Luc 4 - Jean 8 - Si le Christ nous libère
Luc 4 - Jean 8 - Si le Christ nous libère
« Il se rendit à Nazareth, où il avait été élevé, et entra, selon sa coutume, dans la synagogue le jour du sabbat. Il se leva pour faire la lecture, et on lui remit le livre du prophète Ésaïe. Il ouvrit le livre et trouva le passage où il était écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a oint pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres; il m’a envoyé pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour proclamer une année de grâce du Seigneur. Puis il roula le livre, le rendit au serviteur et s’assit. Les yeux de tous, dans la synagogue, étaient fixés sur lui. Alors il se mit à leur dire : Aujourd’hui cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, est accomplie. »
Luc 4.16-21
« Jésus dit aux Juifs qui avaient cru en lui : Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples; vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres. Ils lui répondirent : Nous sommes la descendance d’Abraham et nous n’avons jamais été esclaves de personne; comment dis-tu : Vous deviendrez libres? Jésus leur répondit : En vérité, en vérité, je vous le dis, quiconque commet le péché est esclave du péché. Or, l’esclave ne demeure pas pour toujours dans la maison; le fils y demeure pour toujours. Si donc le Fils vous rend libres, vous serez réellement libres. »
Jean 8.31-36
La Bonne Nouvelle que l’Église chrétienne transmet depuis vingt siècles émane des lèvres mêmes de celui qui se présente à la fois comme le Sauveur et le Libérateur des hommes. La totalité de l’Évangile est contenue, si j’ose dire, dans ces deux textes bibliques, dans ces propos prononcés par le Christ.
Ni la raison ni aucune ressource humaine ne pourront jamais concevoir notre salut ni offrir la libération que seul peut nous apporter le Fils de Dieu. C’est uniquement par la foi que nous percevons tout le sérieux de cette offre et de son effet. Par la foi en ce Jésus de Nazareth, Fils de Dieu, nous saisissons la présence même de Dieu au milieu de nous, tendant son oreille à nos soupirs et témoin compatissant de nos misères.
Il s’adresse à nous dans sa Parole, « pleine de grâce et de vérité », et nous voilà face à ce Dieu qui nous dit la vérité à son sujet et à notre sujet.
Un jour — le premier de son apparition publique dans la synagogue de sa propre ville —, Jésus déclara la grande nouvelle : Le salut des hommes et leur libération sont là, aujourd’hui, pendant que vous entendez les propos du prophète Ésaïe. Jésus est leur réalité et leur accomplissement. Son commentaire sur le livre du prophète ouvrait l’année de grâce du Seigneur Dieu. En ce jour-là s’inaugurait une histoire nouvelle, une histoire qui transcende les dimensions politiques, économiques et culturelles de la vie. Car ces dimensions-là ne sont pas toute l’histoire réelle. Les glorieuses performances du passé, les tragédies et les sommes de détresse, la prospérité ou le sang versé, ne forment l’histoire véritable ni des vies individuelles ni des sociétés organisées.
L’histoire vraie débute avec la venue du Christ Jésus, et tout homme et toute société seront désormais confrontés à cet événement, qu’ils le veuillent ou non, qu’ils le sachent ou qu’ils l’ignorent. Toute décision et tout choix ne peuvent fonctionner que par rapport à elle : soit dans la lumière claire ou même vacillante de la foi, soit dans un refus absurde et tragique.
Désormais, tous les drames humains, toutes les tragédies réelles ne se jouent qu’à ce niveau. Suis-je donc personnellement prêt à accueillir l’an de grâce du Dieu et Seigneur de l’univers ou bien, bêtement, est-ce que je m’obstine à fuir en avant jusqu’à m’écraser contre le Rocher des âges? Ce serait alors l’échec fatal et ultime, non seulement un échec pour l’après, pour l’au-delà et pour l’éternité, mais encore pour mon ici et maintenant. L’histoire inaugurée par Jésus-Christ contient, contrôle et juge tout le reste; les vies individuelles comme tous les autres domaines : la vie sociale, la politique, l’économie, la culture…
La lecture faite par Jésus-Christ du texte du prophète de l’Ancien Testament concernait tout premièrement, bien entendu, la situation des juifs exilés quelque six siècles avant lui. Ils étaient, eux, les hommes au cœur brisé, les pauvres, les captifs et les opprimés. Jésus applique ces paroles à ses propres contemporains, et il n’y a aucune raison pour penser que nous ne serions pas aussi, dans notre condition présente, du nombre de ces mêmes pauvres et captifs.
