Psaume 73 - Romains 12 - S'approcher de Dieu
Psaume 73 - Romains 12 - S'approcher de Dieu
« Psaume d'Asaph. Oui, Dieu est bon pour Israël, pour ceux qui ont le cœur pur. Quant à moi, pour un peu mes pieds allaient fléchir, il s’en est fallu d’un rien que mes pas ne glissent, car je jalousais les insensés, en voyant la prospérité des méchants. Rien ne les tourmente jusqu’à leur mort. […] J’ai donc réfléchi pour comprendre cela; ce fut pénible à mes yeux, jusqu’à ce que j’arrive aux sanctuaires de Dieu; alors j’ai compris le sort final des méchants. »
Psaume 73.1-4a, 16-17
« Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable. Ne vous conformez pas au monde présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, agréable et parfait. »
Romains 12.1-2
- Chercher à discerner la volonté de Dieu
- Le sanctuaire
- Le cœur, un autre sanctuaire
- Le corps, ou s’offrir entièrement
1. Chercher à discerner la volonté de Dieu⤒🔗
Qui, parmi nous, serait intéressé par une intelligence renouvelée, une intelligence qui permet de discerner ce qui est agréable à Dieu, dans chaque situation qui se présente, de comprendre ce qui est « bon, agréable et parfait », pour reprendre l’expression de Paul? C’est évidemment le désir profond de chaque chrétien.
Ce désir est sans doute, avec l’amour pour les frères et sœurs dans la foi, un des signes de la régénération du cœur et de la nouvelle naissance.
Mais le désirer est une chose et le vivre… en est une autre.
Frères et sœurs, il y a des choses que nous désirons et que nous attendons. C’est ce qui relève de l’espérance. Par exemple le retour du Seigneur, le festin des noces de l’Agneau, les nouveaux cieux et la nouvelle terre… Cela, nous l’attendons dans la foi et nous nous en réjouissons par avance!
Mais pour ce qui est de discerner la volonté de Dieu, cela fait-il partie de ce que nous devons attendre ou de ce que nous sommes appelés à vivre dès maintenant?
Sommes-nous conscients à quel point la société dans laquelle nous vivons se construit et fonctionne de plus en plus en ignorant la volonté de Dieu (ou en la combattant de plus en plus ouvertement), à quel point nous sommes tentés de cultiver en même temps des réflexes de croyants — à certains moments ou dans certains domaines — et des réflexes d’incroyants à d’autres moments ou dans d’autres domaines?
Je cite Manuel Vals, ministre de l’Intérieur, au Synode de l’Église protestante unie à Lyon le 11 mai dernier (2013) :
« La laïcité, qui est le fruit d’un compromis, a garanti l’unité de notre pays en tirant un trait catégorique entre ce qui relève de la sphère publique et ce qui tient de l’intimité spirituelle de chacun. »
Nous comprenons cela s’il faut entendre que nous n’avons pas, en tant que chrétiens, à confondre l’Église et la société en général. Mais nous ne pouvons pas comprendre qu’il puisse exister « un trait catégorique » qui sépare la réalité en deux : une partie qui relève de la sphère privée (la maison, l’Église) et une partie — dont Dieu serait exclu — qui relève de la sphère publique (la rue, l’école, le travail…). Cela, c’est nier la foi! Une formatrice en milieu hospitalier a, par exemple, utilisé l’expression : « laisser sa foi au vestiaire », en parlant des soignants chrétiens. Un chrétien peut-il laisser sa foi au vestiaire?
Il est facile de remarquer que les chrétiens qui, dans l’histoire, ont marqué leur temps sont ceux qui, au lieu de faire des compromis, se sont tenus près de Dieu. Je développe cela à partir de trois mots : le sanctuaire, le cœur, le corps.
2. Le sanctuaire←⤒🔗
On pourrait faire une étude très longue et profonde sur le sanctuaire. Mais quelqu’un dira : À quoi cela va-t-il servir? Qu’est-ce que ça va changer? Quel rapport peut-il y avoir entre le sanctuaire et ce que nous vivons chaque jour?
Asaph, dans le Ps 73, confie un trouble profond, partagé par d’innombrables personnes aujourd’hui, devant l’injustice, devant ce qui lui apparaît comme une contradiction : tandis que nous croyons que Dieu est juste et tout-puissant, des méchants vivent sans que rien ne les inquiète, alors que des justes souffrent misérablement. « Mon pied allait fléchir, dit-il. Mes pas étaient sur le point de glisser. […] Quand j’ai réfléchi là-dessus, la difficulté fut grande à mes yeux » (Ps 73.2, 16).
