Introduction à l'épître aux Éphésiens
Introduction à l'épître aux Éphésiens
- Auteur
- Circonstances de composition
-
Destinataires
a. La ville d’Éphèse
b. L’Église d’Éphèse - Message
- Analyse du contenu
- Questions
1. Auteur⤒🔗
L’apôtre Paul est l’auteur de cette lettre qu’il compose depuis sa prison romaine. Durant les longues heures de sa détention, il eut sans doute le temps de se remémorer les grandes lignes de sa prodigieuse carrière et de ses activités missionnaires. Sur le chemin de Damas, il avait reçu la vision du Christ ressuscité et sa vocation directement de sa part. Il avait renoncé à la voie pharisaïque et cessé de persécuter l’Église naissante. Mais il avait dû fuir aussi Damas de peur que ses anciens coreligionnaires juifs ne le mettent à mort à cause de sa conversion. À Jérusalem, il avait rejoint les rangs des chrétiens et des apôtres du Christ, mais là également il avait dû fuir à cause d’une foule excitée cherchant à le maltraiter du fait de son adhésion au Messie rejeté.
Après une période de retraite à Tarse, sa ville natale en Cilicie, il avait reçu l’appel de seconder un principal de l’Église, Barnabas, son aîné, et de l’aider dans son ministère d’édification de l’Église d’Antioche. À partir de cette ville, il devait plus tard entreprendre ses voyages missionnaires, au nombre de trois. Ensemble avec Barnabas ils s’étaient rendus d’abord à Chypre et ensuite à la partie centrale de ce qu’actuellement s’appelle la Turquie, l’Asie Mineure. Lors de son deuxième voyage, il avait traversé l’Europe et fondé de nouvelles Églises, cette fois-ci en Macédoine et en Grèce centrale. En revenant à Éphèse lors d’une brève visite, il y laissait ses nouveaux amis, le couple Aquilas et Priscille. Après un séjour à Antioche il s’était de nouveau rendu à Éphèse où il passait trois ans en œuvrant pour la mission. Là, il n’avait pas seulement fondé une forte Église, mais ayant choisi cette métropole comme centre de rayonnement, il envoyait ses collaborateurs pour évangéliser d’autres contrées de l’Asie Mineure. De nouvelles Églises furent donc implantées. À Éphèse, il avait formé le projet de se rendre à Rome, la capitale de l’Empire. Cependant, il devait auparavant se rendre à Jérusalem, la capitale religieuse de sa foi. Après avoir passé quelque temps en Grèce et en Syrie, il s’arrêta à Milet, port proche d’Éphèse, où il envoya quérir les anciens de l’Église pour prendre congé d’eux. Il était chargé d’apporter l’offrande destinée aux membres pauvres de la communauté de Jérusalem.
Les juifs de cette ville étaient toujours décidés à l’éliminer. Ils étaient prêts à fomenter une émeute dans l’intention de le compromettre. Ce fut in extremis qu’il fut sauvé par l’officier romain de service lequel, pour le soustraire à la vindicte de la populace, le fit escorter jusqu’à Césarée, siège du gouverneur romain. Paul devait y rester durant deux années entières. Mais désespérant d’obtenir justice, il avait usé de son droit de citoyen romain pour faire appel à César. C’était l’unique moyen dont il pouvait se servir pour se rendre à Rome. Mais le voyage devait se passer dans des circonstances totalement différentes de celles qu’il espérait. Ce n’était plus en missionnaire libre de ses mouvements qu’il s’embarquait sur le navire le transportant vers la capitale de l’Empire, mais en détenu enchaîné.
Il ne fait aucun doute que, durant ces longs mois de détention dans la prison impériale à Rome, le grand apôtre se souvint de tous les épisodes de sa vie mouvementée. Mais il ne se contenta pas de se remémorer le passé. Sa détention se passait dans des conditions plutôt favorables. Il logeait dans une maison qu’il avait pu louer à ses propres frais et, en toute liberté, il y recevait des visites. Il jouissait également d’autres avantages, dont celui de pouvoir s’entretenir avec des groupes chrétiens. Ils étaient nombreux ceux qui dans la maison impériale — Néron était alors empereur — voulaient en savoir davantage sur cette nouvelle religion se réclamant d’un juif nommé Jésus, le Christ.
