La colère de Dieu - Un élément essentiel de la mission La mission dans la perspective de la venue du Christ qui viendra juger les vivants et les morts - 2 Timothée 4.1
La colère de Dieu - Un élément essentiel de la mission La mission dans la perspective de la venue du Christ qui viendra juger les vivants et les morts - 2 Timothée 4.1
INTRODUCTION
1. LA COLÈRE DE DIEU SELON LES PERSPECTIVES ŒCUMÉNIQUES
1.1. Approche et missiologie
1.2. L’exercice de la discipline ecclésiastique chez les œcuméniques
1.3. La colère de Dieu et la sanctification de la vie chez les œcuméniques
2. LA COLÈRE DE DIEU SELON LES PERSPECTIVES ÉVANGÉLIQUES
2.1. La colère dans la méthodologie et la prédication
2.2. La sainteté dans l’Église, en particulier dans l’exercice de la discipline ecclésiastique
2.3. La colère de Dieu et la sanctification de la vie
3. NOTRE OPINION
3.1. La colère de Dieu est une partie essentielle de la prédication missionnaire
3.2. La colère de Dieu dans l’édification de la vie de l’Église
3.3. La colère de Dieu et la sainteté de son peuple
4. PERSPECTIVES
INTRODUCTION
La mission semble avoir réussi à traverser ses années difficiles. Durant les années 1970 et 1980, Bangkok (1972/3) a dominé la scène avec son appel au dialogue et au salut immédiat du monde. En même temps, nous pouvions entendre le slogan : « Missionnaire, retourne chez toi », comme un désir d’en finir avec la mission occidentale.
Mais le vent tourna vers le milieu des années 1980. L’Église était mise au défi, même dans les pays en développement, par la sécularisation, le renouveau des religions (par exemple l’islam), le renversement du communisme, la pollution, l’élargissement du fossé Nord-Sud, etc. L’Église est-elle pertinente pour le monde, ici et maintenant? Par souci pour sa propre existence, l’Église devait prouver sa crédibilité. Maintenant ou jamais!
La nouvelle identité de la mission porta le nom de Missio Dei. La mission est l’œuvre même de Dieu pour le salut du monde. L’Église est l’instrument choisi de Dieu. L’Église entière est envoyée dans le monde entier avec l’Évangile entier : nous parlons d’une méthode missionnaire holistique (globale).
La mission n’est pas la tâche exclusive des missionnaires, des Églises et des organisations missionnaires. C’est la tâche de tous les chrétiens, partout dans le monde. Ils sont tous responsables de ce monde et de cette humanité qui a des besoins désespérés. Ils doivent tous agir, en paroles et en actes, de sorte que l’humanité puisse survivre jusqu’à la fin du 20e siècle. L’Église et les chrétiens sont appelés à démontrer l’amour de Dieu dans tous les aspects de la vie. La Missio Dei signifie : l’Église doit être ou ne pas être.
Puisque, en gros, cette conception est acceptée autant par les œcuméniques que par les évangéliques, nous devons nous demander si cette mission apporte effectivement l’Évangile en entier. La notion de péché dans la missiologie moderne fut récemment critiquée1. Nous examinerons l’impact qu’a eu cette pensée moderne sur la façon de concevoir la punition contre le péché. Quelle est la réaction de Dieu à l’égard du péché? Quelles en sont les conséquences sur la méthodologie de la mission et l’organisation d’une jeune Église? Dans cet article, nous portons notre attention sur l’aspect de la colère de Dieu. D’où le titre : « La colère de Dieu : un élément essentiel de la mission. La mission dans la perspective de la venue du Christ qui viendra juger les vivants et les morts. » Nous nous limiterons à trois éléments : (1) l’approche; (2) l’exercice de la discipline ecclésiastique, et (3) le stimulant à la sainteté. Dans la première partie, nous examinerons les perspectives œcuméniques; dans la deuxième partie, nous traiterons des conceptions évangéliques, et dans la troisième partie, nous présenterons notre opinion. Nous conclurons avec une perspective réformée de la mission.
En somme, nous soulevons la question de savoir si et comment la mission moderne conduira les hommes à une rencontre avec le Dieu vivant et redoutable.
1. LA COLÈRE DE DIEU SELON LES PERSPECTIVES ŒCUMÉNIQUES⤒🔗
1.1. Approche et missiologie←↰⤒🔗
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1.1.1) Mission et évangélisation : une affirmation œcuménique2 (abréviation : MÉ)←↰⤒🔗
MÉ est le document officiel accepté par le Conseil œcuménique des Églises (COÉ, Vancouver 1983) qui traite de la critique évangélique et des préoccupations du COÉ. Il avait pour but de stimuler une nouvelle ère de mission.
L’introduction (A) déclare que le péché ne commence qu’avec le rejet du plan du salut de Dieu. Cette conception conduit à une anthropologie optimiste, relativisant la colère de Dieu. Dieu promet le Royaume aux pauvres, à ceux qui ne sont pas (encore) rejoints par l’Évangile, avec comme conséquence la rédemption commune. Les murs de séparation ont été renversés, le monde est racheté avec Dieu. L’on ne devient aliéné de Dieu que par rejet délibéré, sans quoi aucune punition n’est infligée.
Nous concluons que, par cette anthropologie, la mission perd son but et relativise la colère. Seul le rejet est mal. Les pauvres font déjà partie du peuple de Dieu. Ils n’ont pas besoin de confesser leurs fautes ou de répondre à la Parole de Dieu. Ce changement radical est causé par la négation de la création historique du monde et de la désobéissance d’Adam et Ève au paradis.
Le deuxième paragraphe modifie la doctrine de la réconciliation. La croix de Jésus n’est pas comprise comme une rétribution, mais comme un symbole de son renoncement à lui-même et de son amour sacrificiel pour les hommes. Les paragraphes 6 à 8 appellent l’Église à servir de médiateur entre Dieu et la création, comme l’a fait le Christ. La souffrance du Christ est identique à la souffrance de ceux qui sont opprimés par les hommes puissants, la pauvreté et la manipulation politique. Tous les opprimés sont disciples de Jésus et bien-aimés de Dieu. La croix exhibe la bataille rangée entre les puissances démoniaques et l’amour de Dieu (par. 8). D’une part, se trouve l’aliénation et la tragédie humaines, d’autre part l’offre de renoncement à soi du Christ, l’homme parfait. L’Église ne sera apostolique qu’au moyen d’une mission incarnée. Par conséquent, elle se doit, comme le Christ, d’être solidaire du monde, participant à ses souffrances à travers son renoncement à elle-même (Jn 20.21).
Nous constatons des changements radicaux dans les doctrines du Médiateur, de la réconciliation et de l’incarnation. Pas un mot n’est dit au sujet de la colère.
1.1.2) San Antonio 1989 sur Mission et Évangélisation3 (abréviation : SA)←↰⤒🔗
La conférence du comité sur la mission et l’évangélisation mondiales de San Antonio de 1989 a traité encore davantage de la critique évangélique. Il est reconnu que l’un des buts de la mission consiste à « se tourner vers le Dieu vivant ». Mais la déclaration se rapproche de l’énoncé de MÉ de 1982. Le péché, la culpabilité et la séparation des hommes à cause de l’incrédulité sont rarement sinon jamais traités. On insiste sur l’amour de Dieu, sans restriction, pour tous les hommes et pour la création entière. L’Église devrait alors se soucier de l’unité et de la communion de tous les êtres humains. L’incarnation signifie que Dieu agit à un niveau humain, dans les cultures humaines, participant à la souffrance humaine et s’identifiant aux pauvres. Le prosélytisme est rejeté.
Le salut personnel signifie la vocation du ministère dans le Royaume. Le témoignage d’un engagement personnel doit être conjoint au dialogue. Les chrétiens ne devraient jamais juger d’autres personnes ayant une foi vivante, mais simplement être des témoins.
Nous concluons qu’à propos de l’évangélisation SA représente un compromis entre les pensées œcuménique et évangélique. Un chrétien n’a pas besoin d’interpeller d’autres personnes. Tout porte à penser que, désormais, l’incrédulité et l’opposition à l’Évangile n’existent plus. L’Église n’est donc plus le peuple de Dieu choisi hors du monde, mais l’instrument choisi de Dieu par lequel il vient vers le monde et sauve l’humanité.
