Le but des sacrements et la façon d’en profiter
Le but des sacrements et la façon d’en profiter
La Parole et le sacrement ont-ils donc tous deux pour but de conduire notre foi au sacrifice de Jésus-Christ sur la croix comme à l’unique fondement de notre salut?
Oui, assurément; car le Saint-Esprit nous apprend dans l’Évangile et nous confirme par les saints sacrements que tout notre salut repose sur le sacrifice unique du Christ, offert pour nous sur la croix1.
1. Rm 6.3; 1 Co 11.26; Ga 3.26-27.
Selon le Nouveau Testament, combien de sacrements le Christ a-t-il institués?
Deux : le saint Baptême et la sainte Cène1.
1. Mt 28.19-20; 1 Co 11.23-26.
Catéchisme de Heidelberg, Q&R 67 et 68
D’où vient la foi? La foi vient du Saint-Esprit qui la produit dans notre cœur. L’Esprit de Dieu agit de façon libre, secrète et mystérieuse, comme le vent qui souffle où il veut (Jn 3.8). En même temps, le Saint-Esprit a bien voulu utiliser des moyens très concrets pour faire son travail. Il a choisi deux outils privilégiés : la Parole et les sacrements. Qu’est-ce qu’un sacrement? C’est un signe et un sceau institué par Dieu pour nous aider à mieux comprendre l’Évangile et pour sceller sa promesse en nous. La Parole et les sacrements sont deux outils qui ont un mode d’emploi très différent. Le premier est audible, le deuxième est visible. Le Saint-Esprit travaille dans un atelier « audiovisuel ». Pourtant, les deux outils opèrent de façon harmonieuse. Les deux visent un même but.
1. Quel est le but des sacrements?⤒🔗
Le but des sacrements est identique à celui de la Parole. La Parole a pour but de fortifier notre foi. Les sacrements aussi. Un marteau sert à clouer des clous, tandis qu’un tournevis sert à visser des vis. Mais la Parole et les sacrements servent au même but, sauf que ces deux outils s’y prennent différemment. La Parole passe par nos oreilles et entre dans notre cœur. Les sacrements annoncent visiblement le même message qui passe par nos yeux ou par notre bouche. Le but des deux outils est identique, celui de nous faire regarder au sacrifice de Jésus-Christ et de diriger notre foi vers lui seul.
« La Parole et le sacrement ont-ils donc tous deux pour but de conduire notre foi au sacrifice de Jésus-Christ sur la croix comme à l’unique fondement de notre salut? Oui, assurément; car le Saint-Esprit nous apprend dans l’Évangile et nous confirme par les saints sacrements que tout notre salut repose sur le sacrifice unique du Christ, offert pour nous sur la croix » (Q&R 67).
Comme pour tout outil que nous ne savons pas bien utiliser, il y a un danger à nous servir des sacrements : celui de les utiliser dans un but différent de ce que Dieu a voulu. Une perceuse sert à percer des trous, mais si nous nous en servons pour scier des planches, nous aurons des problèmes. C’est exactement ce qui est arrivé dans l’histoire de l’Église avec l’utilisation des sacrements. Certains ont estimé que les sacrements devaient attirer notre attention sur les sacrements eux-mêmes. Plusieurs ont été attirés par leur prétendu pouvoir presque magique, comme s’ils possédaient une efficacité directe. Le Catéchisme de l’Église catholique de 1992 dit par exemple ceci aux paragraphes 1127-1128 :
« Célébrés dignement dans la foi, les sacrements confèrent la grâce qu’ils signifient. Ils sont efficaces parce qu’en eux le Christ lui-même est à l’œuvre. […] Les sacrements agissent ex opere operato [littéralement : “par le fait même que l’action est accomplie”], c’est-à-dire en vertu de l’œuvre salvifique du Christ, accomplie une fois pour toutes. »
Nous ne sommes pas nous-mêmes à l’abri de cette tentation. Quand nous participons à la sainte cène, il peut nous arriver de penser recevoir quelque chose de plus que lorsque nous écoutons la prédication. En réalité, les deux, la Parole et les sacrements, nous font regarder vers la même réalité. Quelle est cette réalité? Le sacrifice du Christ et les bienfaits qu’il nous procure, c’est-à-dire la promesse du pardon des péchés et de la vie éternelle en Jésus-Christ. Les sacrements ne nous « confèrent » pas la grâce de façon automatique, quasi magique. Ce sont des signes et des sceaux de la promesse de Dieu.
