La Bible et son interprétation
La Bible et son interprétation
- La nécessité d’interpréter correctement la Bible
- Mise en garde contre de mauvaises méthodes d’interprétation
- Les principes d’interprétation respectant l’autorité des Écritures
- Des versions récentes de la Bible
- Différents styles dans la Bible
La Bible et son interprétation, tel sera le sujet des pages suivantes, consacrées à la lecture et à la compréhension de la Parole de Dieu.
1. La nécessité d’interpréter correctement la Bible⤒🔗
Tout débat au sujet de l’inspiration et de l’autorité de la Bible s’accompagne nécessairement de la question de son interprétation. Il ne suffit pas d’affirmer que l’Écriture sainte est infaillible. La reconnaître comme telle est une chose, la lire et la comprendre en est une autre. Nous n’adorons pas la Bible, mais, sachant qu’elle est la Parole de Dieu, nous devons tout mettre en œuvre pour qu’elle parle à notre foi et nous engage à une consécration plus grande. Pour cela, nous aurons besoin de certains critères et de certaines règles qui soient justes pour une correcte interprétation. Quel est le sens précis d’une affirmation biblique? Faut-il l’entendre littéralement? Sommes-nous autorisés à chercher des sens cachés? Pourquoi peut-on interpréter un livre historique de manière littérale et un livre prophétique ou l’Apocalypse de manière tout autre?
Parlant de l’interprétation de la Bible, les modernes emploient un terme technique et savant que j’aimerais retenir pour les besoins de notre étude. C’est celui « d’herméneutique », et j’espère que son usage ne rebutera personne. Il est bien certain que tout lecteur de la Bible n’a pas besoin de connaître ce terme pour s’approprier le message du salut. Mais j’estime que le connaître et savoir ce qu’il signifie, en tant qu’idée et comme pratique, pourra mieux servir notre connaissance de la révélation et nous aider à répondre à un certain nombre de questions que des hommes se posent au sujet de l’Écriture et de la foi.
Je suis persuadé que nous ne devons pas avoir peur de nous attaquer à des problèmes réputés compliqués. Tout prédicateur sérieux et consciencieux de l’Évangile doit savoir qu’il ne peut nourrir la foi de l’Église par des méditations à l’eau de rose, et que, sous prétexte de simplifier l’Évangile, il ne peut s’autoriser à diluer celui-ci dans un sentimentalisme imprécis.
Le mot « herméneutique » vient du grec « hermeneia » qui signifie « interprétation », lequel, à son tour, dérive de « Hermes » (du nom du dieu grec, messager des dieux olympiens). Ajoutons sans tarder que les Grecs avaient l’habitude de traiter Hermès de menteur, tant il est vrai que le préposé aux informations des divinités était capable d’affabuler et de falsifier! J’aimerais tant que la noble science moderne de l’herméneutique biblique ne jouisse pas d’une réputation aussi peu flatteuse. Mais est-elle réellement au-dessus de tout soupçon? Parfois, j’ai de très sérieuses raisons pour penser le contraire. Hermès a des émules modernes à qui il arrive de dépasser leur prototype de jadis en ingéniosité et en trucages!
Examinons donc de près ce qui fait de l’interprétation de la Bible une bonne herméneutique, capable de mieux inspirer et de mieux édifier la foi chrétienne.
Tout lecteur de la Bible fait de l’herméneutique sans le savoir, à la manière de Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans s’en rendre compte. À nous d’aider le premier à faire une bonne herméneutique.
Dans toutes les questions qui sont étudiées et discutées dans les Églises, c’est l’autorité de la Bible qui est invoquée finalement comme fondement de toute réponse. L’Église, ainsi que notre foi personnelle, ne peut se reposer que sur la Parole de Dieu, elle-même pierre angulaire de tout l’édifice. Mais la Parole de Dieu n’est pas une abstraction théorique dont nous ne connaîtrions l’existence qu’en tant que réalité du passé.
Les chrétiens de presque toutes les confessions ecclésiastiques admettent volontiers que la Bible est la Parole de Dieu. Mais ceci ne devrait pas nous faire oublier le fait qu’elle est aussi un livre humain. Certes, elle est vivante et agissante comme une sève qui monte des racines jusqu’aux extrémités des rameaux pour nourrir et vivifier l’arbre et produire des fruits. Ce qui signifie que la Bible doit se lire et se comprendre comme une Parole du Dieu vivant, mais aussi comme un texte ou comme un document littéraire de la même nature que tout autre document. Les deux aspects de la Bible — divin et humain — sont indissolublement liés, comme c’est le cas pour notre Seigneur Jésus-Christ, à la fois Fils de Dieu et Homme parfait. Comment donc interpréter la Bible? Comment comprendre ce qu’elle dit? Sur quels principes s’appuyer pour donner une interprétation juste et vraie des paroles bibliques? Poser cette question, c’est faire de l’herméneutique.