Ces circonstances particulières motivent sa demande, à la fin de sa lettre aux Éphésiens, de prier en sa faveur afin qu’il puisse ouvrir la bouche et faire connaître les mystères de l’Évangile dont il était l’ambassadeur enchaîné. Paul prisonnier n’en restait pas moins un prédicateur d’une grande hardiesse. On est en droit de penser que, durant ces années de détention, il accomplit davantage que durant ses années d’activité normale. Il y composa certaines de ses lettres qui nous sont parvenues comme des véhicules de la révélation divine. Sur le plan humain et littéraire, ces écrits sont à nos yeux de précieux documents. Nous n’avons aucune raison de douter de l’authenticité de cette lettre.
Paul se nomme à deux reprises (1.1 et 3.1).
Les preuves externes de cette authenticité sont nombreuses aussi et résistent à toutes les attaques des détracteurs. La lettre est confirmée par les témoignages de Polycarpe, d’Ignace, d’Irénée, de Clément d’Alexandrie et sans doute elle a été connue de Clément de Rome, ainsi que de Tertullien. Dans le canon d’Eusèbe, elle figure au nombre des « homologoumena » c’est-à-dire parmi les lettres qui avaient été admises par les Églises aussi bien d’Orient que d’Occident. Le canon de Muratori l’inclut à côté des neuf autres lettres de Paul (les pastorales n’en font pas partie).
Nous ne nous attarderons pas longuement sur les questions relatives à cette authenticité, ne mentionnant que certains arguments internes — dont la théologie même de Paul —, arguments qui la prouvent à leur manière. L’argument opposé selon lequel la lettre ne serait pas de Paul, mais de l’un de ses disciples, parce que Paul ne se présente pas comme il le fait dans d’autres écrits, semble à la fois arbitraire et non scientifique. D’autres lettres de Paul développent les mêmes thèmes, bien que ce soit d’une façon différente.
2. Circonstances de composition←⤒🔗
Diverses raisons motivèrent l’envoi de cette lettre. Un messager était arrivé à Rome transmettant l’expression de l’affection des amis macédoniens de l’apôtre. Après la grave maladie qui avait gardé le cher Épaphrodite au lit, l’immobilisant pendant longtemps, celui-ci est en mesure de rentrer chez lui. Paul profite de l’occasion pour lui confier une lettre adressée aux Philippiens. Il remercie chaleureusement les membres de cette Église pour leur amitié et leurs dons matériels. Il partage aussi certaines expériences dont il avait personnellement bénéficié. De la lointaine Colosses lui parviennent également d’autres nouvelles sur la situation des Églises de la région. Dans la lettre qu’il adressera aux Colossiens, l’apôtre prend vigoureusement la défense de la divinité éternelle du Christ. Et puis, un esclave fugitif de cette ville, du nom d’Onésime et qui se trouve à Rome, est arrêté. Mais il se convertit au Christ par les soins de l’apôtre. Alors il décide de rentrer chez son ancien maître qu’il avait gravement lésé et qui est aussi un chrétien, un converti de Paul, Philémon. Paul rédige un billet à l’intention de ce dernier le priant d’accueillir son ancien esclave. Il l’envoie chez Philémon accompagné d’un ami et collaborateur de l’apôtre, Tychique. Celui-ci porte la lettre aux Colossiens.
Cependant, d’autres chrétiens que ceux de la ville de Colosses se trouvent dans le même district. Paul a à cœur leur état spirituel. Il pense à eux-mêmes durant la période de sa pénible détention romaine. En pensant donc à ceux-ci, il rédige une autre lettre, celle que nous appelons « lettre de Paul aux Éphésiens ». Tychique en sera également le porteur.
Le lien historique entre les lettres aux Philippiens, aux Colossiens et à Philémon fait encore mieux ressortir le contenu de notre présente lettre. On peut penser que la date de sa composition, comme celle des trois précédentes, fut l’an 62 ou 63. Si durant les deux années de sa captivité il ne put accomplir une activité missionnaire directe, la rédaction de ces quatre « lettres de prison » peut être considérée comme un événement majeur de la carrière missionnaire du grand apôtre. La rédaction de celle aux Éphésiens est la réponse à sa prière : « Je vous demande de ne pas perdre courage à cause de mes tribulations pour vous qui sont votre gloire » (Ép 3.13).
