La liberté pour quoi faire?
La liberté pour quoi faire?
1. Oppression et liberté⤒🔗
Le vocabulaire humain ne semble pas contenir, apparemment, de mot plus envoûtant que celui de « liberté ». Depuis l’aurore de l’humanité et à travers les siècles qui se sont succédé, la liberté a été l’idéal poursuivi par des millions d’hommes et de femmes et la devise de beaucoup de peuples, et les lettres qui la composent ont été gravées sur l’étendard de bien des nations. Certains partis politiques l’ont choisie comme leur emblème, mais cet idéal a aussi servi de slogan à des groupes violents et à des révolutionnaires sanguinaires.
Par moments, elle a ressemblé à un lambeau arraché au paradis perdu, destiné à nourrir l’utopie d’une nouvelle terre promise pour laquelle on n’a pas hésité à payer le prix le plus fort et à consentir aux sacrifices les plus lourds.
Quelle en est la raison? N’est-ce pas parce que l’histoire de l’humanité n’est qu’une suite de procès-verbaux des exactions, des oppressions, des asservissements et de l’arbitraire que des hommes et des pouvoirs ont exercé sur les corps et sur les consciences?
Aussi, que de crimes ont été commis au nom de la liberté! En son nom, des hommes violents n’ont pas hésité à écraser leurs semblables et de nouvelles tyrannies qui, à leur tour, ont exercé leur despotisme et leur pouvoir déshumanisant.
Peut-on assurer que toutes les idées sur la liberté recouvrent le même sens et indiquent les mêmes réalités? Il n’est un secret pour personne que ce qui pour les uns passe pour être la liberté, n’est pour les autres qu’une nouvelle forme d’asservissement, parfois pire que la précédente. Il existe, à ce sujet, un immense malentendu.
Ce malentendu ne date pas d’hier. Il apparaît déjà sur la première page de l’histoire de l’humanité. Rappelons-nous ce récit extraordinaire que nous trouvons au début du livre de la Genèse, dans la Bible. Le grand séducteur des esprits, nous y est-il rapporté, vint offrir au premier couple humain la toute première illusion d’une liberté totale : celle de l’indépendance par rapport à Dieu et même davantage, puisque le serpent affirme à la femme qu’ils peuvent même espérer devenir « comme Dieu ». Mais dès qu’ils se laissent entraîner dans cette entreprise démesurée, le séducteur s’éclipse et ils se retrouvent seuls face à leur folle responsabilité.
Dès lors, la liberté n’est pas seulement synonyme d’illusion, mais encore l’équivalent du joug funeste portant le nom de « péché ». Actuellement, ce terme biblique ne jouit pas d’une grande popularité. J’ignore s’il a été plus populaire dans le passé. Pourtant je l’emploierai encore volontiers, car, mieux que tout autre, il nous rappelle aussi bien l’origine de la tragédie humaine que la cause de notre mort spirituelle. Depuis la tentative du premier couple humain de s’offrir une liberté en dehors de Dieu et indépendamment de sa volonté, plus personne n’échappe à ce sort inéluctable : malheur et mort spirituelle. Alors, si cela est ainsi, à quoi nous sert cette liberté tant convoitée?
Je ne prétends pas vous offrir des réponses toutes faites. Je vous propose plutôt un principe. Tout raisonnement et tout fondement en dehors de la Parole révélée de Dieu, qu’il s’agisse de la liberté ou de tout autre exercice humain, sont voués à un échec lamentable. Il ne pourra résoudre le moindre de ces inextricables problèmes, de ces problèmes fondamentaux qui torturent tellement les êtres humains.
Regardez autour de vous : Aussitôt qu’une réponse est offerte, l’homme aliéné de Dieu se trouve devant une nouvelle situation, aussi inextricable et chargée d’incertitudes que celle qu’il s’imaginait avoir résolue. En dépit de tant de louables efforts, la raison humaine ne parvient pas à démêler les fils enchevêtrés de tant d’opinions divergentes et contradictoires. En outre, il semble que la liberté soit devenue un concept abstrait. Lorsqu’on parle de liberté, s’agit-il de la liberté concrète dont nous avons besoin pour vivre et pour respirer?
Il faut donc écouter la réponse à notre question en dehors de nous-mêmes. Il faut la chercher à l’endroit où elle se trouve, c’est-à-dire du côté de la vérité transcendante et absolue. Cela vaut mieux que de consulter une anthologie d’écrits philosophiques consacrés à la notion de liberté, depuis Montesquieu et Spinoza jusqu’à Kant en passant, bien entendu, par Jean-Paul Sartre… Pour ma part, je tiens surtout à lire à son sujet ma Bible chrétienne, Ancien et Nouveau Testament.