Asaph n’est pas un enfant quand il écrit cela. Il a crié à Dieu son incompréhension. Il a peut-être même douté que Dieu soit réellement là pour l’entendre, à certains moments, tellement sa logique était bousculée. « Car je portais envie aux insensés, voyant le bonheur des méchants… » (Ps 73.3). Probablement a-t-il consulté des sacrificateurs, des docteurs de la loi, mais aucune explication ne l’a réellement apaisé… « jusqu’à ce qu’il ait pénétré dans les sanctuaires de Dieu » (Ps 73.17).
Asaph avait en quelque sorte deux regards : un regard sur les choses apparentes, choquantes ou séduisantes (pensons à la télévision), et un regard sur Dieu, un peu tâtonnant. Je me demande si ce n’est pas ce que vivent ces innombrables personnes qui disent : Je suis croyant, pas pratiquant. Je crois que c’est aussi ce que vivent des croyants pratiquants… qui n’osent pas confesser la foi avec assurance : ils sont gênés, ils sont à moitié sûrs, ils sont comme sur une balance, un peu partagés, prudents, hésitants, souvent prêts à des compromis, sans réel témoignage…
Asaph a dû être comme cela… « jusqu’à ce qu’il ait pénétré dans les sanctuaires de Dieu ». À ce moment-là, il s’est passé quelque chose qui a produit un changement radical. La réalité est demeurée la même, mais elle est apparue sous un éclairage complètement nouveau, et le trouble s’est évanoui! « J’étais stupide et sans intelligence », écrit Asaph (Ps 73.22).
« Jusqu’à ce que j’eusse pénétré dans les sanctuaires de Dieu. » De quoi s’agit-il? Ce terme est employé pour désigner des lieux de culte païens qui existaient avant Israël ou autour de lui. Il désigne aussi le tabernacle dans le désert, puis le temple, et notamment le lieu de la rencontre, réservé aux prêtres. Le lieu de la rencontre, quelle expression! Enfin, le sanctuaire désigne aussi le lieu céleste où Dieu a sa demeure.
« Christ n’est pas entré dans un sanctuaire fait de main d’homme, en imitation du véritable, mais il est entré dans le ciel même afin de comparaître maintenant pour nous devant la face de Dieu » (Hé 9.24; voir Ps 102.20).
Ici apparaît encore cette dimension de la rencontre, du face à face. Le sanctuaire, c’est le lieu du face à face avec Dieu, sans intermédiaire, sinon le Seigneur Jésus.
C’est l’expérience de Job, résumée dans cette parole : « Mon oreille avait entendu parler de toi, mais maintenant mon œil t’a vu » (Jb 42.5). Que s’est-il passé? C’est comme quand deux regards se rencontrent enfin. Il y a une double mise en lumière : sur Dieu et sur moi. « J’ai parlé sans les comprendre de choses trop grandes pour moi », dit Job (Jb 42.3). Comme dans la vision d’Ésaïe :
« L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur assis sur un trône très élevé. […] Alors je dis : Malheur à moi! Je suis perdu, car je suis un homme dont les lèvres sont impures, et mes yeux ont vu l’Éternel » (És 6.1, 5).
C’est encore la rencontre de Jésus avec la femme Samaritaine. Là aussi, c’est une double rencontre, un double dévoilement : sur Jésus le Messie, mais aussi sur son cœur à elle : « Voilà un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait! » (Jn 4.29). Nous reconnaissons là le cœur de l’expérience chrétienne : il n’y a pas une porte qui s’ouvre, mais deux. « Le Seigneur s’étant retourné regarda Pierre… » (Lc 22.61). On pourrait parler d’une double révélation : celle de la présence de Dieu et celle de mon propre cœur.
3. Le cœur, un autre sanctuaire←⤒🔗
Nous ignorons souvent la dimension du cœur. Nous connaissons les raisonnements, les idées, les sentiments, les affections, mais le cœur, qui le connaît? « Le cœur de l’homme est un abîme » (Ps 64.7). « Le cœur est tortueux par-dessus tout et il est incurable : Qui peut le sonder? » (Jr 17.9). En réalité, notre propre cœur est aussi inaccessible que Dieu, car c’est la même lumière qui permet de découvrir l’un et l’autre. De Lydie, la marchande de pourpre, il est dit que « le Seigneur lui ouvrit le cœur pour qu’elle fût attentive à ce que dirait Paul » (Ac 16.14). Oui, en un sens, c’est Dieu qui en a la clé. Et cela nous concerne tellement!