On sait que la Réforme du 16e siècle fut déclenchée par la découverte et par le retour à la Parole de Dieu, considérée comme unique autorité dans la vie et pour la foi. Mais cela n’a jamais voulu dire, comme on l’a dit si souvent, que tout fidèle protestant peut interpréter la Bible à sa manière et selon ses fantaisies. La Réforme n’a jamais voulu justifier la liberté de faire dire à la Bible ce qu’on veut qu’elle dise. Il existe chez les protestants un individualisme dangereux qui, finalement, s’érige en autorité finale. Il est très inquiétant de trouver toujours un fondement biblique à toutes sortes d’idées théologiques ou à certains comportements modernes.
Une question subsidiaire, mais extrêmement importante vient à nos esprits. Qui est compétent pour interpréter la Bible? Nous rappellerons, contre tout autoritarisme et tout magistère prétendu infaillible, qu’il existe la glorieuse liberté des enfants de Dieu pour écouter et comprendre la Bible. Il est nécessaire pourtant de dire qu’étant une parole écrite, donc traduite dans un langage humain, il faut d’abord comprendre ce langage, ses mots, ses phrases, son contexte historique. Il faut des connaissances suffisantes pour éviter de trouver dans les textes autre chose que ce qu’ils disent. L’Église estime nécessaire de préparer ses pasteurs par des études de théologie, par la connaissance de l’hébreu et du grec, par l’exégèse des textes, par la théologie biblique, afin d’éviter les dangers d’une interprétation fausse et fantaisiste.
2. Mise en garde contre de mauvaises méthodes d’interprétation←⤒🔗
On se demandera avec raison si la théologie, si la science théologique elle-même se trouve au-dessus de tout soupçon. Tous les théologiens sans exception seraient-ils capables, voire honnêtes, dans l’accomplissement d’une tâche aussi redoutable? Les troubles dans l’Église, notamment au sujet de la foi, sont si souvent causés par un conflit d’interprétation, et sont dus si souvent à des erreurs de théologiens! Ma réponse est que la théologie comme telle, tout comme d’ailleurs l’Église elle-même, n’est pas infaillible. Il faut posséder une grande dose de vigilance et mener parfois un combat acharné contre les théologiens qui se sont érigés en maîtres absolus de la foi et qui, dans l’Église, égarent et trompent les fidèles, altérant les vérités de la révélation écrite.
Il en est ainsi chez certains théologiens modernes. Ils ont des présuppositions de l’esprit lorsqu’ils entreprennent d’interpréter la Bible. Ils lisent et comprennent le texte biblique avec leurs a priori philosophiques. Par conséquent, il faut un constant effort de loyauté et le refus des préjugés pour ne pas interpréter la Bible en fonction d’idées modernes philosophiques, politiques ou scientifiques. Autrement, le risque de déformer la Parole de Dieu sera énorme.
Prenons un exemple contemporain : celui du théologien allemand Rudolf Bultmann. À l’aide de sa philosophie existentialiste, Bultmann a commencé à distinguer dans le texte biblique ce qui, selon lui, était conforme à la situation et aux idées du passé et ce qui contenait un message permanent. Il s’est efforcé de dépouiller ce message de son enveloppe « mythique », donc périmée, puisque — toujours selon lui — notre situation présente et nos idées scientifiques modernes n’étaient pas celles du passé. Mais où s’arrête cette « démythisation »? Quel en est le critère? Considérer comme périmé et inutile ce que notre raison prétend ne plus accepter et ce qui fait partie du message essentiel? Notre raison devient le seul juge de la Parole de Dieu dans ce qu’il faut accepter ou rejeter. La philosophie moderne, passagère, se mêle à la compréhension de la Bible et à la prédication de l’Évangile.