Sur ses pages, vous ne trouverez certes pas un article aussi court et concis que celui de votre vocabulaire philosophique. Dans la Bible, vous trouverez plutôt des principes fondamentaux, ceux qu’établit la révélation divine et qui peuvent s’appliquer parfaitement à la vie courante.
Le principe fondamental au sujet de la liberté humaine nous parle tout d’abord d’une libération, c’est-à-dire de l’affranchissement d’une situation humaine devenue intolérable. Jésus-Christ déclarait dans l’Évangile : « Si le Fils [entendez le Fils de Dieu] vous rend libres, vous serez réellement libres » (Jn 8.36). Jésus s’adressait en premier lieu aux Juifs, ses contemporains. Ceux-ci gémissaient sous le joug de l’oppression romaine, et Jésus n’ignorait pas, bien entendu, la situation politique de ses concitoyens. Pourtant, il leur offre une liberté d’une autre nature : celle qu’il était venu apporter au prix du sacrifice de sa divine personne. Tout son ministère tournait précisément autour de cette libération.
Dès son premier discours public dans la synagogue de Nazareth, il reprenait à son compte les célèbres paroles d’un ancien prophète, Ésaïe : « L’Esprit du Seigneur, l’Éternel, est sur moi; […] il m’a envoyé […] pour proclamer aux captifs leur libération… » (És 61.1). Le Fils de Dieu, le Sauveur, était venu délivrer les humains d’une misère bien plus profonde et plus mortelle que toutes les misères dues aux circonstances extérieures.
On peut faire remarquer qu’un tel discours sur la liberté est bien loin des préoccupations de millions d’hommes et de femmes, et que cette liberté-là ne satisfait pas nécessairement les aspirations de tous ceux qui croupissent dans la misère ou dans des geôles inhumaines; qu’une liberté qui ne délivre pas le corps et ne remplit pas l’estomac n’est qu’une liberté de luxe…
Pourtant je crois fermement que la libération qu’offre le Christ a un lien vital avec les libertés sur lesquelles nous discourons et pour lesquelles nous sommes disposés à nous battre en tout premier lieu. Et d’ailleurs en vain, car elles ne sont que l’illusion de la liberté, son ombre, et c’est pour cette ombre-là que nous sommes parfois prêts à donner même notre vie.
C’est la libération offerte par le Fils de Dieu qui fonde toute liberté humaine. Nous savons au fond de nous-mêmes, tout au moins je l’espère, que tout abus de pouvoir, toute oppression et toute tyrannie (qu’elle soit politique, sociale, économique, voire religieuse) sont le fruit de ce que j’ose encore nommer péché.
C’est le péché qui prive autrui de son élémentaire dignité humaine, qui empiète sur les droits du prochain, qui écrase le faible et celui qui est sans défense. Or, la libération offerte par le Christ est de nature globale. Grâce à elle, l’homme tout entier guérit. C’est avec lucidité qu’il s’aperçoit de sa véritable condition humaine et se rend compte réellement de la situation hideuse sous laquelle il se trouve asservi. La libération apportée par Christ corrige sa vue déformée et déformante et lui permet de lire, désormais, aussi bien l’ordre créationnel que les vérités les plus profondes, sous l’éclairage de la Parole divine. L’Esprit Saint régénère son esprit et alors il peut s’émerveiller devant la grâce de sa libération, goûter à la bonté divine et voir s’ouvrir devant lui une route nouvelle, le véritable chemin de la liberté. Bénéficiant d’une relation entièrement renouvelée avec Dieu, il peut réajuster ses relations avec son prochain.
Pour commencer, il respectera l’ordre créé par Dieu et, inévitablement, il veillera à ne pas empiéter sur les droits de son prochain. Il aimera Dieu de toute son âme, de tout son cœur et de toute sa force, et il aimera son prochain comme lui-même. C’est une chose inespérée, merveilleuse, que de se savoir bénéficiaire de cette libération. C’est elle qui nous mettra en mouvement pour conquérir toutes les autres libertés : politiques, sociales, culturelles et religieuses.
Si nous commençons par là, nos libertés individuelles ou collectives seront des forteresses imprenables. Aucune contrainte extérieure ne pourra ni les altérer ni nous les enlever. Il se pourrait que, comme jadis nos pères dans la foi, nous soyons amenés à donner notre vie pour les préserver. De toute manière, la liberté que nous avons en Christ est inaliénable, à moins que nous la trahissions nous-mêmes : Mais dans ce cas, vaut-il encore la peine de vivre?