Un panneau de signalisation routier n’est pas la même chose que la route elle-même. Le panneau attire notre attention sur la route. Une fois que nous voyons le panneau, il serait dangereux de garder les yeux fixés sur le panneau. Nous risquons des accidents graves! De même, un sceau sur une bouteille de médicaments ne devrait pas attirer notre attention sur le sceau lui-même, mais sur la garantie que nous procure le sceau concernant les médicaments contenus dans la bouteille. Les sacrements sont une « signalisation » sur notre route, une garantie, une attestation que les promesses de Dieu sont fiables et dignes de confiance, à recevoir par la foi. Les sacrements eux-mêmes ne nous sauvent pas, mais ils nous indiquent assurément la source et le seul fondement de notre salut.
D’autres croient que les sacrements attirent notre attention sur nous-mêmes. Le baptême serait un témoignage que nous avons mis notre foi en Jésus. Par exemple, la confession de foi d’une Église baptiste dit ceci :
« Cette cérémonie est un signe extérieur de ce qui s’est passé spirituellement à l’intérieur : nous avons été baptisés dans la mort de Christ. Quand l’eau nous recouvre, nous reconnaissons que nous avons été ensevelis avec notre Sauveur Jésus-Christ. Quand nous sortons de l’eau, nous montrons que nous sommes ressuscités avec Christ et désirons marcher en nouveauté de vie avec lui. Le baptême est le symbole de ce qui s’est déjà passé dans le cœur et la vie de celui qui a mis sa confiance en Christ comme Sauveur et Seigneur de sa vie. »
Encore là, l’attention est détournée des promesses de Dieu. Dans cette perspective, les sacrements ne seraient pas une image du sacrifice de Jésus sur la croix, mais une image de ce qui se produit prétendument dans le cœur d’une personne. Le panneau de signalisation représente alors le tournant que la personne a pris avec sa voiture ou que Jésus lui a fait prendre. L’image représente son expérience personnelle, et non le contenu de la Parole. Il s’ensuit qu’ici aussi la Parole et les sacrements sont déconnectés.
Les sacrements peuvent-ils alors servir de sceau? Le baptême peut-il garantir et authentifier quoi que ce soit? Peut-il nous assurer que nous sommes réellement convertis? Non, il y a des gens qui ont été baptisés adultes et qui ont abandonné la foi qu’ils n’ont en fait jamais eue réellement. Leur baptême demeure-t-il alors valide? Devrait-on les rebaptiser s’ils se repentent et reviennent à la foi? Certains l’exigent, car pour eux le premier baptême n’avait alors aucune valeur. Il y a des gens qui se font rebaptiser plusieurs fois, parce que chaque fois leur conversion ne semblait pas authentique. Cette conception des sacrements n’offre aucune garantie, aucun sceau d’attestation. Notre propre expérience de foi ne peut jamais être un fondement solide pour notre foi.
