Ésaïe 55 - Le pardon
Ésaïe 55 - Le pardon
« Ô vous tous qui avez soif, venez vers les eaux, même celui qui n’a pas d’argent! Venez, achetez et mangez, venez, achetez du vin et du lait, sans argent, sans rien payer! […] Tendez l’oreille et venez à moi, écoutez et votre âme vivra; je conclurai avec vous une alliance éternelle. […] Voici : tu appelleras une nation que tu ne connais pas, et une nation qui ne te connaît pas accourra vers toi. […] Cherchez l’Éternel pendant qu’il se trouve; invoquez-le tandis qu’il est près. Que le méchant abandonne sa voie, et l’homme de rien ses pensées; qu’il retourne à l’Éternel, qui aura compassion de lui, à notre Dieu, qui pardonne abondamment. Car mes pensées ne sont pas vos pensées, dit l’Éternel, et vos voies ne sont pas mes voies. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, et mes pensées au-dessus de vos pensées.. Comme la pluie et la neige descendent des cieux et n’y retournent pas sans avoir arrosé, fécondé la terre et fait germer les plantes, sans avoir donné de la semence au semeur et du pain à celui qui mange, ainsi en est-il de ma parole qui sort de ma bouche : Elle ne retourne pas à moi sans effet, sans avoir exécuté ma volonté et accompli avec succès ce pour quoi je l’ai envoyée. »
Ésaïe 55.1-11
Les solutions à court terme à des problèmes sérieux s’avèrent parfois néfastes, voire cruelles. Cela est le cas, de façon tout à fait particulière, en ce qui concerne le sentiment de la faute. On peut vivre avec celui-ci pour le reste de sa vie parce que l’on a choisi la solution la plus facile. Et la pire…
Tout mal accompli dans le passé a tendance à revenir nous troubler profondément. Il est fort possible que, pendant un certain temps, l’on puisse se mettre à l’abri du sentiment de remords et de culpabilité. En effet, notre nature est faite de telle manière qu’elle peut opposer un puissant mécanisme de défense à l’encontre de tout sentiment morose nous permettant d’oublier ainsi momentanément notre faute. Parfois, ce peut être au moyen d’un activisme effréné; nous travaillons dur, et tant que nous sommes accaparés et actifs, nous avons l’illusion d’oublier les échecs du passé et les folies d’autrefois. Celui qui a rompu avec son conjoint ou qui a heurté et inutilement blessé son entourage pourra travailler, s’amuser et espérer oublier son erreur. D’autres auront recours à une gymnastique philosophique bien élaborée et complaisante pour lutter contre les mauvais souvenirs qui pourraient les talonner. Je parle de l’éthique situationniste, qui consiste à agir selon les circonstances et à s’adapter à la situation, sans se référer à une morale stable ni a des normes fixes. « Soyez pragmatiques, mettez-vous à l’aise, évitez surtout tout complexe! », disent ces slogans. D’autres encore se compareront à leur prochain. « Certes, dira l’une ou l’autre de ces personnes, je ne suis pas le meilleur de tous et je ne prétends pas l’être, mais je m’estime quand même supérieur à Dupont-Durand et, en tout cas, meilleur que ces hypocrites de chrétiens… »
Les hommes qui raisonnent ainsi, une fois lancés sur cette voie, se sentent aussi frais qu’une rose. Et pourtant, le passé, tel un fleuve boueux, charrie les immondices de notre vie et nous submerge lorsque nous nous y attendons le moins. Il y a des moments de lucidité presque effrayante, où chacun d’entre nous se sent terriblement impur et corrompu. Il existe dans la vie de chacun d’entre nous des chapitres bien embarrassants, bien laids et bien noirs… Mais le sentiment de culpabilité peut naître aussi de la fausse idée, largement répandue, que l’on est nécessairement responsable de tous les maux qui affligent la société.
Coupable parce que l’on est bien portant lorsqu’il y a tant de malades, parce que l’on vit dans une certaine abondance tandis que d’autres croupissent dans la misère, et que sais-je encore… Sans oublier ces fautes, imaginaires ou réelles, qui, telles des gouttes de poison, se déversent dans notre esprit et infectent notre existence tout entière. Nous avons beau nous sentir coupables… Tôt ou tard, la soupape de sécurité arrive à céder, et alors c’est la grande explosion. Que ressentez-vous en vous remémorant tel ou tel acte de votre vie qui ne peut inspirer que honte et dégoût? Au moment où vous l’accomplissiez, rien ne vous troublait, mais combien vous est pénible d’en supporter le souvenir maintenant!
Je ne désire pas retourner le couteau dans la plaie, mais partager avec vous une bonne nouvelle. Si tout en vous sentant coupable vous avez un désir inexplicable de pureté et de purification, désir qui peut devenir une soif brûlante chassant toute autre préoccupation de votre esprit, la bonne nouvelle consiste à vous dire qu’une telle soif peut être apaisée. Je voudrais m’entretenir avec vous du pardon.