Une autre idée erronée est que la Bible parle lorsque son interprète parle! C’est annoncer un peu vite et à tort, à notre avis, la possibilité de découvrir réellement ce que la Bible veut dire. On prétendra alors que la science théologique a découvert des résultats définitifs. C’est ainsi qu’interprètes et théologiens risquent de constituer un écran entre la Bible et l’Église, de la même manière que jadis le magistère ecclésiastique avait usurpé l’autorité suprême. Plus on avance dans l’étude de la Bible, en s’astreignant à la méthode scientifique la plus rigoureuse et à l’honnêteté intellectuelle la plus grande, plus on s’aperçoit que la méthode scientifique laisse des questions « ouvertes » — les questions les plus décisives — sans pouvoir donner de réponse. Plus on découvre de textes qui ne sont pas explicables par ce contexte historique et culturel du temps de leur auteur, plus on constate que la pensée de la Bible est rebelle à l’assimilation avec n’importe quel contexte historique. On se heurte sans cesse à l’originalité foncière de la Bible. La science peut constater cette originalité si la recherche est bien menée; elle peut en cerner le contour. Elle ne peut pas l’expliquer ni en indiquer la source. Elle ne peut juger de sa valeur, la confirmer ou la nier.
Au point où nous laissent la science et notre propre incapacité, seule l’action du Saint-Esprit nous rend capables de saisir le sens de la révélation de Dieu, Parole vivante. Il nous faut recevoir et croire. La science ne peut pas dire ce que nous devons croire, bien qu’il soit parfaitement exact qu’une bonne méthode scientifique nous aide à inventorier le contenu de la Bible. Mais ni la science ni la philosophie n’ont d’autorité ni de compétence pour juger de la valeur et de la vérité du contenu biblique.
Depuis deux siècles, il s’abat sur la Bible une véritable tempête, déclenchée par certains théologiens. Mais leurs résultats aussi sont constamment remis en cause par d’autres découvertes qui, elles, confirment l’authenticité des paroles, l’originalité des sources et la fiabilité des documents bibliques.
La Bible reste au-dessus de toute tempête et au-dessus de toute autorité humaine. Il en est ainsi à cause de son intention première : « Ceci est écrit afin que vous croyiez que Jésus-Christ est le Fils de Dieu et qu’en croyant, vous ayez la vie éternelle » (Jn 20.31). « Or, tout ce qui a été écrit d’avance l’a été pour notre instruction, afin que, par la patience et par la consolation que donnent les Écritures, nous possédions l’espérance » (Rm 15.4). Voyez donc l’intérêt tout pratique de la Bible. Nous pouvons la lire et la comprendre afin de croire et d’hériter la vie éternelle que Dieu nous réserve dans son Royaume.
3. Les principes d’interprétation respectant l’autorité des Écritures←⤒🔗
Après avoir développé l’idée de la nécessité d’interpréter correctement la Bible et après une mise en garde contre certaines méthodes erronées de l’herméneutique, nous aborderons dans cette partie les principes qui, depuis la Réforme — voire depuis la Renaissance —, ont cours dans les Églises qui respectent et professent l’autorité suprême des saintes Écritures.
Ce furent deux grandes figures de la Renaissance, Reuchlin et Érasme, qui furent sans doute les premiers à souligner la nécessité de lire et d’interpréter la Bible d’une manière scientifique. Avant eux, certains théologiens n’avaient même pas lu en entier la Bible, et s’ils la lisaient, c’était dans la version latine dite « Vulgate ». La Renaissance a souligné la nécessité de s’adresser à l’original de la Bible et de la lire dans les langues de sa rédaction première, comme aussi dans les manuscrits sinon autographes, du moins les plus anciens.
Je ne voudrais pas oublier de rendre ici hommage à l’un des grands précurseurs de la Réforme, le Français Lefebvre d’Étaples, qui a tant fait pour la bonne lecture et la bonne interprétation de la Bible. Il a tenté, le premier, de traduire la Bible en français.
Interpréter la Bible nécessite, depuis ce moment, la lecture des lettres, c’est-à-dire une bonne connaissance de la langue, de la grammaire, des expressions particulières, dont la langue grecque appelée « koinè » s’était servie pour sa rédaction. D’autre part, cela requiert une égale connaissance de l’histoire, des circonstances, des événements, des lieux et des temps, des peuples et des coutumes dont la Bible était contemporaine. Cette méthode s’appelle « méthode grammaticale et historique ». Elle n’est pas différente des méthodes utilisées pour lire tout autre livre humain, ancien ou moderne. Un récit ou un procès-verbal doit se faire comprendre d’une manière littérale, rien de moins, mais rien de plus.