3. Destinataires←⤒🔗
a. La ville d’Éphèse←↰⤒🔗
La lettre est adressée à des chrétiens résidant dans la province romaine de l’Asie (à ne pas confondre avec l’Asie géographique ou politique moderne!). Cette province à l’intérieur de l’Asie Mineure s’étend tout au long de la côte ouest. Plusieurs grands centres y sont situés, dont Éphèse est le plus important. Depuis l’antiquité, la ville jouissait d’une grande notoriété. Elle avait été fondée par des Athéniens, mais sa population était largement composée d’Orientaux. À l’époque de Paul, elle rivalisait avec Alexandrie et Antioche comme l’un des trois grands emporiums de commerce de la Méditerranée orientale. C’est une métropole à la fois politique et commerciale. Juifs et Grecs s’y côtoient dans les rues; son port est situé sur le Gayster; son déclin ultérieur pourrait être attribué au déclin du port.
Au cours du premier siècle, elle est l’une des villes les plus prospères de l’Empire. Mais son importance est notamment due à l’intérêt religieux qui s’y est développé depuis toujours. En effet, le temple dédié à Diane (l’Artémis grecque) était l’une des sept merveilles du monde antique. Cette superbe construction de marbre était tournée vers l’est, hors de l’enceinte de la ville. Le temple avait une longueur de 110 m sur 80 de large. Une centaine de colonnes soutenaient sa hauteur de près de 20 m; chacune était un chef-d’œuvre d’art et d’architecture et le don d’un prince. Sa construction avait requis en tout près de vingt ans. À l’intérieur de l’autel se trouvait l’image de la déesse qu’on s’imaginait tombée du ciel.
Derrière l’autel étaient conservés les trésors des souverains et de nombreuses nations. Rappelons-nous que l’accusation portée contre Paul consistait à le tenir pour le responsable du déclin du commerce des sanctuaires miniatures en argent; l’émeute qui s’ensuivit mit fin à l’activité évangélisatrice du grand apôtre. Autre monument architectural digne d’admiration, et dont il est fait mention dans le livre des Actes, le théâtre était l’un des plus vastes du monde hellénique, avec une capacité de 50 000 spectateurs. Ce fut vers ce théâtre que la foule déchaînée entraîna Paul. L’émeute fut cependant apaisée sur le sage conseil du secrétaire de la ville, qui était également le président du sénat.
Près du théâtre s’étendait un stade pour les courses athlétiques et les combats de fauves auxquels Paul fait allusion dans sa lettre aux Corinthiens, usant sans doute d’un langage métaphorique. Il est intéressant de noter que le culte de Diane pratiqué ici était la version orientale de celui qu’on lui vouait ailleurs. Comme l’Astarté d’origine syrienne ou phénicienne avec laquelle on l’identifiait souvent, la déesse était honorée comme source de fertilité et comme patronne de la propagation de la race. On peut s’imaginer la violence des orgies sous des auspices religieux de cette nature. Une vaste jungle de fanatisme et de superstition s’était développée autour de cette septième merveille du monde. Sur un sol aussi bien disposé se développaient toutes sortes d’abominations diaboliques, et la sorcellerie comme l’occultisme polluaient l’atmosphère. Cependant, soutenu par la toute-puissance du Seigneur, l’apôtre put s’attaquer aux forteresses du Malin et y planter la bannière de la croix. Il avait été choisi pour être le témoin du Christ, et la réussite de son entreprise demeure un éloquent témoignage rendu à cette exceptionnelle mission, que fut la sienne. Ajoutons que cette mission n’était qu’une parmi toutes celles entreprises et menées à bien par Paul.
L’Apocalypse de Jean nous apprend qu’Éphèse faisait partie des sept Églises dont « l’ange » reçoit une lettre.
b. L’Église d’Éphèse←↰⤒🔗
Il n’est pas absolument certain que la lettre qui porte le titre ou la suscription « Aux Éphésiens » soit une lettre adressée directement à l’Église d’Éphèse. On peut penser qu’elle fut une lettre « circulaire » adressée en même temps à plusieurs Églises de la région. Nous y reviendrons plus loin. Il est fort probable que les Églises de Laodicée et de Hiérapolis aussi la reçurent et la lurent (Ép 1.13-15; 2.21 et 6.21; Col 2.2-3).
