Actes 17 - Proximité de Dieu Message de Noël
Actes 17 - Proximité de Dieu Message de Noël
« Dieu n’est pas loin de chacun de nous, car c’est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l’être. »
Actes 17.27-28
Le monde chrétien s’apprête une fois de plus à commémorer la grande fête de la nativité. La célébration de Noël, en dépit de tous les éléments parasitaires qui l’entourent, l’encombrent ou cherchent à en étouffer le message, demeure, au cœur de chacun de nous autres chrétiens, la fête de joie par excellence. Oserai-je ajouter : d’une joie non pas purement spirituelle, mais encore matérielle. En effet, le chrétien que je suis et que vous êtes conçoit que Noël apporte certains plaisirs et surtout beaucoup de joie, car cette joie n’est-elle pas aussi le témoignage rendu au caractère exceptionnel de Noël? « Une grande nouvelle qui sera sujet d’une grande joie », annonçait le premier prédicateur de la Nativité (Lc 2.10). Je pense, lecteur chrétien, que vous choisirez la meilleure façon de passer votre prochaine fête de Noël; permettez-moi aussi de vous souhaiter très sincèrement une fête réussie et beaucoup de bonheur durant ces quelques jours. Permettez-moi aussi de ne pas en rester là et de partager avec vous l’essentiel du message de Noël.
Ésaïe, le prophète hébreu du 7e siècle avant notre ère, a eu l’inspiration fondamentale à propos de Noël, et c’est sur une des pages les plus connues de son livre que je lis :
« Voici tu appelleras une nation que tu ne connais pas, et une nation qui ne te connaît pas accourra vers toi à cause de l’Éternel, ton Dieu » (És 55.5).
« Je les amènerai sur ma montagne sainte et je les réjouirai dans ma maison de prière, […] car ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples » (És 56.7).
Le discours prophétique concernait déjà, avant Noël, cette proximité de Dieu dont je me propose de vous entretenir. À mon avis, le plus clair commentaire de ce vieux texte de l’Ancien Testament a été donné par saint Paul. L’écrivain et l’historien Luc rapporte un grand discours prononcé par l’apôtre, dont je retiens une toute petite phrase : « Dieu n’est pas loin de chacun de nous, car c’est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l’être » (Ac 17.27-28). Ce discours, dont est extraite la phrase que je cite, fut prononcé sur l’endroit le plus prestigieux du monde antique, dans le haut lieu de la culture et de la civilisation grecques, sur l’Aréopage, l’une des collines de la glorieuse Athènes.
Ces Athéniens, dont la pensée et le savoir éblouissent et inspirent encore nos contemporains quelque vingt siècles après Paul, étaient des païens. Non pas des gens nouvellement convertis à la foi en Christ. L’élite d’une ville complètement impie et paradoxalement superstitieuse a été quasiment interpellée par saint Paul. Rien de ce qui concerne le Dieu de Paul et la religion de la révélation ne leur était familier; mais le porte-parole chrétien leur annonce et les assure que le Dieu qu’ils ignorent est tout près d’eux. Il osera même préciser qu’ils lui appartiennent, puisqu’ils ont en lui leur vie, leur mouvement et leur être.
L’apôtre Paul se serait-il laissé emporter par quelques sentiments généreux et enthousiastes, et, profitant de l’occasion, aurait-il prononcé un discours diplomatique pour accrocher ses auditeurs? Je n’en crois rien. Nous le connaissons suffisamment pour ne pas le soupçonner de compromissions ou d’habiles tactiques pour faire de nouveaux prosélytes. Nous le connaissons surtout comme l’homme qui ne se livre jamais à une analyse ni à un diagnostic socioculturel. Ce n’est pas un homme comme nous en rencontrons si souvent, hélas!, dans le monde moderne pour qui un peu de religion, même païenne, n’a jamais fait de mal à personne, un homme pour qui l’intérêt des Athéniens pour le Dieu inconnu méritait d’être encouragé! Tolérant, libéral et pluraliste, Paul aurait-il peut-être remporté quelque succès sur la colline de Mars, à Athènes. Mais son intention était toute autre, car sa mission était fort différente de celle qui consiste en une trop facile évangélisation des païens, des incrédules et des athées. L’apôtre n’ignorait pas la différence entre ses interlocuteurs païens et la foi des disciples de Jésus-Christ. Il ne chercha pas à démolir de ses propres mains le mur de séparation entre foi chrétienne et philosophie païenne ou athée. Il connaissait trop les Athéniens comme il connaissait trop l’esprit de l’homme déchu pour lui concéder quoi que ce soit. Athéniens ou Juifs, Barbares ou Grecs, civilisés ou incultes, tous, à ses yeux, « sont privés de la gloire de Dieu » (Rm 3.23).
La religiosité superstitieuse ou la morale païenne sont l’évidence de l’apostasie, et chacune, même lorsqu’elle apparaît sous les formes d’une éblouissante pensée philosophique ou comme une brillante culture, dénote à coup sûr la rébellion contre Dieu.
