Cet article a pour sujet la persécution des chrétiens en Corée du Nord à travers le récit d'une dame qui raconte son expérience de conversion et de souffrance dans son pays.

5 pages. Traduit par Claire Bédard

L’annonce de la vérité en Corée du Nord

Elle pleurait. Il pleurait. Nous attendions. Le soleil d’après-midi brillait, projetant une ombre sur notre sœur dans la foi, « Choi Yong Jin », alors qu’elle nous racontait son expérience en Corée du Nord. Des larmes incontrôlables coulaient sur le visage de Choi, entrecoupant notre entrevue de deux heures. Quelqu’un lui a tendu un mouchoir, puis la boîte tout entière. Petit à petit, elle a retrouvé son calme. Notre traducteur s’est arrêté un instant pour essuyer ses larmes.

Le monde semble séduit par le nouveau visage de la République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord). Aux yeux du monde, c’est maintenant une nation qui soutient la liberté artistique, ayant même accueilli l’Orchestre philharmonique de New York. Elle est vue comme une nation faisant la promotion de la paix, maintenant que la tour de refroidissement nucléaire de Yongbyong, le plus important symbole de son programme nucléaire, a été détruite.

Cependant, pour des milliers de chrétiens nord-coréens comme Choi Yong Jin, la Corée du Nord est un pays où les forces du mal sont déchaînées. Il est difficile de saisir comment un endroit peut être si terrible que les chrétiens doivent fuir en Chine communiste pour trouver un minimum de liberté religieuse. Mais ne vous y trompez pas : pour les chrétiens, la Corée du Nord, c’est l’enfer sur la terre. La Corée du Nord, isolée sur la moitié d’une péninsule dont les côtes baignent dans la mer du Japon, est bien davantage qu’une dictature. C’est un régime totalitaire dans lequel les citoyens doivent non seulement appuyer leurs dirigeants communistes, mais aussi les adorer comme s’ils étaient des dieux vivants. Par conséquent, Kim Il Sung, fondateur de la Corée du Nord moderne, a créé le « juche », la religion d’État du pays.

Le gouvernement utilise les méthodes d’endoctrinement des sectes pour maintenir le « juche ». Par exemple, les enfants de la Corée du Nord reçoivent un bonbon par année. C’est un grand luxe pour une population dont presque 40 % des enfants souffrent de malnutrition. Mais avant de développer leur précieuse sucrerie, les enfants doivent s’incliner dans une prière de reconnaissance envers les « dieux » dictateurs du pays. En plus, on enseigne aux enfants de la Corée du Nord à chanter des chants d’adoration, compilés dans un livre contenant six cents hymnes, à la louange de Sung et de son fils Kim Jong Il, le chef actuel de la nation1. (Des contacts de l’organisme VOMC ou « Voice of the Martyrs Canada » [La voix des martyrs Canada] sont en train de réécrire trente de ces hymnes en remplaçant les paroles par des paroles chrétiennes. Ces hymnes seront ensuite radiodiffusés dans le pays.)

Afin de maintenir le « juche », le gouvernement harcèle, torture, emprisonne et kidnappe les citoyens qui osent suivre celui qu’ils appellent « le Dieu du ciel » et que nous appelons le seul vrai Dieu et son Fils Jésus-Christ.

Comme nous le dit Choi, renier le « juche » et suivre le Christ en Corée du Nord n’est pas considéré simplement comme une désobéissance, mais plutôt comme une trahison.

Choi, qui a déjà été mariée à un responsable communiste, était un disciple d’un roi terrestre. Comme tous les autres Nord-Coréens, elle avait deux photos bien en vue dans sa maison : une de Kim Il Sung et une de son fils, Kim Jong Il.

Le mari de Choi participait à un groupe d’étude de Kim Il Sung dans lequel les membres se penchaient sur les écrits du « Grand Dirigeant ». Les gens affluaient vers le mari de Choi. Il avait tellement d’influence que lorsqu’un ami a été arrêté par ce gouvernement oppressif, un simple mot de sa part a suffi à éviter à cet ami d’être puni. En guise de reconnaissance, cet homme a donné aux Choi un livre inconnu.

« C’est l’histoire de quelqu’un au ciel qui aide les pauvres gens. Aimeriez-vous la lire? », a dit l’homme. Choi Yong Jin et son mari n’avaient jamais entendu parler de la Bible, mais ils étaient intrigués et ils ont accepté le livre. Il était humide et moisi parce qu’il avait été enterré dans le sol afin de le cacher des employés du gouvernement.