La première visite de l’apôtre à Éphèse qui est le siège d’une grossière et notoire idolâtrie (arx paganismi, d’après Bengel) fut brève; ce fut une visite de reconnaissance de la situation plutôt qu’un champ choisi pour commencer une œuvre missionnaire dans l’intention d’y établir une Église. Aquilas et Priscille y furent laissés après cette visite en qualité d’évangélistes provinciaux, peut-être en leur capacité d’assistants apostoliques (1 Co 12.28) et leur mission ne fut pas sans porter des fruits. Lorsque Paul y retourna durant son troisième voyage missionnaire, il y resta plus de deux ans. L’opposition ne manqua pas de se déclencher contre sa mission, fomentée surtout par des juifs. Selon sa stratégie, dans cette situation, Paul se tourna franchement vers les païens. Peu à peu, les disciples s’assemblèrent unis par les liens créés par l’Évangile, dans les salles de lecture d’un nommé Tyrannus, salle qui était sans doute le siège d’une école de philosophie ou de rhétorique. Le nom peut indiquer soit un juif soit un Grec. L’apôtre consacra probablement une partie de son temps à travailler pour subvenir à ses besoins et l’autre partie à l’évangélisation.
L’assemblée chrétienne se développa et crût en nombre, et le rayonnement de la vie communautaire dépassa les limites de la ville. Il est probable que ce fut durant cette époque de l’apostolat missionnaire que furent fondées les sept autres Églises de l’Asie Mineure. À Éphèse même, une large fraternité chrétienne fut créée, bien que nous manquons de détails quant à son édification et à son expansion.
On peut être sûr que « l’Hébreu, fils d’Hébreu » qu’était Paul fut affligé par le spectacle d’une telle idolâtrie et par les orgies et autres débordements qui l’accompagnaient. Toutefois, en bon stratège, il n’attaqua pas de front le culte d’Artémis-Diane, car la ville s’enorgueillissait de sa qualité de « néokoros », c’est-à-dire de gardienne du temple. Il ne manqua pas cependant de réprouver ce culte, et ses critiques ne tardèrent pas à tomber dans les oreilles des Éphésiens. Les effets directs de la prédication de Paul se firent voir dans la menace planant sur le commerce prospère de la confrérie des orfèvres, lesquels s’enrichissaient du commerce du culte païen. Lors d’un autodafé, des livres de magie et de sorcellerie furent brûlés avec grand zèle par les nouveaux convertis. Ceci prouve encore l’influence extraordinaire qu’exerça l’apôtre sur la ville tout entière. Luc a donné une description fidèle et très vivante de la scène qui opposa des hommes d’affaires à Paul. La foule excitée, les Asiarques mis à contribution, la plèbe vociférant, la présence du grave « eirenikon », le secrétaire de la ville, l’ensemble témoigne de la résonnance exceptionnelle de cette émeute. « Ces choses-là ne se passeront pas dans un coin. »
On a posé la question de savoir si, en rédigeant cette lettre, Paul songeait uniquement à l’importante Église qu’il avait fondée à Éphèse. Tous les manuscrits à notre disposition comportent bien la suscription : « aux saints qui sont à Éphèse » sauf trois, mais dans chacun de ces derniers une main ultérieure a inséré l’adresse. La phrase se trouve dans toutes les versions anciennes du Nouveau Testament. En outre, il était dans les habitudes de Paul de désigner ses lecteurs. Il est vraisemblable que l’apôtre n’écrit pas uniquement cette lettre à une Église à laquelle le liaient de chers souvenirs et une profonde affection. Deux importants manuscrits grecs ne comportent pas cette suscription. On admet qu’ils sont antérieurs à ceux qui comportent la suscription par conséquent, ils ont plus de poids. Selon le témoignage des Pères apostoliques (fin du premier siècle, début du second), il n’existe pas de mention « à l’Église d’Éphèse ». En fait, on affirme que l’expression ne se trouve pas dans des manuscrits datant des trois premiers siècles.