Quelles sont les implications pratiques de cette libération? Comment est-il possible d’associer une vie de liberté avec la pratique des autres valeurs fondamentales de l’existence? Comment empêcher que la glorieuse liberté des enfants de Dieu que le Christ nous a acquise ne dégénère en anarchie? Notons, d’une part, que cette libération est d’ordre individuel. Il existe par conséquent un domaine privé où, en dernière analyse, l’homme devra décider pour lui-même. Nous devons assumer notre destinée parce que nous portons en nous l’image de Dieu, restaurée par le sacrifice du Christ. Nous avons donc droit à la liberté de conscience et devons refuser toute tentative de « baby-sitting » spirituel que n’importe quel « Big Brother » improvisé pourrait être tenté d’exercer sur nous.
Mais la liberté doit aussi s’exercer dans le cadre de la vie communautaire. Ainsi, la famille devra servir Dieu en toute liberté; l’Église aussi, en tant que communauté des fidèles et communion des saints. L’État aussi devra servir Dieu. Tout ce que recouvre le vocable « société » est appelé à le servir en toute liberté. Les rapports sociaux ne peuvent pas se définir par de simples « contrats sociaux » selon l’idéologie de Jean-Jacques Rousseau. Ils sont établis et fixés par le Dieu souverain. Lisez à ce sujet les passages suivants dans le Nouveau Testament : Éphésiens 5 et Romains 13. Le champ où nous sommes appelés à exercer nos responsabilités est bien plus vaste encore, mais ces deux passages indiquent les fondements sur lesquels doivent être bâtis tous les rapports humains.
Depuis la Révolution française, une fausse idée de la liberté humaine, personnelle ou sociale, a dégénéré en un individualisme aberrant. Selon cette idéologie, il n’y a ni Dieu ni Maître, mais cette idée qui se veut sans Dieu ni Maître est, à sa manière, une idée religieuse. Elle permet au citoyen de se comporter comme bon lui semble et une telle liberté ira jusqu’à lui accorder, à l’occasion, la liberté arbitraire d’empiéter sur le domaine d’autrui… Elle oublie trop souvent que même bonhomme charbonnier est maître chez lui!
Il existe, bien entendu, l’abus opposé. Je prendrai comme exemple l’attitude des pharisiens de l’époque de Jésus qui prescrivaient des obligations religieuses dans les moindres détails et, ce faisant, violaient la liberté de conscience des gens simples.
En concluant la première partie de notre exposé, reconnaissons que les conflits entre individus et sociétés et entre divers groupes sociaux ne manqueront jamais. L’État s’opposera à l’Église, et ce, même dans le plus démocratique et libéral des États… Dans un tel cas, l’Église, bien entendu, a le devoir sacré de proclamer la grande et unique Nouvelle de la libération de l’homme et de ses structures par le pouvoir rédempteur du Christ, le Fils incarné de Dieu. Sous sa direction, nous pourrons déclarer, comme les premiers disciples : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Ac 5.29).
2. Les rapports entre l’État et le citoyen chrétien←⤒🔗
La deuxième partie de mon exposé développera les rapports entre l’État et le citoyen chrétien. Dans cette deuxième partie de notre exposé traitant de la liberté chrétienne, je voudrais examiner principalement les rapports qui devraient exister entre le chrétien et l’État et ensuite entre les chrétiens et d’autres groupes ou institutions sociales.
Ce n’est un secret pour personne qu’actuellement les menaces les plus graves à l’encontre de notre liberté chrétienne nous viennent du côté de l’État. Par conséquent, nous devrions exercer dans ce domaine une vigilance accrue dans tous nos pays, y compris dans nos pays dits démocratiques.