1.1.3) Introduction œcuménique à la missiologie4 (abréviation : IOM)←↰⤒🔗
Les mêmes questions apparaissent dans le nouveau manuel néerlandais de missiologie. Le but principal de la mission est de soutenir et de fournir le fondement d’une communauté humaine unique (p. 475-476). Les chrétiens et les autres « croyants » ne sont que des pèlerins en route vers Dieu, se faisant part mutuellement de leurs expériences avec Dieu (p. 197). « Dieu avec nous », c’est-à-dire avec tout le monde, devient l’intérêt principal. L’infidélité humaine ne peut annuler la fidélité de Dieu.
Nous constatons que IOM énonce la rédemption commune, en d’autres mots il n’existe pas de séparation entre les croyants et les incroyants. Toutes les religions conduisent au même Dieu. Il n’y a pas de punition pour raison d’incrédulité et de désobéissance.
1.1.4) Mission transformatrice5 ←↰⤒🔗
Les idées du renommé David Bosch vont dans le même sens. L’incarnation signifie la participation de Dieu, qui doit être continuée par son Église dans le monde. L’évangélisation ne contient aucune menace, aucune crainte de l’enfer (p. 413). L’eschatologie est réalisée maintenant (p. 508). Le jugement dernier n’est pas mentionné. Il s’agit d’un plaidoyer horizontal en faveur de l’humanisation, puisque la colère et la vengeance de Dieu sont supplantées. Il subsiste une espérance pour le monde parvenu à la perfection, mais aucune place n’est laissée au jugement et à la séparation de l’humanité.
1.2. L’exercice de la discipline ecclésiastique chez les œcuméniques←↰⤒🔗
La discipline ecclésiastique n’est pas souvent abordée dans les milieux du COÉ. Nous pouvons toutefois tirer des conclusions de ce qui n’est pas dit. Considérons d’abord la structure du COÉ lui-même. Le COÉ développe de vastes programmes et formule des déclarations impressionnantes. Mais qui est responsable? Qui est censé les rendre effectifs? Qui dirige? Quelles seront les sanctions prises contre les dissidents? En réalité, la structure même du COÉ n’est-elle pas le plus grand obstacle à une action concrète et adéquate dans le monde, ici et maintenant, en commençant par l’Église?
1.2.1) Mission et évangélisation←↰⤒🔗
L’incorporation dans l’Église, le corps du Christ, fait partie du message (par. 20 MÉ). Toutefois, l’Église est « la communauté ayant comme but ultime la célébration de la sainte Cène et l’adoration de Dieu, qui dépasse toutes nos séparations » (suppl. 5, p. 57). L’unité de l’Église est l’entreprise missionnaire principale. Mais même si les documents de Lima parviennent à une plus grande unité doctrinale, il n’existe toujours pas d’unité doctrinale d’ensemble.
Nous concluons qu’il y règne une tolérance envers la liberté doctrinale et le syncrétisme. Les frontières entre l’Église et le monde sont consciemment passées sous silence. Dans ce climat, la discipline ecclésiastique ne peut pas s’épanouir, sans mentionner l’influence néfaste que cela fait subir aux organisations non œcuméniques.
1.2.2) San Antonio←↰⤒🔗
À de nombreuses reprises, les documents de SA invitent à abattre les murs d’hostilité et de séparation. Car l’unité de la famille humaine est primordiale. L’unité dans l’action missionnaire est encouragée. Les principales questions doctrinales, quant à elles, concernent la participation des femmes aux ministères officiels et l’eucharistie accessible à tous. La principale hérésie de ce temps semble être la restriction de la sainte Cène aux membres en bonne et due forme et le rejet des femmes aux ministères officiels. Le prosélytisme est rejeté puisqu’il nierait l’authenticité de la foi des autres chrétiens. La communauté locale doit devenir la source de la mission, car le monde croira principalement à travers l’expérience d’une communauté humaine pertinente pour lui.
Nous constatons que l’eucharistie (le nom œcuménique pour la sainte Cène) accessible à tous est un rejet implicite de la discipline ecclésiastique. L’autorité des Écritures est remplacée par l’authenticité des croyants. Cela signifie que la force principale de la mission est réduite. Le monde doit ainsi croire à cause de la communauté (idéale) des croyants, non à cause de l’écoute de la Parole de Dieu. Mais en réalité, il nous faut plutôt reconnaître que le monde ne sera impressionné que par une unité fondée sur les Écritures, et non pas sur des compromis humains ni sur une action conjointe. L’Église démontrera alors qu’elle est construite sur la grâce et qu’elle n’est pas simplement une institution humaine. Tel fut précisément le cas au temps de la Réforme.
1.2.3) Introduction œcuménique à la missiologie←↰⤒🔗
L’IOM cherche à résoudre la polarisation ecclésiastique du 20e siècle (p. 476-477). Les murs de l’Église doivent être abattus afin de s’unir dans l’action sociale pour le bien de l’unité de l’humanité à l’avenir. Toutes les Églises sont bienvenues : les Églises évangéliques, catholique romaine, catholique russe et grecque orthodoxe. Personne n’est exclu.
Nous concluons qu’il s’agit d’un rejet fondamental de la discipline ecclésiastique, puisque nous n’avons pas à juger des sentiments religieux des autres. Si personne n’est exclu, alors la discipline ecclésiastique, elle, est exclue! À l’avenir, le COÉ pourrait organiser un Conseil œcuménique des religions. Cette mission n’affiche aucune identité chrétienne.
1.2.4) Mission transformatrice←↰⤒🔗
Bosch se réjouit du changement en faveur de l’Église locale (p. 378). Mais cela signifie un « événement parmi des gens ». Il n’y a pas d’appel à la repentance ni de proclamation du salut. Il s’oppose avec d’autres à l’extra ecclesiam nulla salus (« hors de l’Église point de salut »). Car Dieu accomplit également son salut dans le monde hors de l’Église.
En outre, l’Église imparfaite est l’objet principal de la Missio Dei (p. 386). Elle doit se repentir avec humilité de ses nombreuses fautes au cours de l’histoire. Semper reformanda constitue, dans ce cas, le jugement contre l’Église, afin qu’elle puisse mieux servir dans un monde changeant. L’exhortation ecclésiastique devient ainsi une accusation portée contre l’Église elle-même!
Nous concluons que la réapparition de la question de l’Église locale n’a pas pour but de protéger la vraie doctrine, mais de promouvoir l’action sociale. L’identité de l’Église s’en trouve appauvrie. La discipline ecclésiastique et les frontières de l’Église semblent entraver la pertinence de l’Église pour le monde. En réalité, tout ceci constitue une adhésion à la pensée du monde : l’Église doit répondre aux attentes du monde.
1.3. La colère de Dieu et la sanctification de la vie chez les œcuméniques←↰⤒🔗
1.3.1) Mission et évangélisation←↰⤒🔗
Le paragraphe 4 de MÉ reconnaît la grande importance de la vie des chrétiens (Ac 2.46-47). La vie de Jésus, caractérisée par la justice, le pardon, la dénonciation du mal et le renoncement à soi, sert de modèle à la vie chrétienne (MÉ, par. 5). La sanctification constitue le ministère de la mission. Le Christ, l’Agneau, doit demeurer l’enjeu principal. L’Église doit prouver sa crédibilité au moyen d’une pauvreté délibérée. Elle doit lire la Bible selon la perspective des pauvres.
Nous constatons que cette conception présente la vie morale davantage comme un instrument fonctionnel de la mission que comme une preuve concrète de reconnaissance envers Dieu. De plus, pourquoi ne pas mentionner la sévérité de certaines des paroles du Christ et son rejet des incrédules comme un élément de ce modèle? L’éthique structurelle semble un sujet plus important que l’éthique personnelle. Pourquoi ne pas exhorter les Églises à tolérer l’hostilité, la manipulation, l’égoïsme (avortement) et l’absence d’amour dans les vies personnelles? Comment l’Église devrait-elle préserver les chrétiens des souillures du monde dans les domaines du mariage, de la famille, du travail/chômage et de l’éducation? Plus important encore, pourquoi les pauvres ne sont-ils pas exhortés à se repentir pour mener une vie sainte, par exemple en renonçant à la haine envers leurs employeurs et les fonctionnaires du gouvernement? Les questions relatives aux problèmes structurels de même que l’opposition aux gouvernements ressemblent davantage au zèle anabaptiste pour la révolution qu’à la patience chrétienne.
1.3.2) San Antonio←↰⤒🔗
Le paragraphe 6 de SA stipule qu’une vie qui n’est pas sainte est punie par Jésus-Christ le Juge. Le nouveau style de vie représente la façon la plus claire et authentique de transmettre l’Évangile et d’en vivre. La dichotomie et la compartimentalisation doivent être remplacées par l’ascétisme et un style de vie simple (SA, par. 19). L’Église doit mettre en œuvre les valeurs d’unité, de réconciliation, de justice, d’égalité, de liberté, d’harmonie, de paix et d’amour (SA, par. 33).
