1 Jean 2 - La vraie confession de foi
1 Jean 2 - La vraie confession de foi
« Jeunes enfants, c’est l’heure dernière; comme vous avez entendu qu’un Antichrist venait, voici qu’il y a maintenant plusieurs antichrists : par là, nous connaissons que c’est l’heure dernière. Ils sont sortis de chez nous, mais ils n’étaient pas des nôtres; car, s’ils avaient été des nôtres, ils seraient demeurés avec nous; mais de la sorte, il est manifeste que tous ne sont pas des nôtres. Vous-mêmes, vous avez une onction de la part de celui qui est saint, et tous, vous avez la connaissance. Je vous ai écrit, non parce que vous ne savez pas la vérité, mais parce que vous la savez, et parce qu’aucun mensonge ne vient de la vérité. Qui est le menteur, sinon celui qui nie que Jésus est le Christ? Celui-là est l’Antichrist, qui nie le Père et le Fils. Quiconque nie le Fils n’a pas non plus le Père; celui qui confesse le Fils a aussi le Père. Pour vous, ce que vous avez entendu dès le commencement doit demeurer en vous. Si ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous, vous demeurerez, vous aussi, dans le Fils et dans le Père. Et voici la promesse qu’il nous a faite : la vie éternelle. Je vous ai écrit ceci au sujet de ceux qui vous séduisent. Pour vous, l’onction que vous avez reçue de lui demeure en vous, et vous n’avez pas besoin qu’on vous enseigne; mais comme son onction vous enseigne toutes choses, qu’elle est véritable et qu’elle n’est pas un mensonge, demeurez en lui comme elle vous l’a enseigné. »
1 Jean 2.18-27
« Qui est menteur sinon celui qui nie que Jésus est le Christ? […] Celui qui confesse le Fils a aussi le Père » (1 Jn 2.22-23). Le Nouveau Testament connaît trois confessions du nom du Christ : comme Fils de Dieu, comme Seigneur, comme Messie. L’apôtre Jean dit exactement tout ce que la Bible tout entière déclare : une vie juste, droite et bonne dépend de la confession correcte de la foi. La doctrine juste commande la morale juste. Pour vivre selon la vérité et pour pratiquer le bien et la justice, il faut surveiller son credo.
Nombre de modernes sont surpris d’apprendre cette importance vitale que revêt la confession de la foi pour exprimer la vérité chrétienne. Ils prétendent que la vie est un mystère ou une expérience vécue, parfois pure poésie. L’existence de Dieu ne devrait-elle pas elle aussi échapper aux formulations verbales humaines? Nos mots ne sont-ils pas trop pauvres pour le décrire? En outre, les mots s’usent, dit-on; ce qu’on a confessé au siècle dernier ne se dit plus par les mêmes mots; à plus forte raison ce qu’on a exprimé au 16e siècle ou au 3e et au 4e! Dieu se laisserait-il emprisonner, ajoute-t-on, dans notre vocabulaire humain? Ce qui compte, c’est le sentiment d’une présence surnaturelle et d’une dépendance d’elle. Dieu se vit, il ne se définit pas! Toute confession de foi, toute doctrine et tout dogme ne sont alors considérés que comme la pâle et faible ébauche insatisfaisante pour exprimer la richesse de la foi. Telles sont les réflexions qu’on fait à propos de la confession de foi de l’Église et des critiques adressées à l’égard des dogmes hérités du passé.
Je vous propose l’étude que j’ai consacrée à la confession de la foi de l’Église pour répondre plus longuement à de telles objections. Ici même, ce n’est qu’en passant que je répondrai encore à celles-ci.
Remarquons que l’apôtre Jean a été de ceux qui ont fait l’une des plus profondes expériences chrétiennes qui soient. Il écrivait ailleurs que Dieu demeure en nous. Il mettait bien en évidence le mystère de la foi. Il signalait le contact prodigieux de l’Esprit de Dieu avec le pécheur régénéré. Il insistait sur le lien indissoluble entre lui et nous qui désormais demeurons dans sa communion. Certains pourraient parler même du « mysticisme de Jean », tant les termes qu’il utilise sont forts. Or, cet homme, bénéficiaire de l’une des expériences les plus profondes, rappelle avec insistance l’absolue nécessité d’une confession correcte de la foi.