Rappelons-nous l’expérience du fils prodigue. Il est assis au milieu des pourceaux. On voit bien que le lieu importe peu! Pour lui, c’était l’heure de l’épreuve. Le regard de cet homme va changer entièrement, comme celui d’Asaph : lui aussi portait envie aux insensés. Et maintenant, il va demander à être traité comme un serviteur! Le texte nous donne une indication intéressante : « Étant entré en lui-même, il se dit… » (Lc 15.17). Voilà de nouveau la dimension du cœur, l’accès au cœur, au plus profond de moi, au « lieu saint » de mon être : c’est là aussi un sanctuaire, en un sens. C’est là que se fait la rencontre avec Dieu! Étant entré en lui-même, il a entendu l’Esprit de Dieu qui disait à son esprit ce qu’il avait à faire. C’est cela l’intelligence selon Dieu! « Il se leva et alla vers son père » (Lc 15.20).
La crainte de Dieu, qui est le commencement de la sagesse et de l’intelligence, ce n’est pas seulement un code de morale ou des souvenirs d’enfance : c’est une disposition profonde du cœur qui va orienter toute ma vie. La voix de Dieu qui va diriger ma pensée, me rendre sensible à sa volonté, m’accorder le discernement, le secours nécessaire, les dons nécessaires, et même la foi pour agir, et encore l’amour, tout cela c’est l’œuvre de l’Esprit. Et c’est au niveau du cœur que l’Esprit agit, pas autrement! « L’amour de Dieu est versé dans nos cœurs par le Saint-Esprit », dit Paul (Rm 5.5). La louange, l’adoration, c’est le cœur! L’obéissance de la foi, c’est le cœur! « Ces commandements seront dans ton cœur! » (Dt 6.6). Mon cœur est comme un sanctuaire. C’est pourquoi il est écrit : « Garde ton cœur plus que tout autre chose… » (Pr 4.23).
Nous comprenons que le sanctuaire, ce n’est pas sur telle ou telle montagne, ou même à Jérusalem, ou le Musée du Désert ou le temple ou le Foyer protestant. Ce n’est même pas la chambre où Jésus nous invite pourtant à entrer, porte fermée. « Car Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l’adorent l’adorent en esprit et en vérité », rappelle Jésus à la femme Samaritaine (Jn 4.24). Or, la dimension de l’Esprit, c’est celle du cœur que Dieu recherche et habite, si nous le lui avons ouvert. C’est pourquoi nous lisons cet appel dans le livre des Proverbes : « Mon fils, donne-moi ton cœur! » (Pr 23.26).
4. Le corps, ou s’offrir entièrement←⤒🔗
Après avoir dit un mot sur le sanctuaire où se vit la rencontre avec Dieu et sur le cœur qui est le lieu où l’Esprit parle à notre esprit, je voudrais dire un mot sur le corps. Pourquoi le corps? Parce que Paul le mentionne à propos du renouvellement de l’intelligence, comme pour Asaph, Lydie, la Samaritaine, etc. Il écrit :
« Je vous exhorte à offrir vos corps en sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu, ce qui constituera un culte pour Dieu de votre part, et qui rendra possible une transformation par le renouvellement de l’intelligence afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait » (Rm 12.1-2).
Que Dieu nous éclaire lui-même, car ces choses, je l’ai dit, sont inaccessibles avec nos propres forces. Et pourtant, nous sommes appelés à les vivre. Non pas plus tard, mais maintenant. Certains se disent peut-être : Ce pasteur nous parle de choses impossibles. Ce n’est pas faux. Et d’autres se disent peut-être : Je veux vivre cela réellement! Ils ont raison aussi! Les deux ont raison : c’est impossible par nos propres forces et c’est pourtant la volonté de Dieu pour chacun de nous.
C’est un appel : Offrez vos corps! Mais le corps, n’est-ce pas ce qui est visible, extérieur, le plus éloigné du cœur et de l’Esprit? Ici, le mot corps désigne la totalité de notre être. Ni plus ni moins : corps, âme et esprit.
Je ne sais pas comment vous réagissez à cela. Peut-être en disant : Mais c’est impossible. Il faut bien que je vive, comme tout le monde… Peut-être en disant : Je sens que c’est bien ce que Dieu me demande. Ne pas m’offrir entièrement, c’est marchander; c’est ce qui m’empêche d’être heureux. Peut-être en disant : Je me suis déjà offert entièrement à lui il y a longtemps; mais je sens que je dois le faire encore aujourd’hui, et chaque jour. Car c’est cela le culte que Dieu aime!
Je ne sais comment vous réagissez ni même comment je réagis moi-même. Ce que je sais, c’est que c’est la condition pour avoir une intelligence spirituelle renouvelée et comprendre la volonté de Dieu. Non pas seulement d’une manière générale, mais aussi ici et maintenant, tout à l’heure, ce soir et demain. Instant après instant.