Conclusion finale : Dans l’ensemble, la sanctification de la vie se rapporte davantage ici aux problèmes structurels qu’à l’éthique personnelle. De plus, la force intérieure qui permet d’agir droitement dans les affaires sociales est fortement soulignée. Contrairement à cela, les Écritures enseignent (Ga 5; Ép 4 à 6) que l’Esprit veut renouveler des personnes, qui doivent recommencer chaque jour (Catéchisme de Heidelberg, 43e dimanche). La nouvelle vie doit également être proclamée à l’intérieur des sphères ecclésiastiques et maintenues par un soutien chrétien mutuel et l’exercice de la discipline. Un plaidoyer en faveur d’une éthique chrétienne ne peut porter du fruit qu’à l’intérieur du cadre de la prédication de la grâce de Dieu et de l’appel à la reconnaissance.
2. LA COLÈRE DE DIEU SELON LES PERSPECTIVES ÉVANGÉLIQUES←⤒🔗
2.1. La colère dans la méthodologie et la prédication←↰⤒🔗
Les évangéliques acceptent les Écritures comme la Parole infaillible de Dieu. Nous sommes reconnaissants de cela. Nous faisons également nôtre une grande partie de leur opposition à la théologie du COÉ. Nous nous demandons toutefois si, dans leurs principaux documents et parmi leurs dirigeants influents, la question de la colère de Dieu est traitée correctement.
2.1.1) Le mouvement de croissance de l’Église :
une vision holistique de la mission6
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Le mouvement de la croissance de l’Église de D.A. McGavran cherche à incorporer à la missiologie les sciences humaines et les techniques de communication. Il examine la manière dont les processus de croissance d’Église sont favorisés ou entravés par les activités humaines. Le succès de la mission est défini par la croissance numérique de l’Église. La prédication doit s’accommoder au « besoin ressenti » et essayer autant que possible de travailler avec des « unités homogènes ».
Nous concluons que, dans ce mouvement, la prédication dépend trop de l’auditeur. Puisqu’un Dieu redoutable qui accuse les hommes ne plaît pas à la plupart des oreilles, il ne devrait être aucunement fait mention de la colère de Dieu. Il nous faut répliquer que Dieu ne satisfait pas à tous les besoins ressentis, mais qu’il révèle plutôt la profondeur du besoin réel. La conception américaine optimiste avec sa notion du succès est fondée sur une anthropologie non scripturaire. Nous n’y trouvons rien à propos de la corruption totale de l’homme ni de l’opposition à l’Évangile qui ne vient pas des hommes (Ga 1.11).
2.1.2) La mission incarnée←↰⤒🔗
Le renommé et respectable John Stott a tendance à suivre la missiologie du COÉ à propos de l’incarnation, en particulier dans son exégèse de Jean 20.21. Une Église qui prêche la croix devrait être caractérisée par la croix7. Comme le Christ s’est identifié lui-même au monde, à sa culture et à ses problèmes, et qu’il en a souffert, l’Église doit également participer aux problèmes de ce monde (Ph 2.5-7).
Nous constatons à nouveau ici une exégèse inexacte de Jean 20.21, de même qu’une identification de la souffrance du Christ avec les problèmes du monde. L’Église n’est pas appelée à imiter et répéter le sacrifice unique du Christ, mais à suivre le Christ dans tous les aspects de sa vie.
2.1.3) La communication incarnée de Kraft8 ←↰⤒🔗
Selon Charles Kraft, l’incarnation est le modèle divin de la révélation : limité, imparfait, restreint et qui accepte les cultures humaines (p. 30). Le Christ a eu un impact réel sur ses auditeurs du fait qu’il a utilisé à la perfection les règles de communication (p. 147ss; 173ss).
Nous concluons que, selon Kraft, la révélation est un processus dynamique continuel, où Dieu dépend de la compréhension humaine et où il est restreint aux cultures humaines. Les règles bibliques de Kraft pour une communication efficace ne mentionnent pas un Jésus courroucé, qui peut rejeter les incrédules et proclamer « malheur à toi » aux auditeurs de mauvaise volonté (Mt 11.21).
2.1.4) La colère selon l’Alliance de Lausanne9(AL)←↰⤒🔗
L’Alliance de Lausanne de 1974 constitue la déclaration fondamentale du mouvement évangélique de Lausanne. Elle mentionne la colère de Dieu dans le paragraphe 5. Mais cette dernière se rapporte à l’injustice dans la société humaine, envers l’oppression, etc. Le paragraphe 15 affirme que la venue du Christ est un stimulant pour la mission.
Nous concluons que la culpabilité n’y est pas mentionnée ni le fait que la privation et la misère humaines peuvent être une conséquence de la punition de Dieu. La seconde venue du Christ n’est pas clairement présentée comme un avertissement avisant du jugement final des incrédules.
2.1.5) La colère selon le Manifeste de Manille10 (MM)←↰⤒🔗
Tout comme dans la missiologie œcuménique, et même davantage, le Manifeste de Manille souligne la « responsabilité sociale » de l’Église. La culpabilité concerne l’Église qui a négligé son service aux pauvres. MM reconnaît clairement qu’il n’y a pas de salut sans le Christ. L’apologétique sert de moyen efficace pour la défense de l’Évangile.
Nous perdons de vue le fait que Dieu rejette les incrédules entêtés et ceux qui s’opposent à l’Évangile. L’apologétique signifie la défense rationnelle et intellectuelle de la foi en vue de répondre aux attaques, mais ne consiste pas en la prédication de la colère de Dieu qui accuse les hommes. Pourtant, le jugement et la colère de Dieu sont certainement des réalités qu’il faut accepter par la foi, et non pas démontrer par une argumentation logique.
2.2. La sainteté dans l’Église, en particulier dans l’exercice de la discipline ecclésiastique←↰⤒🔗
Il s’agit là d’une question délicate. La plupart des évangéliques sont déçus des Églises établies à cause du style de vie chrétien qui ne porte pas la marque de sainteté. Nous sommes d’accord avec eux sur ce plan. Ils essaient de trouver leur voie dans des mouvements indépendants, associations et nouvelles communautés ecclésiastiques de gens qui craignent Dieu et qui partagent les mêmes opinions.
Ils préfèrent le réveil à la réforme. À leur conférence, on peut expérimenter l’unité dans la foi et souvent célébrer la sainte Cène sans restriction. Après la conférence, chacun retourne à sa propre « confession » sans aspirer à davantage d’unité ecclésiastique. Bien plutôt, les différences sont perçues comme étant nécessaires aux personnalités et styles de vie variés. Même si elles peuvent rendre l’action missionnaire inefficace, elles ne sont pas comprises comme une séparation pécheresse aux yeux de Dieu. Ces faiblesses laissent peu de place à une discipline ecclésiastique conséquente.
2.2.1) Le rôle de la colère dans la pensée du mouvement de croissance de l’Église←↰⤒🔗
Le « principe de l’unité homogène » du mouvement de croissance de l’Église enseigne l’approche collective de gens de même clan, tribu, classe de population, etc. Cela empêche une aliénation individualiste après la conversion et a pour but de favoriser l’incorporation dans une Église indigène. Cette stratégie fonctionne, selon McGavran. Les puissantes structures et procédures traditionnelles devraient être maintenues dans l’Église, et les dirigeants naturels devraient être ordonnés comme anciens.
Nous concluons que le « principe de l’unité homogène » conduira au « volkskerk » [Église du peuple ou de la nation]. L’on devient membre d’une Église à cause de ses relations avec le clan ou la tribu, non à cause de sa relation avec le Christ. En outre, les dirigeants naturels ne se comporteront pas nécessairement comme d’humbles serviteurs (1 Pi 5.1-5) et la critique des gens ayant des liens familiaux devient souvent impossible. Dans de telles circonstances, la discipline ecclésiastique deviendra inexistante.
2.2.2) L’approche transculturelle de Kraft11 ←↰⤒🔗
L’exercice de la discipline ecclésiastique est étroitement lié à la notion du péché. Pour une période intérimaire, Kraft accepte comme normatif la notion tribale traditionnelle du péché et des valeurs éthiques. Le missionnaire devrait, dans ce premier temps, former les nouveaux membres de l’Église à élever leur style de vie au niveau des valeurs idéales traditionnelles. Après cela viendrait l’étape suivante de la norme divine des valeurs, car Kraft croit que Dieu adapte la norme de vie éthique à la compréhension des hommes.
