Exode 20 - Dieu nous repose
Exode 20 - Dieu nous repose
En même temps qu’elle nous fait connaître l’ordre de Dieu en ce qui concerne le travail, et tout en rehaussant la valeur de celui-ci, l’Écriture nous parle aussi du repos. Ce qui plus est, Dieu nous commande de nous reposer : « Souviens-toi du jour du repos, pour le sanctifier. Tu travailleras six jours, et tu feras tout ton ouvrage. Mais le septième jour est le repos de l’Éternel, ton Dieu » (Ex 20.8-10).
Le jour du repos nous rappelle qu’il y a une limite à tout travail. La volonté expresse du Créateur est que tout travailleur jouisse d’un repos bien mérité. Ce jour de repos nous rappelle aussi que le travail n’est pas un but en soi. Il doit servir l’homme, non le dominer. Cet arrêt périodique et régulier montre à la fois que nous devons nous reposer de nos fatigues et que nous n’entendons pas nous laisser dominer par notre travail.
Le jour du repos était aussi, dans l’Ancien Testament, le jour cultuel par excellence. Ce jour-là, plus que tout autre, le fidèle pouvait et devait exercer sa religion de manière tout à fait spéciale. Ce jour lui rappelait le véritable repos à venir, lorsque nos activités terrestres cesseront et que notre seul devoir sera de glorifier Dieu sans cesse.
En ce qui concerne les fidèles de la Nouvelle Alliance, les membres de l’Église chrétienne, ils savent que le salut opéré en Jésus-Christ inaugure dès à présent ce repos éternel. Le dimanche, par lequel les premiers disciples ont remplacé le sabbat dans la tradition chrétienne, est le jour de la résurrection de Jésus, et par là il nous rappelle notre rédemption finale. Dans sa grâce et à cause de l’œuvre rédemptrice du Christ, Dieu nous permet de nous reposer avant même d’avoir commencé notre semaine de travail, puisque le dimanche est le premier jour de la semaine.
Loin d’employer ce jour-là d’une manière légaliste, appliquons-nous à le consacrer au culte de Dieu et au service des hommes. Mettons-le aussi à profit pour qu’il nous procure une détente réelle et suffisante dans nos travaux hebdomadaires.
Par ce repos, par la participation à la vie de l’Église et éventuellement par quelques sains loisirs, nous échapperons à la zone de danger que peut présenter le travail. Le désir illimité, insatiable, de dominer le monde et de jouir de toutes choses risque de détruire le sens même de notre existence. Lorsque l’homme ne veut pas se plier à l’ordre de Dieu, il devient inévitablement l’esclave de quelque chose. Sa véritable liberté se trouve dans sa soumission joyeuse à cet ordre. Si Dieu n’est pas le Maître, ce sera autre chose qui le dominera. De notre insubordination à Dieu découlent tous les matérialismes avoués ou inconscients. Nous ne pouvons pas vivre en ignorant ou en refusant le plan de Dieu pour notre vie, pour notre société et pour le monde tout entier.
Nous constatons jour après jour que des faits nouveaux apparaissent ici et là, et aussi autour de nous, tels que les congés payés annuels, l’organisation rationnelle des loisirs, les week-ends de deux jours et, qui sait, peut-être bientôt la semaine de quatre jours de travail. Pourtant, aucune de ces mesures ne semble pouvoir résoudre nos problèmes de travail et de repos; au contraire, nous nous trouvons devant des situations d’une complexité toujours plus grande.
Bien sûr, dans un bref article comme celui-ci, il n’est pas question d’aborder tous les problèmes d’ordre social ou économique auxquels nous sommes confrontés dans le monde moderne, mais nous ne saurions ni les ignorer ni demeurer aveugles ou insensibles à leur égard.
Ainsi, notre fatigue est devenue, surtout dans les grandes villes, une maladie chronique. Elle a deux sources : l’une intérieure, l’autre extérieure; l’une psychologique, l’autre physiologique. Les deux sources parfois se confondent. Les nuisances de la vie moderne, rapide, bruyante, déracinante et souvent même dépersonnalisante, nous attaquent sans cesse et sous des formes nouvelles. Nos activités sont désordonnées. L’air même que nous respirons et l’eau que nous buvons sont pollués. Et ceci non seulement dans les grandes cités, mais encore dans les campagnes. Quant au bruit, il est devenu notre principal agresseur. D’après les spécialistes, si nous subissions tous les bruits ambiants, nous ne pourrions pas survivre.
