15. Le lien entre ancienne et nouvelle alliance
15. Le lien entre ancienne et nouvelle alliance
- Le Nouveau Testament : les promesses accomplies
- Les références à l’Ancien Testament
- Ancien et Nouveau : une question de moins et de plus
- Ancien et Nouveau : des ombres aux réalités
Certains chrétiens déclarent que le terme alliance n’est pratiquement pas mentionné dans le Nouveau Testament et que, par conséquent, la notion a en fait perdu toute pertinence pour l’Église du Nouveau Testament. Ils conçoivent l’alliance comme une structure physique appartenant à l’ancien Israël, mais qui désormais, depuis l’effusion du Saint-Esprit, a perdu son importance. Si elle est encore en fonction, elle ne l’est que de manière marginale. Certains citent des chiffres et des pourcentages pour prouver que l’alliance ne joue pas un grand rôle dans le Nouveau Testament.
Leur raisonnement est le suivant. Sous l’ancienne alliance, on naissait dans l’alliance, et par conséquent on recevait immédiatement le signe de cette alliance en la circoncision. Mais dans le Nouveau Testament, nous dit-on, les choses sont différentes. Désormais, pour faire partie du peuple de Dieu, il faut naître de nouveau. Ce n’est qu’alors que l’on peut recevoir le signe. Il s’agit désormais d’une question spirituelle. Il n’est pas surprenant qu’avec ce type de raisonnement le baptême des enfants ne puisse être maintenu. Je reviendrai sur la question du baptême des enfants dans un chapitre subséquent. Pour le moment, je veux traiter du lien entre l’ancienne et la nouvelle alliance.
Il est important de bien comprendre ce lien. Pouvons-nous encore parler en termes allianciels lorsque nous cherchons à comprendre l’enseignement du Nouveau Testament et à l’appliquer à notre vie? Si oui, de quelle manière?
1. Le Nouveau Testament : les promesses accomplies⤒🔗
Il nous faut commencer par remarquer que dans le Nouveau Testament la notion d’une alliance est présente dès le tout début, non comme pensée après coup ou idée secondaire, mais comme révélation intégrale de Dieu. Lorsque nous lisons Matthieu 1, nous trouvons la « généalogie de Jésus-Christ » qui commence par Abraham et va jusqu’à Joseph en passant par David. La naissance du Christ est présentée par Matthieu comme l’accomplissement de la promesse alliancielle faite à Abraham et à David.
Lorsque la Bible nous donne une généalogie, cette dernière revêt une signification spéciale. L’objectif en est de montrer que Dieu œuvre dans la lignée des générations fidèles de l’alliance. La vision biblique de l’histoire n’est pas que nous sommes prisonniers d’un cercle sans fin et sans espoir, mais que nous avançons en suivant les lignes que Dieu a déterminées. Dieu marche toujours et chaque génération peut marcher avec lui. Nous progressons donc tous jusqu’à ce que le dessein de Dieu s’accomplisse et que son but soit atteint.
Par sa généalogie, Matthieu fait bien comprendre que la naissance de Jésus-Christ n’est pas un événement soudain, sans lien avec l’histoire du monde, mais qu’elle est le résultat de siècles d’histoire alliancielle. La naissance du Christ avait été annoncée et par conséquent pouvait être attendue. Lorsque Matthieu décrit la naissance de notre Seigneur, il fait référence à la prophétie d’Ésaïe : « la vierge sera enceinte, elle enfantera un fils, et on lui donnera le nom d’Emmanuel, ce qui signifie Dieu avec nous » (Mt 1.22). Il est intéressant de voir à quelle fréquence Matthieu utilise l’expression selon laquelle quelque chose arriva pour accomplir l’Ancien Testament. Le Nouveau est clairement l’accomplissement de l’Ancien. Il y a continuité et progression dans l’histoire de l’alliance de Dieu.