Nous concluons que la discipline ecclésiastique est impossible pour Kraft. Les valeurs humaines ne peuvent jamais servir de précurseur aux normes divines. Selon les Écritures, la vie chrétienne sainte ne se limite pas au comportement, mais elle consiste en une relation personnelle avec Dieu conduite par l’Esprit. Nous rejetons l’idée de Kraft selon laquelle l’homme serait capable de bien se comporter par le moyen de sa volonté. Kraft a raison de dire que Dieu, dans sa révélation, utilise la compréhension de l’homme, mais il le fait souvent d’une manière antithétique et n’est certainement pas limité à l’horizon des cultures humaines limitées.
2.2.3) L’Alliance de Lausanne←↰⤒🔗
L’Alliance de Lausanne déplore l’infidélité de l’Église. Les hérésies devraient être combattues. Stott supplie les chrétiens de prendre conscience de l’hérésie12. Les convertis devraient se joindre à l’Église. Mais l’Église est davantage perçue comme une communauté qu’une institution avec des caractéristiques bien définies. De plus, la coopération avec d’autres Églises (catholique romaine, luthérienne, etc.) dans la mission est recommandée.
Nous perdons de vue le moyen par lequel l’hérésie devrait être rejetée de l’Église. Être seulement conscients et vigilants ne suffit pas. La discipline n’est ni mentionnée ni employée, malgré Galates 1.6-9. La conception fonctionnelle de l’Église domine la scène. Les différences doctrinales sont relativisées par la coopération avec d’autres Églises. Le droit d’exercer la discipline s’estompe. L’objectif de l’Évangile n’est pas atteint et sa puissance est neutralisée.
2.2.4) Le Manifeste de Manille←↰⤒🔗
Le Manifeste de Manille va dans la même direction. La coopération entre différentes Églises dans la mission est nécessaire et la compétition (rivalité) devrait être évitée. Les catholiques romains, les grecs orthodoxes et même les Églises œcuméniques sont bien accueillis dans l’entreprise missionnaire.
Nous concluons que l’Église n’est pas davantage protégée dans MM. Le jugement de Dieu est banni des affaires de l’Église. Une action missionnaire conjointe atténue l’identité individuelle et détruit la discipline. Plus important encore, le monde ne pourrait-il pas être conscient du manque de solidité et de crédibilité d’une telle unité fonctionnelle des Églises?
2.3. La colère de Dieu et la sanctification de la vie←↰⤒🔗
Les évangéliques désirent sans nul doute vivre des vies pieuses et saintes. Ils réagissent en effet au manque de sainteté et à la corruption qu’ils observent dans la vie de tellement de prétendus chrétiens et Églises. Voilà pourquoi ils insistent sur la conversion personnelle, souvent associée au rejet du baptême des enfants vu comme un automatisme de l’Église. La conversion personnelle devient le point de mire. Cela peut conduire à un style de vie forcé : interdiction de fumer ou de boire. Parfois, bien d’autres comportements caractéristiques seront requis.
2.3.1) La sainteté chez Kraft←↰⤒🔗
Pour Kraft, la sanctification de la vie est le processus dynamique de la conversion : un processus humain naturel qui se développe selon des lois psychologiques du développement de la conscience. La clé d’un changement vers une nouvelle vie se trouve dans les faiblesses et les imperfections de l’ancien mode de vie. Le missionnaire devrait trouver cette clé et, progressivement, introduire des changements dans la pensée religieuse et le comportement.
Nous concluons qu’un processus naturel est différent du fruit de l’Esprit. Kraft est beaucoup trop optimiste à l’égard de la pensée religieuse existante et du style de vie traditionnel. Il utilise l’anthropologie culturelle en vue de montrer les nombreuses formes semblables apparaissant dans la religion, mais il n’en examine pas la signification profonde. Le rejet et l’antithèse ne font pas partie de ses considérations, ce qui n’accorde pas de place à la discipline.
2.3.2) La sanctification selon AL et MM←↰⤒🔗
Plus qu’auparavant, dans l’AL, la sainteté de vie est encouragée comme moyen de témoignage, en paroles et en actes. Selon cette conception, il faudrait mettre un terme au dualisme et promouvoir un style de vie fonctionnel de service et de témoignage. L’Église est envoyée dans le monde également en vue d’une action sociale et politique. Même si ce n’est pas comme tel de l’évangélisation, il s’agit du service au monde, motivé par le grand commandement de l’amour (AL, par. 5).
Le MM met en évidence la sainteté comme condition d’un témoignage digne de confiance. La sainteté est la preuve de l’Évangile. On retrouve encore ici un déplacement vers les problèmes structurels : les femmes, les jeunes, les pauvres, la société, etc. Il est peu fait mention d’une vie de piété personnelle.
Comme conclusion finale sur la colère dans la pensée évangélique, nous y constatons l’absence du jugement de Dieu et de la punition de l’humanité impure et pécheresse. L’appel à une vie sainte est moins motivé par la conscience d’une faiblesse personnelle et d’un penchant vers le péché que par la promotion d’une stratégie efficace pour un témoignage digne de foi dans le monde. Le message de la sanctification semble adressé uniquement à l’Église. Le désir de changer les structures assimile les valeurs chrétiennes aux actions humanitaires. Mais la mission devrait plutôt inciter à une vie personnelle sainte devant Dieu qui, dans sa patience, retient son jugement. L’Église devrait également préserver sa crédibilité, au milieu de structures injustes, en démontrant de la patience jusqu’au jour du Seigneur.
3. NOTRE OPINION←⤒🔗
3.1. La colère de Dieu est une partie essentielle de la prédication missionnaire←↰⤒🔗
3.1.1) Le fait de proclamer la colère13 ←↰⤒🔗
Nous limitant aux données du Nouveau Testament, nous pouvons noter que, dès le début, la proclamation du Christ comportait aussi l’annonce de la colère de Dieu. Jean-Baptiste mentionne la hache, le feu et la paille mise au feu. Jésus poursuit cette prédication : le feu, les vers, l’obscurité, la géhenne. Il est l’Agneau en colère (Ap 6.16). Le jugement est remis entre ses mains. C’est Jésus qui décide de la vie et de la mort. Un jour viendra où se fera la séparation de l’humanité, avec ses conséquences graves. La Bonne Nouvelle est extrêmement sérieuse.
Les apôtres ont suivi les traces de l’enseignement de Jésus. 1 Thessaloniciens 1.9-10 en donne un résumé : se tourner vers le Dieu vivant et vrai, attendre la venue du Christ et être délivré du terrible jugement. La proclamation de la colère faisait constamment partie de la prédication apostolique. L’Évangile n’est pas un don sans obligation. Sans le Christ, il ne reste que la juste vengeance de Dieu. Un avertissement réel est lancé aussi bien aux croyants qu’aux incroyants, puisque le jugement commence avec la maison même de Dieu (1 Pi 4.17-18). Quelle sera alors la fin de ceux qui refusent?
Nous concluons que, dans le Nouveau Testament, la réalité de la colère de Dieu n’est jamais négligée, que ce soit dans le contexte de la prédication aux païens ou de l’édification de l’Église. Au contraire, il s’agit d’une partie essentielle de l’ensemble du message (Jn 3.36).
3.1.2) L’arrière-plan de la colère←↰⤒🔗
La colère de Dieu contredit-elle l’amour de Dieu? La colère n’est-elle pas un élément de l’Ancien Testament qui est renversé par le Nouveau Testament? Dieu ne veut-il pas le salut des hommes?
a. Dieu réagit au fait que les hommes le rejettent
La colère de Dieu est sa réaction en face du refus des hommes de l’honorer comme Dieu et Créateur. Cela débuta au paradis et atteignit son apogée dans le rejet du Christ. Tous sont sous le pouvoir du péché et coupables devant Dieu (Rm 3.9ss; 5.12). Dieu prend le péché au sérieux. Plusieurs problèmes de la missiologie moderne proviennent du fait que l’on nie l’origine divine de l’histoire et la chute d’Adam et Ève au paradis.
b. Dieu ne permet pas que son amour soit bafoué
La forte réaction de Dieu au péché ne peut se comprendre que dans la perspective de son amour. Même si la colère peut sembler opposée à l’amour de Dieu, en réalité, il s’agit d’une authentique expression de l’amour véritable. Il veut se donner lui-même à l’homme dans un amour total, mais l’homme s’est moqué de cet amour. En faisant l’expérience de la colère de Dieu, l’homme est obligé de se rendre compte à quel point l’amour offensé de Dieu est sérieux et profond. On ne se joue pas de Dieu. Il n’est pas un compagnon de jeu soumis aux caprices des hommes. Il est Dieu! Il ne peut se renier lui-même (2 Tm 2.13). Il demeure Dieu, également dans sa juste colère.
