Christ ou Mahomet (2) - Ce que l'islam dit sur la Bible et sur Jésus-Christ
Christ ou Mahomet (2) - Ce que l'islam dit sur la Bible et sur Jésus-Christ
Nous avons vu dans l’article précédent quels avaient été les débuts de l’islam. Je voudrais maintenant vous présenter ce que l’islam enseigne sur la personne de Jésus-Christ, et de manière plus générale encore, comment le Coran cite la Bible. Rappelons d’abord que Mahomet, ayant vécu aux alentours de l’an 600 de notre ère, ne connaissait que de manière fragmentaire aussi bien l’Ancien Testament que le Nouveau Testament. Il avait eu des contacts aussi bien avec des juifs qu’avec des chrétiens, mais ces contacts ne lui avaient pas permis de s’informer suffisamment en profondeur sur l’enseignement de la Bible. Il semble en particulier qu’il ait été déçu dans ses rapports avec les tribus juives d’Arabie. On se rend compte aussi en lisant le Coran que Mahomet connaissait certaines traditions juives ainsi que certains commentaires des rabbins juifs sur l’Ancien Testament, mais pas nécessairement le texte de l’Ancien Testament lui-même.
Le Coran mentionne l’Ancien Testament sous le nom de Taurat, et l’Évangile sous le nom d’Injil. Il parle des deux avec beaucoup de respect, les considérant comme écritures sacrées provenant de Dieu et ayant été révélées par Dieu lui-même à ses prophètes d’antan. Les plus grands de ces prophètes, d’après le Coran, sont Adam, Moïse, David et Jésus. Voici quelques citations du Coran qui confirment ce que je viens de dire.
Dans la 2e sourate, verset 130, on peut lire :
« Tu diras : Nous croyons en Allah, et en la révélation qui nous a été donnée, ainsi qu’à Abraham, Ismaël, Isaac, Jacob et aux douze tribus; nous croyons aussi à celle qui a été donnée à Moïse et Jésus et à tous les prophètes de leur Seigneur. Nous ne faisons aucune différence entre l’une ou l’autre d’entre elles. »
Au second verset de la 3e sourate, le Coran dit ceci :
« Il t’a envoyé le livre contenant la vérité et qui confirme les Écritures qui t’ont précédé. Avant lui, il fit descendre le Pentateuque et l’Évangile pour servir de direction aux hommes. Il a fait descendre le livre de la Distinction. »
Le Pentateuque est le nom donné aux cinq premiers livres de l’Ancien Testament, dans la Bible, et qu’on attribue à Moïse. Dans la 4e sourate du Coran, on lit encore :
« Ô croyants! Croyez en Dieu, en son apôtre, au livre qu’il lui a envoyé, aux Écritures descendues avant lui. Celui qui ne croit pas en Dieu, en ses anges, à ses livres, à ses apôtres et au jour dernier est dans un égarement lointain. »
Le verset 72 de la 5e sourate dit encore :
« Dis aux hommes des Écritures : Vous ne vous appuierez sur rien de solide tant que vous n’observerez pas le Pentateuque, l’Évangile et ce que Dieu a fait descendre d’en haut. »
Je pourrais ainsi multiplier les citations du Coran qui font référence à la Bible, Ancien et Nouveau Testament, enjoignant les musulmans à croire au message révélé par Dieu aux prophètes et aux apôtres. D’après toutes ces citations, il est clair que Mahomet considérait les Écritures que lisaient juifs et chrétiens de son époque comme étant inspirées par Dieu. Rien n’indique qu’il mettait en doute leur authenticité ou la préservation intacte des textes des Écritures lus par juifs et chrétiens. À maintes reprises, le Coran ordonne aux musulmans de suivre ces Écritures et d’obéir à leur contenu. Il ne peut évidemment s’agir que des textes des Écritures que ses contemporains avaient à leur disposition.
Pourtant, Mahomet a été rapidement confronté au fait que ni les juifs ni les chrétiens auxquels il s’adressait ne voulaient le suivre ou accepter comme divinement inspirées les paroles qu’il prononçait. Aussi leur a-t-il reproché de tordre le sens des Écritures. On trouve une allusion très claire à cette accusation au 72e verset de la 3e sourate du Coran :
« Quelques-uns d’entre eux torturent les paroles des Écritures avec leurs langues pour vous faire croire que ce qu’ils disent s’y trouve réellement. Non, ceci ne fait point partie des Écritures. Ils disent : Ceci vient de Dieu. Non, cela ne vient point de Dieu. Ils prêtent sciemment des mensonges à Dieu. »
Le Coran rapporte de nombreux événements ou paroles qu’on trouve dans la Bible, que ce soit à propos d’Adam, d’Abraham, de Moïse ou de Jésus-Christ. Pourtant, on est frappé de voir les différences qui existent entre les récits ou paroles bibliques et la manière dont ces mêmes récits ou paroles sont rapportés dans le Coran. Ces différences ne sont pas seulement des variations, mais présentent souvent des versions incompatibles des faits et paroles en question.