Nous trouvons aussi une généalogie du Seigneur Jésus dans Luc 3, et elle y établit un lien direct qui remonte jusqu’à Adam. La question de l’alliance particulière avec Israël commence avec Abraham; le but de Matthieu est de convaincre les Juifs et il commence de ce fait par le père d’Israël, Abraham. Le cadre de Luc est plus large et plus profond. Écrivant à Théophile, le Romain cosmopolite, il explique que la naissance et le ministère du Christ doivent être reliés à Adam, le premier homme. L’œuvre d’alliance de Dieu débute bien avant qu’Israël ne soit une nation. Cela met en évidence le fait que Jésus est le Sauveur du monde et de toute l’humanité.
Il est intéressant de noter que dans le livre des Chroniques, qui décrit l’histoire d’Israël du point de vue des prêtres comme celle de la nation sainte de Dieu, le point de départ ne soit pas non plus David, mais Adam (1 Ch 1.1). Les Israélites savaient que l’alliance de Dieu avec eux, et que ses demandes à leur égard, découlaient de la même alliance que Dieu conclut avec l’homme (Adam) dans le paradis. Nous notons la continuité. La généalogie montre la ligne de l’œuvre rédemptrice de Dieu : d’Adam à Abraham, en passant par David et Israël, jusqu’à Jésus-Christ! Le Nouveau Testament n’inaugure pas une ère radicalement différente. Dieu n’œuvre pas de façon atomisée ou fragmentée. Toute l’histoire est une unité. Le Nouveau Testament proclame déjà dans ses premières pages que désormais en Christ les anciennes lignées de l’alliance continuent.
2. Les références à l’Ancien Testament←⤒🔗
Plus haut, j’ai fait référence au chant de Zacharie, qui présente les événements entourant la naissance de Jésus vue comme l’accomplissement des promesses alliancielles de Dieu : « [le Seigneur] se souvient de sa sainte alliance, conformément au serment qu’il avait fait à Abraham, notre ancêtre » (Lc 1.72-73).
Les évangélistes citent constamment l’Ancien Testament, car le ministère du Seigneur Jésus ne peut être compris sans cet éclairage. L’Évangile fut révélé dans l’Ancien Testament, lorsque Dieu fit connaître son alliance, et il se poursuit dans le Nouveau Testament, lorsque Dieu confirme son alliance dans le sang de son Fils. L’apôtre Paul parle par conséquent de l’« Évangile qui avait été promis auparavant de la part de Dieu par ses prophètes dans les saintes Écritures; il concerne son Fils » (Rm 1.2-3).
Les apôtres ne pouvaient prêcher sans faire référence à l’Ancien Testament. Paul dit aux Juifs d’Antioche de Pisidie : « Et nous, nous vous annonçons cette bonne nouvelle [l’Évangile] que la promesse faite à nos pères, Dieu l’a accomplie pour nous, leurs enfants, en ressuscitant Jésus » (Ac 13.32-33). Plusieurs références à l’Ancien Testament se trouvent dans le même chapitre. La réalité est claire : l’Évangile de notre salut est l’accomplissement des promesses alliancielles faites aux patriarches sous l’ancienne dispensation.
Nous avons déjà noté le passage dans Luc 24, où le Seigneur Jésus mentionna à ses disciples de quelle manière Moïse, les prophètes et les psaumes (tout l’Ancien Testament) font référence à sa souffrance, à sa mort et à sa gloire. Il dit la même chose aux dirigeants juifs : « Vous sondez les Écritures, parce que vous pensez avoir en elles la vie éternelle : ce sont elles qui rendent témoignage de moi » (Jn 5.39).
Alors que l’Ancien Testament nous fait connaître la (ou les) promesse(s) de l’alliance, le Nouveau Testament nous fait connaître l’accomplissement de ces promesses en le Christ Jésus. Tout cela était déjà connu et accepté dans l’Église primitive : Augustin écrivit : « Vetus testamentum in novo patet, novum in vetere latet », ce qui signifie, « l’Ancien Testament devient clair dans le Nouveau, le Nouveau est caché (latent) dans l’Ancien ».
