Éphésiens 2 - Le don de la foi
Éphésiens 2 - Le don de la foi
« C’est par la grâce en effet que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. »
Éphésiens 2.8
Comment peut-on expliquer que tel homme ait la foi et que tel autre ne l’ait pas? S’agit-il d’une différence de nature, d’un sens du surnaturel chez l’un et du défaut de celui-ci chez l’autre? Est-ce une question de formation, d’arrière-plan familial, de fréquentation d’Église ou d’éducation? Le tempérament joue-t-il un rôle? Ou encore l’intelligence? Faut-il attribuer la possession de la foi à la chance? Ou simplement à une meilleure disposition de l’esprit? Peut-on parler de nature religieuse ou de sensibilité spirituelle? Est-il vrai que certains sont plus doués que d’autres pour croire? Ce sont là des questions que l’on se pose parfois pour essayer d’expliquer la présence ou l’absence de la foi.
Sans doute, certains des facteurs mentionnés sont vrais. L’éducation religieuse, les dons naturels, l’environnement, etc. font qu’il y a parfois des différences entre croyants et non-croyants. Pourtant, il faut convenir qu’il y a des exceptions à ces règles. Nous rencontrons beaucoup d’hommes et de femmes qui sont devenus chrétiens malgré l’absence de facteurs favorables. Ils n’avaient, au départ, aucun des privilèges mentionnés il y a un instant. Tandis que d’autres, entourés des conditions les plus favorables, sont restés réfractaires à la foi et ont refusé leur allégeance au Christ. Parmi ceux qui ont reçu la même éducation et acquis les mêmes connaissances religieuses, on peut trouver aussi bien des croyants que des incroyants. Parents, Églises ou éducation ne sont pas toujours un facteur décisif. Ajoutons surtout qu’il n’existe aucune explication psychologique pouvant nous aider à résoudre ce problème.
Car la réponse ne se trouve pas tout d’abord en l’homme, mais en Dieu. C’est Dieu qui donne la foi. C’est là une explication peu satisfaisante, diront certains. Si c’est Dieu qui donne la foi, pourquoi ne la donne-t-il pas à tous? J’avoue que je n’ai pas de réponse à cette question. Sauf que Dieu, lui, a certainement des raisons valables pour agir ainsi, et il n’est pas obligé de nous les révéler et de satisfaire notre curiosité. S’il le faisait, il est fort probable que nous ne pourrions pas les comprendre. Il suffit de lui faire confiance.
L’apôtre Paul s’est longuement penché sur ce problème. Il avait une double réponse à l’Évangile qu’il prêchait. Au chapitre 10 de l’épître aux Romains, il se rappelle que le prophète Ésaïe s’était plaint de la même chose bien des siècles avant lui. En réalité, tout prophète de Dieu, comme tout prédicateur de l’Évangile, a dû faire la même expérience. Finalement, l’apôtre a abouti à la conclusion que « la foi vient de ce que l’on entend, et ce qu’on entend vient de la parole du Christ » (Rm 10.17). Celui qui écoute et reçoit l’Évangile est transformé par le Saint-Esprit. « Tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu sont fils de Dieu », ajoute-t-il dans cette même lettre (Rm 8.14). Il n’explique pas pourquoi l’Esprit n’applique pas sa prédication à tous ceux qui l’ont entendue. Il montre simplement de quelle manière chaque croyant véritable a reçu la foi. Il avait constaté à maintes reprises le pouvoir de l’Esprit, agissant et efficace, dans sa prédication.
Prenons l’exemple de Lydie, une femme païenne marchande de pourpre dans la ville de Philippe en Macédoine. En fait, cette femme est la première convertie européenne à l’Évangile, en tout cas la première dont nous connaissons le nom, car des cas semblables se sont produits ailleurs.
Songez à Corneille, un officier romain écoutant la prédication de l’apôtre Pierre. Lui aussi ne s’est converti qu’à la suite de l’écoute de l’Évangile. Ainsi, tous ceux qui ont fait l’expérience du pouvoir de transformation de l’Esprit de Dieu sont devenus croyants. Reste pourtant le problème de ceux qui n’ont pas voulu croire à ce même Évangile. De toute évidence, c’est Dieu qui permet de croire. Il ouvre les cœurs des hommes et des femmes, selon l’expression du Nouveau Testament. Ce qui nous amène à dire que le responsable de la foi, chez les croyants, c’est Dieu en personne.
Est-ce à dire que nous serions en plein fatalisme? Il n’en est rien. Au contraire, cette action de Dieu est l’opposé, l’antidote même de tout fatalisme. Nous sommes placés ici en présence de la plus grande vérité de l’Évangile, car sans cette action de Dieu, il n’y aurait même pas d’Évangile; aucun espoir pour le monde, rien que le désespoir… Si Dieu ne donnait pas lui-même la foi, s’il se contentait de nous offrir simplement le salut, nous laissant ensuite libres de l’accepter ou de le refuser, combien pensez-vous qu’il y aurait de chrétiens dans le monde? Pas même un seul! Nous serions tous perdus, car aucun d’entre nous n’a le moindre désir d’accepter l’Évangile d’un salut gratuit. Nous sommes morts « dans nos offenses », selon l’expression de l’Écriture (Ép 2.1,5), et nous savons par expérience que telle est la terrible réalité (voir Éz 37).
