Le peuple de Dieu, le pays d'Israël et l'impartialité de l'Évangile Lettre ouverte aux évangéliques et aux autres groupes intéressés
Le peuple de Dieu, le pays d'Israël et l'impartialité de l'Évangile Lettre ouverte aux évangéliques et aux autres groupes intéressés
Récemment, un certain nombre de dirigeants spirituels de la communauté protestante des États-Unis ont vivement recommandé d’appuyer une politique d’engagement unilatéral d’une portée considérable envers le peuple et le pays d’Israël dans le conflit israélo-palestinien, citant les Écritures saintes pour justifier un tel engagement. Afin de donner du poids à leur appui, plusieurs de ces dirigeants ont également insisté pour dire qu’ils parlaient au nom des soixante-dix millions de personnes constituant la communauté évangélique américaine.
Il est bon et nécessaire que les dirigeants évangéliques s’expriment publiquement au sujet des grands enjeux moraux de notre temps, afin d’obéir à l’appel que le Christ a adressé à ses disciples d’être le sel de la terre et la lumière du monde (Mt 5.13-16). Mais il en est tout autrement lorsque les dirigeants demandent que nous prenions des engagements fondés sur une interprétation erronée des Écritures saintes. Il est également bon et nécessaire, dans de tels cas, que d’autres dirigeants s’expriment publiquement. C’est ce que nous faisons ici dans l’espoir de pouvoir contribuer à la cause du Seigneur Jésus, sans qui la véritable paix durable dans le monde est impossible (Jn 14.27).
Deux propositions vouées à l’échec sont au cœur des engagements politiques en question. Tout d’abord, certains enseignent que la prétendue faveur de Dieu envers Israël aujourd’hui serait fondée sur la descendance ethnique plutôt que sur la grâce de Jésus-Christ seule, telle que proclamée dans l’Évangile. Ensuite, d’autres enseignent que les promesses de la Bible concernant le pays sont accomplies dans une région politique particulière, ou « Terre sainte », perpétuellement mise à part par Dieu pour un seul groupe ethnique. Par conséquent, à la suite de ces fausses affirmations, une grande partie de la communauté évangélique, nos concitoyens et notre gouvernement sont induits en erreur quant à l’enseignement de la Bible sur le peuple de Dieu, le pays d’Israël et l’impartialité de l’Évangile.
Nous rendons nos convictions publiques par ce qui suit. Nous le faisons en reconnaissant que plusieurs qui ne seront pas d’accord avec nous ont la foi évangélique authentique. Sachant que nous pouvons nous attirer leur défaveur, nous sommes toutefois contraints par les Écritures et par notre conscience de publier les propositions suivantes pour la cause de Jésus-Christ et de la vérité.
1. L’Évangile offre sans distinction, aux Juifs tout comme aux Gentils, la vie éternelle au ciel comme don gratuit en Jésus-Christ (Rm 6.23). La vie éternelle au ciel n’est ni gagnée ni méritée; elle n’est pas non plus fondée sur une descendance ethnique ou sur la naissance naturelle (Lc 3.8; Ép 2.8-9).
2. Tous les êtres humains sont pécheurs, aussi bien les Juifs que les Gentils (Rm 3.22-23), et en tant que tels, ils sont sous le jugement mortel de Dieu (Rm 6.23). Puisque la norme divine exige une parfaite obéissance et que tous sont pécheurs, il est impossible pour quiconque d’acquérir la paix temporelle ou la vie éternelle par ses propres efforts. De plus, en dehors de Jésus-Christ, il n’y a pas de faveur divine particulière envers qui que ce soit dans quelque groupe ethnique que ce soit; pas plus qu’il n’y a de promesse divine d’un pays terrestre ou d’un héritage céleste pour quiconque, Juif ou Gentil, en dehors de Jésus-Christ (Rm 3.9-10). Enseigner ou suggérer autre chose n’est rien de moins que de compromettre l’Évangile même.
3. Dieu, le Créateur de toute l’humanité, est miséricordieux et ne prend pas plaisir à punir les pécheurs (Éz 18.23,32). Mais Dieu est également saint et juste et il doit punir le péché (Ex 34.7). Afin de satisfaire à la fois sa justice et sa bonté, Dieu a donc choisi une seule voie de salut pour tous, Juifs ou Gentils, en Jésus-Christ seul (Ac 4.12; Jn 14.6).
4. Jésus-Christ, qui est pleinement Dieu et pleinement homme (Jn 1.1,14), est venu dans le monde pour sauver des pécheurs (1 Tm 1.15). En mourant sur la croix, Jésus était l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde, autant pour le Juif que pour le Gentil. La mort de Jésus a accompli pour toujours et a éternellement mis fin aux sacrifices du temple juif (Hé 9.11-12; 10.11-12). Tous ceux qui désirent adorer Dieu, qu’ils soient Juifs ou Gentils, doivent maintenant venir à lui en esprit et en vérité par Jésus-Christ seul. L’adoration de Dieu n’est plus rattachée à un sanctuaire terrestre particulier. Il reçoit l’adoration uniquement par Jésus-Christ, le Temple éternel et céleste (Jn 4.21,23; 2.19-21).