Certains réformés ont adopté cette attitude vis-à-vis de la sainte cène et vont tellement loin dans leur introspection que, dans certaines Églises, une toute petite minorité de gens seulement participent à la sainte cène. Tous les autres attendent une expérience particulière. Ils ont tellement de doute sur eux-mêmes qu’ils n’osent jamais participer. Suis-je bien régénéré? Ai-je réellement la foi? Suis-je passé par toutes les bonnes étapes de la conversion? Il est vrai que le Seigneur nous demande de nous examiner nous-mêmes. Mais cet examen devrait toujours se faire à la lumière de sa Parole. Nous examinons notre vie à travers des lunettes qui regardent d’abord au Seigneur Jésus. Sinon, nous sommes désespérés! La foi n’est pas une confiance dans ce que j’ai fait, mais dans ce que Jésus-Christ a fait. J’ai été baptisé, non pas au nom de ma foi, mais au nom de Dieu Père, Fils et Saint-Esprit (Mt 28.19). Je participe à la sainte cène qui annonce, non pas ma foi, mais la mort du Christ pour moi, jusqu’à ce qu’il revienne (1 Co 11.26). Le Seigneur me donne les signes et sceaux de sa grâce non pas pour m’écraser sous le poids du doute ou de la spéculation, mais pour m’aider dans ma faiblesse et me fortifier dans la foi.
D’après Romains 4.11, la circoncision, dans l’Ancien Testament, était un signe et un sceau, non pas de la foi d’Abraham, mais de la justice de Dieu qui s’obtient par la foi. La différence est très grande. La circoncision représentait et attestait, non pas la foi de l’individu, mais la justification promise par Dieu. Cette justification, bien sûr, s’obtient par la foi seule, mais le regard est tourné vers la promesse parfaite du Seigneur et non vers ma réponse imparfaite. C’est la raison pour laquelle Abraham a été circoncis après avoir cru et qu’Isaac a été circoncis avant d’avoir cru. Dans les deux cas, la circoncision attestait la même fidélité de Dieu à sa promesse. Le premier, Abraham, a d’abord cru à la promesse de Dieu, puis, des années plus tard, quand sa foi s’est mise à vaciller, il a reçu le signe et le sceau de la promesse divine afin que sa foi soit fortifiée et la promesse de Dieu confirmée. Le second, Isaac, a d’abord reçu le signe et le sceau de la promesse, alors qu’il était encore tout petit, puis il a cru à cette promesse et a ainsi pu continuer d’être fortifié toute sa vie par ce sacrement qui n’a jamais cessé de lui confirmer cette promesse.
2. Comment utiliser avec profit les sacrements?←⤒🔗
Comment devrions-nous utiliser les sacrements du Seigneur pour qu’ils nous soient utiles et profitables? Pour répondre à cette question, nous devrions nous demander : Comment regarder au panneau de signalisation? Avec foi! Je conduis sur la route en me guidant au moyen des indications routières. J’entends le message de l’Évangile et je vois son illustration visible. Est-ce que j’y crois? Le message du Seigneur passe par mes oreilles et par mes yeux. Est-ce que mon cœur répond avec foi? « La Parole et le sacrement ont […] tous deux pour but de conduire notre foi au sacrifice de Jésus-Christ sur la croix » (Q&R 67).
Les sacrements ne représentent pas ma foi, mais ils sont là pour conduire ma foi au sacrifice de Jésus-Christ. Ils ne se limitent pas à représenter extérieurement ce qui s’est déjà produit intérieurement en moi au moment de ma conversion. Ils représentent et attestent ce que Dieu a promis de faire en moi tout au long de ma vie, jusqu’à la fin. La signification de notre baptême et de la cène s’étend à notre vie entière. Ils nous sont donc utiles et profitables tous les jours de notre vie. Le baptême et la cène sont des appels de Dieu qui nous sont adressés personnellement pour que nous mettions constamment notre foi en Jésus-Christ, dans ses promesses de purification et de vie nouvelle. Voilà pourquoi l’apôtre Paul fait mention de notre baptême dans le contexte de notre sanctification progressive.
« Que dirons-nous donc? Demeurerions-nous dans le péché, afin que la grâce abonde? Certes non! Nous qui sommes morts au péché, comment vivrions-nous encore dans le péché? Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés en Christ-Jésus, c’est en sa mort que nous avons été baptisés? Nous avons donc été ensevelis avec lui dans la mort par le baptême, afin que, comme Christ est ressuscité d’entre les morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie » (Rm 6.1-4).