Nous reconnaissons volontiers que la plupart des discours que contient la Bible sont des résumés, fidèles certes, mais succincts, d’un événement qui s’était produit. Ainsi en est-il du discours de l’apôtre Pierre le jour de la Pentecôte. Ou encore de certains discours de Jésus. Nous nous rappellerons aussi que Jésus a parlé dans une autre langue que le grec, en araméen, et que ses propos furent traduits en grec. Les faits ou les discours bibliques ont été très souvent comprimés. Les auteurs humains de la Bible n’en ont donné que la substance, en évitant les détails.
Par exemple, dans l’Évangile selon Luc, on a l’impression que la résurrection de Jésus et son ascension ont eu lieu le même jour! Tandis que le livre des Actes rend clair que l’ascension se produisit quarante jours après. De même, Marc 5 et Luc 8 parlent de la maladie de la fillette de Jaïrus, tandis que Matthieu 9.18 annonce aussitôt la mort de celle-ci. Il le fait pour comprimer les deux étapes en une seule (voir aussi Lc 18.35-43 en comparant à Mt 20.29 et Mc 10.46).
Tous les réformateurs, Luther, Melanchthon, Calvin, ont adopté la solide méthode d’exégèse littérale et historique de la Bible. Selon eux, « l’Écriture doit s’interpréter elle-même ». Toute compréhension de la Bible devrait se faire aussi par l’analogie de la foi. Une telle méthode grammatico-historique rend parfaitement compte de l’inspiration de la Bible, de son unité ainsi que de sa diversité, du style des Écritures et des traits généraux.
L’exégète travaille pour découvrir le sens de chaque mot séparément, le sens des mots dans la phrase, les caractéristiques particulières d’un auteur. Paul n’écrit pas comme l’auteur du Deutéronome; les livres historiques sont différents dans leur style et dans leur intention première des livres prophétiques. Dans la mesure où l’on tient compte du style, des circonstances, de l’auteur et de l’intention première d’un texte biblique, on parvient à saisir le sens total — uni et cohérent — de la Bible, qui apparaît comme la Parole divine ayant une autorité pour toute époque jusqu’à la fin des siècles.
4. Des versions récentes de la Bible←⤒🔗
J’aimerais ouvrir une parenthèse concernant les versions de la Bible, plus particulièrement certaines versions récentes. En effet, depuis peu, le marché est inondé de traductions, de versions, de paraphrases, de Bibles annotées, de Bibles illustrées et d’autres séduisants imprimés qui, loin d’être les signes d’un renouveau biblique, annoncent plutôt à mon avis la confusion qui règne actuellement au sujet de la Bible.
Un auteur moderne a même tenté de traduire les Évangiles en hébreu, prétendant parvenir à une meilleure compréhension du sens des mots de Jésus! J’avoue que je m’inquiète de cette prolifération de Bibles, qui me rappellent les valises à double fond des fraudeurs passant par les douanes! Je n’insisterai pas longuement sur l’inutilité des paraphrases dites vivantes ou modernes de la Bible. Rien de plus dangereux pour la Parole de Dieu que celles-ci. Des versions modernes, dans toutes les langues, comportent des notes théologiques et dogmatiques propres à obscurcir le sens de la Bible et à égarer le lecteur. J’en connais une qui vient d’être traduite de l’anglais en français et qui remporte un effarant succès de librairie. Je dirai à son sujet que ses notes marginales ne sont rien de moins qu’une cinquième colonne théologique introduite dans la Bible et capable de désintégrer tout l’Évangile.
Celui qui veut comprendre le sens de la Bible doit recourir soit aux textes originaux, hébreux et grecs, s’il les possède, soit à une bonne version qui a prouvé sa solidité et son sérieux dans l’usage de l’Église, et je ne saurais mettre assez en garde mes lecteurs contre les abus des versions truquées et des paraphrases ingénieuses qui altèrent totalement le sens de la Bible sous prétexte d’en rendre l’interprétation aisée et la lecture moins rebutante.
5. Différents styles dans la Bible←⤒🔗
Cette parenthèse fermée, il me reste plus brièvement à aborder les quelques différents styles utilisés par les auteurs de la Bible. Je ne consacrerai aucun paragraphe à ce que les modernes appellent le mythe biblique ou les sagas dans la Bible, parce que je refuse catégoriquement de trouver toute trace de mythe ou de saga dans la Parole de Dieu. J’y trouve plutôt des « métaphores », c’est-à-dire un procédé littéraire par lequel on transfère la signification propre d’un mot à une autre signification et qui ne lui convient qu’en vertu d’une comparaison sous-entendue. Ici, nous entrons dans le domaine de la poésie. Ainsi, le Psaume 29 compare la voix de Dieu au tonnerre. Pensons aussi aux expressions « les piliers de la terre » (ou « du ciel ») ou « les fenêtres du ciel », merveilleuses descriptions de la réalité, mais poétiques.
