Dogmatique (13) - Le développement de la doctrine
Dogmatique (13) - Le développement de la doctrine
Selon Charles Hodge1, la doctrine romaine de la tradition ne doit pas se confondre avec la doctrine moderne de développement. Tous les protestants admettent qu’il y a eu, en un sens, un développement ininterrompu de théologie dans l’Église, depuis l’âge apostolique à notre époque. Tous les faits, les vérités et principes qui entrent en la théologie chrétienne se trouvent dans la Bible. Ils y sont aussi pleinement et aussi clairement en une époque qu’en une autre, au commencement, comme ils le sont à présent. Aucune addition n’est venue s’ajouter. Pas de nouvelles explications furent accordées à leur nature ou leurs rapports. La même chose reste vraie pour les faits de la nature. Ils sont ce qu’ils avaient été depuis le commencement. Cependant, ils sont mieux connus et plus clairement compris maintenant qu’ils l’étaient il y a un millénaire. Le mécanisme de l’univers était le même au temps de Pythagore, comme il le fut au temps de Laplace. Néanmoins, l’astronomie du dernier était immensément en avance sur celle de son prédécesseur. Le changement s’est effectué par un progrès constant et graduel. Le même progrès s’est accompli dans la connaissance théologique.
Chaque croyant se rend compte d’un tel progrès dans sa propre expérience. Lorsqu’il était enfant, il pensait comme un enfant. À mesure qu’il grandit, il progressa dans la connaissance de la Bible; il s’accrut non seulement en compassion, mais en clarté, ordre, harmonie de son savoir. Ceci est aussi vrai pour l’Église collectivement comme pour le chrétien à titre individuel. C’est en premier lieu naturel, sinon inévitable qu’il le soit ainsi.
La Bible, bien que claire et simple en son enseignement, de sorte que celui qui la lit acquiert suffisamment de connaissance pour son salut, est encore pleine de trésors de la sagesse et de la connaissance de Dieu et révèle des vérités des plus profondes relatives aux grands problèmes qui ont embarrassé l’intelligence de l’homme depuis le commencement. Ces vérités ne sont pas énoncées de manière systématique, mais de façon dispersée, pour ainsi dire, de même que les faits de la science sont dispersés à la surface de la nature ou cachés dans ses profondeurs. Tout homme sait qu’infailliblement il y a plus dans la Bible qu’il a pour l’heure appris, de même que tout homme de science sait qu’il y a sans faute davantage dans la nature qu’il a découvert pour l’heure ou bien qu’il comprend.
Il va sans dire qu’un tel livre étant le sujet d’étude pieuse et laborieuse, siècle après siècle, par des hommes capables et fidèles peut être toujours mieux compris. Et, comme dans les cas des faits scientifiques, bien qu’une théorie fausse après une autre, fondée sur des principes erronés ou sur l’induction imparfaite des faits, ont été abandonnées, il n’en reste pas moins vrai qu’un certain progrès a été accompli et le terrain une fois conquis ne fut pas abandonné; nous devons nous attendre de même avec l’étude de la Bible. On peut s’attendre que des opinions fausses, des inférences erronées, des mauvaises compréhensions, l’ignorance de certains faits ou des mauvaises représentations puissent surgir dans une succession sans fin. Mais nonobstant, un progrès constant en la connaissance de ce que la Bible enseigne sera accompli. Nous devons nous attendre qu’ici aussi, le terrain une fois conquis sûrement, il ne sera pas de nouveau perdu.
Mais en second lieu, ce qui est naturel et raisonnable en soi est un fait historique patent. Ainsi, l’Église a avancé dans son savoir théologique. La différence entre les représentations confuses et discordantes des Pères primitifs sur tous les sujets concernant la doctrine de la Trinité et de la personne du Christ, et la clarté des vues après des siècles de discussions et l’énoncé de ces doctrines par des Conciles de Constantinople et de Chalcédoine, est aussi grande ou presque qu’entre le chaos et le cosmos. Or, ce terrain-là ne fut plus perdu. La même chose est vraie pour la doctrine du péché et de la grâce. Avant les longs débats à leur sujet durant la période augustinienne, la plus grande confusion et contradiction prévalait en l’enseignement des conducteurs de l’Église. Durant ces débats, les opinions de l’Église se sont clarifiées et se sont fixées. Il est rare qu’une doctrine ou un principe sur la chute de l’homme, la nature du péché et de la faute, et sur la nécessité de l’action de l’Esprit, qui à présent fait partie de la foi évangélique, ait été clair pour l’Église.
De la même manière avant la Réforme, une semblable confusion régnait par rapport à la grande doctrine de la justification. Aucune ligne de démarcation n’était tracée entre elle et la sanctification. En fait, au cours du Moyen Âge, et parmi les plus pieux des docteurs scolastiques, l’idée de la faute s’était confondue avec celle du péché et le péché tenu comme une défection morale. Le grand objet consiste à se procurer la sainteté. Bien entendu, le pardon allait venir. La doctrine apostolique, paulinienne, profondément biblique, affirmant qu’il ne peut y avoir de sainteté à moins qu’il y ait expiation du péché, pardon, justification, réconciliation avant la sanctification, n’avait pas été comprise. Ce fut la grande leçon que l’Église a apprise à la Réforme, et que depuis, elle n’a plus jamais oubliée. Il est vrai qu’en tant qu’un fait historique, l’Église a progressé. À présent, elle comprend beaucoup mieux que jadis les grandes doctrines de la théologie, de l’anthropologie, de la sotériologie.
Note
1. Systematic Theology, vol. I.