Car la confession de foi, telle qu’il la comprend et telle que nous devrions la comprendre, est plus qu’une description de Dieu. « Celui qui confesse le Fils a aussi le Père » (1 Jn 2.23); confesser, c’est parler, dire à soi-même, à l’Église et au monde, le contenu de sa foi reconnaissante. En confessant sa foi, le chrétien proclame qu’il renonce à lui-même, à sa sagesse, à sa suffisance, à ses prétentions; au contraire, il accepte ce que Dieu lui fait connaître. Il se plie à sa volonté, il saisit et il entre en la possession de Dieu. Quand on fixe l’itinéraire qui doit mener au but, on ne peut rester dans le vague. Voilà pourquoi la foi s’exprime avec précision dans la confession, ou le credo.
Nier que le Christ Jésus soit le Christ est le mensonge par excellence. Or, le Christ a dit : « Personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler » (Mt 11.27). « Celui qui croit en moi croit, non pas en moi, mais en celui qui m’a envoyé » (Jn 12.44). Nous connaissons Dieu à travers Jésus. Cette foi confessée correctement mène à la vie éternelle, déclare saint Jean. Il y a donc une foi vraie qui mène à la vie éternelle, mais aussi des croyances étrangères à la vérité, parce qu’aveugles aux desseins de Dieu. À la définition juste s’opposent des déclarations fallacieuses et illusoires sur la façon de trouver Dieu : « Qui est menteur sinon celui qui nie que Jésus est le Christ? » (1 Jn 2.22). Le Christ est le Messie véritable et définitif annoncé par les prophéties de l’Ancien Testament, attendu par le peuple juif, mais refusé et rejeté par la synagogue.
Cependant, les Juifs contemporains de Jésus ne sont pas les seuls qui l’ont refusé. Des hommes le refusent et contestent qu’il soit le Fils de Dieu.
À l’époque de Jean, deux types d’hérésies faisaient rage dans les Églises. L’une d’elles nous est connue par les écrits d’Irénée de Lyon, qui vers la fin du 2e siècle écrivait contre les hérétiques. L’auteur chrétien dénonçait notamment l’erreur d’un penseur gnostique du nom de Cérinthe pour qui Jésus était le fils de Joseph et de Marie sans toutefois être le Christ. Après son baptême, le Christ, être divin, serait descendu sur Jésus sous la forme d’une colombe. Dès lors, Jésus aurait prêché et fait des miracles. Mais avant la mort de Jésus, le Christ divin l’aurait quitté. Jésus seul aurait vécu le Vendredi saint et Pâques alors que le Christ spirituel échappait à la souffrance. Cette doctrine affirme uniquement l’humanité de Jésus en affirmant que le Christ s’est associé avec Jésus de manière passagère.
L’autre hérésie signalée par Ignace, évêque d’Antioche, est la négation de l’humanité de Jésus. Elle prétend que Jésus-Christ est un être divin qui se serait approché des hommes, revêtant un semblant de corps humain. Pouvait-il en être autrement puisque la matière était irrémédiablement souillée par le péché? À cette hérésie appelée docétisme (du grec « dokein », paraître), Ignace y opposa un credo qui insiste sur la pleine humanité de Jésus-Christ, réellement enfanté, réellement condamné, réellement crucifié, réellement ressuscité des morts. Il profita pour la combattre lorsqu’il se rendit à Rome pour y subir le martyre.
Pourquoi évoquer de vieilles erreurs? me demanderez-vous. La raison en est que, sous une forme ou une autre, ces mêmes hérésies apparaissent chaque siècle et qu’actuellement au moins la première, niant l’origine et la nature divines du Christ, est courante chez nombre de théologiens. Saint Jean, et à sa suite les fidèles confesseurs de la foi, dénonçait l’hérésie avec vigueur.
Quelle est la cause profonde d’une hérésie? Si Dieu s’abaisse jusqu’à prendre la forme du serviteur et à mourir sur la croix, cette humiliation, avant de nous enrichir, doit nous appauvrir. Qui sommes-nous pour que Dieu ait besoin de venir nous chercher si loin et si bas? S’il est descendu jusqu’à nous, c’est que nous ne pouvons nous élever jusqu’à lui. L’incarnation réelle, totale du Fils de Dieu est un jugement impitoyable prononcé sur nos qualités de cœur et d’esprit. Saint Paul parle du scandale de la croix. Saint Jean, lui, fait allusion au scandale de l’incarnation.