Ce qui précède ne signifie pas que toutes les promesses que Dieu a données dans l’Ancien Testament se sont déjà accomplies dans le Nouveau. Nous attendons toujours le retour du Christ et la perfection de toutes choses. Nous pouvons aussi penser à la promesse donnée dans Ésaïe 11.6s concernant la paix et l’harmonie qui prévaudra sur la nouvelle terre. Beaucoup de progrès a été accompli sur le chemin du salut, mais les promesses concernant la restauration finale de toutes choses attendent toujours leur accomplissement.
3. Ancien et Nouveau : une question de moins et de plus←⤒🔗
En parlant du lien entre Ancien et Nouveau Testament, non seulement pouvons-nous penser en termes de promesse et d’accomplissement, mais nous pouvons aussi parler en termes de « moins » et de « plus ». Alors que sous l’ancienne alliance le peuple de Dieu fut abondamment béni, cela est encore plus vrai pour le peuple de Dieu sous la nouvelle alliance.
Bon nombre de passages confirment cela dans les Écritures. Je pense à 2 Corinthiens 3.7-18, où l’apôtre compare la gloire de la nouvelle alliance à celle de l’ancienne.
Paul introduit le sujet en expliquant que Dieu les a rendus capables, lui et ses collègues, d’être « ministres d’une nouvelle alliance » (2 Co 3.6). Quelle est cette nouvelle alliance? Il s’agit d’une alliance non de la lettre, mais de l’Esprit. Cela signifie, conformément à Jérémie 31, que la caractéristique principale de la nouvelle alliance est que la loi de Dieu est gravée dans nos cœurs par le Saint-Esprit. Nous devons servir Dieu et aimer notre prochain de tout notre cœur en tant que personnes nées de nouveau.
Cette exigence n’était-elle pas aussi celle de l’ancienne alliance? Si, elle l’était, mais cette exigence ne pouvait être accomplie en raison de la nature pécheresse de l’homme. La loi qui était censée apporter la vie n’apporta que mort et condamnation. Paul souligne cela au profit des judaïsants (à qui il avait souvent affaire) parce qu’ils enseignaient que l’on pouvait parvenir à la vie en gardant la loi. Nous ne pouvons cependant pas la garder. Paul parle donc de « la lettre [qui] tue » (2 Co 3.6). L’Esprit, ajoute-t-il, donne la vie; l’Esprit écrit la loi de Dieu sur nos cœurs et nous rend capables de vivre comme enfants de Dieu. Nous avons réellement fait des progrès.
L’Esprit n’était-il alors pas actif auparavant? Sans conteste, il l’était. Nous nous pencherons aussi sur cette question. C’est néanmoins dans la nouvelle alliance que l’Esprit met pleinement en application l’œuvre rédemptrice du Christ et mène les gens par la foi en Christ à servir Dieu d’esprit et de cœur.
Notez que Paul n’écarte pas l’ancienne alliance comme si elle ne valait rien. Il parle de la gloire de l’ancienne alliance, évidente dans le fait que les Israélites ne pouvaient pas regarder le visage de Moïse parce qu’il rayonnait de la gloire de Dieu lui-même. À cette époque-là, Dieu se trouvait aussi au milieu de son peuple et montrait sa gloire parmi eux. Par la suite, il sauva aussi son peuple.
Voilà le point de comparaison : si cette ancienne alliance qui condamnait les hommes et devait disparaître revêtait une telle gloire, quelle bien plus grande gloire revêt la nouvelle alliance! La gloire de la nouvelle surpasse celle de l’ancienne, parce qu’elle en constitue l’accomplissement et se polarise sur le ministère parfait du Christ.
Si seulement les Juifs de l’époque de Paul avaient compris cela. Ils auraient alors bien mieux compris l’Ancien Testament. Tout comme Moïse mit un voile sur son visage pour cacher la gloire rayonnante de Dieu, le cœur des Juifs aussi était voilé (2 Co 3.15). On ne peut voir la gloire de l’Ancien Testament que par le Christ Jésus.
