Homilétique (6) - Trois exigences de la prédication
Homilétique (6) - Trois exigences de la prédication
Ce chapitre, comme les suivants, part du principe que la discipline n’est pas contraire à l’action de l’Esprit. L’une comme l’autre doivent permettre d’aller plus loin. Nous sommes convaincus que seul le Saint-Esprit peut accomplir une œuvre durable qui porte du fruit pour la gloire de Dieu. Mais il importe aux serviteurs (à tout chrétien) de gérer avec diligence ce qui leur a été confié. Nous pourrions paraphraser ce qui est écrit dans la lettre aux Hébreux : « Toute discipline paraît au début un sujet de tristesse, mais ensuite elle produit un fruit paisible de justice » (Hé 12.11).
1. L’unité⤒🔗
a. La prédication devrait porter sur un seul sujet←↰⤒🔗
Comment l’auditeur pourrait-il appliquer sérieusement ce qu’il a entendu, si ce n’est pas le cas? Comment pourrait-il le transmettre ensuite à quelqu’un d’autre? Dans la marche chrétienne, il est utopique de vouloir franchir plusieurs étapes en une seule fois.
Cela impose de choisir un angle. Cela implique de faire un tri dans ses idées. On pourrait dire qu’un prédicateur est comme un sculpteur : c’est quand il a enlevé tout ce qui n’est pas nécessaire que la forme harmonieuse apparaît.
Cela empêche le prédicateur de vagabonder d’une pensée à l’autre, l’oblige à réfléchir à ce qu’il va dire et ne pas dire. Les auditeurs ont besoin d’entendre un discours cohérent. « Il est plus facile d’attraper une balle qu’une poignée de sable. »
b. L’idée principale doit venir du texte lui-même←↰⤒🔗
L’idée principale doit venir du texte lui-même, qu’il s’agisse du thème principal du texte ou d’un thème secondaire. Il faut donc se poser les questions suivantes :
- De quoi l’auteur parle-t-il exactement?
- Que dit-il à ce sujet?
Lire et assimiler le texte pour définir l’idée principale qu’il communique, ou s’il y a plusieurs idées principales, celle que l’on va retenir.
Travailler cette idée et la formuler sous la forme d’un résumé, une « phrase-message ». Une bonne « phrase-message » serait : « Dieu demeure fidèle à l’égard d’un peuple infidèle » ou « Une foi fragile dans un Sauveur puissant », etc.1
Quelle que soit l’approche utilisée, il est nécessaire de bien formuler l’idée principale. Une prédication peut comporter plusieurs points, mais elle ne peut pas porter sur trois sujets différents.
2. Le but←⤒🔗
L’auteur biblique ne s’adresse pas à des anges. Il s’est adressé en premier lieu — et s’adresse encore — à des personnes particulières, dans un contexte donné, et cela doit absolument être pris en compte. Le but du texte et de la prédication est nécessairement en lien avec l’aspect de la condition humaine qui y est développé. On pourrait le dire ainsi : la Parole de Dieu, lue ou prêchée, déborde largement tous les contextes imaginables; cependant, elle est toujours lue ou entendue dans un contexte donné.
Prendre le texte au sérieux suppose que l’on se pose ce genre de questions :
- Quelle est l’intention de l’auteur?
- Pourquoi le Saint-Esprit a-t-il inspiré ce texte?
- Pourquoi Paul aborde-t-il à cet endroit précis de son raisonnement ce thème-là et pas un autre?
- Qu’est-ce qui manquait à ses lecteurs?
Bryan Chapell écrit2 :
« L’aspect particulier de la condition humaine que met en lumière le texte sert de point commun aux lecteurs d’alors et aux croyants d’aujourd’hui. La prédication met en évidence la manière dont le texte répond au problème qui y apparaît et dont nous faisons l’expérience dans notre vie. »
Une fois cet aspect particulier de la condition humaine mis en lumière, la prédication oriente l’auditoire vers la grâce de Dieu, vers la réponse de Dieu.
Cet aspect particulier de la condition humaine devra probablement être présenté dans l’introduction, ce qui constituera sans aucun doute une bonne accroche. Il ne s’agit pas nécessairement de quelque chose dont nous serions coupables : il peut s’agir aussi de la souffrance, de la maladie, du désir d’être de meilleurs parents, etc.
Trois questions permettent de bien formuler le problème humain :
- Que dit le texte?
- Quelles questions spirituelles et pratiques le texte aborde-t-il dans son contexte?
- Quelles préoccupations spirituelles et pratiques les auditeurs d’aujourd’hui partagent-ils avec ceux d’autrefois?
Pour la clarté du message, la réponse à chacune de ces trois questions devrait pouvoir tenir en une seule phrase.
3. L’application3 ←⤒🔗
Si le prédicateur néglige cette étape, l’auditoire se dira : « Et après? »
Deux écueils existent à cet égard :
- Prendre les auditeurs pour des enfants.
- Considérer qu’ils savent automatiquement appliquer la vérité biblique à leur vie.
Il est intéressant de constater que Jésus, Paul ou Jean appellent leurs auditeurs enfants (et même « petits enfants ») tout en les considérant comme des adultes4! Dans tous les cas, le prédicateur doit rendre évident que le texte biblique est porteur d’une implication importante pour chacun des auditeurs, dans sa vie personnelle, dans sa situation propre, quelle qu’elle soit5.
Il manque à beaucoup de sermons un but clair et une application pratique. Un message demeure incomplet tant que les idées présentées ne conduisent pas à une application concrète. L’objectif de la prédication ne doit pas être seulement d’informer, mais aussi de transformer6.
Notes
1. Il peut arriver que le prédicateur ne soit pas en mesure de dire lui-même la phrase résumé de son message, après avoir prêché. Ce n’est pas bon signe.
2. Bryan Chapell, Prêcher, l’art et la manière. Excelsis, 2009. Ce livre a inspiré plusieurs points de ce cours.
3. Nous reviendrons sur cet aspect avec le chapitre XII intitulé La proclamation du sermon.
4. Jean dit en quelque sorte à ses lecteurs : « Petits enfants, vous n’êtes plus des enfants! » (voir 1 Jn 2.18-23).
5. Voir par exemple Tite 2.1-6. Il ne s’agit pas de créer une attente excessive, mais plutôt de susciter un sain désir.
6. Voir le chapitre XI de ce cours intitulé La pratique de l’application dans la prédication.