3. À quoi les sacrements peuvent-ils être utiles si je n’ai pas la foi?←⤒🔗
À rien du tout. Si nous n’avons pas la foi, les sacrements ne nous seront d’aucune utilité. Si le message proclamé visiblement par les sacrements n’est pas reçu dans une humble foi, leur effet positif sera nul. Nos yeux verront. L’eau coulera sur notre corps. Nous mangerons le pain et boirons le vin, mais sans la foi, tout cela ne nous servira à rien. Pourtant, même alors, les sacrements eux-mêmes demeurent vrais. Leur validité ne repose pas sur nous, mais sur la fidélité de Dieu. Quelle que soit notre attitude, cela ne change rien à ce que le Seigneur signifie et scelle dans les sacrements. Dieu est sérieux lorsqu’il nous fait ses promesses! Il ne nous trompe pas et il ne nous décevra jamais! Sauf que si nous prenons part aux sacrements en refusant de croire en lui, nous nous moquons de lui et nous employons les sacrements pour notre condamnation. « Celui qui mangera le pain et boira la coupe du Seigneur indignement sera coupable envers le corps et le sang du Seigneur » (1 Co 11.27).
4. Qu’arrivera-t-il si nous négligeons de nous servir de ces deux outils?←⤒🔗
SI nous négligeons de participer aux sacrements, notre foi risque de rester faible et chancelante. Nous souffrirons de malnutrition spirituelle. Nous risquons même des accidents graves sur la route. Si, par contre, nous utilisons les sacrements correctement, nous grandirons spirituellement. Quand notre corps devient malade, nous devons quand même continuer à manger de la bonne nourriture pour reprendre des forces. De même, quand nous passons par des moments de doute, le Seigneur nous demande de continuer de venir à sa table. Si la Parole, le baptême et la cène sont au cœur de notre vie, nous aurons tout ce qu’il faut pour vivre la vie chrétienne. Si nous négligeons la Parole et les sacrements, cela nous attirera des problèmes. Le Saint-Esprit se plaît à utiliser ces outils. Ne négligeons pas de nous en servir à bon escient. Si nous les employons de la façon prévue par Dieu, alors ils nous aideront à grandir et à persévérer dans la foi.
5. Sur qui portons-nous notre attention quand nous sommes réunis en Église?←⤒🔗
Souvent, notre attention se porte sur nous-mêmes ou sur les autres. Nous oscillons entre deux attitudes. Dans un cas, nous sommes portés à regarder à nous-mêmes et à nos mauvaises actions. Nous nous sentons alors facilement coupables. Dans l’autre cas, c’est l’inverse, nous nous pensons corrects et justes. Il nous est alors facile de nous estimer supérieurs à nos frères et sœurs, de voir leurs péchés et de les critiquer. Détournons donc notre regard de nous-mêmes ou des autres et portons plutôt notre attention sur ce que nous annonce oralement la Parole de Dieu et sur ce que nous confirment visiblement les deux outils dont se sert le Saint-Esprit, car les deux sacrements nous font tourner nos regards vers Jésus-Christ et son sacrifice parfait, afin que nous mettions notre foi en lui. Jésus-Christ est l’Auteur de notre foi et celui qui la mène à la perfection.
Laissons le Saint-Esprit agir dans nos vies. Servons-nous humblement de la Parole et des sacrements. Le Seigneur fait passer son message par nos oreilles, par nos yeux et par notre bouche pour produire et fortifier la foi dans notre cœur. Ne soyons pas remplis de nous-mêmes et de notre propre justice. Regardons à Jésus-Christ avec humilité et reconnaissance pour le don de sa parfaite justice. Ne soyons pas non plus abattus par la crainte ou le découragement. Regardons à lui avec joie et espérance. Il nous a donné les outils de la Parole, du baptême et de la cène. Quelle richesse nous avons!