Mais rappelons-nous pour commencer d’une parole du Christ tirée de l’Évangile : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Mc 12.17). Jésus associe donc Dieu à César… À première vue, il pourrait sembler qu’il les place sur le même niveau. Telle n’est pourtant pas son intention, car lorsqu’il déclare qu’il faut rendre à Dieu ce qui est à Dieu, il inclut tout le reste, y compris César, dans ce premier et principal commandement. César et notre soumission à son autorité sont aussi inclus et soumis à l’offrande que nous devons apporter à Dieu, qui demeure le souverain Maître. Et, à ce titre-là, il a une juridiction absolue jusque sur César. Si cette Parole reconnaît à l’État une place légitime sous la juridiction divine, elle établit une fois pour toutes les limites de son pouvoir politique. Car lorsque l’État réclame pour lui la juridiction suprême, c’est parce qu’il est devenu totalitaire. Nous lui rendrons ce qui lui revient, et pas un millimètre de plus…
Quel est le domaine où s’exercera son autorité? Selon l’apôtre Paul, la mission du magistrat consiste à faire respecter l’ordre public et à veiller sur l’exécution de la justice de Dieu. Il porte à cet effet le glaive afin de punir le malfaiteur et non pas uniquement pour le menacer. (Rm 13.1-7). Il a, par conséquent, le droit d’infliger jusqu’au châtiment suprême. La déclaration de Jésus montre encore un autre aspect de l’autorité étatique. Jésus avait reconnu sur une pièce de monnaie qu’on lui avait présentée l’effigie de César; son nom y était gravé (Mc 12.16). L’autorité civile a donc le droit, et même le devoir, de frapper de la monnaie et de la faire circuler.
Le gouvernement civil veillera également sur la sécurité du citoyen, il préviendra les accidents et les malfaçons, obligeant les auteurs de celles-ci à faire le nécessaire pour les réparer afin que personne ne subisse de préjudice. Nous pouvons dire qu’actuellement l’État a aussi le devoir de veiller sur la sécurité routière, de construire des ponts et chaussées, etc.
Sa tâche s’adaptera aux besoins et aux circonstances de l’heure et veillera sans relâche au maintien de l’ordre public; il apportera aussi son soutien actif et positif à l’entretien de bonnes relations entre les divers groupes sociaux; il prendra des mesures appropriées pour porter secours aux victimes des catastrophes naturelles; il exercera un certain arbitrage dans le domaine de l’économie et réglera les relations avec les pays étrangers; il empêchera qu’un groupe de citoyens n’empiète sur le terrain d’un autre groupe. La protection des libertés individuelles et sociales sera assurée par ses soins.
L’État n’a pourtant pas le droit de s’immiscer dans les affaires intérieures d’un groupe social ou d’une association librement et légalement constituée. Ainsi, pour ne prendre que l’exemple de l’Église, l’État n’a aucun droit d’intervenir dans ses affaires intérieures. À moins, évidemment, que les activités d’une Église ou d’un groupe ou groupuscule religieux ne mettent en danger l’ordre public ou n’exercent de nuisance sur autrui. Mais attention! Là aussi il faut veiller, car la tentation peut être grande pour certains politiciens, sous prétexte de garder l’ordre public, de resserrer l’étau autour de sectes, de groupes ou d’Églises qui ne seraient pas de leur goût. Car la privation de la liberté n’est pas uniquement le fait des États totalitaires, mais aussi, si on n’y prend pas garde, le fait de nos respectables démocraties occidentales qui, d’année en année, grignotent sournoisement la liberté de leurs citoyens dans des domaines pourtant essentiels.
Je mentionnerai en passant un groupe social dont les idées ne sont nullement les miennes; je veux parler des objecteurs de conscience qui, pour motifs religieux ou philosophiques, ne désirent pas servir de façon classique dans l’armée. Je ne discuterai pas ici de la validité de leurs arguments, mais ce que je voudrais mentionner, c’est la nécessité de leur accorder la liberté de conscience.
Un autre exemple où l’État dépasse les limites de son autorité et de sa fonction est lorsqu’il oblige les parents à envoyer systématiquement leurs enfants à l’école publique. D’autant plus que c’est lui qui choisit les programmes d’enseignement, depuis l’école primaire jusqu’à l’université, et que dans la plupart des cas la philosophie qu’il y a derrière ceux-ci est humaniste et anti-chrétienne; souvent même carrément athée.
À mon sens, presque tous les États modernes, y compris ceux qui se réclament du libéralisme, se rendent actuellement coupables d’imposer aux parents chrétiens une éducation pour leurs enfants qui s’oppose à leurs convictions religieuses et à l’exercice de leur autorité parentale.
Il conviendrait encore de mentionner toutes les entreprises de socialisation de la vie, de la culture aux loisirs en passant par les nationalisations des entreprises privées…
J’ose espérer que mes lecteurs et lectrices ne me feront pas grief de faire ici de la politique. Ils voudront bien comprendre que mon intention est uniquement celle de puiser du message biblique libérateur tout ce qui a trait à nos rapports sociaux. Si par malheur le chrétien que je suis se cantonnait dans une position neutre et laissait l’État envahir des domaines qui ne lui appartiennent pas, je contribuerais, même sans lui apporter ma caution, à ce qu’il outrepasse ses droits et qu’il viole la liberté la plus élémentaire de tout homme, la mienne y comprise. Par une attitude passive je contribuerais, indirectement mais sûrement, à faire de l’État moderne cette Bête dont parle le livre de l’Apocalypse, ce personnage mystérieux et monstrueux, ce tyran absolu qui surgit on ne sait pas trop d’où et qui exerce un pouvoir absolu sur tous les domaines de l’existence, à tel point, nous dit le texte sacré, que personne ne pouvait « acheter ni vendre sans avoir la marque, le nom de la Bête » (Ap 13.17). Cet État est devenu un monstre piétinant et détruisant toute liberté individuelle, et surtout toute liberté de conscience.