Mais tout cela également est une Bonne Nouvelle. Imaginons ce que serait la situation si Dieu passait outre à la désobéissance de l’homme et au programme de révolte de Satan! Le monde serait alors abandonné à un compromis éternel entre le bien et le mal, une lutte sans fin ne parvenant jamais à la justice. Mais Dieu est Dieu. Il n’accorde pas de place à Satan et au mal dans son monde. Il ne permet pas que son amour soit bafoué pour toujours. Il commence un programme global de rédemption et de délivrance, car il ne peut renier son amour pour sa création et son Église. La croix révèle la profondeur de la colère de Dieu du fait que le Christ est mort pour nos péchés. Elle révèle également le sérieux de son intention d’accepter à nouveau l’homme dans son amour.
c. Le Dieu de colère est le Dieu saint
Parce que Dieu est un Dieu saint, il hait tout péché et tout mal. Le péché provoque sa colère qui devient malédiction pour le monde (Rm 1.18ss). L’essence même de sa colère est Dieu lui-même : sa majesté, sa gloire, sa sainteté. Il ne laissera pas sa gloire à un autre dieu (És 42.8). Tous, incluant Satan, devront reconnaître la sainteté de Dieu. Voilà pourquoi Dieu rachète son peuple au moyen de la croix, du jugement et de la grâce. Tout le contraire d’un Évangile bon marché!
3.1.3) L’expression de la colère de Dieu←↰⤒🔗
La colère de Dieu est révélée pour le monde entier. Mentionnons trois points :
- La colère de Dieu envers les religions non chrétiennes (voir l’histoire de l’Ancien Testament et Romains 1). Le péché le plus grave est d’évacuer Dieu et de le remplacer par des produits faits maison. Dieu, alors, abandonne les hommes à eux-mêmes. Ils sont pris dans leurs propres filets.
- La colère de Dieu envers le déclin religieux de son peuple. Si Israël traite Dieu comme un dieu parmi d’autres, Dieu les traite alors comme il traite les autres nations, les abandonnant à leur voie qui mène à la mort.
- La colère de Dieu envers le déclin éthique, aussi bien des nations que de son peuple (Rm 1). Il semble que Dieu permet au péché de s’accroître jusqu’à sa pleine capacité, comme la gangrène (2 Tm 2.17; 3.13).
La réponse 3 du Catéchisme de Heidelberg est tout à fait pertinente au champ de mission. Nous ne connaissons notre misère que par la loi de Dieu. Si la colère de Dieu n’est pas révélée et proclamée, les hommes continueront alors dans leurs mauvaises voies. Le « besoin ressenti » masque le besoin réel. En vérité, la proclamation de la colère révèle le sérieux de son amour. Voilà la Bonne Nouvelle!
3.1.4) Le but de la proclamation de la colère←↰⤒🔗
La prédication de la colère doit être considérée dans la perspective de l’Évangile. Nous pourrions également dire que proclamer la colère est Bonne Nouvelle. Car, en réalité, le fait que Dieu permette à sa colère d’être proclamée donne la possibilité à l’homme de se repentir (voir Jonas à Ninive).
a. Permettre à l’homme de découvrir la profondeur de sa misère
La proclamation de la colère a pour but de sortir l’homme de son illusion (religieuse). En Actes 2.37, les auditeurs ont demandé : « Que ferons-nous? » Cela démontre la gravité de la situation. Le jugement ne vient pas seulement lorsque la colère est prêchée, mais l’homme vit en permanence sous la colère (Jn 3.36). La prédication de la colère révèle le péché; elle démasque l’innocence humaine. Les hommes sont confrontés à la dure réalité de l’amour blessé de Dieu. Le Saint-Esprit les accuse au moyen de la Parole devant le trône de Dieu (Jn 16.8ss).
b. Rechercher la conversion et le salut
La prédication de la colère est un sujet délicat et difficile. Elle ne consiste pas à effrayer et faire paniquer en criant « enfer et damnation ». Elle sera plutôt un appel humble et sincère qui invite les gens à reconnaître leur culpabilité devant le Dieu vivant et saint, Créateur de l’univers. Certes, les auditeurs entrent en « crise », mais dans la perspective de l’Évangile. Ils sont appelés à abandonner leur résistance à l’égard de Dieu et à se repentir, car seul ce vrai Dieu promet le salut.
c. Démontrer la profondeur de l’Évangile
Dans sa colère, Dieu révèle à quel point il prend l’homme au sérieux. S’il était indifférent, pourquoi aurait-il envoyé son Fils bien-aimé mourir pour des pécheurs? Aucune autre religion n’enseigne une condamnation et un jugement aussi forts. Cela prouve que Dieu est Dieu, le Dieu vivant, qui se prend lui-même au sérieux et qui prend l’homme au sérieux. Dieu révèle à l’homme les conséquences ultimes de son comportement. Cela implique également la réalité de l’amour de Dieu et son désir de voir répondre un amour humain.
Sans la colère, la Bonne Nouvelle de l’Évangile devient bon marché et superficielle. En réalité, nous avons ici une conception tout à fait unique de Dieu, de l’homme et de l’avenir. La croix n’est pas simplement le sommet de l’amour de Dieu, mais également le centre de sa colère. Le chemin vers Dieu ne peut à nouveau être accessible que par le jugement et la grâce. Il n’y a pas d’autre amour que l’amour sérieux, exigeant la réponse d’un amour sérieux.
d. Prêcher l’Évangile, coloré par la gravité du jugement
Nous concluons que la proclamation de la colère n’entre pas en contradiction avec l’Évangile, mais en est une partie essentielle. Par elle, le sérieux de l’Évangile est mis en lumière et la véritable profondeur de l’amour de Dieu est révélée. De cette manière, l’homme est ramené au Dieu vivant. La colère, la punition, Golgotha et le jugement dernier font pleinement partie de l’Évangile du salut. Un prédicateur de l’Évangile qui ne proclame pas la colère de Dieu agit comme un pompier qui se présente alors qu’il n’y a pas d’alerte de feu.
3.1.5) Le résultat de la proclamation de la colère←↰⤒🔗
Le résultat de la prédication de la colère consiste en une séparation de l’humanité entre croyants et incroyants. Dieu accomplit de cette manière son élection et sa réprobation (1 Th 5.9). Nous n’aborderons toutefois pas cet aspect maintenant.
a. Un endurcissement dans l’incrédulité
Le Nouveau Testament indique souvent que les hommes rejettent le Christ et ses apôtres. Ils rejettent le jugement de Dieu porté contre le Christ à la croix. Ils s’endurcissent eux-mêmes dans leur incrédulité et recevront un jugement d’autant plus sévère (Mt 11.20-24).
b. Le salut par la foi et la conversion
Le Nouveau Testament révèle également la conversion comme résultat de cette prédication. Ceux qui se repentent sont rachetés par la foi en Christ. Ils rentrent à la « maison », coram Deo, devant le trône du Dieu vivant, comme citoyens de son Royaume.
c. La consolation et l’espérance
La colère enseigne également qu’à la fin la justice sera rétablie dans un monde injuste. Une justice non pour les pauvres comme tels, mais pour l’Église du Christ foulée aux pieds et opprimée (voir Ap; Confession des Pays-Bas, art. 37). Les adversaires et ceux qui enseignent l’hérésie seront réduits au silence. Il n’est donc pas surprenant que l’eschatologie et la missiologie aillent de pair. L’Église espère ainsi ardemment le jour du Christ, qui viendra pour juger les vivants et les morts, incluant ses ennemis et les miens (Catéchisme de Heidelberg, réponse 52). L’Église ne sera jamais heureuse de la perdition des hommes, mais elle se réjouira véritablement de la victoire de la justice et de l’amour de Dieu.
d. La prédominance de la perspective de l’amour
Nous concluons que la proclamation de la colère devrait être intégrée à la perspective de l’amour missionnaire de Dieu. De la sorte, Dieu révèle à l’homme sa culpabilité et le démasque comme un fugitif qui se cache loin de Dieu. Le sérieux et l’amour contraignent ainsi l’homme à retourner à Dieu. Il doit s’approcher du trône de Dieu, que cela lui plaise ou non. La prédication missionnaire est dangereuse pour l’auditeur. Il ne peut se tenir devant son Créateur qu’en tombant à genoux devant la croix de la grâce. C’est avec le dessein ultime de l’ensemble du message de Dieu que les missionnaires poursuivent leur travail, gardant bien en vue le salut.
