Christologie (27) - La session du Christ à la droite de Dieu
Christologie (27) - La session du Christ à la droite de Dieu
L’ascension comme telle n’est pas encore la session de Christ à la droite de Dieu. Nous distinguerons donc entre la confession de l’ascension et celle de la session à la droite de Dieu. L’ascension a eu lieu dans le passé. Parlant de la session, le Credo se sert du présent (« il est assis à la droite de Dieu »), car il s’agit maintenant de l’œuvre messianique qui commence après l’ascension. Il est aujourd’hui assis à la droite de Dieu. L’ascension est la fin de l’œuvre terrestre de Christ, elle nous parle du retour du Christ à celui qui l’a envoyé après l’accomplissement de son œuvre terrestre. La session de Christ nous fait cependant penser à l’œuvre que le Médiateur accomplit dans le ciel.
Nous pensons d’habitude surtout à l’exercice de l’office royal de Christ, parce que le fait que Christ se trouve à la droite de Dieu évoque en premier lieu l’idée de sa gloire, de sa majesté. Toutefois, Christ n’est pas seulement Roi dans le ciel. Nous avons déjà dit qu’il continue aussi sa tâche de Prophète et celle de Sacrificateur. Il est vrai que Christ exerce son office royal à la droite de Dieu. Mais il ne faut pas oublier que Christ gouverne son Église par sa Parole et par son Esprit, qu’il règne comme l’Agneau immolé (Ap 5.6). La majesté de Christ est aussi la majesté de son sacrifice grâce auquel il est notre Avocat puissant auprès du Père (Rm 8.34; 1 Jn 2.1). Nous avons un souverain Sacrificateur dans le ciel qui est toujours vivant pour intercéder en notre faveur (Hé 7.25; 9.24) et qui nous sauve parfaitement. On ne doit donc pas oublier l’unité des trois offices de Christ si on veut comprendre l’œuvre de Christ à la droite de Dieu.
Toutefois, cela n’enlève rien au fait qu’en sa qualité de Médiateur Christ a la plus grande puissance qui puisse exister sous Dieu. Il a reçu cette puissance en vue de poursuivre son œuvre messianique (Mt 28.18).
Christ est en premier lieu le Chef de son Église, qu’il forme par sa Parole (Mt 28.19; Rm 1.16; 10.14) et par son Esprit (1 Co 12.3). Il est appelé son Chef (« Kephalos ») (Ép 1.22; 4.15; 5.23; Col 1.18). Cela implique une relation spéciale entre ce Roi et son peuple qui peut être appelé « son corps », tandis que lui est appelé la « Tête » de l’Église. Sa vie est leur vie. Il vit en eux et les fait croître en lui (Ép 3.19; 4.15-16; Col 2.10). Christ est tout en tous (Col 3.11). C’est Dieu qui remplit Christ (Col 1.19), tandis que Christ remplit l’Église (Ép 1.23). Christ veut devenir de plus en plus leur Roi, les gouverner de plus en plus par sa Parole et par son Esprit. Pour atteindre ce but, il se sert des ministres de l’Église, de leur prédication et de l’administration des sacrements et en général de tous les croyants auxquels il distribue les divers dons nécessaires pour l’édification de l’Église (Rm 12.3-8; 1 Co 12).
Christ n’a pas seulement reçu le pouvoir sur les croyants, mais tout pouvoir dans le ciel et sur la terre (Ps 2.8; Mt 28.18; Ép 1.22; Ph 2.10; Col 2.15). Il dirige l’évolution de l’histoire de la création (Ap 5). Ainsi peut-il effectivement protéger les siens. Rien ne peut les séparer de son amour (Rm 8.35-39). Ainsi toutes choses doivent concourir à leur bien (Rm 8.28).
Christ est dans le ciel en dehors de l’atteinte de Satan, bien que son Église se trouve encore sur la terre en toutes sortes de détresses (Ap 12). En lui, elle a aussi une place dans les lieux célestes (Ép 2.6). Là, la vie de l’Église est gardée en sûreté (Col 3.3; 1 Pi 1.4). Cela implique que les membres de l’Église sont des étrangers sur la terre, parce qu’ils sont des citoyens des cieux (Ph 3.20). Ce fait ne doit pas conduire à une vie en dehors du monde (Jn 17.15). On doit servir Dieu dans le monde. Mais notre vie doit entièrement être déterminée par le fait que Christ est notre Chef (Col 3.5-10).