Un autre argument assez fort contre la théorie de la lettre adressée exclusivement aux Éphésiens se trouve dans le caractère particulier des relations entretenues par Paul avec cette Église. Ces relations étaient à la fois intimes et durables. Paul avait été le fondateur de cette Église et son pasteur durant trois ans. Il parle de ses exhortations « en pleurs et en larmes jour et nuit ». L’intensité de son affection envers cette Église se traduit dans son discours d’adieux devant les anciens à Milet. Ils tombèrent à son cou et l’embrassèrent en pleurant, et en s’attristant grandement d’apprendre qu’ils n’allaient plus le revoir (Ac 20.38). Il est assez difficile d’imaginer que Paul put écrire une lettre à une Église à laquelle tant de liens l’unissaient sans se référer à des incidents passés et sans se rappeler de précieux souvenirs. Mais la lettre ne contient ni références locales, ni salutations personnelles, ni aucune trace de relations personnelles privilégiées. Certains passages laisseraient même supposer que Paul n’avait pas connu ses lecteurs. Les déclarations profondes et les exhortations pratiques de la lettre sont plutôt abstraites et impersonnelles; en conséquence, les spécialistes sont parvenus à la conclusion que cette lettre ne fut pas adressée à une Église particulière, mais qu’il s’agit d’une encyclique, destinée à plusieurs communautés chrétiennes de la région parmi lesquelles devait se trouver aussi Éphèse.
Ses lecteurs sont d’origine païenne. L’apôtre a entendu parler de leur foi et de leur amour. Ils avaient appris qu’il était détenu et ils en étaient attristés. Il est clair qu’ils connaissent Tychique. En outre, cette lettre en accompagne une autre adressée nommément aux chrétiens de Colosses, et comme elle est transmise par les soins de Tychique, on pourrait conjecturer avec raison qu’elle était destinée aux Églises de Laodicée, de Hiérapolis et d’autres villes du proconsulat de l’Asie dont Éphèse était la capitale administrative.
Selon une hypothèse, le « à Éphèse » ne se trouverait nulle part, selon une autre un espace aurait été laissé vacant et par la suite, une suscription y aurait suppléé suivant l’endroit où la lettre était lue. On peut penser en effet que le « à Éphèse » fut ajouté ultérieurement.
Tout en optant pour l’hypothèse d’une lettre encyclique, nous ferons remarquer que l’essentiel n’est pas là. Son contenu a une importance décisive pour notre propre foi, et son inspiration est telle que très tôt elle figure parmi les écrits considérés comme canoniques du Nouveau Testament. Ce contenu s’adapte parfaitement aux besoins et aux conditions de toute Église chrétienne de chaque génération, où qu’elle se trouve.
Les Églises mentionnées dans le livre de l’Apocalypse de Jean furent assaillies par de faux enseignements auxquels certaines d’entre elles succombèrent. Éphèse maintint l’intégrité de la foi, quoiqu’elle manqua de zèle et d’ardeur. Selon une ancienne tradition, l’apôtre Jean y aurait passé les dernières années de sa vie. Durant un temps intérimaire, Timothée présida aux destinées de l’Église. Durant le deuxième siècle de notre ère, elle jouissait encore d’une bonne réputation. Ignace lui adressa l’une de ses lettres. Plus tard, la ville tomba sous l’emprise du sacerdotalisme, et avec la décadence, Éphèse à son tour perdit de sa vitalité pour ne laisser que la lettre que nous lisons sous l’appellation « Aux Éphésiens ».
4. Message←⤒🔗
« Le ton de l’épître est impérial. » Le Christ est le Souverain d’un Empire universel dans lequel tout chrétien, qu’il soit d’origine juive ou païenne, possède les mêmes droits et les mêmes devoirs. Une telle conception de la vie chrétienne ne pouvait surgir que dans la capitale de l’Empire romain, tout près du palais impérial des Césars. C’est pourquoi l’apôtre ne s’adresse pas ici à un particulier comme à Philémon, ni à une Église locale, ainsi qu’il fait à Colosses, mais écrit et parle urbi et orbi, à l’ensemble du corps chrétien. Le but recherché par la lettre est général : fortifier et encourager la foi des membres de l’Église.