3.2. La colère de Dieu dans l’édification de la vie de l’Église←↰⤒🔗
La colère de Dieu se rapporte également au processus d’édification de son Église, en particulier dans l’exercice de la discipline ecclésiastique14.
3.2.1) La discipline ecclésiastique dans le Nouveau Testament←↰⤒🔗
L’Église de Jérusalem, dès ses premiers jours, a dû s’occuper de discipline ecclésiastique, avec le cas d’Ananias et Saphira (Ac 5.1-12). Cela semble avoir interrompu le développement missionnaire, mais l’occasion amorça une nouvelle vague de conversions ainsi que l’expansion de l’Église (Ac 5.14). Dieu empêcha son Église de devenir une association religieuse. Il est en fait dangereux de devenir membre de la maison de Dieu. La discipline conduit à passer au tamis, faire le tri, séparer, mais aussi à gagner des hommes sérieux pour le Christ. Pour protéger les frontières entre l’Église et le monde, entre la vraie religion et les religions non chrétiennes, entre la vraie Église et la fausse, l’Église ne peut pas se passer de discipline.
Les lettres du Nouveau Testament présentent la même image. La discipline se retrouve dans les Églises des deuxième et troisième générations. Le premier amour a maintenant diminué. L’Église est considérée comme étant une chose normale. Les enfants et les petits-enfants n’ont pas fait l’expérience du combat qu’il faut mener pour rompre avec la religion et le comportement traditionnels, comme l’ont fait leurs parents. Dans cette situation, l’Église est appelée à mettre en évidence le sérieux de l’Évangile en instruisant la jeunesse et en exerçant la discipline.
3.2.2) L’exercice de la discipline est une preuve d’amour←↰⤒🔗
La discipline n’a pas pour but ultime d’expulser ou d’excommunier quelqu’un de l’Église, mais plutôt de sauver un membre de l’Église. Il s’agit du combat contre le mal et contre la puissance du péché et de Satan dans la vie d’un pécheur qui s’obstine dans son péché, combat mené en vue de le sauver. Loin d’être une froide réglementation, la discipline mettra en action l’amour chaleureux de Dieu, au moyen de visites à domicile et d’intercessions dans la prière. La discipline signifie que le Christ nous tient tout près de lui et que nous ressentons la puissance de sa grâce. Toute l’Église locale y est impliquée. Celui qui est discipliné sentira la main forte du Berger qui veut rassembler tout son troupeau avec son bâton et sa houlette (Ps 23). Celui qui refuse la discipline refuse l’amour et les soins de Dieu.
3.2.3) Pour la sainteté de l’Église←↰⤒🔗
La discipline ecclésiastique est nécessaire à toute l’Église locale. Le conseil de l’Église devrait annoncer de façon officielle et publique que le péché n’est pas toléré dans l’Église. Cela contribuera à garder dans la bonne voie les croyants vacillants. Cela rappellera aussi à la communauté non chrétienne et au gouvernement que l’Église expulse le péché du milieu d’elle. La discipline doit empêcher l’Église du Christ d’être compromise. La discipline est patiente, mais cette patience a ses limites. L’Église n’est pas un club religieux, mais la maison de Dieu qui déteste le mal et le péché. La discipline joue un rôle missionnaire très important.
3.2.4) La procédure de la discipline←↰⤒🔗
La discipline maintient l’Église en santé. Elle est une preuve concrète de la vie par la grâce dans une société malade. La discipline a besoin d’être enseignée, dans les sermons, le catéchisme, les visites à domicile, ainsi que par la confession et les formulaires liturgiques d’excommunication et de réadmission. L’Église doit démontrer de façon très concrète comment elle lutte contre le péché. La mission devrait préparer l’Église à cette tâche sérieuse. Nous mentionnons quelques points importants :
- Les pasteurs, anciens et diacres devraient être des pères spirituels, des bergers, et non des bureaucrates, des conducteurs d’Église ou des dirigeants mondains.
- C’est le conseil de l’Église qui décide qui peut être admis aux sacrements, et non le pasteur, l’Église locale, la famille ou le gouvernement.
- Toute crainte humaine et tout obstacle culturel à la discipline mutuelle (Ac 20.28) devraient être analysés et remplacés par la hardiesse biblique (Ac 4.30-31).
- La visite pastorale à domicile liée à la prédication pratique doit encourager les chrétiens dans leur lutte contre le péché.
- Des ententes ecclésiastiques concernant les procédures de discipline, d’excommunication et de réadmission sont indispensables.
Le gouvernement de l’Église doit viser à protéger les sacrements et l’exercice de la discipline ecclésiastique. C’est bien plus important que la question des délégués, des commissions, des bâtiments et des bureaux, etc. L’amour brûlant qui vient du cœur de Dieu se manifeste par l’exercice local de la discipline ecclésiastique. Voilà le lieu où Dieu habite et où il accorde sa bénédiction.
3.2.5) Les dangers de l’exercice de la discipline ecclésiastique←↰⤒🔗
La mise en œuvre et l’exercice de la discipline ecclésiastique nécessitent la hardiesse chrétienne. Les jeunes Églises doivent souvent lutter contre les sentiments traditionnels. L’Église doit prier pour avoir la sagesse de structurer l’amour de Dieu dans des formes adéquates. Nous adressons une mise en garde contre certains dangers :
a. La tiédeur affaiblit la discipline
La tiédeur apparaîtra avec la deuxième et la troisième génération de chrétiens. Les usages chrétiens seront acceptés sans en connaître la signification. La motivation pour examiner et, si nécessaire, rejeter de nouvelles influences fera défaut (voir Ap 2 et 3).
La tendance moderne à un christianisme pratique et œcuménique réduit souvent les doctrines à des questions d’ordre intellectuel et cognitif. L’Église locale perdra alors sa propre identité.
Au nom de la stabilité politique et des sentiments nationalistes, les pressions du gouvernement peuvent induire l’Église à une plus grande tolérance aux participations dans des cérémonies civiles ou (semi-) religieuses, ou même au soutien d’autres religions.
Le monde social et économique en changement exerce son influence matérialiste et ne laisse souvent pas assez de temps pour les affaires de l’Église. L’implication financière directe de conseils d’Église ou de pasteurs, anciens et diacres dans des projets de développement peut grandement faire échouer l’exercice de la discipline.
Nous concluons que l’affaiblissement de la discipline ecclésiastique causée par la tiédeur réduira l’Église à un club religieux.
b. Le légalisme pétrifie la discipline ecclésiastique
Il arrive également que la discipline soit maintenue, mais comme un moyen rigide d’écarter des gens qui pensent différemment. Ce légalisme est également synonyme de paganisme dans l’Église. Avec une exactitude juridique, on contrôle et vérifie par exemple les conventions vestimentaires, les usages et les pratiques ecclésiastiques, afin d’excommunier le « pécheur » sans pardon.
L’intérêt de la famille, du clan ou de la tribu peut aussi influencer la discipline. Il arrive qu’un ancien incompétent soit choisi pour représenter un groupe particulier plutôt que pour être le berger de tout le troupeau. Il aura facilement la tentation des préjugés. Le tribalisme et l’ethnocentrisme diminuent l’étendue de l’amour de Dieu.
De même, l’exercice légaliste de la discipline inclut souvent l’obligation de posséder ou d’obtenir quelque chose de particulier : une histoire de conversion personnelle, le parler en langues, des guérisons, des rêves, des activités spéciales d’évangélisation ou de grands sacrifices financiers. Cela crée de nouveaux groupes d’élite qui, par leur mot de passe (ou « schibboleth »), rejettent d’autres chrétiens (par exemple : des charismatiques et des « Églises indépendantes »).
Nous concluons que le légalisme dans la discipline ecclésiastique pétrifie l’Église et la rend sectaire.
3.2.6) La vocation de la mission et de l’Église nationale←↰⤒🔗
Il est nécessaire, plus encore aujourd’hui, que l’Église maintienne et exerce la discipline ecclésiastique. Plusieurs Églises dans le monde provoquent la colère de Dieu. D’une part, les frontières de l’Église sont abolies par l’œcuménisme et la critique biblique, d’autre part, le concept de l’Église est progressivement remplacé par les structures des écoles, des mouvements et des sectes. La grandeur de l’amour de Dieu n’est plus approfondie ni expérimentée. La discipline devient un moyen d’auto-destruction.