L’ancien Israël est une parabole de l’humanité, illustrant à la foi ses révoltes absurdes et ses souffrances intolérables. Le texte évangélique de Luc se réfère à deux types de misère : l’une matérielle et temporelle, l’autre, plus secrète, plus profonde aussi, est une misère qui se situe à un autre niveau. Jésus-Christ est venu pour annoncer qu’il s’intéresse à la première autant qu’il se charge de la seconde.
Que nul ne s’imagine que Dieu reste indifférent ou neutre, voire passif à l’égard de la misère physique et matérielle. C’est précisément à ceux qui en sont affligés que Jésus est venu annoncer tout d’abord la libération et la délivrance.
Pauvreté et oppression sont le lot quotidien d’un grand nombre parmi nous. Mais Dieu ne reste pas à l’écart. Il se penche sur les victimes de l’injustice avec une sollicitude toute paternelle, et il n’a pas besoin de se transformer en « Dieu mère » (ainsi que le font certains théologiens modernes) pour que « ses entrailles de miséricorde » vibrent face à notre misère. Certes, nous sommes personnellement responsables des maux et des malheurs qui s’abattent sur nous. Ce sont nos actes et nos comportements qui les produisent. La pauvreté et l’oppression ne sont pas le fait d’une fatalité inexorable. Elles sont les conséquences de notre haine et les fruits de notre propre violence.
Pourtant, Dieu ne fait pas que juger nos conduites. Par la bouche de Jésus-Christ, il déclare qu’il s’en occupe, qu’il s’en charge même. Il tient à changer la destinée de toutes les victimes. Jésus-Christ est venu annoncer précisément cette Bonne Nouvelle. Il commença son ministère par cette annonce et il le conclut en scellant notre salut et notre délivrance par sa propre mort.
Mais il existe également une autre misère que nous aurions infiniment tort d’oublier ou même de négliger. Autrement, nous ne comprendrions rien à la nature du salut offert ni à la libération apportée par le Christ. Il existe une misère réelle, aussi concrète — plus difficile aussi à traiter — que la misère ou que la pauvreté matérielle. Durant son ministère public, Jésus-Christ mit le fer sur cette plaie-là. Non pas pour condamner simplement le mal intérieur, le péché profond enraciné dans nos esprits, mais pour nous en délivrer.
L’une et l’autre de ces misères forment notre destinée humaine. Cependant, nous aurions grand tort de n’insister que sur la première. Car aussi longtemps que le mal restera enraciné en nous, il corrompra individus et sociétés. Aussi longtemps qu’il ne sera pas écrasé, nous demeurerons aveugles et opprimés, quels que soient notre prospérité matérielle et notre bien-être social.
C’est ici qu’apparaît encore toute l’actualité du message libérateur du Christ. Au milieu des phalanges et même des hordes de sauveteurs tous azimuts, tandis que les idéologies en conflit se livrent une guerre sans merci, que des promoteurs de futur nous annoncent « la nouvelle société », que nous entendons parler des remèdes offerts par les professionnels du bien-être matériel et que les révolutionnaires nous promettent des lendemains qui chantent, nous savons que seule la vérité du Christ nous libérera. Aucune berceuse humaniste n’apaisera nos angoisses ni ne nous affranchira de notre mal le plus profond et le plus enraciné.
En dépit des bonnes intentions de tant de nos contemporains, nous restons les témoins affligés de fraternités brisées, de classes en lutte, de peuples en guerre, de dignités humaines bafouées et de droits de l’homme ridiculisés. L’injustice, la violence et les oppressions prendront toujours de nouvelles formes et se présenteront avec de nouveaux visages; elles ne changeront pas leur nature profonde.
Telle est notre commune expérience à tous. Aussi je vous invite à rester ouverts à l’appel du Christ Libérateur. De celui qui, avant de s’attaquer aux épiphénomènes du mal, vient changer nos esprits et transformer nos cœurs. Entendez donc cette parole, lue et commentée par le Sauveur du monde, comme étant l’invitation la plus mystérieuse et la plus contraignante qu’il ne vous sera jamais adressée. Convertissez-vous donc à son salut et accueillez la seule libération qui vaille la peine d’être appelée de ce nom.
Dans notre vie, nous regrettons peut-être nombre de traits, d’expériences, de choix; la couleur de notre peau, notre niveau social ou culturel, l’entreprise dans laquelle nous nous sommes embarqués, voire notre mariage; mais nous ne regretterons jamais de nous être convertis au salut en Jésus-Christ qui, déclaré prophétiquement et accompli messianiquement, est la seule libération qui nous arrache au mal, à la mort et au néant.