Il ne semble pas qu’il existe un danger d’hérésie menaçant cette Église, ce qui explique le ton plutôt positif de la lettre. Les lecteurs doivent parvenir au sommet de la foi. Ils sont en présence de la plénitude du plan rédempteur de Dieu, de son origine et de sa consommation en son Fils. Le contenu peut rappeler un « psaume évangélique » plutôt qu’un exposé doctrinal systématique. Dans cette lettre, nous avons l’évaluation que Dieu fait de son Église. Celle-ci n’est pas une organisation purement humaine destinée à des activités sociales et philanthropiques ni une association de volontaires ayant de l’expérience spirituelle; elle est le corps du Christ.
5. Analyse du contenu←⤒🔗
1. Introduction (1.1-2)
Dans le verset qui ouvre la lettre se trouve aussitôt la preuve interne de l’authenticité de celle-ci. Elle est signée par Paul. Dans cette lettre à un groupe d’Églises auquel appartient Éphèse et dont elle est la principale, Paul se présente comme un apôtre du Christ-Jésus par la volonté de Dieu.
2. Le privilège d’être membre du corps du Christ (1.3 à 3.21)
Puisque le grand thème est l’unité des croyants qui constituent l’Église du Christ, il est normal que Paul parle de son origine. L’Église a son fondement en l’élection divine. Dieu en a choisi les membres d’avance, avant l’existence même du monde. Élue de Dieu, sauvée par Christ et scellée par l’Esprit, voilà comment l’Église a été formée.
L’apôtre poursuit son argument en rappelant que le privilège de devenir membres de celle-ci devrait aussi inculquer la conviction de la richesse d’une telle position, ainsi que de la puissance de Dieu. Tandis qu’ils étaient encore spirituellement morts, enfants de colère, ils sont devenus des enfants d’adoption en Christ. Ceci n’est pas le résultat de leur effort. « C’est par grâce que vous êtes sauvés et ceci ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu » (Ép 2.8).
L’Église du Nouveau Testament est universelle. Elle ne se limite pas aux seuls juifs comme c’était le cas dans l’Ancien Testament. Les païens et toutes les races peuvent en faire partie au même titre, et en égalité avec les juifs. Ceux qui auparavant étaient éloignés de Dieu sont à présent rapprochés par le sang du Christ. La distinction entre juif et gentil a disparu. Il n’est plus possible d’établir des barrières ethniques, raciales, linguistiques et culturelles, mais seulement une barrière spirituelle, celle qui divise les hommes entre les membres du corps du Christ, l’Église, les rachetés du Sauveur, et ceux qui refusent de se soumettre à Dieu et de vivre par sa grâce, manifestée en son Fils notre Sauveur. Actuellement, ce n’est que par pure commodité que nous diviserons les hommes en des catégories ethniques et raciales, mais cela n’a rien de décisif quant à leur élection et à leur salut éternels. Ce nouveau corps ne peut être divisé en fractions. L’apôtre insiste sur l’unité spirituelle radicale de tous les croyants.
Afin que ses lecteurs ne doutent pas de leur inclusion dans l’Église, Paul leur rappelle que Dieu l’a appelé à devenir le missionnaire auprès des gentils. Il conclut la section doctrinale en priant Dieu :
- de les fortifier dans leur foi,
- afin que le Christ puisse demeurer dans leur cœur, et
- qu’ils puissent connaître et apprécier la grandeur de l’amour de Dieu
3. Les obligations des membres du corps du Christ (4.1 à 6.20)
D’ordinaire, dans ses lettres, Paul aborde premièrement la partie ou le fondement doctrinal de son enseignement sur lequel il va élever ensuite la seconde partie, que nous appellerons éthique ou morale (de quelle manière ils peuvent vivre leur vie chrétienne). Car à ses yeux la doctrine et la pratique, la confession de la foi et la conduite, vont de pair. Ainsi, les trois derniers chapitres de la lettre sont-ils de nature pratique.