Comment expliquer ou justifier de telles différences, sachant, encore une fois, que Mahomet considérait aussi bien l’Ancien que le Nouveau Testament comme Écritures inspirées de Dieu et que ses propres disciples devaient accepter au même titre que le Coran? Quelle version de ces faits ou de ces paroles rapportés par le Coran et repris à la Bible est la version authentique?
Pendant environ 400 ans après la mort de Mahomet, aucun théologien musulman n’a sérieusement mis en doute l’authenticité des textes bibliques tels qu’ils étaient connus et préservés à l’époque de Mahomet. Au contraire, des historiens ou théologiens musulmans reconnus comme Al-Mas’udi, Ali at-Tabari ou le célèbre Al-Ghazzali (mort en l’an 1111) reconnaissaient cette authenticité. Cette vue fut partagée par le grand savant arabe Avicenne. Un autre théologien musulman, Bukhari (mort en 870) cita même le Coran pour prouver que le texte de la Bible n’avait pas été falsifié. C’est Ibn-Khazem, ayant vécu au 11e siècle à Cordoba, dans le sud de l’Espagne conquis par les Arabes quelque 300 ans plus tôt, qui introduisit l’idée que le texte des Évangiles avait été falsifié. Les contradictions entre le Coran et les Évangiles étaient de telle nature qu’il lui fallait trancher : si le Coran disait la vérité, alors les Évangiles ne pouvaient dire la vérité. Mais comme Mahomet enjoint de croire en ce que disent les Évangiles, alors, pensait Ibn-Khazem, la logique voulait que les Évangiles aient été falsifiés à un moment donné.
Un des faits les plus difficiles à réconcilier entre le Coran et l’Évangile concerne la crucifixion de Jésus-Christ. Le verset 156 de la 4e sourate du Coran dit en effet ceci :
« Ils disent : nous avons mis à mort le Messie, Jésus fils de Marie, l’apôtre de Dieu. Non, ils ne l’ont point tué, ils ne l’ont point crucifié; un autre individu qui lui ressemblait lui fut substitué, et ceux qui disputaient à son sujet ont été eux-mêmes dans le doute. Ils n’en avaient pas de connaissance précise, ce n’était qu’une supposition. Ils ne l’ont point tué réellement. Dieu l’a élevé à lui, et Dieu est puissant et sage. »
Pour Ibn-Khazem, une telle contradiction entre ce que rapportent les Évangiles au sujet de la crucifixion de Jésus et ce qu’en dit le Coran ne pouvait être résolue logiquement qu’en soutenant que les Évangiles avaient été falsifiés. Selon lui, les chrétiens avaient perdu l’Évangile, à l’exception de quelques traces que Dieu a laissées intactes pour servir d’argument contre eux. Cependant, la logique d’Ibn-Khazem n’était fondée sur aucune preuve historique.
Qu’enseigne le Coran sur la personne de Jésus? La sourate 19 parle de l’annonciation de la naissance de Jésus faite à Marie et de la conception de Jésus. Il est aussi nommé le Messie, dans la sourate 4. Le mot « Messie » n’est pas défini dans le Coran et doit probablement être compris au sens que la Bible lui accorde. En revanche, l’idée de Jésus-Christ comme Fils de Dieu est inacceptable pour le Coran, car Dieu ne peut engendrer de fils comme les pères humains. Bien sûr, telle n’est pas l’idée que se font les chrétiens de la filiation divine de Jésus-Christ, qui est appelé Fils de Dieu selon une filiation éternelle, et non par analogie à une filiation humaine. L’idée d’un Dieu unique en trois personnes égales en divinité, éternité et toute-puissance est également inacceptable pour le Coran, au nom de l’unicité d’Allah. C’est ce qu’exprime la sourate 4 au verset 169 :
« Ô vous qui avez reçu les Écritures, ne dépassez pas les limites dans votre religion, ne dites de Dieu que ce qui est vrai. Le Messie, Jésus fils de Marie, est l’apôtre de Dieu et son verbe qu’il jeta dans Marie : il est un esprit venant de Dieu. Croyez donc en Dieu et à ses apôtres, et ne dites point : Il y a Trinité. Cessez de le faire. Ceci vous sera plus avantageux. Car Dieu est unique. Loin de sa gloire qu’il ait eu un fils. À lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Son patronage suffit; il n’a pas besoin d’un agent. »
Notons au passage que Jésus est ici décrit comme le verbe, ou l’expression de Dieu. On retrouve ceci au verset 40 de la 3e sourate :
« Les anges dirent à Marie : Dieu t’annonce son Verbe. Il se nommera le Messie, Jésus fils de Marie, honoré dans ce monde et dans l’autre, et un des confidents de Dieu. »
Jésus est aussi décrit comme saint, ou sans péché, dans la sourate 19, une caractéristique qui n’est attribuée à aucun autre personnage mentionné dans le Coran, pas même à Mahomet lui-même. Adam, Abraham, Moïse, Jonas, David, Mahomet ont péché et ont besoin de se repentir devant Dieu, mais pas Jésus-Christ.