La mission et les Églises réformées se doivent d’entretenir un amour fraternel conséquent par l’exercice de la discipline. Alors seulement, le Saint-Esprit protégera par la grâce la vie de l’Église, comme cette cité où se rencontrent la paix, la justice et la vérité (Ps 85; 122 [122.5!]; 132.7; 1 Co 13.5).
3.3. La colère de Dieu et la sainteté de son peuple←↰⤒🔗
Les Écritures révèlent que Dieu fulmine souvent contre les hommes qui ne marchent pas dans les voies de la sainteté, en particulier contre ceux de son peuple. L’Église est exhortée à vivre une vie sainte afin de ne pas perdre l’héritage du Royaume (Hé 12.14). Quel est l’impact missionnaire du style de vie de l’Église?
3.3.1) Le caractère de la sainteté←↰⤒🔗
a. Un don de Dieu
Tout comme la justification, la sainteté est un don de Dieu en Christ (1 Co 1.30). La principale condition est une relation avec le Christ par une foi vivante, d’où, par conséquent, une relation avec les croyants dans l’Église. C’est ainsi que le Saint-Esprit produit les fruits de la croix. Nous rejetons donc le perfectionnisme et la sainteté qui se manifeste par l’activisme, mais également l’espoir d’un succès automatique que nous garantirait l’application des règles des sciences humaines. Le péché ne sera vaincu que par l’Esprit du Christ.
b. Un commandement adressé aux croyants
Le commandement divin ordonnant la sanctification est un appel à refléter le Christ dans la vie personnelle et ecclésiastique. Le Dieu saint ne tolère pas le péché et l’absence de sainteté dans sa maison. L’Épouse du Christ doit refléter sa sainteté et se garder pure en vue des noces.
c. Sa signification
La sanctification ne signifie pas une vie sans péché, mais une vie en lutte contre le péché, un acte délibéré de séparation d’avec des pratiques « mondaines », que ce soit dans l’adoration, le style de vie ou la doctrine. Elle signifie une vie consacrée à Dieu, qui met sa confiance entière en lui. La plupart des religions limitent la sanctification au domaine religieux. La vie chrétienne inclut tous les aspects de la vie. Elle ne consiste pas en la séparation du sacré et du profane, mais en la séparation de la foi et de l’incrédulité, de l’Église et du monde.
3.3.2) La colère de Dieu sur le péché←↰⤒🔗
a. Le caractère de la colère
Comme il a déjà été mentionné, la colère n’est pas le contraire de l’amour de Dieu, mais plutôt la preuve de son refus du péché. Dieu prépare le nouveau ciel et la nouvelle terre, où lui seul sera honoré. Voilà pourquoi Dieu fulmine déjà dans ce monde-ci, en particulier contre les religions (Rm 1). Si Dieu abandonne les hommes à leur religion et à leur style de vie, cela ne peut que les conduire à la mort. Ces principaux facteurs dans la missiologie réformée excluent le relativisme et l’inclusivisme.
b. La fonction de la colère
Conduire au salut
Une vie qui n’est pas sainte crée des adorateurs d’idoles (Ép 5:3ss), qui n’entreront pas dans le Royaume de Dieu. La mise en garde contre l’absence de sainteté ouvre la voie au salut. Une Église sainte sera un avertissement et un signe dans un monde malade et souillé. Il existe un autre choix de vie, mais uniquement par le sang du Christ et par l’Esprit.
Demeurer attachés à la grâce
Certains chrétiens croient que le baptême est un billet d’entrée pour le ciel. Ils négligent la sainteté et, malheureusement trop souvent, gardent leur ancien style de vie. Ils ne vivent pas par la grâce. L’Église et la mission doivent débattre de sujets éthiques durant leurs réunions afin de motiver les chrétiens à la sanctification. De plus, les sermons doivent encourager à la sainteté, non pas d’une manière légaliste, mais comme étant un don de la grâce et une Bonne Nouvelle. Les lois et les prescriptions de Dieu délivrent son peuple de l’esclavage du péché. Les commandements de Dieu procurent au croyant une véritable liberté et le gardent attaché à la grâce.
Persévérer
Le rejet de l’Évangile et l’oppression de l’Église peuvent produire des sentiments de colère chez les croyants. Ils ont tendance à devenir les juges du monde. Dieu demande la patience et la prière, non la vengeance (Rm 12.19), car c’est lui qui, en son temps, tirera vengeance. L’Église peut persévérer dans un style de vie chrétien, parce qu’elle a l’espérance de la vie, contrairement au style de vie païen qui cache la crainte de la mort (1 Co 15.34ss). Une vie sainte portera des fruits, maintenant et à l’avenir.
Remporter la victoire pour le Christ
Au moyen de la sainteté de l’Église, Dieu veut démontrer au monde son refus d’une vie où la sainteté est absente. Si l’Église ne manifeste pas la sainteté, qui sur la terre le fera? Elle est l’habitation de Dieu, par la Parole et par l’Esprit. Le monde doit parvenir à la conviction que Dieu est dans l’Église (1 Co 14.25). Le bon comportement de l’Église fera réfléchir ceux du dehors et les amènera à la repentance afin d’être sauvés au jour du jugement (1 Pi. 2.12).
Le Nouveau Testament atteste que la sainteté personnelle est un moyen essentiel pour accomplir la mission15. Sans elle, les activités missionnaires sont paralysées. L’Église devrait être la première à confesser la gravité de la colère de Dieu. Voilà pourquoi une vie sainte est aussi une vie missionnaire. Elle attire les gens du dehors à venir et à jouir du salut en Christ. Structurer, organiser et maintenir le style de vie chrétien est une vocation missionnaire importante, en vue de gagner des gens pour le Christ.
Mettre en garde les incrédules avec un sérieux extrême
Dieu jugera aussi les non-croyants à cause de leur comportement impie. L’Église, par sa propre sainteté, doit leur proclamer la colère. Elle sera ainsi à la fois une démonstration que la vraie joie de vivre tire son origine de l’amour de Dieu et un avertissement extrêmement sérieux.
Rendre gloire à la justice de Dieu
La colère de Dieu révèle également que Dieu est Dieu et demeure Dieu. Toute opposition à sa justice sera détruite. À la fin, tous confesseront qu’il est un Dieu saint. La colère est le juste jugement d’un Dieu glorieux.
3.3.3) Les conséquences de la sainteté pour l’Église et la mission←↰⤒🔗
La sainteté entraîne des conséquences. Les incroyants se demanderont pourquoi les chrétiens rejettent leur façon de vivre (1 Pi. 4:4).
a. L’appel à un plus grand amour
Si l’Église reconnaît la signification de la sainteté, elle accroîtra ses efforts. Les Écritures demandent une croissance dans la foi, un plus grand zèle, un ministère d’amour accru et une sainteté approfondie. Nous grandirons en Christ dans l’unité avec les saints et dans la solidité de la doctrine, afin que nous soyons capables de comprendre avec tous les saints la profondeur de l’amour du Christ (Ép 3.18; 4.16ss).
b. L’élargissement du fossé entre l’Église et le monde
Tandis que l’Église doit vivre dans une plus grande sainteté, le monde des incroyants s’enfoncera de plus en plus dans le péché (Ap 22.11). Le fossé entre l’Église et le monde ira en s’élargissant. Cela ne découragera pas la mission, mais permettra d’éviter l’étonnement. L’absence de sainteté du monde peut s’amplifier de façon telle que l’Église doive cesser son témoignage dans un silence rempli de dignité. L’Église ne devrait jamais oublier que secouer la poussière de ses pieds est également une action missionnaire (Mt 10.14).
c. La progression de la prédication
Il viendra un temps où, à cause de l’incrédulité, certaines personnes et certains domaines seront hors de portée de l’action missionnaire. L’Écriture dit que Dieu envoie aux hommes une puissance d’égarement qui les amène à croire au mensonge (2 Th 2.11; 2 Tm 4.3-4). Ils sont incapables d’obéir à Dieu. La prédication provoque la résistance, le refus et l’endurcissement des cœurs. L’Église ne peut « vendre le message à n’importe quel prix ». Elle doit également accepter humblement l’œuvre divine de réprobation. Ce n’est pas nous, mais Dieu qui crée l’Église, où et quand il lui plaît. Même s’il est décevant de constater que tous ne se repentent pas au moyen de nos efforts missionnaires, l’Église doit quand même accepter et reconnaître que le fossé se creuse entre l’Église et le monde.
