1 Timothée 6 - L'honneur à qui vous devez l'honneur
1 Timothée 6 - L'honneur à qui vous devez l'honneur
« Que tous ceux qui sont sous le joug de l’esclavage estiment leurs propres maîtres comme dignes de tout honneur, afin que le nom de Dieu et que la doctrine ne soient pas calomniés. Et que ceux qui ont des croyants pour maîtres ne les méprisent pas, sous prétexte qu’ils sont frères, mais qu’ils les servent d’autant mieux que ce sont des croyants et des bien-aimés qui reçoivent leurs bons services. »
1 Timothée 6.1-2
1. Introduction⤒🔗
Question : est-ce qu’il y a des esclaves dans la salle cet après-midi? Non? Bon, alors on peut passer tout de suite à la sainte Cène. J’avais préparé une prédication, mais comme le texte d’aujourd’hui concerne les esclaves, ça ne vous concerne pas, donc on peut gagner du temps et passer directement à la suite! Trêve de plaisanterie : c’est vrai que ce texte parle explicitement des esclaves (et des devoirs des esclaves en tant qu’esclaves chrétiens), mais ce n’est pas parce que l’esclavage a été aboli en France le 27 avril 1848 qu’on va enlever de la Bible ce type de passage. Il y a plusieurs autres passages, en effet, où la Bible parle de l’esclavage et des devoirs non seulement des esclaves, mais aussi des propriétaires d’esclaves.
Ce que la Bible dit au sujet de l’esclavage est très intéressant et utile, parce que ces passages reflètent par excellence la vision que la Bible porte sur les rapports d’autorité. Ce que je veux dire, c’est que si la Bible applique certains principes à la relation qu’il y a entre un esclave et son maître, à combien plus forte raison ces principes devraient-ils s’appliquer à la relation, par exemple, entre un employé et son employeur, ou entre un élève et son professeur. Ce que la Bible dit au sujet de l’esclavage est donc très intéressant et utile, comme je l’ai dit, parce que cela reflète par excellence la vision que la Bible porte sur les rapports d’autorité, et à ce titre, cela nous concerne tous.
Je ne vous apprends rien si je vous dis qu’en France, le concept de l’autorité nous pose problème. Dans une entrevue accordée au magazine l’Express, le coprésident d’Ipsos (l’institut de sondage qui réalise de nombreuses études d’opinion) a déclaré : « [La crise] a tout bonnement amené les Français à constater qu’ils n’ont plus de respect pour l’autorité. » Un peu plus loin dans l’entrevue, ce sociologue analyse certains faits de société et explique que « nous avons […] là le reflet d’une société qui, n’attendant plus rien de l’autorité, assume son dérèglement sans culpabilité et multiplie les gestes de désobéissance civile. »
Alors, la question que je vous pose est la suivante : est-ce que cette description vous caractérise? Quel est votre rapport à l’autorité? Vous n’êtes pas des esclaves avec des maîtres, mais vous êtes des étudiants avec des professeurs, vous êtes des employés avec des patrons, vous êtes des enfants avec des parents, ou au moins, vous êtes des citoyens avec un gouvernement. La leçon que ce texte nous adresse à tous est la suivante : honorer l’autorité, c’est honorer Dieu. Pour nous faire comprendre ce message, Paul nous parle de deux cas de figure : d’abord la situation d’un chrétien vis-à-vis d’une autorité non chrétienne, et ensuite la situation d’un chrétien vis-à-vis d’une autorité chrétienne.
2. Honorer les autorités (v. 1)←⤒🔗
a. Le devoir de tout esclave chrétien←↰⤒🔗
Honorer l’autorité, c’est honorer Dieu, tout d’abord, parce qu’un chrétien qui méprise l’autorité dans sa vie, c’est un chrétien qui contredit sa profession de foi. En ce qui concerne l’esclavage en tout cas, ce que Paul dit est clair : il estime qu’il est du devoir de tout esclave chrétien d’honorer son maître. « Que tous ceux qui sont sous le joug de l’esclavage estiment leurs propres maîtres comme dignes de tout honneur, afin que le nom de Dieu et que la doctrine ne soient pas calomniés » (6.1). Cela veut dire non seulement obéir à son maître, mais en plus, le faire de bon cœur. Ne pas honorer son maître, en tant qu’esclave chrétien, ce serait un contre-témoignage vis-à-vis de Dieu et vis-à-vis de l’Évangile.
