Christ donne un sens à tout ce que nous faisons. Pourtant, voilà une personne qui ne s’y intéresse pas.
2. Les sources de l’apathie←⤒🔗
Il est bon de réfléchir à l’origine de cette apathie. À cause du péché, dit la Bible, tous les hommes sont aveugles à la réalité du vrai Dieu et perdus dans les ténèbres. En dehors de l’Esprit régénérateur de Dieu, personne ne le reconnaîtra jamais avec une foi salvatrice.
L’incrédulité à l’égard de Dieu n’est pas nouvelle. Cependant, « l’esprit du temps présent » peut également exercer une forte influence sur les gens (Rm 12.2). En ce qui concerne l’esprit de notre époque, nous pouvons dire qu’il existe une aversion générale pour la foi. Beshears souligne qu’une telle indifférence religieuse se retrouve typiquement dans une société sécularisée, qui vit confortablement et qui profite de nombreuses distractions.
La culture occidentale est sécularisée en ce sens qu’il est devenu beaucoup moins acceptable de croire en Dieu avec quelque conviction que ce soit. La foi en Dieu n’est qu’un choix parmi de nombreuses autres croyances. Aujourd’hui, il existe de nombreuses explications alternatives de l’univers et de ce qui donne un sens à la vie. Par exemple, les gens se tournent vers la science de l’évolution pour trouver les réponses aux plus grandes questions de la vie. Nous sommes également devenus plus conscients de l’existence de nombreuses religions différentes : entre le christianisme, l’islam, l’hindouisme, la wicca et le bouddhisme, qui peut dire laquelle est la bonne? Nous vivons à une époque de pluralisme, et il est de plus en plus difficile de se préoccuper de Dieu lorsque le champ est encombré de « vérités » concurrentes. La religion devient alors une affaire purement privée dont l’impact sur la société est considérablement réduit. Notre culture est sécularisée.
L’apathie règne parce que notre époque et le contexte dans lequel nous vivons sont si confortables. Aujourd’hui, le sentiment de sécurité et de tranquillité est largement répandu. Nous menons une vie agréable : une bonne carrière, une maison confortable, assez de richesse pour avoir notre confort matériel et des relations positives avec les autres. Lorsque la vie semble toujours sûre, stable et prévisible, il n’y a guère de raison de se tourner vers Dieu pour obtenir de l’aide. Qu’est-ce que Dieu peut me donner que je n’ai pas déjà? À juste titre, Jésus a souvent averti que les riches auront du mal à entrer dans le royaume de Dieu, et ne sommes-nous pas tous riches, à bien des égards? Riches et confortables, nous sommes tentés d’oublier Dieu.
Un troisième facteur à l’ère de l’apathie est la distraction. Les gens sont soit occupés par leur travail, soit par leurs nombreux passe-temps, soit par leurs appareils électroniques. La personne typique travaille toute la semaine, mais vit pour le week-end. Lorsque nous sommes occupés de la sorte, toujours en train de passer à autre chose, nous avons du mal à réfléchir à notre raison d’être et à ce qui est vraiment vrai et important dans la vie. Réfléchir en profondeur demande du temps, et nous n’en avons pas. Dans un monde distrait, Dieu n’est pas seulement inutile, il passe inaperçu.
Ce sont là des facteurs importants de la vie à une époque d’apathie. Nous pouvons certainement comprendre qu’il sera difficile de témoigner auprès de quelqu’un d’apathique.
Autrefois, on voyait des panneaux d’affichage le long des autoroutes qui annonçaient : « Jésus est la réponse. » Je pense que ce message n’aurait plus vraiment de résonance aujourd’hui. Jésus est la réponse à une question que les gens ne se posent tout simplement pas.
La plupart des gens ne s’inquiètent pas d’être réconciliés avec Dieu à cause d’une vague idée du péché et de la culpabilité. Cela signifie qu’il n’y a pas vraiment d’étincelle pour une conversation sur l’Évangile.
3. Comment témoigner?←⤒🔗
Comment pouvons-nous témoigner à une époque d’apathie? L’Écriture nous enseigne toujours qu’il faut commencer par le cœur. Dans ce cas également, nous devons commencer par le cœur. Et pas par le cœur de notre voisin, mais par notre propre cœur! En interagissant avec les autres, nous devrions d’abord penser à l’exemple de notre propre vie. Dans quelle mesure notre démarche se démarque-t-elle dans cette culture?
Peut-être devrions-nous commencer par nous demander si nous avons nous aussi été affectés par notre époque apathique. En vivant dans cette culture séculière, confortable et distraite, est-il possible que j’aie commencé à perdre la joie du salut? Lorsque nous pensons moins au vrai Dieu, nous nous tournons si rapidement vers les idoles de l’époque actuelle. Alors, où cherchons-nous la joie? Trouvons-nous la joie dans les choses matérielles? Dans les gens qui nous entourent? Nous réjouissons-nous de mener une belle vie?
L’alternative, bien sûr, est de retrouver la joie du salut. En effet, s’il existe un contraste avec l’apathie, c’est la véritable joie dans le Christ. Pensez à la façon dont les Écritures parlent de la joie de l’Évangile qui façonne la vie (par exemple, après la montée de Jésus au ciel, les disciples, « après l’avoir adoré, retournèrent à Jérusalem avec une grande joie », Luc 24.52). Nous pouvons communiquer cette même grande joie parce que nous connaissons Dieu par le Christ. Lorsque notre propre vie est empreinte de la joie dans le Seigneur, il devient un peu plus facile de montrer aux gens à quel point la vie en Christ vaut la peine d’être vécue.
De tous les arguments apologétiques que nous pouvons avancer, aucun n’est probablement meilleur que la vie d’un croyant sincère. Si nous sommes apathiques, nous n’avons aucune raison d’attendre autre chose qu’une réponse apathique à l’Évangile. Cependant, lorsque nous nous intéressons nous-mêmes à l’Évangile, nous sommes bien mieux placés pour en parler à ceux qui nous entourent.
4. Un élément à prendre en considération←⤒🔗
Dans tout cela, soyons réalistes quant à l’objectif que nous poursuivons en interagissant avec nos voisins. L’objectif n’est pas la conversion, mais la considération. On a souvent dit que l’un des objectifs du témoignage ou de l’apologétique chrétienne est de mettre des cailloux dans les chaussures des gens. Notre voisin peut s’éloigner et sembler indifférent, mais ce que vous avez dit — et la manière dont vous vivez — peut rester en lui comme un caillou dans sa chaussure. Au bout d’un certain temps, peut-être que cela le dérangera suffisamment pour qu’il y jette un autre coup d’œil.
Et dans ce cas, le caillou que nous plaçons concerne leur propre source de joie. Quelle est leur plus grande source de bonheur? Est-ce le travail, la musique, les amis, l’argent, l’amour ou autre chose? La joie qu’ils éprouvent est-elle suffisamment puissante pour les soutenir dans les périodes les plus sombres de la vie? Leur joie est-elle suffisamment permanente pour rester toujours présente?
En tant qu’enfants de Dieu, le Seigneur nous a confié un grand trésor, quelque chose dont nous pouvons nous réjouir et dans lequel nous pouvons trouver notre bonheur. Lorsque nous manifestons cette joie aux autres, nous pouvons laisser au Seigneur les résultats de chaque rencontre. C’est Dieu seul qui allume le véritable amour et la bonne passion. Il nous appelle simplement à être les témoins fidèles et joyeux de sa gloire.