Jean 15 - C'est moi qui vous ai choisis afin que votre fruit demeure
Jean 15 - C'est moi qui vous ai choisis afin que votre fruit demeure
« C’est ici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître; mais je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j’ai appris de mon Père. Ce n’est pas vous qui m’avez choisi; mais moi, je vous ai choisis, et je vous ai établis, afin que vous alliez, et que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure, afin que ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous le donne. Ce que je vous commande, c’est vous aimer les uns les autres. »
Jean 15.12-17
Dimanche dernier, chers amis, nous avons commenté les versets 8 à 11 de ce 15e chapitre de l’Évangile de Jean. Vous vous souvenez peut-être de notre conclusion : Demeurer en Christ, c’est demeurer dans son amour en gardant ses commandements. Demeurer en Christ c’est aussi devenir, être et rester joyeux. Non pas d’une joie artificielle ou affectée, mais de la joie même du Christ, une joie pleine et entière; il ne nous est pas possible d’en espérer ou d’en attendre une plus grande! Le Christ nous promet que, par lui, notre joie sera dans sa plénitude (v. 11).
Et voici qu’à présent, Jésus établit un lien entre cette divine gaieté du chrétien qui prend sa source dans son amour à lui, et l’amour que nous devons avoir les uns pour les autres. « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (v. 12). Jésus répète ici, comme allant de soi désormais, le « commandement nouveau » qu’il nous a déjà donné au chapitre 13, verset 34. Au cours de notre seconde prédication, nous avons souligné que ce commandement-là n’est donné qu’aux disciples. Pour comprendre ce qu’est « aimer comme le Christ nous a aimés », ne faut-il pas croire au Christ, donc être son « disciple »? Vous qui croyez aujourd’hui, vous avez bien fait, n’est-ce pas, l’expérience que cet amour est radicalement différent de tout ce que vous aviez connu et vécu jusqu’au jour où vous êtes convertis et avez donné votre cœur au Christ et à Dieu.
Il n’est plus question d’un amour sentimental, romantique, humanitaire. L’amour les uns pour les autres dans la communion des croyants, dans l’Église, c’est beaucoup plus que nous attacher les uns aux autres, nous aider, et même nous dévouer les uns pour les autres. Quantité de non chrétiens ne pratiquent-ils pas cet amour-là?
Aimer comme Jésus a aimé? C’est voir les choses et les hommes comme il les voyait; c’est connaître les besoins des âmes, les intérêts éternels de chacun, comme il les discernait, lui; c’est donner pour but à chacun, avec nous, de glorifier Dieu et l’aider à l’atteindre.
Aimer comme Jésus a aimé? C’est considérer tous ces « autres », ensemble, dans la communion subtile et profonde qui nous unit, tous, dans l’Église du Christ. C’est nous poser pour chacun la question : De quoi ce frère, cette sœur, en tant que frère, en tant que sœur, a-t-il ou a-t-elle aujourd’hui besoin en raison de ces liens qui nous lient si étroitement?
Aimer comme Jésus a aimé? C’est avoir le même but, la même volonté envers nos frères que le Christ envers nous… Ce frère, cette sœur, il n’est pas nécessaire de les chercher bien loin : ce sont notre épouse, notre mari, nos enfants, nos parents… Voilà bien « ces autres » que, les premiers, nous devons aimer comme Christ nous a aimés. Les aimer ainsi, c’est les placer dans l’amour du Père, les faire progresser dans la grâce, leur multiplier les dons de l’Esprit Saint sans jamais contrecarrer ses initiatives envers eux.
Cet amour implique et exige l’oubli de soi, jusqu’au don de sa propre personne. Jésus le sait. C’est pourquoi il ajoute aussitôt : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » (v. 13). Demeurer dans l’amour du Christ, c’est aimer et donner sa vie.