Saint Paul ne fait pas de la sociologie religieuse ni de la phénoménologie des cultes foisonnant dans ce milieu grec. Laissons ces avatars à nos contemporains trop bavards et écoutons plutôt l’interprète de Dieu. Ce Dieu qui nous tient tous entre ses mains. Paul, le missionnaire chrétien, prend ses auditeurs et ses contradicteurs au dépourvu. « Vous dépendez de lui, car vous ne pourriez pas respirer un seul instant sans que son souffle vous soutienne, rester debout sans qu’il ne vous supporte et exister sans qu’il ne fonde votre être. Dieu vous conserve la vie et autorise votre existence. »
Interprétation saisissante pour moi aussi, qui vis au cœur d’une des plus grandes métropoles du monde et qui me mêle si souvent à la foule des grands boulevards, qui m’engouffre dans les couloirs du métro parisien, qui fais partie de la multitude de ceux qui se ruent vers les musées de notre prestigieuse capitale. Entouré par ces hommes et ces femmes qui courent dans tous les sens, affairés, parfois affolés, souvent agacés et irrités, quand ce n’est ouvertement agressifs, parfois mornes ou indifférents, je me dis : quel est le ressort qui tient debout ces milliers et ces millions de personnes? Ma question, lorsque j’aperçois des visages humains, cesse d’être une question de nature sociologique ou démographique. Pour moi, ces hommes sortant des usines ou des bureaux, ces femmes et ces enfants qui vivent souvent dans des logements exigus, tous ces visages rencontrés au hasard, à l’arrêt d’un bus, éventuellement dans une salle de spectacle, ou sur un terrain de sport, ont tous un secret. Et voilà que la phrase de saint Paul éclaire le mystère : Dieu n’est pas loin de chacun d’entre eux! Il n’est donc pas loin de vous, ami lecteur, il n’est pas loin de vous, sceptique, incroyant ou ouvertement athée. Il est le plus proche de ceux qui vous entourent, Madame, vous qui êtes attachée aux obligations parfois ingrates de la maisonnée, ou de vous, Monsieur, qui, à peine réveillé, êtes déjà las à la pensée de recommencer une nouvelle journée harassante. Non seulement il est là tout près, mais il permet que vous vous leviez encore ce matin; c’est lui qui préserve aujourd’hui votre vie constamment menacée.
Dieu n’est pas loin de ces millions d’êtres qui se trouvent dans les pays voisins ou encore sous les régimes totalitaires, dans ces États où toute liberté leur est refusée.
Quel rapport, direz-vous, peut avoir tout ceci avec la Nativité dont je commençais à vous entretenir au début de cet écrit? Un rapport très étroit, car ce Dieu annoncé par Paul a pris un visage, celui de l’enfant de Bethléem, et cet enfant est plus que providence qui soutient notre vie et qui préserve notre existence. Il est devenu une présence paternelle, une proximité fraternelle, une relation d’amour. Il est proche aussi de vous, vous qui demeurez étrangers, qui refusez le statut de citoyen, qui peut-être le renvoyez ou le boudez…
Sur la colline de Mars, à Athènes, un homme sans prestige apparent et sans talents oratoires pour éblouir les sommités de la culture grecque interpellait des hommes incrédules et immoraux, faussement religieux ou encore ouvertement athées. Dieu était proche d’eux, de même qu’il s’est approché de vous. Il se peut que les Athéniens d’il y a deux mille ans aient eu une secrète attente de Dieu. Il se pourrait que vous, aujourd’hui, malgré votre air blasé ou un cynisme affiché, vous souhaitiez cette présence ou cette proximité divine. De toute manière, vous lui appartenez. Vous dépendez de lui. Autrement, vous n’existeriez pas! Je crois que vous êtes agités secrètement par la seule question essentielle : celle qui concerne Dieu et son rapport avec vous. Il restera, qu’on le veuille ou non, ou bien l’Éternel tourment ou bien le Libérateur.
Depuis que l’enfant Jésus est né à Bethléem, le mur de séparation est devenu bien mince. Sa grâce et sa bonté le font tomber. À Bethléem, une espérance est née pour tout homme; elle perce les ténèbres. La foi qui peut accueillir la seule lumière est désormais possible. Le Sauveur est né et on ne peut l’ignorer ni se passer de lui. À moins de le faire au détriment de sa vie. Que cette nouvelle célébration de la Nativité puisse rendre sa réalité plus proche, plus concrète, plus visible pour vous et pour les vôtres. C’est pourquoi j’aimerais prier ce Dieu dont la proximité est pour moi une absolue certitude. Je le fais dans la communion avec mes lecteurs croyants. Je le fais pour vous, lecteurs sceptiques ou chercheurs découragés.
« Père éternel, Soleil des fidèles! Toi qui as appelé les nations à ta lumière et les peuples à la clarté de ta révélation, remplis le monde de ta gloire, nous t’en prions, et manifeste-toi à l’humanité tout entière, de toute race, de tout peuple et de toute langue. Au nom de celui qui est la lumière véritable, l’Orient d’en haut et la brillante Étoile du matin, Jésus-Christ, ton Fils, notre Seigneur. Amen. »