Cet article a pour sujet la souveraineté de Dieu qui connaît tous nos besoins et la prière qui écoute Dieu et qui est écoutée par Dieu.

Source: Souveraineté de Dieu et responsabilité de l'homme. 4 pages.

La souveraineté de Dieu et la prière

  1. Le Notre Père
  2. Le Psaume 139
  3. Être accordé avec Dieu
  4. La prière qui écoute
  5. La prière écoutée
  6. L’exaucement conditionné
  7. La prière du paresseux
  8. L’intercession
  9. Annexe : Savoir écouter

C’est là un sujet sensible et d’une grande importance, que beaucoup de chrétiens vivent avec une certaine difficulté. C’est sans doute pour cela que les réformateurs faisaient de l’étude du Notre Père une des bases de l’enseignement dans l’Église1.

1. Le Notre Père🔗

Parcourons ce passage (Mt 6.5-13). Jésus dit de ne pas prier en cherchant à se faire remarquer (6.5) : ce serait se préoccuper de soi-même. Il dit de s’isoler (6.6) : c’est s’approcher de Dieu. Il dit de ne pas multiplier les vaines paroles (6.7) : ce serait encore se préoccuper de nos propres désirs. Ce serait aussi oublier que « notre Père sait de quoi nous avons besoin avant que nous le lui demandions » (6.8, 32). Cependant, juste après, Jésus donne le modèle d’une prière (6.9). Que remarquons-nous? Les diverses demandes exprimées dans cette prière sont introduites et se concluent par des paroles qui affirment la souveraineté de Dieu. « Car c’est à toi qu’appartiennent le règne, la puissance et la gloire, dans tous les siècles! » (6.13). Il y a là, il faut le reconnaître, quelque chose d’un peu mystérieux.

2. Le Psaume 139🔗

Le Psaume 139 associe également la souveraineté de Dieu et la prière. Le premier verset dit :

« Éternel! tu me sondes et tu me connais, tu sais quand je m’assieds et quand je me lève, tu pénètres de loin ma pensée; tu sais quand je marche et quand je me couche, et tu pénètres toutes mes voies. Car la parole n’est pas sur ma langue, que déjà, ô Éternel! tu la connais entièrement » (Ps 139.1-4).

C’est une affirmation. Le dernier verset dit :

« Sonde-moi, ô Dieu, et connais mon cœur! Éprouve-moi, et connais mes pensées! Regarde si je suis sur une mauvaise voie, et conduis-moi sur la voie de l’éternité! » (Ps 139.23-24).

C’est une demande. Que remarquons-nous? La demande correspond à l’affirmation. C’est un des secrets de la prière : même si elle débute en tâtonnant, la prière doit s’achever par demander ce que Dieu veut2.

3. Être accordé avec Dieu🔗

Si nous disons « amen » à notre prière, cela signifie que nous avons prié de manière sincère. Mais cela devrait également signifier que nous avons prié de manière juste, c’est-à-dire de manière à ce que Dieu puisse également dire « amen » à cette prière. Alors, cette prière sera exaucée. L’illustration magistrale se trouve bien sûr à Gethsémané : « Père, si tu voulais éloigner de moi cette coupe. Toutefois que ta volonté se fasse et non la mienne » (Mt 26.42). En un sens, dire cela, c’était mourir… avant la croix. C’est pourquoi il est parfois recommandable de prier à genoux!

À la lumière de ce passage et de bien d’autres, il est possible d’affirmer que la meilleure prière, c’est l’obéissance de cœur, celle-ci étant la reconnaissance, dans la foi, de la juste souveraineté de Dieu.

« L’Éternel trouve-t-il du plaisir dans les holocaustes et les sacrifices, comme dans l’obéissance à la voix de l’Éternel? Voici, l’obéissance vaut mieux que les sacrifices, et l’observation de sa parole vaut mieux que la graisse des béliers » (1 S 15.22; voir És 1.15).

« Si quelqu’un détourne l’oreille pour ne pas écouter la loi, sa prière même est une abomination » (Pr 28.9). C’est-à-dire qu’elle attriste Dieu profondément : mieux vaut ne pas le dire3!

4. La prière qui écoute🔗

Il découle de cela que prier signifie autant écouter que parler. Paul le dit ainsi : « Nous ne savons pas ce qu’il nous convient de demander dans nos prières. Aussi l’Esprit nous aide dans notre faiblesse » (Rm 8.26)4. Nous voyons que la prière est tout à la fois la nôtre et celle que Dieu lui-même inspire. La prière que Dieu exauce, c’est celle qu’il inspire! En réalité, comment pourrait-il en être autrement?