Pour être pourtant équitables, reconnaissons que les abus et les transgressions ne sont pas le seul apanage de l’État. Des groupes sociaux ou religieux peuvent s’en rendre, eux aussi, coupables, ou encore une majorité imposant sa volonté et ne tenant aucun compte des droits de la minorité. Or, nous estimons que toute harmonie et tout équilibre entre divers groupes sociaux ne peuvent être atteints qu’à travers la libération apportée par le Christ. Il n’y a de communauté authentique, saine et viable que là où le Christ est le souverain Maître, et cela pas seulement dans l’Église, mais encore dans toute association, dans toute ligue, dans tout cercle, dans tout syndicat, pour ne pas dire dans tout parti politique. Ce n’est qu’à cette seule condition que les hommes pourront connaître une réelle fraternité humaine.
Le récit de la Pentecôte illustre admirablement ce nouvel esprit créé entre les membres vivants d’une communauté. En fait, les disciples du Christ ayant reçu l’Esprit se mirent à parler un même langage et à communiquer le seul message de vie et de libération. L’Évangile, voyez-vous, ne privilégie pas la communauté aux dépens de l’individu ni l’individu aux dépens de la communauté. Et au nom de la liberté que Dieu nous accorde, nous avons le droit et le devoir de nous lever là où il y a des signes évidents et des preuves flagrantes de la violation de celle-ci. Le Fils de Dieu nous a appelés à exercer cette liberté. Il l’a payée de sa vie; il a subi le supplice de la croix pour nous affranchir de tout joug, non seulement satanique, mais encore humain. Même au sein d’une société moralement corrompue, nous pouvons agir en notre qualité de disciples pour rendre les rapports humains et les relations sociales des réalités nouvelles et transformées. Nous en avons le droit à plus d’un titre à cause des droits que le Christ nous a acquis. Notre mission consiste à déclarer qu’il est le grand et véritable Libérateur et que lui seul rétablit les rapports brisés et la communication rompue.
Nous devrions déclarer à la face du monde entier que seule la soumission à l’ordre de Dieu assurera une vie personnelle harmonieuse et une vie sociale libre, car nous sommes ses prophètes.
Pensons à cette histoire si significative de l’Ancien Testament, celle de ce jeune Israélite déporté dans la cour païenne du roi Neboukadnetsar, il s’agit de Daniel, qui, par motif de conscience religieuse, refusa même le régime alimentaire qui lui fut proposé (Dn 1).
Saint Paul lui-même se défendit lorsqu’il fut injustement accusé et fit même appel à César (Ac 25.6-12). Lors de son procès, il protesta contre les mauvais traitements dont il avait été victime à la cour du roi Hérode. Nous sommes appelés à devenir les témoins de la glorieuse liberté des enfants de Dieu qui est la nôtre. Notre mission consiste à déclarer que le Christ seul est le grand et le véritable Libérateur.
Le grand séducteur déploie tous ses efforts contre ce but. L’adversaire de Dieu et des hommes proclame son séduisant anti-évangile du seul pain matériel, et combien de personnes, en effet, ont sacrifié leur personnalité unique et leur liberté pour ce pain périssable… Combien d’hommes et de femmes se sont avilis et ont perdu toute dignité à cause des biens matériels! Les disciples du Christ, qui pourtant prient aussi pour leur pain quotidien, ont appris qu’avant même ce pain indispensable à leur vie ici-bas, il y a Dieu et ses droits. Vous pouvez donc réclamer ce qui vous est dû au nom de Dieu.
Chrétiens du monde entier, cessez de vivre en mendiants de vos droits! Votre liberté ne devrait pas être uniquement visible le dimanche matin lors du service religieux, mais chaque jour, partout. Liberté de parents chrétiens, de travailleurs chrétiens, d’intellectuels chrétiens, d’hommes politiques chrétiens… Unissez-vous donc, chrétiens du monde entier, afin de ne pas perdre votre liberté, fruit de l’offrande de la personne même du Fils de Dieu.