Dans le Coran, sa mission est décrite dans les termes suivants, toujours selon la 3e sourate :
« Dieu lui enseignera le livre et la sagesse, le Pentateuque et l’Évangile. Jésus sera son envoyé auprès des enfants d’Israël. Il leur dira : Je viens vers vous accompagné de signes du Seigneur; je formerai de boue la figure d’un oiseau; je soufflerai dessus, et par la permission de Dieu l’oiseau sera vivant; je guérirai l’aveugle de naissance et le lépreux; je ressusciterai les morts par la permission de Dieu; je vous dirai ce que vous aurez mangé et ce que vous aurez caché dans vos maisons. Tous ces faits seront autant de signes pour vous, si vous êtes croyants. Je viens pour confirmer le Pentateuque que vous avez reçu avant moi; je vous permettrai l’usage de certaines choses qui vous ont été interdites. Je viens avec des signes de la part de votre Seigneur. Craignez-le et obéissez-moi. Il est mon Seigneur et le vôtre. Adorez-le : c’est le sentier droit. »
Un peu plus loin, le Coran déclare :
« Les juifs imaginèrent des artifices contre Jésus. Dieu en imagina contre eux; et certes, Dieu est le plus habile. Dieu dit à Jésus : Je te ferai subir la mort et je t’élèverai à moi; je te délivrerai des infidèles, et j’élèverai ceux qui t’ont suivi au-dessus de ceux qui ne croient pas, jusqu’au jour de la résurrection. Vous retournerez tous à moi, et je jugerai vos différends. »
Résumons les différents traits attribués par le Coran à Jésus-Christ : Jésus est le Messie de Dieu, son Verbe, né de la vierge Marie. Il accomplit des miracles qui servent de signes de la part du Seigneur. Il a même le pouvoir de ressusciter les hommes. Ceux-ci doivent lui obéir. Il est saint, sans péché. Les juifs s’opposent à lui, Dieu lui fait subir la mort, mais l’élève à lui (c’est l’ascension). Le Coran déclare aussi que Jésus reviendra sur terre, au jour du jugement final. Tous ces éléments indiquent la place très spéciale que le Coran accorde à Jésus. Il est le serviteur par excellence de Dieu.
Mais la Bible nous enseigne beaucoup d’autres choses sur la personne de Jésus. C’est là que nous trouvons le récit exact de sa vie et de ses actes. Voilà pourquoi je vous invite à lire l’Évangile pour aller à la source la plus fiable concernant la personne de Jésus-Christ. L’Évangile déclare que tous les hommes qui commettent des fautes, qui sont des pécheurs devant Dieu, ont besoin de Jésus-Christ pour les mener vers Dieu et les réconcilier avec lui. Que ce soit Adam, Abraham, Moïse, David ou Mahomet, tous sont des pécheurs et ne peuvent par leurs propres mérites être justifiés devant le Dieu saint et parfait. Seul un médiateur saint et parfait peut nous donner accès à Dieu. Aussi bien la Bible que le Coran admettent que Jésus était saint et envoyé par Dieu pour parler avec vérité de Dieu aux hommes.
Dans le prochain article, nous verrons les différences de caractère et de comportement qui existent entre Jésus-Christ et Mahomet, et pourquoi Mahomet lui-même, homme pécheur appelé à plusieurs reprises par le Coran à se repentir de ses fautes, avait besoin de Jésus-Christ pour avoir accès à Dieu.