Il existe aussi toutes les contrariétés d’ordre familial ou social, qui nous agressent et nous épuisent. Que fait l’homme moderne devant la fatigue? S’il est inquiet, il prendra des tranquillisants. S’il souffre d’insomnie, il absorbera des somnifères. Et si la fatigue le rend amorphe et somnolent, il aura recours à des excitants… On connaît où peut mener l’usage abusif des drogues et des médicaments de choc dont se gorgent tant de nos contemporains. Dans cette situation, l’homme ne peut pas être en harmonie avec lui-même, ni physiquement ni moralement.
Pour qu’une telle harmonie puisse avoir lieu, elle doit exister tout d’abord entre l’homme et Dieu. Car à moins de rencontrer Dieu personnellement et de se placer sous son regard, l’homme ne retrouvera pas son équilibre. Ce n’est qu’alors qu’il pourra éviter la dispersion de son attention et de ses forces. Il lui faut réapprendre à se recueillir et à entendre ce que Dieu a à lui dire. La fatigue de notre monde est l’un des signes les plus sûrs de son profond besoin de Dieu. Elle peut être aussi le salaire du péché. Seul Dieu peut nous libérer de la lassitude de notre corps et de notre âme, car bien souvent la fatigue n’est que le contrecoup de nos angoisses…
« Je vous donnerai du repos », dit Dieu à son peuple élu. Il est le seul qui puisse nous reposer. Nous avons l’habitude de dire : « Je me repose ». D’après l’Écriture, le repos n’est pas un bien que nous possédons et que nous pourrions nous accorder de manière souveraine. Dieu lui-même est notre repos. Ceci signifie que le repos auquel nous aspirons n’est pas la simple suspension de nos activités. Au contraire, il permet notre réfection. Dieu nous rafraîchit. À son peuple qui marchait dans le désert, pèlerin sans domicile, Dieu permettait de temps en temps l’ombrage d’une oasis rafraîchissante. Jésus a dit : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos, […] car mon joug est aisé et mon fardeau léger » (Mt 11.28-30). Il est un repos radical qui nous délivre du fardeau de tous nos soucis majeurs et qui nous introduit dans un monde nouveau.
Parlons aussi de l’emploi de notre temps. Nous croyons être les maîtres de notre travail, de notre temps et de notre repos. En réalité, comme nous venons de le voir, nous sommes les esclaves non seulement du travail, mais encore du temps. Nous cherchons à orienter notre vie comme nous l’entendons et à employer notre temps comme nous le voulons. Mais consciemment ou non, nous sommes enfermés dans le temps et nous en sommes devenus les esclaves. Or, notre temps aussi appartient à Dieu, non seulement parce qu’il en est le Créateur, mais aussi parce qu’il est venu pénétrer dans notre espace et dans notre temps. Il en a subi les contraintes afin de mieux en secouer la pesanteur. Il s’est lié à notre temps et à notre condition humaine à travers la mort et la résurrection de son Fils unique. Par cette dernière, Jésus-Christ a triomphé de la mort, mais aussi du temps. Le croyant peut s’écrier avec confiance : « Mes destinées sont dans ta main » (Ps 31.16).
Nous vivons à présent le temps de la fin, entre la résurrection et le retour glorieux du Sauveur. Notre monde vit en sursis, car c’est maintenant le temps de la patience de Dieu. La fin de l’histoire peut survenir d’un moment à l’autre. Le temps est accompli. Le Royaume de Dieu est proche. Tout est accompli.
Alors, quelle doit être notre conduite dans le temps présent? Nous absorber uniquement par les soucis du travail, du plaisir ou des loisirs? Tirer le maximum de profit des biens de ce monde? Au contraire, notre comportement sera tout autre si nous acceptons l’objectif qui est placé devant nos yeux. Notre emploi du temps pourra changer. « Ne vous conformez pas au monde présent », exhorte l’apôtre Paul en écrivant aux chrétiens de Rome (Rm 12.2). Que votre ligne de conduite et l’emploi de votre temps soient dominés par la pensée du retour de Jésus-Christ. Il nous fait connaître un renouvellement de notre esprit, afin que nous discernions quelle est la volonté de Dieu, qui est bonne, agréable et parfaite.
Il faut prendre le temps pour discerner la volonté de Dieu. Ce sera le secret de l’apprentissage pour un bon emploi de notre temps. Ceci est plus important que l’organisation de la vie de la société par toutes sortes de programmes, de spectacles et de loisirs, c’est même capital. « On ne met pas le vin nouveau dans de vieilles outres », disait Jésus (Mt 9.17). Il nous faut un changement complet d’optique.
Nous pouvons saisir maintenant l’occasion que Dieu nous offre de lui répondre et de lui obéir. Il le faut maintenant, et non pas demain. Il faut aussi nous poser la question capitale de notre vie : Est-ce que je vis chacune de mes journées pour accomplir la volonté de Dieu? Car de cette réponse dépendront la valeur du travail que nous accomplissons et la qualité du repos que nous cherchons.