Chaque nuit, Choi recouvrait précautionneusement ses fenêtres, s’installait dans un coin et se cachait la tête sous une couverture. Selon la recommandation de l’étranger, elle a lu cinq parties de son nouveau livre : la Genèse et les quatre sections écrites par quelqu’un du nom de Jean.

L’homme l’avait mise au défi de lire trois fois ces sections avant de lire quoi que ce soit d’autre. Chaque soir, elle finissait sa lecture le nez tout noir, couvert de suie, et la tête remplie de questions.

Elle était fascinée par l’histoire de Jésus. « En lui était la vie… », a-t-elle lu en Jean 1.4. « Voici l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde » (Jn 1.29). Le monde avait de la haine pour lui (Jn 7.7) et ses disciples avaient été avertis que le monde aurait de la haine pour eux également (1 Jn 3.13). Cependant, il y avait aussi des promesses…, des promesses de victoire! « Voici la victoire qui triomphe du monde : notre foi » (1 Jn 5.4).

L’histoire de l’Évangile et les promesses de victoire intriguaient Choi, mais elle avait tant de questions et personne pour y répondre. Quelques mois plus tard, son oncle qui avait déménagé dans la Chine voisine est venu lui rendre visite. Au souper, Choi a remarqué qu’il faisait une pause et qu’il inclinait sa tête avant de manger le riz. Alors qu’elle le regardait prier, le Saint-Esprit toucha son cœur et les histoires qu’elle avait lues dans les écrits de Jean sont soudain devenues claires. Ses questions se sont évanouies et sa foi est née. Le matin suivant, son oncle lui a enseigné à chanter « Grâce infinie ». Plus tard, elle l’a visité en Chine et elle a participé pour la première fois au culte d’adoration dans une Église. Le pasteur a prié avec elle.

Dans un pays où les voisins se dénoncent les uns les autres à la police, les secrets ne demeurent pas cachés bien longtemps. La nouvelle que Choi lisait la Bible tard dans la nuit s’est répandue. Elle a été arrêtée et accusée d’être une « espionne religieuse » et de « répandre des idées anticommunistes ».

« Les policiers m’ont arrêtée et m’ont torturée sévèrement », nous a-t-elle dit. « Ils m’ont forcée à m’agenouiller sur la chaise et ils ont marché sur mes genoux. Ils m’ont frappée au visage et partout sur mon corps. Mon visage était tuméfié et très noir. Ils m’ont demandé de confesser mes activités d’espionnage et m’ont dit : “Donne-nous des renseignements sur l’homme qui t’a apporté des Bibles.” Je leur ai répondu que je n’étais pas une espionne et que je n’avais commis aucun acte d’espionnage contre la Corée du Nord. Je ne leur ai pas révélé le nom de l’homme et je leur ai répété avec insistance que j’étais la seule qui avait lu la Bible. »

Lorsqu’ils ont vu qu’ils n’arrivaient pas à tirer une « confession » de Choi en la torturant, les policiers sont allés voir son mari. Ils lui ont dit que s’il témoignait contre elle à son procès, elle serait bientôt de retour à la maison.

« Les policiers sont revenus me voir. “Votre mari va comparaître comme témoin de votre crime! Alors, vous devez tout confesser!” » Choi arrivait difficilement à parler alors qu’elle se remémorait la trahison de son mari.

« Après cela, ils m’ont attaché les jambes, ils m’ont suspendu la tête en bas et ils m’ont battue. En prison, j’ai été battue chaque jour, toute la journée. »
« Les policiers me forçaient à me tenir debout et à placer mes mains à l’extérieur de la porte à travers une petite fenêtre dans la porte et ils me frappaient les doigts et les mains avec un tuyau. Je saignais abondamment et mes mains étaient toutes déchirées. Je n’ai pas pu utiliser mes mains pendant plus de vingt jours. »

Choi nous a montré ses mains pendant qu’elle nous racontait cette histoire. Les marques laissées par la torture sont encore bien visibles. Plusieurs de ses doigts sont tordus et forment des angles étranges.

Le premier procès de Choi a duré cinq heures. Un supplice au cours duquel son mari, réalisant qu’il avait été trompé par la police, s’est porté à sa défense avec beaucoup d’audace. Elle a été acquittée. Cependant, en Corée du Nord, la réalité est souvent bien différente de ce que les apparences peuvent laisser croire. Le verdict de non-culpabilité de Choi a rapidement été mis de côté. Elle a dû subir un procès à nouveau. Lors de son deuxième procès, Choi ne pouvait même pas parler parce qu’elle avait été tellement battue que son visage était paralysé. Après seulement une heure, elle a été reconnue coupable et condamnée à quinze ans de prison.