Paul n’est pas en train de dire que l’esclavage est une bonne chose. « As-tu été appelé en étant esclave, ne t’en inquiète pas; mais si tu peux devenir libre, profites-en plutôt » (1 Co 7.21). Il n’est pas en train de dire que les maîtres peuvent traiter leurs esclaves comme ils le veulent.
« Quant à vous, maîtres, agissez de même à l’égard de vos serviteurs; abstenez-vous de menaces, sachant que leur Maître et le vôtre est dans les cieux et que devant lui il n’y a pas de considération de personnes » (Ép 6.9).
Paul est simplement en train de reconnaître l’existence d’un rapport d’autorité, d’une différence de rang entre maîtres et esclaves qui était normale à cette époque, et il est en train de dire aux croyants comment leur foi doit se traduire dans cette situation.
b. Une drôle d’exigence←↰⤒🔗
Paul insiste vraiment sur l’exigence qui repose sur les épaules des esclaves chrétiens, sans doute parce que le désir de se rebeller contre son maître, ou de traîner les pieds dans l’accomplissement des tâches, ou de murmurer son mécontentement à longueur de journée, était un désir légitime! Être un esclave, après tout, c’était être dans la pire condition sociale qui existait à l’époque. Non pas que les esclaves étaient systématiquement maltraités, mais ils n’avaient aucun droit. Ils étaient totalement subordonnés à leur maître, dont ils étaient la possession au même titre qu’un animal de compagnie ou un meuble. Il est donc normal et légitime qu’un esclave rouspète dans ces conditions! Mais Paul dit aux chrétiens de ne pas rouspéter, de ne pas mépriser leur maître, mais au contraire d’honorer leur maître au maximum, sans quoi c’est la réputation de Dieu et de l’Évangile qui pourrait être ternie.
c. La perspective chrétienne←↰⤒🔗
Paul est en train de nous faire remarquer ici que la façon dont nous vivons témoigne de ce que nous croyons. L’esclave rebelle et revendicateur, de quoi témoigne-t-il? Il témoigne de sa profonde insatisfaction vis-à-vis de sa situation. Son désir d’être libre est une obsession. En fait, il estime que sa dignité en tant qu’être humain est bafouée par son maître. Sa vie ne retrouvera sa vraie valeur que le jour où il sera affranchi. Cette attitude nous paraît normale, n’est-ce pas?
Mais voyez comment la foi chrétienne change la perspective sur cette situation. Le chrétien, c’est celui qui ne mesure pas la valeur de sa personne à sa condition sociale, mais au prix que Dieu a payé pour le racheter de ses péchés. Dieu a payé le prix le plus élevé qui soit pour sauver les croyants : il a offert son propre Fils, Jésus-Christ, qui est mort sur la croix dans le but de délivrer de leurs péchés tous ceux qui se confient en lui et de leur offrir la vie éternelle. L’esclave chrétien, donc, n’est pas obsédé par son désir d’être affranchi, car il sait que sa dignité ne dépend pas de sa condition sociale, il sait à qui il appartient vraiment, et il est profondément satisfait de son statut aux yeux de Dieu, en vertu du pardon qu’il a reçu par le moyen de la foi en Jésus-Christ. Les esclaves non chrétiens sont esclaves de leur esclavage, tandis que les esclaves chrétiens sont en réalité libres d’être esclaves! Et c’est pour cette raison qu’ils peuvent servir leurs maîtres de bon cœur.
d. Le paysan, le seigneur et le roi←↰⤒🔗
Imaginez que vous êtes un paysan au Moyen-âge et que vous travaillez pour le compte d’un seigneur local qui vous traite de façon injuste et parfois cruelle. Ça fait des années que ça dure, et votre haine à son encontre ne fait que grandir avec le temps. Tous les mois, il vous rend visite et il taxe lourdement vos récoltes. Vous avez l’impression de vous fatiguer pour rien, et par conséquent, vous commencez à être de plus en plus démotivé dans votre travail, vous râlez tous les jours, vous pestez contre l’injustice de la situation et vous commencez même à imaginer des façons de résister à cette exploitation.
Un jour, vous recevez une visite, et ce n’est pas le seigneur du canton, c’est le roi en personne! Il vous salue amicalement, il souhaite s’asseoir à votre table et partager un repas avec vous. Bien sûr que vous l’accueillez. Et pendant que vous lui servez tout ce qui vous reste à manger ce jour-là, à savoir une maigre soupe de pommes de terre, il vous explique qu’il est venu vous apporter en personne un titre de propriété à votre nom. Il s’agit d’un appartement dans son château. Ce présent est pour vous, et le roi vous remet un parchemin, apposé de son sceau royal, pour vous le garantir. Vous n’en croyez pas vos yeux ni vos oreilles : vous appartenez dorénavant à la cour du roi!