Ce qui nous apparaît comme de nombreuses difficultés concernant la Bible se résoudrait si nous gardions à l’esprit la présence de métaphores dans ses pages. Pensons encore au langage anthropomorphique de la Bible. Dieu est Père. La création de l’homme est comparée à l’œuvre d’un potier. Dieu donne la vie en soufflant l’esprit dans les narines. Après le sacrifice de Noé (Gn 9), Dieu prend plaisir à l’agréable odeur. Ailleurs, son action ressemble à celle des hommes : il descend du ciel; il se promène dans le jardin; il visite la tour de Babel; il apparaît à Abraham sous forme humaine; à Ézéchiel, revêtu d’un manteau blanc.
Vient ensuite la « parabole » qui, elle, est une histoire généralement empruntée à des situations réelles, pour illustrer un certain point précis que le discoureur tient à souligner. Dans l’exemple du bon Samaritain secourant un Juif, le fait qu’un étranger et ennemi exerce la charité envers son ennemi est le seul point à retenir de cette histoire (ne pas chercher des détails dans l’huile, le vin, dans le mulet, l’hôtel et l’hôtelier!). Ces détails de la parabole sont une sorte d’ameublement pour remplir une pièce, mais seule la pièce a une importance réelle. Il serait dangereux de tirer des conclusions des détails.
Le « symbole », lui, est la représentation réelle ou la vision d’un objet, d’un événement ou d’un personnage qui n’a pas de signification propre, mais uniquement dans ce qu’elle illustre. Un exemple typique est celui d’Ézéchiel tenant deux bâtons dans sa main pour croire qu’il n’y en a qu’un seul. Avec ce symbole, il illustre Juda et Israël qui ne sont qu’un seul peuple (Éz. 37.15-28). Daniel et l’Apocalypse, ainsi que de très nombreux livres prophétiques, sont remplis de symboles. On ne peut, sans faire insulte à l’intelligence créée par Dieu, prendre littéralement la présence de bêtes, de cornes, de trompettes ou encore de figures célestes comme des mots à interpréter littéralement. Fort heureusement, la Bible elle-même vient à notre aide quand il s’agit de comprendre correctement des êtres ou des objets symboliques.
Le « type », lui, est la représentation d’une vérité permanente et plus grande par un événement, un objet ou un personnage qui possèdent leur existence propre et ont un sens en eux-mêmes. Ainsi, la loi rituelle de l’Ancien Testament était le type du ministère de Jésus. L’épître aux Hébreux en donne un commentaire éloquent et autorisé. Pour le chrétien, cette loi n’a plus aucune valeur ni aucune signification. Pourtant, elle en avait eu dans le passé, avant la venue du Christ. Les fidèles de l’Ancien Testament pouvaient obtenir le pardon de leurs péchés. Elle représentait le Christ. Un équivalent moderne du « type » est l’exemple des billets de banque qui représentent la valeur réelle de l’or ou de l’argent. En soi, le papier imprimé émis par une banque n’a aucune valeur, mais sa prolifération ou sa fabrication non autorisée entraînent la dévaluation par l’inflation. On a dévalorisé le Christ en usant et abusant de la « typologie ». Jésus nous aide à voir qui sont les vrais « types » de sa personne (Jonas, par exemple, ou David, le prophète Osée, etc.).
Enfin, terminons cette énumération par « l’allégorie », qui est la description d’une vérité par un récit que l’on admet comme « histoire », bien que les événements n’aient pas eu lieu en réalité sous la forme qu’elle les rapporte. (Je pense spécialement ici au célèbre roman allégorique de John Bunyan, Le Voyage du Pèlerin, et dans la littérature profane, à Alice au Pays des Merveilles, de Lewis Carrol).
Il existe un usage démesuré de l’allégorie chez certains chrétiens. Il faut veiller; la Bible, lorsqu’elle utilise ce langage allégorique (Jg 9.7-15; 2 R 14.9), le rend clair. Mais il faut faire attention à ne pas considérer le récit de la Genèse comme une allégorie. Le contexte géographique rend clair que ce récit des origines a un arrière-fond historique, véridique et vérifiable.