L'appel à la sanctification - Le rôle du Saint-Esprit dans notre sanctification
L'appel à la sanctification - Le rôle du Saint-Esprit dans notre sanctification
Dès qu’il est adopté par Dieu comme son enfant, le fidèle reçoit le Saint-Esprit. Lorsque Paul, converti par le Christ, arrive à Damas, un disciple de la première heure, Ananias, lui déclare : « Le Seigneur m’a envoyé… pour que tu recouvres la vue et que tu sois rempli d’Esprit Saint » (Ac 9.17). L’Esprit Saint est en effet le don propre que Dieu accorde au croyant baptisé sur l’intercession de son Fils. Il est l’Esprit même du Christ ressuscité, dont la propre vie anime ses membres (Rm 8.9-11; Ga 4.6; 1 Co 12.13).
De même que le premier homme, formé de terre, était devenu une « âme vivante », un être animé par le souffle divin, de même le nouvel Adam est devenu pour tous les siens « esprit vivificateur » (1 Co 15.45).
À la vérité, l’Esprit Saint, selon le Nouveau Testament, est bien davantage que le « don de Dieu » résumant l’ensemble des biens du salut, et même que l’agent de notre sanctification nous communiquant la grâce et stimulant toutes nos vertus. Il est la source propre de la vie spirituelle, à telle enseigne que la vie nouvelle se caractérise notamment par la comparaison avec l’ancienne morale israélite, comme une vie sous la motion de l’Esprit (Rm 8.2); c’est-à-dire que l’on relève de l’Esprit et de lui seul, de ses inspirations et de son impulsion, on se conduit selon l’Esprit, car tel est le critère d’authenticité chrétienne (Rm 8.14). Bref, sur le plan de l’expérience, l’économie de la Nouvelle Alliance innove et se spécifie en ceci : nous servons Dieu sous le régime nouveau de l’Esprit (Rm 7.6). Alors que le rapport du croyant au Christ est assimilé à une greffe, à une implantation ou à une incorporation, la relation au Saint-Esprit est comparable à celle d’une marque indélébile frappée par un sceau (2 Co 1.21-22; Ép 1.13-14; 4.30).
Le rôle particulier qui revient à l’Esprit dans notre sanctification est celui d’agent qui, en ouvrant nos cœurs et en les disposant favorablement à la grâce, nous permet de croire et d’accepter le salut. Ensuite, il applique intérieurement les bénéfices du salut achevé sur la croix. Nous ne sommes donc pas placés sous la tyrannie d’un moralisme légaliste qui s’imagine devoir et pouvoir prendre en charge sa propre sanctification. L’Esprit en nous s’oppose au péché et nous permet de le surmonter. Notre union mystique avec le Christ n’est ni un événement du passé ni l’effet d’un sentiment actuel, mais le résultat de l’habitation permanente du Christ en nous. Sa présence et son union avec nous sont aussi réelles que l’est l’union de la branche avec le tronc et celle de la tête avec les membres du corps. Aussi l’apôtre peut-il écrire : « J’ai été crucifié avec Christ et si je vis maintenant ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi » (Ga 2.20).
La présence du Christ en nous, qui fonde notre sanctification, ne déracine pas complètement le mal, mais la victoire obtenue au moment décisif est tellement réelle que l’apôtre Jean peut écrire : « C’est ici la victoire qui vainc le monde, à savoir la foi » (1 Jn 5.14). De son côté, l’apôtre Paul affirme : « Le péché n’aura plus de pouvoir sur vous » (Rm 6.14). En principe, l’homme régénéré et justifié est mort au péché et affranchi de sa domination, même s’il lui advient de dépasser, soit par inadvertance soit malheureusement parfois de manière délibérée, les frontières de son nouveau territoire, pour faire des incursions dans son ancien domaine. Il ne nous est pas facile de décrire l’œuvre de l’Esprit dans le processus de notre sanctification. C’est là un mystère qui dépasse l’entendement humain. Certaines réalités tangibles, ainsi que notre expérience quotidienne, prouvent cependant son opération en nous. Par conséquent, la sanctification sera attribuée à son opération, mais nous garderons clairement à l’esprit que les œuvres externes des personnes de la sainte Trinité ne peuvent, dans l’économie du salut, se diviser et se séparer.
Les passages du Nouveau Testament les plus importants ou les plus connus à ce propos sont les suivants : Jean 14.17; Romains 8.4,9; 1 Corinthiens 3.16; 2 Corinthiens 3.3; 2 Thessaloniciens 2.13; 1 Pierre 1.2. L’ensemble de ces textes, signés par différents auteurs du Nouveau Testament, rend témoignage à l’opération incontestable de l’Esprit. Il renouvelle, il sanctifie, il conduit et il inscrit dans nos cœurs la loi de Dieu. Il est la condition même de l’actualisation de la vie nouvelle, fruit de la passion et de la résurrection du Sauveur. Il touche directement le cœur. Il ne se contente pas d’inspirer de bons sentiments ou de présenter de bons arguments pour laisser ensuite à l’homme le soin de sa propre sanctification. Il le sanctifie tout entier. Le cœur désigne la racine même de toute manifestation de vie humaine. Le cœur est la source de toutes nos pensées, le moteur de chacun de nos actes. La sanctification du cœur implique celle de l’homme dans sa totalité.
Si l’Esprit touche le cœur à un moment donné, la sanctification, elle, ne devra pas s’identifier à ce moment précis, car elle se développe progressivement et ne sera achevée qu’une fois franchi le seuil céleste… Ainsi, le fidèle n’atteint la sainteté totale qu’au moment de sa mort!