Ce gouvernement de Christ n’est reconnu que dans l’Église, bien qu’il détienne le pouvoir sur toutes choses. Nous avons déjà dit qu’il est investi de ce pouvoir afin de protéger son Église contre chaque ennemi. Nous ajoutons que Christ a aussi besoin de ce pouvoir parce que son œuvre messianique n’est pas limitée au salut des hommes. Il doit conduire toutes les choses, la création entière, vers sa finalité désignée par Dieu (Ép 1.10).
Dans la doctrine de la providence, nous affirmons que ce gouvernement de Christ n’implique pas l’abdication de son Père. Comme le Père est actif dans la réconciliation parce qu’il réconcilie lui-même toutes choses avec lui en Christ, ainsi gouverne-t-il maintenant aussi toutes choses par Christ en sa qualité de Médiateur. Ce gouvernement de Christ en sa qualité de Médiateur est appelé le règne de la grâce, parce que le but de ce gouvernement est la rédemption du monde pécheur. On peut distinguer entre ce règne-là et le gouvernement de toutes choses qui appartient à Christ en vertu du fait qu’il est le Fils ontologique de Dieu. Ce dernier gouvernement qui repose sur la relation entre la deuxième personne de la sainte Trinité et la création est souvent appelé le « règne essentiel » ou le « règne naturel ».
Le Fils éternel de Dieu est prêt à cacher sa majesté et sa puissance sur tout ce qui lui appartient parce qu’il est le Fils ontologique de Dieu. Il n’a pas voulu détenir cette majesté comme une proie, s’en servir pour un besoin personnel, mais il s’est dépouillé. Ainsi a-t-il pu fonder le Royaume dans lequel Dieu serait glorifié par le monde sauvé. Christ reçut cette gloire qu’il avait auprès de Dieu avant la création du monde en sa qualité de Médiateur, de Sauveur de la création, parce qu’il s’abaissa jusqu’à la mort sur la croix. Il reçoit cette gloire quand Dieu le place à sa droite. La puissance que Christ a en qualité de Médiateur n’est donc pas moins grande que celle qu’il avait comme Fils éternel de Dieu.
Il faut aussi réfuter la pensée selon laquelle il y a un Royaume de Dieu trinitaire à côté du Royaume du Messie. La Bible dit clairement que le Messie gouverne toutes choses. Le Père gouverne maintenant toutes choses par le Christ. Nous ne concevrons donc pas la distinction entre le Royaume essentiel de Christ et son Royaume de grâce comme s’il s’agissait de deux gouvernements concomitants. Cette distinction exprime certes que le pouvoir du Fils de Dieu sur tout ce qui existe dans le ciel et sur la terre est une chose toute naturelle, mais également que ce pouvoir peut maintenant être employé par Christ, en sa qualité de Médiateur, afin de sauver la création. Ceci dépend de la grâce de Dieu et de la volonté de Christ de s’humilier et de mourir sur la croix. Il a reçu le nom au-dessus de tout nom en sa qualité de Médiateur par son abaissement et par son obéissance parfaite.
Toute la création est maintenant soumise à Christ, bien que seule l’Église l’admette. Le gouvernement de Christ sur le monde est un gouvernement caché. Satan et les ennemis de Christ sont encore là. Ils continuent encore dans leur rébellion. Ils résistent au Royaume de Christ. Cependant, ils se trouvent involontairement soumis à la puissance de Christ. Christ en a triomphé par la croix (Col 1.15-20; 2.15). La victoire décisive a été remportée. Satan est tombé du ciel comme un éclair (Lc 10.18). Son royaume a reçu le coup mortel. Mais il a encore la possibilité de faire beaucoup de mal à l’Église. Satan est tombé sur la terre. Cela est le commencement de son élimination totale. Pourtant, ce que nous lisons dans Apocalypse 12.12 est encore valable : « Malheur à la terre et à la mer! car le diable est descendu vers vous, animé d’une grande colère, sachant qu’il a peu de temps. » C’est pourquoi il est encore question de tribulation, d’angoisse, de persécution, de faim, de nudité, de péril et d’épée (Rm 8.35). On peut même dire que la haine de Satan est devenue plus grande que jamais après la victoire de Christ sur lui. Cette haine concerne surtout ceux qui croient en Christ (Rm 8.36; Ap 12.17). Cependant, Satan ne peut remuer ni bouger contre la volonté de Christ. Aussi les croyants confessent-ils que, dans toutes ces épreuves, ils sont plus que vainqueurs par celui qui les a aimés (Rm 8.37). Christ dirige Satan et toutes les puissances sur la terre. Il gouverne par sa Parole ceux qui veulent librement lui obéir. Mais son gouvernement n’est pas limité à eux.