« En prison, je priais tout le temps, même lorsque les policiers me battaient », nous a-t-elle dit. Choi se remémorait les versets qu’elle avait lus dans sa Bible abîmée par la moisissure. Elle se rappelait les paroles de Jésus : « Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre » (Mt 5.39). Elle s’est accrochée à la promesse que l’on trouve dans la première lettre de Jean et selon laquelle notre foi peut triompher du monde, même un monde créé par les dictateurs nord-coréens.

Après un an de prison, Choi ne pesait plus que vingt-huit kilos. Lorsque son mari est venu la visiter, elle l’a supplié de la faire sortir de là. Il a vendu leur maison et a recueilli toutes les sommes qu’il pouvait en contactant des amis et de la parenté, puis il est revenu avec l’argent ainsi qu’un téléviseur qu’il a offert au gardien de la prison pour réussir à la sortir de là. Le pot-de-vin a fait débloquer les choses et elle est retournée dans son village. Cependant, elle ne se prosternait plus devant leur roi terrestre.

« Avant cette expérience, je croyais que mon pays était le meilleur pays au monde! Mais lorsque j’étais en prison, j’ai pris pleinement conscience de la réalité nord-coréenne. J’ai dit à mon mari : “Si j’arrive à retrouver ma santé, je ne veux plus vivre dans ce pays parce que maintenant je sais ce qu’il est réellement!” »

Choi s’est enfuie en Chine, puis en Corée du Sud. Bien que le supplice de Choi ait été horrible, les Nord-Coréens ont conçu des façons encore pires pour s’opposer au christianisme. Les contacts de VOMC disent que maintenant les chrétiens ne sont plus seulement emprisonnés, mais qu’ils disparaissent.

L’an dernier, neuf chrétiens qui travaillaient avec les partenaires de VOMC en Corée du Nord ont simplement disparu. Un par un, ils ont cessé de se présenter aux rendez-vous fixés pour prendre contact. Ils avaient reçu une formation technique et professionnelle ainsi que l’équipement nécessaire pour démarrer une entreprise. Ces chrétiens, qui vivaient dans trois endroits différents, avaient maintenant disparu. En septembre 2007, l’histoire s’est clarifiée. Le gouvernement nord-coréen a organisé une conférence de presse dans la capitale de Pyongyang, en présence des médias des différents pays du monde. « Nous avons capturé des espions », a dit un représentant officiel nord-coréen. Comme preuve, des caméras ont présenté des images d’une table sur laquelle se trouvait le prétendu « matériel d’espionnage ».

Nos contacts ont reconnu l’équipement que l’on pouvait voir sur la vidéo. Ce n’était pas du matériel destiné à l’espionnage, mais bien plutôt du matériel qui avait été fourni à nos frères et sœurs si précieux afin qu’ils puissent subvenir à leurs propres besoins dans le cadre d’une entreprise légale, une entreprise pour laquelle ils avaient demandé un permis officiel. Il semblerait que nos frères et sœurs chrétiens soient entre les mains de la police secrète de la Corée du Nord et que nous ne les reverrons jamais, qu’ils ne seront jamais relâchés.

De telles mesures de répression contre les chrétiens rendent notre travail plus important que jamais devant tant de mal. Bien qu’amère face à la persécution qui sévit dans son pays, Choi n’a pas tourné le dos à ses concitoyens nord-coréens. Aujourd’hui, Choi travaille comme bénévole dans une station radiophonique à Séoul, en Corée du Sud, où les partenaires de VOMC soutiennent financièrement des émissions radiophoniques qui annoncent l’Évangile et qui sont diffusées dans sa terre natale. La station diffuse également les histoires des fugitifs nord-coréens, ce qui permet à leur parenté qui vit dans le Nord de savoir qu’ils ont réussi à s’enfuir et qu’ils sont maintenant libres.

Après avoir été emprisonnée, blessée, battue et persécutée, notre sœur Choi demeure toujours vigilante, utilisant sa voix et priant afin que le mal soit anéanti. Nous ne savons pas combien de Choi Yong Jin sont enfermées dans les camps de prisonniers en Corée du Nord ou combien de chrétiens prient et adorent à l’intérieur de ce pays appelé parfois « le royaume ermite ». Cependant, notre mandat est clair. Nous ne les oublierons pas. Tant que Jésus-Christ ne sera pas revenu, tant que le nombre de martyrs nord-coréens ne sera pas complet, nous ne cesserons pas de travailler dans le but de les aider.

« … jusqu’à ce que soient au complet leurs compagnons de service et leurs frères qui allaient être mis à mort comme eux. » (Ap 6.11).

Note

1. N.D.L.R. : Kim Jong Il était le chef de la Corée du Nord au moment où cet article a été écrit. Kim Jong Un lui a succédé en 2011.