Ce rôle permanent de l’Esprit ne laisse pas l’homme dans une position passive. Attirons l’attention sur l’erreur quiétiste, qui se fait une fausse idée de la victoire du Christ; l’œuvre du Christ et de l’Esprit ne rend pas notre responsabilité superflue. Si dans la régénération nous sommes passifs, dans la sanctification nous pouvons et devons tenir un rôle actif. L’Esprit Saint respecte notre personnalité. Il permet à toutes nos facultés affectives, volitives et intellectuelles de coopérer afin d’atteindre le but final.
« Connaître Christ, c’est connaître les bienfaits de son œuvre », écrivait Melanchthon. Le progrès dans la sanctification ne tolère aucun retard, mais, quels que soient les progrès accomplis, on ne peut jamais se croire parvenu « au stade final ». Qui d’entre nous a déjà atteint la perfection? Cependant, ce progrès difficile peut devenir une immense possibilité. Nos fenêtres seront ouvertes vers la grâce, nous refuserons une piété de parade et une sanctification d’apparence, car à présent le Maître de la maison n’est autre que son véritable propriétaire, notre Sauveur. Dans la repentance, nous abandonnerons les conduites honteuses du passé, car une fausse sanctification est étrangère à la sanctification biblique; elle ne cherche que sa propre justice. Une telle spiritualité a recours à des « pratiques » et à des « méthodes », à un art factice, sans parenté avec la grâce régénératrice et restauratrice. Déjà dans l’Ancien Testament la conduite légaliste d’Israël cherchant à se soustraire à la protection et à la direction du Seigneur était vigoureusement dénoncée par les prophètes. C’est pour cette raison-là qu’Israël sombra dans une autonomie rebelle et finit par échouer définitivement.
Qu’il existe une fausse sanctification, nous le constatons sans plaisir, mais ce n’est pas une raison pour refuser celle à laquelle nous invitent l’Esprit et la Parole, car du fait que Dieu a pris l’initiative et opère en nous par son Esprit, il nous est possible de travailler à notre salut. Son action est à la fois la condition préalable et le stimulant de notre zèle. Nous chercherons à devenir ce que nous sommes déjà en vertu de la justification. Citoyens du ciel, d’ores et déjà nous appartenons au Royaume. Le monde présent hostile à Dieu est voué à la destruction, mais à cause de notre appartenance au Seigneur nous serons préservés lorsque viendra le jour de la colère quand Dieu jugera le monde, gardés en lieu sûr, sous la conduite et la protection de l’Avocat Paraclet.
À présent, nous vivrons pour plaire au Maître de nos destinées; les moindres traces de mal en nous seront considérées comme une anomalie intolérable. Nous savons que le mal est générateur de conflits et de tensions, mais quiconque a mis son espérance en Dieu se purifie. Désormais, il existe une différence fondamentale entre celui qui vit pour le péché et celui en qui le péché vit encore. Il est écrit de ce dernier « qu’il est heureux », car le péché n’aura pas le dernier mot sur lui.
Le but ultime de la sanctification est le « soyez saints, car je suis saint », et si le fidèle a compris ce que veut dire « à Dieu seul la gloire », il marchera dans la sanctification. Si nous convenons que la sanctification n’est pas un état fixe, mais une marche constante en avant, nous tendrons nos oreilles vers la vocation à la sainteté que nous avons reçue. Des signes et des moyens extérieurs attestent notre sanctification et nous soutiennent dans notre désir de la rechercher, telle la prière pour la plénitude de l’Esprit. « Celui qui croit en moi, des fleuves de vie couleront de son sein », déclara Jésus (Jn 7.39). La lecture de la Parole en sera un autre. Dieu s’en sert comme moyen de grâce; elle contient les instructions salutaires ainsi que la promesse qui nous assure de la victoire ultime. Le culte public en est encore un autre. « N’abandonnons pas notre assemblée », exhorte l’auteur de la lettre aux Hébreux (Hé 10.25). Nos peines et nos épreuves sont aussi des éléments positifs pour notre sanctification (Hé 12.10).
Si la justice de la foi se fonde sur l’œuvre rédemptrice et réconciliatrice du Christ, la justice quotidienne, elle, sera conditionnée par notre coopération avec le Saint-Esprit. Celui-ci nous greffe au corps du Christ afin que nous puissions lutter et atteindre, par un effort soutenu, la sainteté fixée devant notre regard et dont le modèle est le Christ en personne. Il ne suffit pas de croire en la lumière; il nous faut encore marcher en elle. Devenus co-ouvriers avec lui, nous la manifestons et la reflétons autour de nous comme des torches enflammées. Notre pratique chrétienne la plus ordinaire montrera que nous le suivons.
Si la grâce est amplement suffisante pour obtenir le pardon, une foi reconnaissante sait que la piété et l’amour fraternel nous encouragent à nous développer constamment. Nos œuvres, si elles ne comptent pas pour obtenir la justice, en constitueront le signe, le fruit même de notre gratitude. Affranchis du péché, nous serons disposés à servir Dieu. Le premier acte de notre libération est notre justification, le second, notre sanctification. Luther se méfiait avec raison d’une culture de la « vie intérieure » et d’un piétisme (avant le mot) tout subjectifs.
Calvin, quant à lui, estime que notre vie tout entière devrait être un exercice de piété. Outre la confession du Christ comme Sauveur, Calvin estime que nous devons chercher en lui notre modèle, car ne sont disciples du Christ que ceux qui l’imitent. Renoncer à soi-même et porter sa croix, voilà des pas concrets vers la sanctification. Autrement, on ferait preuve de mépris envers la croix. L’œuvre de la régénération se fait instantanément; celle de la sanctification est un long processus de développement.