Certes, les temps ont changé depuis vingt siècles, mais les rapports entre Dieu et les hommes sont restés les mêmes. La tentation d’aller à Dieu sans passer par Jésus-Christ demeure. Mais le Nouveau Testament tout entier déclare : Quiconque nie le Fils, venu en chair, n’a pas non plus le Père! Il n’y a pas de raccourci qui mènerait au Père en évitant Jésus-Christ qui est le Chemin. Il n’y a pas de sentier plus court, dans une religion monothéiste du Moyen-Orient ou spiritualiste de l’Extrême-Orient.
Le chemin inverse est celui de l’Antichrist. Antichrist et non antéchrist, comme persistent encore à l’écrire même des théologiens, en faisant un contresens… Car Antichrist, du grec « anti », veut dire celui qui s’oppose au Christ ou qui se substitue à lui. Antéchrist, du latin « ante », veut dire avant le Christ. Ainsi Abraham, Moïse, David et les prophètes ont tous été des antéchrists, mais non des antichrists.
Dans l’étude Espérer contre toute espérance, j’ai consacré un chapitre entier à ce personnage mystérieux intitulé L’Antichrist. Un bref rappel de l’essentiel suffira ici :
Le terme d’Antichrist apparaît uniquement dans les écrits de Jean, mais l’idée est aussi vieille que le monde. Il peut signifier soit adversaire du Christ, soit son substitut. La même idée est exprimée ailleurs dans la phrase « l’abomination de la désolation », ou encore « l’homme de l’iniquité ». À ce sujet, on a songé à l’empereur Caligula, un demi-fou, qui avait tenté d’installer sa statue dans le temple de Jérusalem pour y être adoré. Le livre de l’Apocalypse parle de la Bête; sans doute visait-il Néron, ou quelqu’un qui le rappelle, un Néron redivivus.
L’Église a depuis toujours été avertie que dans les derniers temps des faux docteurs apparaîtront en se présentant comme étant le Christ. Saint Jean a une vue spéciale de la situation. Il ne pense pas à l’Antichrist comme à une personne seulement, mais encore comme à plusieurs personnalités et à des idées s’opposant au Christ. En ce sens, le champ où l’adversaire livre bataille est l’esprit de l’homme, des hommes. Il combat l’Esprit de Dieu en établissant, en première ligne, l’intelligence des humains. On peut dire que tout endoctrinement et propagande, surtout actuellement, grâce aux énormes moyens de communication modernes, peut infiltrer dans nos esprits une idée, des idées, nous menant à un asservissement total sinon irréversible.
« La dernière heure » ne signifie pas un temps d’annihilation, un néant total comme au commencement. Dans la pensée biblique, la dernière heure est la fin d’une époque et l’inauguration d’une autre. Elle est dernière au sens où les choses du passé ont pris fin, non au sens d’oblitération du monde, mais de son renouvellement. Comme le monde, l’homme, membre de l’Église, sera renouvelé.
Mais bonne nouvelle, car l’avenir est à Dieu. Ne nous effrayons pas des agissements de l’adversaire. Si l’Antichrist existe, c’est le Christ qui non seulement existe, mais règne. Certes, nous vivons dans « les derniers temps » depuis deux mille ans. L’instant ultime dure depuis deux mille ans! Nous espérons le renouvellement de toutes choses. Pour l’heure, Dieu n’abandonne pas ses fidèles malgré les agissements de son opposant.
De toute manière, nous avons reçu l’onction : lors de notre baptême d’eau, mais aussi lors du baptême d’Esprit, et nous avons été scellés pour toujours. Cette onction nous enseigne sur tout ce qui concerne notre rédemption. L’Esprit n’agit pas sporadiquement en nous; il demeure en permanence. C’est par l’Esprit en nous que nous avons Jésus-Christ. Notre communion avec lui est indissoluble. Elle s’établit dans une zone de notre être située bien plus profond que le domaine des sentiments, épiderme qui connaîtrait des hauts et des bas, d’élans et de doute. Celui qui est baptisé et qui a l’Esprit possède le Christ.