5. À tous ceux qui se reposent en Jésus-Christ seul et qui le reçoivent par la foi seule, aux Juifs tout comme aux Gentils, Dieu donne la vie éternelle dans son héritage céleste (Rm 1.16; Jn 1.12-13).
6. Les promesses d’héritage que Dieu a données à Abraham ont pris effet en Jésus-Christ, la véritable descendance d’Abraham (Ga 3.16). Ces promesses n’ont jamais pris effet et ne prendront jamais effet grâce à l’observation de la loi par l’homme pécheur (Rm 4.13). La promesse d’un héritage est plutôt faite à ceux-là seuls qui croient en Jésus, le véritable Héritier d’Abraham. Tous les bienfaits spirituels proviennent de Jésus, et sans lui aucune participation aux promesses n’est possible (Ga 3.7,26-29). Puisque Jésus-Christ est le Médiateur de l’alliance faite avec Abraham, tous ceux qui le bénissent, lui et son peuple, seront bénis de Dieu, et tous ceux qui le maudissent, lui et son peuple, seront maudits de Dieu (Gn 12.3). Ces promesses ne s’appliquent pas à un groupe ethnique particulier (Ga 3.22; Mt 21.43), mais à l’Église de Jésus-Christ, l’Israël véritable (Rm 2.28-29; Ph 3.3). Le peuple de Dieu, que ce soit l’Église d’Israël au désert dans l’Ancien Testament (Ac 7.38) ou l’Israël de Dieu parmi les Gentils de la Galatie dans le Nouveau Testament (Ga 6.16), forme un corps qui, par Jésus, recevra la promesse de la cité céleste, la Sion éternelle (Hé 13.14; 2 Pi 3.13; Ap 21.9-14; Hé 11.39-40). Cet héritage céleste a fait l’objet de l’espérance du peuple de Dieu à travers tous les âges (Hé 11.13-16; 12.22-24).
7. Jésus a enseigné que sa résurrection constituait la construction du véritable Temple d’Israël (Jn 2.19-21). Il a remplacé le sacerdoce, les sacrifices et le sanctuaire d’Israël en les amenant à leur accomplissement par son propre ministère sacerdotal glorieux et par l’offrande, une fois pour toutes, de son sacrifice pour le monde, c’est-à-dire pour les Juifs aussi bien que pour les Gentils (Hé 8.1-6; voir aussi Hé 4.14 à 5.10; 6.13 à 10.18). Les croyants de toutes les nations sont maintenant édifiés par lui dans ce troisième Temple (Ép 2.19-22; 1 Pi 2.4-6), l’Église que Jésus a promis de construire (Mt 16.18; Hé 3.5-6).
8. Simon Pierre a parlé du retour du Seigneur Jésus relativement au jugement final et au châtiment des pécheurs (2 Pi 3.10-13). Il est instructif de voir que ce même Simon Pierre, l’apôtre des circoncis (Ga 2.7), ne dit rien à propos de la restauration du royaume d’Israël dans le pays de Palestine (Ac 1.6-7). En revanche, tandis que ses lecteurs envisagent la promesse du retour de Jésus, il ancre toute leur espérance dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre, là où la justice habitera (2 Pi 3.13).
9. Le droit d’un groupe ethnique ou religieux quelconque de posséder le territoire du Moyen-Orient appelé la « Terre sainte » ne peut pas être justifié par les Écritures. En fait, les promesses d’un pays faites à Israël dans l’Ancien Testament ont été accomplies avec Josué (Jos 21.43-45). Le Nouveau Testament parle clairement de manière prophétique de la destruction du second temple en l’an 70 apr. J.-C. (Mt 24.1-2; voir aussi Mc 13.1-2; Lc 21.20-24). Aucun écrivain du Nouveau Testament ne prévoit un retour d’un Israël ethnique dans le pays comme les prophètes de l’Ancien Testament l’avaient annoncé après la destruction du premier temple en 586 av. J.-C. (Lc 21.24). De plus, dans le Nouveau Testament, les promesses de l’Ancienne Alliance au sujet du pays sont invariablement et délibérément développées de manière à montrer la domination universelle de Jésus (Ex 20.12; Ép 6.2-3; Gn 12.1; Rm 4.13; Ps 37.11; Mt 5.5; Ps 2.7-8), qui règne depuis le ciel sur le trône de David, invitant par l’Évangile toutes les nations à participer à sa domination universelle et éternelle (Ac 2.29-32).