5. La prière écoutée🔗

L’apôtre Jean dit clairement cela :

« Nous avons auprès de lui cette assurance, que si nous demandons quelque chose selon sa volonté, il nous écoute. Et si nous savons qu’il nous écoute, quelque chose que nous demandions, nous savons que nous possédons la chose que nous lui avons demandée » (1 Jn 5.14-15).

L’expression « selon sa volonté » peut être comprise à deux niveaux : la volonté de Dieu révélée dans l’Écriture (Pr 28.9) et la volonté de Dieu dans telle ou telle situation précise5. Nous voyons ici combien l’écoute fait partie de la prière et combien le secours du Saint-Esprit est nécessaire6.

Cela nous apprend aussi quelque chose sur la foi7 : il s’agit moins d’être sûr de soi que d’être accordé à ce que Dieu veut, dans les deux sens indiqués ci-dessus8.

6. L’exaucement conditionné🔗

Les promesses d’exaucement ne sont jamais méritées; elles sont cependant conditionnées. « Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voudrez », dit Jésus (Jn 15.7). Deux signes en témoignent, qui accompagnent la foi : garder les commandements et aimer les frères dans la foi. Cela est redit dans la première lettre de Jean, avec cette belle formule : « Car nous faisons ce qui lui est agréable » (1 Jn 3.22-24)9.

7. La prière du paresseux🔗

La prière du paresseux demande à Dieu d’accomplir ce que Dieu nous a lui-même confié. Dire : Seigneur donne à manger à mon frère qui a faim, ou : Seigneur, éduque mon enfant, ou : Seigneur, chasse ce démon! est aussi déplacé que de dire : Seigneur, va ensemencer mon champ.

8. L’intercession🔗

L’intercession fait partie du combat spirituel. Nous avons peu de chances d’y entrer utilement si Dieu n’en guide l’orientation. Pour Sodome, c’est Dieu qui suscite Abraham (Gn 18.17-33). Celui-ci s’y implique avec cœur, mais rien de sentimental là-dedans! Il en est de même quand Moïse intercède pour le peuple d’Israël pendant la bataille (Ex 17.11) et quand Paul demande qu’on prie pour lui « afin que, quand il ouvre la bouche, il fasse connaître hardiment et librement le mystère de l’Évangile » (Ép 6.19).

9. Annexe : Savoir écouter🔗

« Le premier service que l’on doit au prochain est de l’écouter. De même que l’amour de Dieu commence par l’écoute de sa Parole, ainsi le commencement de l’amour pour le frère consiste à apprendre à l’écouter. Les chrétiens, et spécialement les prédicateurs, croient souvent devoir toujours “offrir” quelque chose à l’autre lorsqu’ils se trouvent avec lui; et ils pensent que c’est leur unique devoir. Ils oublient qu’écouter peut être un service bien plus grand que de parler. Qui ne sait pas écouter son frère bientôt ne saura même plus écouter Dieu; même en face de Dieu, ce sera toujours lui qui parlera… Nous devons écouter avec les oreilles de Dieu, afin de pouvoir nous adresser aux autres avec sa parole.10 »

Notes

1. Les catéchismes de la Réforme sont des commentaires du Décalogue, du Notre Père et du Symbole des apôtres.

2. François de Malherbe (1555-1628) le dit dans son magnifique poème Consolation à Monsieur du Perrier pour la mort de sa fille : « Vouloir ce que Dieu veut est la seule science qui nous mette en repos. » Ainsi, le jeûne n’a pas pour objectif d’obtenir ce que l’on veut, mais de mieux comprendre la volonté de Dieu.

3. Jésus dit cela aussi dans une parabole étonnante en Matthieu 21.28-31 : « Un homme avait deux fils… » Voir la citation de Dietrich Bonhoeffer sur l’écoute dans l’annexe.

4. Jésus dit à ses disciples : « Vous ne savez pas ce que vous demandez… » (Mt 20.22).

5. Voir mon article intitulé La prière de guérison.

6. Quant à Dieu, il entend bien toutes les prières, mais il ne les écoute pas toutes. Il écoute celles qu’il agrée.

7. En rapport avec cette parole de Jésus : « Si vous avez la foi comme un grain de sénevé… » (Lc 17.6).

8. Ainsi, les dons spirituels mentionnés en 1 Co 12 (foi, guérison, miracle, discernement, etc.) viennent-ils bien de Dieu « qui donne à chacun en particulier, comme il veut » (1 Co 12.11).

9. Ainsi, comme avant de prendre le repas du Seigneur (1 Co 11.28), nous devrions « nous éprouver nous-mêmes » avant de prier, ce qui fait déjà partie de la prière. On pourrait dire : prier avant de prier, ou encore « aplanir les chemins du Seigneur », comme Jésus le dit en Mt 5.23-24 : « Va d’abord te réconcilier avec ton frère! »

10. Dietrich Bonhoeffer, De la vie communautaire.