Puisque le thème principal de la lettre est l’unité des croyants, dans cette section, Paul exhorte ses lecteurs à maintenir et à conserver cette unité. Ils ne doivent jamais la tenir pour une chose acquise une fois pour toutes, autrement elle serait perdue. Il est exact que les membres de l’Église possèdent leur capacité propre et occupent des postes et des offices différents, mais cela ne détruit pas leur unité. Ils peuvent la maintenir s’ils se rappellent :
- que la source de leurs dons se trouve en Christ monté au ciel;
- que le but pour lequel ils ont été accordés est pour l’édification des membres de l’Église jusqu’à ce que tous parviennent à la maturité chrétienne.
Si on garde ces deux points à l’esprit, il n’existera pas de division entre croyants.
Les Éphésiens doivent également rejeter le vieil homme, se débarrasser des vieilles habitudes et des actes de péché afin de revêtir l’homme nouveau. Ils doivent « développer des vertus chrétiennes ». Les anciens vices sont appelés « les œuvres des ténèbres » et ce sont l’impureté, le mensonge, le vol, la convoitise, la jalousie. L’impureté est traitée longuement parce qu’elle caractérise toute la vie païenne. Les païens étaient des impurs dans leur religion, dans leurs loisirs, dans leurs affaires et dans leur politique. Les vertus nouvelles sont appelées les œuvres de la lumière et sont : l’amour, le pardon, la justice, la sainteté. Plus nous nous débarrassons du vieil homme, plus nous nous approchons de l’image du Christ.
Les relations entre les membres de la famille chrétienne sont abordées ensuite. Pour commencer, ce sont les relations entre époux et épouses qui seront traitées. Les femmes doivent obéir à leurs époux. Il nous faut retenir ce terme biblique qui dit ce qu’il veut dire de la part de Dieu. À leur tour, les époux doivent aimer leurs épouses. La raison en est profonde : les rapports entre l’homme et la femme deviennent l’image même des rapports entre Christ et son Église. Les épouses doivent obéissance à leurs époux comme l’Église doit obéissance et soumission au Christ. Les époux doivent aimer leurs épouses, car Christ a aimé son Église et s’est donnée pour elle.
Les rapports entre parents et enfants ensuite. Les enfants doivent respect et soumission à leurs parents, car Dieu leur a accordé une autorité. De leur côté, les parents ne doivent pas inciter leurs enfants inutilement à la colère.
Enfin, les rapports entre maîtres et serviteurs. Ces derniers doivent se soumettre à l’autorité de leur maître selon la chair, même s’il s’agit de non-croyants. Les maîtres chrétiens devraient s’occuper de leurs serviteurs avec douceur. L’amour doit être le facteur principal dans ces divers rapports.
Tout chrétien devra se comporter en soldat courageux. Il est appelé au saint combat dans l’armée du Seigneur. Les armes, aussi bien offensives que défensives, lui sont fournies par Dieu lui-même. Pour illustrer son discours, l’apôtre emploie l’image d’un soldat romain de son époque.
4. Conclusion
La mission de Tychique, chargé d’apporter la lettre, est double : répondre aux questions des récipiendaires de la lettre s’ils en ont; les consoler en leur annonçant la prochaine visite de Paul, après l’élargissement qu’il espère.
6. Questions←⤒🔗
- Mentionner les bénédictions dont les Éphésiens ont été les bénéficiaires (Ép 1).
- Quelle est la cause principale de la prédestination? Son but final? (1.5-6).
- Quel est le contenu de la prière de l’apôtre en faveur de ses lecteurs? (1.17-20, 3.14-19).
- Quel est le rapport de la foi et de la grâce dans l’œuvre divine du salut? (2.8).
- Comment maintenir l’unité des croyants? (4.1-3).
- Décrire l’œuvre des pasteurs et des docteurs de la Parole. (4.12).
- Décrire l’état misérable des non-croyants. (2.12; 4.17-19).
- Résumer les devoirs conjugaux et les relations sociales.
- Décrire l’unité des croyants. (1.10; 2.6, 14, 17, 19).
- Analyser les prières de Paul en faveur de l’Église. (1.17-20 et 3.14-19).
- Expliquer les sept unités dans 4.4-6.
- Décrire la marche chrétienne. (4.1, 13, 17, 5.1, 8, 15).
- Comparer le vieil homme au nouveau. (4.22-24).
- Décrire l’armure chrétienne. (6.14-17).