Seulement, avant de déménager, il vous faut encore, pendant quelque temps, acquitter vos devoirs de paysan. Vous tenez entre vos mains le précieux parchemin et votre cœur déborde de joie et de reconnaissance. Le repas touche à sa fin, et au moment de partir, le roi vous adresse solennellement le salut réservé aux nobles dans son royaume. Tiens, c’est bizarre, mais le lendemain, lorsque vous vous levez à 4h pour atteler la charrue et commencer à ramasser vos patates sous la pluie, vous n’êtes plus en train de râler contre le petit seigneur-dictateur du coin, mais vous êtes en train de siffler votre joie de vivre et votre louange du roi!
e. Voir le monde différemment←↰⤒🔗
Voilà le genre de changement de perspective qu’entraîne la foi chrétienne. Nous ne voyons plus le monde du même œil. Nous ne voyons plus notre condition sociale du même œil. Nous ne sommes plus complexés vis-à-vis de l’autorité. Le chrétien voit les personnes qui ont de l’autorité dans sa vie, mais son regard ne s’arrête pas sur elles; le chrétien voit plus loin, il voit, au-delà de ces personnes, celui qui a autorité sur toutes choses, qui régit souverainement l’univers, qui promet aux croyants un héritage éternel et qui a scellé cette promesse avec son propre sang.
Alors, vous travaillez peut-être pour un patron désagréable, voire injuste et tyrannique. Ou peut-être que vous êtes étudiant et que vous avez un mauvais professeur. Qu’est-ce qu’on fait normalement dans ces cas-là? On fait la grève, bien sûr! On devient revendicateur et méprisant de l’autorité. Mais votre devoir en tant que chrétien, en réalité, c’est de continuer à faire du bon travail et d’honorer ce patron ou ce professeur malgré ses défauts, car ainsi vous montrez que vous croyez vraiment à la souveraineté de Dieu (c’est lui qui a permis que ce patron ou ce professeur soit en position d’autorité). C’est également ainsi que vous croyez vraiment à l’Évangile (c’est la façon dont Dieu vous traite qui définit votre valeur et non pas la façon dont un patron ou un professeur vous traite).
Nous pouvons appliquer ce principe à la relation des enfants avec leurs parents. Peut-être que vous avez des parents qui ne sont pas chrétiens; cela ne signifie pas que vous pouvez les mépriser. Vous devez les honorer, leur montrer du respect, même si eux-mêmes sont méchants ou injustes. De même à l’égard des autorités politiques; vous n’êtes peut-être pas du tout d’accord avec la politique du gouvernement. En tant que chrétiens, nous devons quand même honorer le rang des gens qui nous dirigent, même si ces gens, en tant que personnes, se montrent indignes. Car la Bible dit qu’il « n’y a pas d’autorité qui ne vienne de Dieu, et les autorités qui existent ont été instituées par Dieu » (Rm 13.1). Bref, honorer l’autorité, c’est honorer Dieu, tout d’abord donc, parce qu’un chrétien qui méprise l’autorité dans sa vie, c’est un chrétien qui contredit sa profession de foi.
3. Honorer les autorités chrétiennes (v. 2)←⤒🔗
a. Une tentation compréhensible←↰⤒🔗
Honorer l’autorité, c’est honorer Dieu, deuxièmement, parce que la foi n’abolit pas les rapports d’autorité, mais au contraire, elle les sanctifie. Au verset 1, Paul a présenté un principe général, à savoir qu’il faut honorer toute autorité, et maintenant, au verset 2, Paul soulève un cas particulier.
« Et que ceux qui ont des croyants pour maîtres ne les méprisent pas, sous prétexte qu’ils sont frères, mais qu’ils les servent d’autant mieux que ce sont des croyants et des bien-aimés qui reçoivent leurs bons services » (6.2).