4. Ancien et Nouveau : des ombres aux réalités←⤒🔗
L’épître aux Hébreux compare l’ancienne et la nouvelle alliance de la même manière que le fait 2 Corinthiens 3. Elle ne dit pas que l’ancienne alliance ne servait à rien, car elle remplissait sa fonction. Par le biais des sacrificateurs lévitiques, l’expiation était faite pour les péchés (Hé 5.1-4). Toutefois, elle ne donnait pas lieu à une réconciliation durable.
Nous lisons dans Hébreux 10.1 que « la Loi de Moïse ne possède qu’une ombre des biens à venir et non pas l’image même de ces réalités » (BDS). Une ombre qui s’allonge indique que quelque chose ou quelqu’un arrive. Dans ce sens, l’ancienne alliance était un gage sûr et solide. Elle n’amena pourtant pas la réalité de la nouvelle alliance. Ce n’était pas son but : cette réalité ne viendrait qu’au travers de Jésus-Christ.
En quoi la nouvelle est-elle alors supérieure à l’ancienne? Nous avons en Christ un parfait grand-prêtre qui fut tenté tout comme nous — et peut ainsi comprendre notre situation difficile —, mais qui est sans péché (Hé 4.4-16). Ce grand-prêtre ne sert pas pour un temps, remplacé en raison de son âge ou de sa mort, mais il est grand-prêtre pour toujours selon l’ordre de Melchisédek. L’Éternel jura que Jésus serait prêtre pour toujours (Ps 110), et cela fait de lui « le garant d’une alliance plus excellente » (Hé 7.22). Les autres prêtres offraient du sang d’animaux, mais le Christ offrit son propre sang en un seul sacrifice (Hé 9.28; 10.12). Par conséquent, « le Christ est le médiateur d’une alliance meilleure » (Hé 8.6). L’héritage des enfants de Dieu est désormais plus assuré qu’il ne l’a jamais été. Je pense ici aussi à Romains 8.34, qui nous assure que le Christ, mort pour nous et ressuscité, « est à la droite de Dieu, et il intercède pour nous ».
L’ancienne alliance a fonctionné pendant un temps, mais elle ne fit jamais d’avancée décisive. Elle est de ce fait devenue obsolète. L’ancienne alliance était bonne, mais la nouvelle alliance est meilleure. Puisque nous avons maintenant une meilleure alliance, nous avons d’autant plus de raisons d’être fidèles à Dieu. Les avertissements et les sanctions de la nouvelle alliance sont plus sévères que ceux de l’ancienne. Si Dieu punit le péché sous l’ancienne alliance, il en fera certainement de même sous la nouvelle!
Par conséquent, les avertissements contenus dans l’épître aux Hébreux utilisent des mots forts. Nous devons lutter contre le péché au point de « verser notre sang ». Nous ne devons pas rompre l’alliance comme Ésaü (Hé 12.16). Nous devons maintenant plus que jamais servir avec reconnaissance. « Comment échapperons-nous en négligeant un si grand salut? » (Hé 2.3). Il nous est rappelé que notre Dieu est un « feu dévorant » (Hé 12.29). Notez particulièrement les avertissements d’Hébreux 10.28 et 29 :
« Celui qui a violé la loi de Moïse meurt sans miséricorde, sur la déposition de deux ou de trois témoins; de quel pire châtiment pensez-vous que sera jugé digne celui qui aura foulé aux pieds le Fils de Dieu, qui aura tenu pour profane le sang de l’alliance, par lequel il a été sanctifié, et qui aura outragé l’Esprit de la grâce? »
Si l’ancienne alliance ne pouvait pas être prise à la légère, la nouvelle alliance est un sujet encore plus sérieux. Nous ne vivons plus dans les ombres, mais nous nous tenons dans la pleine lumière de la grâce de Dieu en Christ. Là où cette grâce est repoussée, il ne reste aucun moyen de salut. De cette façon, nous commençons à comprendre la gravité du péché contre le Saint-Esprit (Mt 12.32; Hé 6.4-6; 1 Jn 5.16).