Elle dirigera alors son attention vers d’autres gens et d’autres régions. La prédication doit se poursuivre. Certaines semences ne germeront pas. Mais la proclamation n’est jamais en vain. La Parole de Dieu ne retourne jamais à lui sans avoir porté de fruits (És 55.11). Plusieurs auront à rendre compte de leur rejet de la proclamation du Christ. Puisse le Seigneur avoir pitié d’eux…
3.3.4) Conclusion←↰⤒🔗
L’Église et la mission doivent tenir compte de ce processus. Dieu peut enlever les lampes de leur place et il le fait vraiment! Il peut abandonner à leur infidélité des Églises établies. Les vrais chrétiens devraient alors se demander s’ils peuvent rester membres de telles Églises et pendant combien de temps. Par ailleurs, les évangéliques pieux et zélés devraient également réfléchir à leur indifférence ecclésiastique qui peut entraîner la séparation de vrais chrétiens.
Nous louons Dieu pour son œuvre à travers le réveil, le piétisme et le mouvement évangélique, mais les Écritures enseignent que la plus solide motivation à la mission est encore la réforme. Si l’on découvre la vie par la grâce, il y aura place pour la repentance, de même que pour l’implantation et le développement d’Églises.
La mission réformée a devant elle une tâche énorme. Elle se référera à l’œuvre de Dieu accomplie durant les époques précédentes. Elle sera également consciente du fait que le fossé entre l’Église et le monde est souvent masqué par des Églises et des institutions chrétiennes. Elle les appellera alors à la véritable unité ecclésiastique dans la foi et la vérité et les exhortera à revenir au Dieu vivant et vrai ainsi qu’à sa Parole. La séparation des vrais croyants dispersés dans différentes Églises est un péché qui fait obstacle à la mission. Mais le maintien d’une unité non biblique fait taire la Parole de Dieu et détruit la mission.
4. PERSPECTIVES←⤒🔗
L’Évangile du Christ ouvre de nouvelles perspectives. Il nous protégera du découragement et du défaitisme en cette fin du 20e siècle. Il ne fermera pas nos yeux au péché et à la colère. Les principes de l’humanisme et du siècle des Lumières deviennent de plus en plus une réalité concrète. Les masques des hommes finissent par tomber. L’homme moderne, y compris celui qui vit dans les pays du tiers monde en processus d’urbanisation et aux villes surpeuplées, n’a plus besoin de Dieu ni du Christ.
Et pourtant, l’épreuve, la souffrance et les soucis du monde demeurent. La paix mondiale est menacée. Même si nous vivons dans l’abondance, le problème de la famine n’est pas résolu pour autant. Le sida est une maladie terrifiante. Les religions non chrétiennes remplissent le vide laissé par un christianisme en constant recul.
Ces expressions de la colère ne viennent-elles pas secouer l’humanité de sa torpeur? Et comment la « spiritualité » œcuménique ou évangélique pourrait-elle venir en aide?
Alors que le fossé s’élargit, la tâche, elle, demeure. La mission n’a jamais eu honte de ne pas être couronnée de succès. Mais elle ne s’accommodera pas non plus au message du « besoin ressenti » humain ou de la mécompréhension humaine. Dans sa méthodologie et dans sa stratégie, la mission continuera à faire la distinction entre ne pas pouvoir entendre et ne pas vouloir entendre.
L’Église doit transmettre son message clairement; elle doit également s’assurer s’il est bien compris et accepté. Elle doit examiner les gens pour vérifier s’ils seront admis à la profession de foi, au baptême et à la sainte Cène. La mission ne consiste pas uniquement à semer, mais aussi à arroser, à prendre soin, à bêcher, à récolter et à ne pas récolter. Tout vient au moment prévu par Dieu. Nous n’aurons pas d’Église parfaite sur terre. Mais, aussi bien dans la doctrine que dans la vie, nous devons être une Église sainte pour le Dieu vivant.
L’Église doit persévérer dans cette œuvre missionnaire. Toutes les Églises dans le monde sont requises pour cette tâche. Je suggère donc que la Conférence internationale des Églises réformées (International Conference of Reformed Churches, ICRC) nomme un comité qui organisera une sorte de Conseil international missionnaire. Au moyen de ce conseil, les forces, les dons, les moyens et les expériences des différentes parties du monde pourraient être organisés afin de stimuler et de coordonner des activités missionnaires nationales et internationales. Nous pouvons alors souhaiter beaucoup d’encouragement, de sagesse et de discernement venant des uns et des autres, et nous poursuivrons le travail jusqu’à ce que le Christ revienne pour juger les vivants et les morts. Il sera alors révélé que l’entreprise missionnaire, fondée sur l’Écriture, n’aura pas été en vain; elle aura préparé le monde à rencontrer le Christ.
Ce jour-là, le Christ embrassera son Épouse devenue pure. Quelle grâce merveilleuse lui sera alors accordée d’hériter le Royaume, en dépit de ses péchés passés! Les incrédules seront confrontés aux conséquences de leur incrédulité. Il ne leur sera pas permis d’entrer dans le Royaume, car il n’y aura de place que pour ceux qui auront été sanctifiés en Christ (Ap 21.17).
Voilà pourquoi, avec les mots de Paul à Timothée, nous pouvons nous encourager les uns les autres, dans une parfaite confiance en Dieu :
« Je t’adjure, devant Dieu et devant Jésus-Christ qui doit juger les vivants et les morts, et au nom de son avènement et de son royaume, prêche la parole, insiste en toute occasion, favorable ou non, convaincs, reprends, exhorte, avec toute patience et en instruisant » (2 Tm 4.1-2).
Notes
1. Joose, L. J., « Kerkgroei : een menselijke mogelijkheid in elke cultuur? » Dans : Het Zondebesef in de moderne missiologie, serie : Missionnaire thema’s, GMO, Kampen, 1987.
2. Dans WCC Mission Series, no 4, Genève, 1983. Nous avons utilisé la traduction néerlandaise dans : Allerwegen, vol. 14, no 3, 1983.
3. Publié dans International Review of Mission, vol. LXXVIII, no 311/311, juillet/octobre 1989.
4. Verstraelen, F.J., éd., Oecumenische Inleiding in de missiologie : Teksten en konteksten van het wereldchristendom, Kampen, 1988. C’est le nouveau manuel missionnaire, utilisé dans la plupart des universités théologiques aux Pays-Bas. Il a été écrit par des auteurs catholiques romains et réformés (Nederlands Hervormde et Église réformée synodale). Il s’annonce comme la norme de la mission (œcuménique) des années à venir.
5. Bosch, D.J., Transforming Mission : Paradigm Shifts in Theology of Mission, New York, 1991. Ce livre est mondialement reconnu comme l’autorité en matière d’orientation missionnaire.
6. McGavran, D. A., Understanding Church Growth, Grand Rapids, 1985, entièrement révisé, réimprimé en 1985. Du même auteur, Effective Evangelism : A Theological Mandate, New Jersey, 1988.
7. Stott, J. R., An explanation of the Lausanne Covenant. J’ai utilisé la traduction allemande dans : Lausanne geht weiter, Stuttgart, 1980 (abr. Weiter). Du même auteur, Christian Mission in the Modern World. J’ai utilisé la traduction néerlandaise : Zending in de moderne wereld, Goes, 1978.
8. Kraft, Ch. H., Christianity in Culture : A Study in Dynamic Biblical Theologizing in Cross-cultural Perspective, New York, 1981.
9. Lausanne Covenant, éd. J. R. Stott dans : The Lausanne Covenant : An Exposition and commentary, Minneapolis, 1975. J’ai utilisé une traduction néerlandaise dans : W.J. Bouw, Evangelisatie : Wat verstaan we er onder? Kampen, 1981.
10. Manila Manifesto, A. Nichols éd. Dans : The Whole Gospel for the Whole World : Story of Lausanne II Congress on World Evangelization, Manila, 1989, Singapore, 1989.
11. Kraft, Christianity in Culture, p. 245-253.
12. Stott, J. R., Lausanne geht weiter, p. 184.
13. Floor, L., Het gericht van God volgens het Nieuwe Testament, Amsterdam, 1979.
14. Nous acceptons la mise en garde de J.H. Bavinck dans son Introduction to Missiology, p. 185 (traduction néerlandaise), selon laquelle la discipline ecclésiastique ne devrait pas précéder la conscience et la compréhension du péché chez les membres de l’Église. L’instruction et la patience sont ici requises. Mais cet avertissement ne devrait pas être compris comme demandant l’abolition de la discipline.
15. Van Swiggchem, D., Het missionair karakter van de christelijke gemeente, Kampen, 1955, p. 106-108.