Mais voici que cet amour nous vaut une gloire nouvelle : il nous initie au mystère de la vie et de la mort du Christ, à la communion de ses souffrances. La révélation de l’amour de Dieu dans la mort de son Fils chasse toute crainte de nos cœurs, puisqu’il n’y a plus aucune crainte dans l’amour. Cette initiation trace la ligne de démarcation entre l’esclavage et l’amitié : « Vous êtes mes amis, dit Jésus, si vous faites ce que je vous commande. » Jusqu’alors, Jésus avait appelé les disciples ses « serviteurs ». Mais à partir du moment où ils sont vraiment enrôlés à son service, il les appelle « mes amis », parce qu’il leur a dévoilé sa pensée et ses desseins. Chacun de nous est comme Abraham, notre père dans la foi : « Ami, ami bien-aimé de Dieu, ami du Christ. » Et combien plus, combien mieux qu’à Abraham les desseins du Christ nous sont-ils dévoilés aujourd’hui, à chacun de nous! Vous êtes choisis, désignés, établis par le Christ pour être non des serviteurs à gages, mais ses amis, parce que le Christ vous a fait connaître tout ce qu’il a appris de son Père. Demeurer dans l’amour du Christ, c’est être son ami.
Avec lui, nous ne pouvons connaître davantage, nous ne pouvons aimer davantage, nous ne pouvons servir davantage, nous ne pouvons être davantage que ce à quoi il nous invite, car nous ne pouvons connaître, croire, aimer, servir et être qu’en lui et avec lui, en étant ses vrais « amis », ceux qu’il a lui-même choisis : « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi; c’est moi qui vous ai choisis et qui vous ai établis, afin que vous alliez et que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure. » À l’obligation de porter du fruit est jointe la promesse que nous en porterons, et que notre fruit demeurera! Christ vous a choisis pour une mission fructueuse. Les fruits que vous portez en lui demeureront et seront amassés, engrangés pour la vie éternelle (Jn 4.36). Voilà votre « mission », votre tâche dans votre famille, dans l’Église et dans le monde; cette mission, cette tâche sont la conséquence directe de la mort du Christ, qui ne peut manquer d’être fructueuse.
Voyez de quelle délicate manière l’apôtre Jean exprime ce lien! Il emploie ici le même mot grec pour dire que Jésus « donne » sa vie, et qu’il nous « établit » pour que nous portions du fruit. C’est parce qu’il « pose » sa vie qu’il nous « pose » dans cette charge, « car le grain de froment demeure seul jusqu’à ce qu’il meure, mais, s’il meurt, il porte beaucoup de fruits » (Jn 12.24). Demeurer dans l’amour du Christ, c’est porter des fruits qui demeurent.
Quelle espérance pour nous que cette promesse! Chers amis, ne doutez jamais du fruit de votre foi, de votre obéissance, de votre témoignage, de votre amour! La promesse est là : vous portez, vous porterez du fruit et votre fruit demeurera. Ni votre temps, ni votre peine, ni vos larmes ne seront jamais perdus! Le sarment vivant porte du fruit par la sève et la volonté du Cep. Christ est bien vivant pour que votre fruit soit et reste vivant. C’est dans ce but qu’il vous a choisis, « posés » ici-bas. N’abandonnez jamais le combat, celui que vous menez, si douloureusement parfois, pour votre époux, vos enfants, vos parents, pour quiconque doit recevoir votre témoignage, ni le combat que vous menez en votre propre faveur. Obstinez-vous, accrochez-vous, soyez tenaces, opiniâtres, inébranlables! Vous êtes en Christ : demeurez en lui, une fois pour toutes… Fatigués? Récupérez! Tombés? Rebondissez! Vidés? Priez! La promesse est formelle : « Ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous l’accordera », dit Jésus. Le fruit, souvent caché, paraîtra au terme de votre persévérance et se multipliera jusqu’à la fin du monde. Ne soyez donc jamais impatients ou découragés…
« À grand-peine pourrait-on dire de combien grande importance est cette consolation contre les tentations qui à toutes heures surviennent aux serviteurs de Jésus-Christ. Ainsi donc, toutes les fois qu’il nous semble que nous perdons notre temps, réduisons ceci en mémoire : Que Christ fera finalement que notre labeur ne sera point vain ni sans effet : car quand il n’apparaît devant nos yeux aucun fruit, c’est alors principalement que cette promesse a lieu » (Jean Calvin).