L’œuvre de Christ à la droite de Dieu a un but. L’œuvre messianique finira quand Dieu sera tout en tous (1 Co 15.28), quand tous les ennemis de Dieu auront été soumis entièrement (1 Co 15.25; Hé 2.8-9). Le fait que notre temps est le temps de la session de Christ à la droite de Dieu détermine ce temps, qui est temps du salut (2 Co 6.2); c’est un temps serré, comprimé (« sunestalmenos », « le temps est court », 1 Co 7.29), le temps qui reste encore (1 Pi 4.2), la dernière heure (1 Jn 2.18), le temps d’aujourd’hui pendant lequel on peut encore se convertir (Hé 3.7,13,15; 4.7). Cela doit marquer l’attitude des croyants dans la vie quotidienne. Ils doivent vivre dans le monde, mais comme n’étant pas du monde (1 Co 7.29-31). L’Église doit se faire conduire par la Parole de son Seigneur et par le fait qu’elle a été scellée du Saint-Esprit pour le jour de la rédemption (Ép 1.13; 4.30). Les arrhes d’un monde nouveau se trouvent ainsi dans leurs cœurs (2 Co 1.22). Qu’ils n’attristent donc pas le Saint-Esprit (Ép 4.30) par une attitude qui n’est pas conforme au fait que Christ leur Chef est assis à la droite de Dieu et qu’il ne tardera pas à rentrer le plus vite possible (2 Pi 3.9).
Parvenus ici, remarquons que selon certains l’idée du fondement christologique de l’État implique que l’œuvre de Christ marque l’État, de sorte que la structure de l’État montre le cachet de l’œuvre rédemptrice de Christ, comme l’Église en porte le cachet. L’Église est par exemple essentiellement catholique, parce que Christ n’est pas venu pour sauver un seul peuple. Le salut est pour des hommes de toute nation. Comme non seulement la structure de l’Église, mais aussi celle de l’État serait déterminée par l’œuvre de la rédemption, on pourrait connaître cette structure de l’État à travers ce que la Bible nous dit de l’Église et de l’œuvre de Christ sur la croix. Ce fait devrait déterminer l’action politique du chrétien, selon ces personnes. Une telle action devrait toujours s’exprimer par analogie de ce que l’Église est et de ce qu’elle confesse. Ainsi l’analogie du caractère catholique ou œcuménique de l’Église sur le terrain de l’État impliquerait le rejet d’un nationalisme abstrait. L’activité politique du chrétien doit donc s’opposer à un tel nationalisme, etc. Mais une telle conception méconnaît la structure propre de l’État. Cette structure n’a pas son fondement dans l’œuvre de la rédemption, mais dans la création et la providence de Dieu. Christ est certainement le Seigneur de l’État, mais l’État n’a pas son fondement dans la croix comme c’est le cas pour l’Église.
Le retour du Christ
Christ reviendra du ciel pour rétablir toutes choses sur la terre (Ac 3.21). Il est parti avec la promesse de revenir (Jn 14.3). Il paraîtra en gloire pour achever sur la terre son œuvre messianique qui inclut aussi le jugement (Jn 5.22; 2 Th 1.6-10). Le retour de Christ ne doit pas effrayer les croyants, car la supposition du retour glorieux de Christ est aussi l’œuvre qu’il a faite pendant son état d’humiliation. L’Église attend le retour de Christ avec joie et avec espérance, car elle annonce la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne. Elle prie le « maranatha » (Ap 22.20). Le retour du Christ a été traité plus profondément dans notre ouvrage Espérer contre toute espérance.