10. Une mauvaise théologie chrétienne au sujet de la « Terre sainte » a contribué à la cruauté tragique des Croisades au Moyen Âge. Il est déplorable que de nos jours une mauvaise théologie chrétienne attribue au peuple séculier d’Israël un mandat divin de conquérir et de posséder la Palestine, avec pour conséquence que le peuple palestinien est marginalisé et pratiquement considéré comme des « Cananéens » (Dt 20.16-18; voir aussi Lv 27.28-29). Cette doctrine est à la fois contraire à l’enseignement du Nouveau Testament et une violation du mandat missionnaire de l’Évangile (Mt 28.19). De plus, cette théologie, qui amène ces chrétiens à appuyer vivement la prise par la violence et l’occupation du territoire palestinien, risque de les rendre moralement coupables du sang versé. Ne sommes-nous pas appelés, en tant que chrétiens, à prier et à travailler pour la paix, avertissant les deux parties engagées dans ce conflit que ceux qui vivent par l’épée mourront par l’épée? (Mt 26.52). Seul l’Évangile de Jésus-Christ peut apporter à la fois la réconciliation temporelle ainsi que l’espérance d’un héritage éternel et céleste aux Israéliens et aux Palestiniens. Ce n’est que par Jésus-Christ que nous pouvons, qui que nous soyons, connaître la paix sur terre.
Le Royaume messianique de Jésus-Christ qui a été promis a été inauguré. Sa venue constitue le point focal de l’histoire humaine. Ce Royaume du Messie continue à tendre vers sa plénitude à mesure que les croyants juifs et gentils sont ajoutés à la communauté des rachetés à chaque génération. Ce même Royaume sera manifesté sous sa forme définitive et éternelle au retour de Jésus-Christ, le Roi, dans toute sa gloire.
De toutes les nations, le peuple juif a joué le rôle premier dans la venue du Royaume messianique. Les Écritures du Nouveau Testament déclarent que les oracles de Dieu leur ont été confiés (Rm 3.2), de même que l’adoption, la gloire, les alliances, le don de la loi, le service de Dieu et les promesses (Rm 9.3-4). Abraham, Isaac et Jacob sont leurs pères et c’est de ces pères que Jésus-Christ est issu selon la chair (Rm 9.5). Le salut vient effectivement des Juifs (Jn 4.22). Tout en affirmant l’enseignement biblique selon lequel il n’y a pas de salut en dehors de Jésus-Christ, les chrétiens devraient reconnaître avec tristesse et chagrin sincère l’oppression fréquente subie par les Juifs dans l’histoire, parfois tragiquement commise au nom de la croix.
Mais que devons-nous penser de l’incrédulité d’Israël? Leur incrédulité a-t-elle rendu la fidélité de Dieu sans effet pour eux? (Rm 3.1-4). Non, Dieu n’a pas complètement rejeté le peuple d’Israël (Rm 11.1; voir Rm 11.2-10) et nous nous joignons à la prière fervente de l’apôtre Paul pour le salut des Juifs, ses parents selon la chair (Rm 9.1-3). Il y a toujours eu et il y aura toujours un reste qui sera sauvé (Rm 11.5). Bien que tout Israël ne goûtera pas à la bénédiction de la participation au Royaume messianique (Rm 9.6), toutefois les Juifs qui viennent à la foi en Jésus-Christ participeront à son règne tout au long de l’ère présente de même que dans l’éternité. De plus, ce n’est pas comme si le rejet d’une partie d’Israël à cause de leur incrédulité ne servait à rien. Au contraire, parce qu’ils ont été retranchés à cause de leur incrédulité, l’Évangile s’est étendu aux Gentils qui, par la foi, ont maintenant part aux bénédictions des pères et qui s’unissent aux Juifs croyants pour constituer le vrai Israël de Dieu, l’Église de Jésus-Christ (Rm 11.11-18).
L’État séculier d’Israël actuel n’est toutefois pas une réalisation authentique ou prophétique du Royaume messianique de Jésus-Christ. Nous ne devrions pas non plus nous attendre à ce qu’un jour le Royaume du Christ manifeste des caractéristiques juives, que ce soit par son emplacement dans « le pays », par ses éléments constitutifs ou par ses institutions et pratiques cérémonielles. L’ère présente atteindra plutôt son point culminant lors de l’arrivée de la phase finale et éternelle du Royaume du Messie. À ce moment-là, tous les yeux, même de ceux qui l’ont percé, verront le Roi dans sa gloire (Ap 1.7). Tout genou fléchira et toute langue confessera que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père (Ph 2.9-11). Les royaumes de ce monde deviendront le Royaume de notre Seigneur et de son Christ, et il régnera pour toujours (Ap 11.15).
À la lumière de la grande espérance prophétique du Nouveau Testament, nous recommandons vivement à nos frères et sœurs évangéliques de revenir à la proclamation de la grâce de Jésus-Christ offerte gratuitement dans l’Évangile à tous les enfants d’Abraham, de prier pour la paix entre les Israéliens et les Palestiniens et de promettre toute sympathie humanitaire et tout soutien pratique à ceux qui souffrent, d’un côté comme de l’autre, dans ce cercle vicieux actuel d’atrocité et de déplacement de population. Nous invitons également les éducateurs et pasteurs chrétiens qui partagent nos convictions au sujet du peuple de Dieu, du pays d’Israël et de l’impartialité de l’Évangile à ajouter leurs noms aux nôtres en tant que signataires de cette lettre ouverte.