Paul dit que lorsqu’un esclave chrétien a un maître qui est lui aussi chrétien, l’esclave est tenté de moins le respecter, sous prétexte qu’ils sont tous les deux « frères » dans la foi, autrement dit, qu’ils sont à égalité devant Dieu. Ils pouvaient même citer un verset biblique en leur faveur, écrit par l’apôtre Paul, qui dit : « Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme, car vous tous, vous êtes un en Christ-Jésus » (Ga 3.28). Mais Paul dit clairement, ici, qu’une bonne application de ce verset ne consiste pas à abolir les rapports d’autorité.
b. La foi sanctifie le rapport d’autorité←↰⤒🔗
Au contraire, Paul dit que la foi est censée sanctifier ce rapport d’autorité, c’est-à-dire le rendre meilleur. Autrement dit, l’esclave chrétien est censé être, en vertu de sa foi, un meilleur esclave qu’un esclave non chrétien. Et de même, bien sûr, un maître chrétien est censé être un meilleur maître qu’un maître non chrétien. La foi chrétienne ne fait pas disparaître le rang d’une personne. Ce n’est pas parce qu’on est frère avec quelqu’un qu’on est à égalité avec lui.
c. Frères, mais pas égaux en rang←↰⤒🔗
Imaginez que je m’appelle François Sarkozy. Je suis le petit frère de Nicolas. Est-ce que je suis à égalité avec mon grand frère? Sous prétexte que nous sommes frères, que nous avons les mêmes parents, que nous avons grandi ensemble, est-ce que ça veut dire que je peux entrer librement à l’Élysée, quand je veux, en short et en sandales de plage? Est-ce que je peux interrompre une réunion ministérielle pour faire la bise à mon grand frère et lui donner des nouvelles de la famille? Bien sûr que non! Ce n’est pas parce que nous sommes frères que nous avons le même rang ou la même autorité. Lui il est président, moi je ne le suis pas, et il est de mon devoir, même si c’est mon frère, de l’honorer en vertu du rang qu’il occupe.
Qu’est-ce que ça veut dire pour nous aujourd’hui? Cela veut dire qu’en tant que chrétiens, il nous faut honorer nos patrons, nos professeurs, nos parents, nos gouvernants, d’autant plus s’ils sont, eux aussi, des chrétiens. Pourquoi? Parce que le rapport d’autorité et de respect qui existe entre eux et nous n’est pas appelé à disparaître à cause de notre foi commune, mais au contraire il est appelé à être exemplaire à cause de notre foi commune. Un patron chrétien est censé être un bon patron, qui exerce bien son autorité. Un employé chrétien est censé être un bon employé, qui remplit bien son devoir. De même pour les parents et les enfants, et pour tout gouvernant et tout gouverné. Bref, honorer l’autorité, c’est honorer Dieu, deuxièmement, parce que la foi n’abolit pas les rapports d’autorité, mais au contraire, elle les sanctifie.
4. Conclusion←⤒🔗
Pour conclure, voici ce qu’a dit Victor Hugo : « Il y a des gens qui observent les règles de l’honneur comme on observe les étoiles, de très loin. » Est-ce votre cas? La notion de l’autorité vous gêne-t-elle ou vous dérange-t-elle? Avez-vous vraiment du mal à estimer « digne de tout honneur » le patron de votre entreprise, vos professeurs à la faculté ou à l’école, vos parents, le président de la République et ses ministres, la police, le pasteur et les anciens de l’Église? C’est certainement compréhensible. Mais nous venons de voir que l’Évangile change notre perspective sur le monde, sur notre condition sociale et sur notre rapport à l’autorité.
Le chrétien, c’est celui qui mesure la valeur de sa personne au prix que Dieu a payé pour le racheter de ses péchés, et à rien d’autre. Est-ce à cela que vous mesurez la valeur de votre vie? Le Créateur du monde, le Régisseur de l’univers, vous tend un précieux titre de propriété pour un appartement dans son royaume, un titre de propriété à votre nom, scellé du sang de Jésus-Christ. L’avez-vous reçu par la foi? Appartenez-vous à la cour du Roi des rois? Et par conséquent, votre rapport à l’autorité reflète-t-il ce que vous dites croire en disant croire à l’Évangile? Voyez-vous qu’honorer l’autorité ici-bas revient à témoigner de votre espérance et à honorer Dieu qui a l’autorité suprême?
Dans l’épître aux Romains, Paul dit qu’il faut honorer les autorités ici-bas « par motif de conscience », en tant que chrétiens, et il ajoute :
« Rendez à chacun ce qui lui est dû : la taxe à qui vous devez la taxe, l’impôt à qui vous devez l’impôt, la crainte à qui vous devez la crainte, l’honneur à qui vous devez l’honneur » (Rm 13.5, 7).