La Bible est étroitement liée au problème de la culpabilité. Elle a des choses essentielles à nous dire à ce sujet; c’est un vrai livre de psychologie humaine. Mais auparavant il nous faudra admettre le fait qu’elle est aussi un agent provocateur du sentiment de la faute. Directe, sans flatterie aucune, elle s’oppose à un certain nombre d’actes et de comportements que nous considérons comme nos droits les plus élémentaires. Sévère, elle parle du jugement et du châtiment qui attend ceux qui les commettent et qui ne se repentent pas. L’avortement, par exemple, est devenu une sorte de droit — d’ailleurs légalisé dans de nombreux pays — dont veulent disposer les femmes de notre époque. Pourtant, Dieu nous fait connaître qu’il est le Créateur de l’embryon, que le fœtus est déjà porteur de l’image de Dieu et qu’il est très grave de le détruire. Le divorce est un autre exemple de plus en plus généralisé et accompli sans complexes, malgré ses graves conséquences — surtout pour les enfants — tandis que Dieu, Créateur du mariage aussi, insiste sur les liens indissolubles qui unissent les époux…
Mais l’extraordinaire, dans la Bible, c’est que celle-ci, qui est la Parole de Dieu, ne veut ni nous écraser ni faire notre malheur. Bien au contraire, elle veut nous relever et nous retirer du bourbier; si elle met le doigt sur la plaie, c’est dans l’intention de la guérir… Dieu est source d’eau et grenier de nourriture. Le pardon et la purification se trouvent auprès de lui, quel que soit le degré de corruption que nous ayons atteint. Dieu crie : « Venez à moi; je dispose de ce qui vous manque, ce dont vous avez besoin. Mangez de mon pain et buvez de mon eau. » Il y a un accent de joie dans cette voix de Dieu lorsqu’il nous fait cette offre.
Il nous demande de nous tourner vers lui, d’abandonner notre ancienne optique ainsi que nos vices, de confesser nos fautes. J’avoue que ce n’est facile pour personne. Notre tendance naturelle est tout le contraire de ce genre de conversion. Rappelez-vous les mécanismes de défense dont nous parlions il y a un instant : activisme, syllogismes philosophiques, comparaisons avec autrui… Mais Dieu ne nous demande pas de faire cela de nous-mêmes. « Cherchez le Seigneur pendant qu’il peut encore être trouvé. » Ainsi, il y a des moments où Dieu vient vers nous; il s’approche après s’être caché. Il fait le premier pas. Il invite. Il permet de répondre. Le fait qu’en ce moment même vous entendez ce message biblique, que vous continuez à l’écouter, n’est-ce pas la preuve que Dieu ne se tient pas à distance? Cherchez-le… « Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais déjà trouvé », écrivait Blaise Pascal dans l’une de ses admirables « pensées ».
La généreuse invitation d’Ésaïe se fonde sur un acte grandiose de Dieu. Ce n’est pas une figure de rhétorique, un morceau de poésie religieuse, une consolation bon marché. Cette invitation se fonde sur ce qui précède dans le chapitre 53 du même livre. Là, l’œuvre du Messie, de Jésus-Christ le Sauveur, est décrite.
Le pardon et la purification signifient que nous avons été pardonnés par la mort du Christ. Ce texte nous parle de l’œuvre expiatoire du Christ, le Fils unique du Dieu vivant, l’Agneau sans tache, offert pour nous sur la croix du Calvaire. Ce texte nous parle de l’œuvre expiatoire du Christ, notre unique Vicaire, l’homme de douleur. « Celui qui n’a pas connu de péché, Dieu l’a fait péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice de Dieu » (2 Co 5.21). Ici, saint Paul se fait l’écho d’Ésaïe 53.
J’ignore si vous avez déjà entendu parler de cette nouvelle. Quoi qu’il en soit, vous n’ignorez plus, à présent, que « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle » (Jn 3.16). Ainsi, Dieu se trouve à proximité de chacun de nous. Christ se compare à une eau et à un pain célestes. Au pied de la croix, vous pourrez laisser tout péché, tout le fardeau de vos sentiments de culpabilité. Autrement, le jour peut venir où vous aurez à payer personnellement. C’est là, l’enfer, le paiement d’une dette interminable; la seconde mort, où il n’y a que des pleurs et des grincements de dents sans fin. Peut-être y a-t-il des faits ou des personnes qui vous troublent en ce moment même… Dieu, lui aussi, veut vous troubler à sa manière. Mais il est le seul à pouvoir vous perdre définitivement ou à vous guérir totalement. Vous fuyez Dieu, vous êtes plongé jusqu’au cou dans le mal. Sachez pourtant que Dieu peut être cherché et trouvé. À cause de la croix du Calvaire, par la force de Jésus-Christ, nous avons la totale assurance que Dieu est tout près. Christ nous suffit. Son Esprit nous purifie. Cherchez donc, cherchez Dieu tant qu’il peut être trouvé, tant qu’il est proche et pendant qu’il est encore temps…