Notre nature rebelle nous rend incapables de croire au Christ. Des cadavres spirituels ne peuvent en aucune manière revenir à une vie nouvelle. Pas plus que l’on ne chercherait de la vie dans un cimetière, on ne peut pas s’attendre non plus à ce que l’homme naturel, mort spirituellement et opposé à Dieu, donne des signes de vie et croie au Christ.
Ce n’est que l’auteur de la vie qui peut nous réveiller et nous ressusciter par son Esprit. Si nous devions dépendre de nos propres forces, il serait vain de prêcher l’Évangile. Il n’y a vraiment aucune chance que la volonté du pécheur accueille sa grâce. Il nous faut l’intervention directe et efficace de Dieu pour pouvoir croire en lui. Si l’Évangile n’était que l’offre du salut sans être en même temps le salut offert, personne au monde ne serait du côté de Dieu. Or Dieu « vient à l’aide de notre incrédulité » et nous amène à croire.
Cela signifie-t-il qu’il suffit de s’asseoir tranquillement et d’attendre que Dieu agisse? Ce serait là une grave erreur et une distorsion injuste de la vérité biblique. En fait, il n’y a que deux attitudes possibles : Ou bien nous choisissons la grâce, ou bien nous nous adonnons aux activités et aux bonnes œuvres issues de notre propre justice avec la mortelle illusion d’être dans la vérité et de mériter les faveurs de Dieu.
Nous avons besoin d’un changement radical pour accepter le salut, et un tel changement ne peut pas se produire automatiquement ni même avec notre meilleure volonté. Une expérience extraordinaire ne pourrait pas le provoquer davantage. Il est dû uniquement à l’action du Saint-Esprit de Dieu. Aucun prédicateur, aussi doué fût-il, ne pourrait le produire; aucun argument ne pourrait nous convaincre. Rien au monde ne peut prouver à nos yeux aveuglés par le péché que l’Évangile dit la vérité. Dieu seul peut nous éclairer, régénérer et sauver. Parfois, il le fait en dépit même de notre opposition. Certes, il peut se servir d’autres moyens pour ouvrir les cœurs et les esprits, mais il entreprend le travail de la conversion de telle sorte que nul ne peut lui résister. Tel est le pouvoir de la Parole de Dieu. Elle accomplit le salut alors que les hommes s’y opposent et se demandent même si l’Évangile est valable… Certains des adversaires les plus véhéments de la foi ont été pourtant convertis par lui. Paul en est l’exemple le plus illustre.
L’Évangile chrétien entre les mains du Saint-Esprit est un étrange paradoxe. Il demande aux hommes de faire ce qu’ils ne peuvent accomplir : croire en Jésus-Christ comme en leur unique Sauveur. Ensuite, il vient à leur aide et leur permet de croire. Dieu donne la foi qu’il demande de nous. Aussi nous n’hésitons pas à annoncer l’Évangile, même lorsqu’il nous apparaît comme une contradiction. « Voici, je me tiens à la porte et je frappe, si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui », dit Jésus-Christ (Ap 3.20). Mais que se passera-t-il si à l’intérieur il n’y a qu’un cadavre spirituel? Comment peut-il entendre la voix et ouvrir? Il le peut à la seule condition que Jésus-Christ, qui se tient à la porte, le régénère et le ramène à la vie comme il le fit un jour devant la tombe de Lazare.
C’est ainsi que la Parole de Dieu explique la différence entre les croyants et les non-croyants. Est-ce à dire que le non-croyant n’a, finalement, aucune chance de croire? Bien au contraire, la chance de croire est offerte à tous. Parce que c’est Dieu qui donne la foi, tout homme a la chance de croire. Autrement il n’en posséderait aucune. Ce n’est pas la faute de Dieu si l’homme est mort dans ses transgressions. Il est mort dans son péché parce qu’il a refusé de croire en Dieu, et il refuse de croire en Dieu parce qu’il est mort dans son péché… Et Dieu n’est pas obligé de lui donner une vie nouvelle. Qu’il la donne aux uns et pas aux autres peut nous paraître arbitraire, mais en réalité il n’y a aucun arbitraire, aucune injustice de la part de Dieu, car son action n’est que pure grâce à l’égard de ceux qui n’ont aucun mérite. Quelle que soit son action, il agit toujours avec justice. Si nous avons la foi, remercions-le. Si nous la refusons, c’est à nous que revient le blâme…
Si souvent on prêche comme si la conversion ne dépendait que de l’homme et de sa libre volonté! J’avoue que cela est bien moins compliqué, plus attrayant et certainement plus populaire… Avec un orgueil à peine dissimulé, on fait dépendre le salut de la seule décision humaine, et alors, une fois de plus, l’homme est au centre de sa religion.
Mais écoutons saint Paul : « C’est par grâce que vous êtes sauvés, et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu » (Ép 2.8). Autrement, il n’y a pas d’Évangile. Si la foi n’est que l’acte de l’homme, elle sera comme tout le reste : le fruit corrompu de son cœur perverti et de son intelligence aveuglée. Elle ne pourra lui procurer la paix ni être acceptée par Dieu. Mais lorsque nous sommes découragés, désespérés de nous-mêmes, alors Dieu vient à notre secours. Il ressuscite les cadavres que nous sommes. Il nous donne la foi. Il nous donne la vie éternelle.